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Le processus de Puembo: renforcer le dialogue sur les forêts en Amérique latine
et aux Caraïbes

W. Thies, J. Rodríguez et E. von Pfeil

Une initiative régionale pour renforcer les programmes forestiers nationaux et les organisations régionales, et servir de lien entre le niveau national et le niveau international.

Wibke Thies est chargé de projet, J. Rodríguez est Vice-Ministre pour l’environnement et l’énergie au Costa Rica et Evy von Pfeil est chef de projet du Projet international sur les politiques forestières, Secrétariat exécutif de l’Initiative Puembo II, Office allemand de la coopération technique (GTZ), Eschborn, Allemagne.

Protéger et gérer les forêts aujourd’hui est moins une question technique (la plupart des pays ayant désormais les compétences techniques nécessaires) qu’une question de politique et de gouvernance qui impose la participation de la société civile à la prise de décisions, une législation adéquate et l’application des lois. Les programmes forestiers nationaux (PFN) permettent d’appréhender la dimension politique de la gestion forestière durable en faisant participer toutes les parties prenantes d’un pays qui s’intéressent aux forêts.

Cependant, en raison de la mondialisation, la protection et la gestion des forêts sont devenues de façon croissante un sujet de dialogue entre les pays, car non seulement le monde prend conscience des avantages universels procurés par les services forestiers (comme la stabilisation du climat), mais les pays reconnaissent également que de nombreux problèmes forestiers transcendent les frontières nationales. Les PFN sont, dès lors, aussi un point de référence pour le dialogue sur les politiques forestières au niveau régional.

L’importance de la collaboration des pays dans la formulation des politiques forestières a été largement reconnue en Amérique latine et aux Caraïbes. Les politiques forestières nationales sont influencées de manière croissante par les accords internationaux sur les forêts. Toutefois, bien que plusieurs pays latino-américains aient formulé des PFN, il n’y a eu guère d’interaction parmi les pays ou entre le niveau international, où se déroulent les négociations relatives aux forêts, et le niveau national, où les actions convenues à l’échelle internationale devraient être mises en œuvre.     

Le Processus de Puembo a été institué pour fournir aux pays d’Amérique latine une plateforme de dialogue où débattre comment:

Grâce à la discussion de questions communes, à l’identification de thèmes pouvant bénéficier d’une action conjointe, à la recherche de solutions transfrontières et à l’échange d’informations sur les bonnes pratiques, le Processus vise à renforcer tant les PFN que les organisations régionales afin de relier le niveau national au niveau international. L’idée est de favoriser le flux des informations et des connaissances parmi les pays et la coordination des actions entre les pays et les différents processus régionaux et internationaux. L’objectif est d’accroître l’intérêt politique pour les forêts, notamment en ce qui concerne leur contribution aux Objectifs du Millénaire pour le développement des Nations Unies 1 («Réduire l’extrême pauvreté et la faim») et 7 («Assurer un environnement durable»).

La protection et la gestion des forêts d’Amérique latine sont devenues de manière croissante une question de dialogue entre les pays
W. Thies

LE PROCESSUS

Le Processus de Puembo est né à la suite d’un atelier tenu à Puembo, Équateur, en 2002, organisé par le Ministère de l’environnement de l’Équateur et parrainé par les Pays-Bas et l’Allemagne, sur la mise en œuvre d’accords forestiers internationaux par le biais des programmes forestiers nationaux en Amérique latine. Les neuf pays latino-américains qui ont participé – Brésil, Costa Rica, Équateur, Guatemala, Honduras, Nicaragua, Paraguay, Pérou et République dominicaine, – se sont engagés à entreprendre une action conjointe pour soutenir les pro­cessus des PFN.

Les participants ont constaté que pour renforcer ces processus dans les pays, il fallait approfondir certaines questions comme le dialogue avec d’autres sec­teurs, le développement des capacités des parties prenantes dans des organisations décentralisées, une meilleure participation de la société civile, l’intégration du secteur forestier dans le développement national et les stratégies de réduction de la pauvreté, la formulation de stratégies de financement novatrices pour la gestion forestière durable, et la coordination entre les actions au niveau national et les décisions prises dans les forums internationaux et régionaux.

Après la présentation des résultats de l’atelier lors de nombreux forums internationaux (le Congrès forestier latino-américain, la sixième Conférence des parties à la Convention sur la diversité biologique (CDB), la Commission des forêts pour l’Amérique latine et les Caraïbes de la FAO (CFALC) et la quatrième session du Forum des Nations Unies sur les forêts (FNUF), les pays participants et les organisations régionales ont sollicité la poursuite du Processus de Puembo.
En novembre 2005, l’Organisation du Traité de coopération amazonienne, la Commission centraméricaine de l’environnement et du développement, le Groupe sous-régional du Cône Sud de la CFALC, le Ministère néerlandais des affaires étrangères (DGIS) et le Ministère allemand de la coopération économique et du développement (BMZ) ont lancé l’Initiative Puembo II pour renforcer le dialogue sur les forêts dans les pays d’Amérique latine et des Caraïbes et entre ces pays. Ils ont proposé d’inclure davantage de pays dans le processus et d’élargir sa portée afin d’introduire des questions relatives à la biodiversité, des approches intersectorielles et des objectifs généraux de réduction de la pauvreté. Par la suite, presque tous les pays d’Amérique latine ont adhéré à l’Initiative Puembo II (voir la carte ci-dessus).

Quatre thèmes ont été identifiés comme étant d’une importance cruciale pour la gestion forestière durable et nécessaires à l’Initiative:

Bien que la coopération régionale dans le secteur forestier ne soit pas inconnue en Amérique latine, la nouveauté de l’approche de Puembo réside dans le fait que le processus ne se borne pas à œuvrer avec les organisations régionales ou les pays, mais les relie au dialogue international sur les forêts – en associant la formulation des PFN par les pays à la mise en œuvre des engagements régionaux et internationaux, et en contribuant aux programmes régionaux sur la mise en valeur des forêts du Traité de coopération amazonienne, de la Commission centraméricaine de l’environnement et du développement et du Marché commun austral (MERCOSUR). Le Processus de Puembo cherche aussi à améliorer la coordination entre ces processus régionaux.

Membres de l’Initiative Puembo II

COORDINATION ET ACTIVITÉS

Les trois organisations régionales fondatrices, à savoir l’Organisation du Traité de coopération amazonienne, la Commission centraméricaine de l’environnement et du développement et la FAO (par le truchement de la CFALC), guident l’initiative et définissent les priorités pour ses thèmes et projets. Ces organisations renforcent les réseaux forestiers de la région, améliorent les relations entre les niveaux national, régional et international, et favorisent le dialogue politique entre les pays membres et les différents secteurs qui influencent les forêts. Elles reçoivent l’appui de la FAO, du Mécanisme pour les programmes forestiers nationaux, de l’Allemagne et des Pays-Bas.

Sur le plan politique, l’initiative est guidée par un Comité de direction qui consiste en représentants de l’Organisation du Traité de coopération amazonienne, de la Commission centraméricaine de l’environnement et du développement, de la CFALC, du DGIS et du BMZ. Le Comité de direction est assisté par un groupe de soutien technique qui comprend les représentants du Mécanisme pour les programmes forestiers nationaux, de la FAO, de l’Organisation du Traité de coopération amazonienne, de l’Union mondiale pour la nature (UICN) et des Pays-Bas. Le groupe de soutien technique est chargé, de concert avec le Secrétariat exécutif géré par la GTZ, de coordonner et de faciliter l’initiative.

La participation ne se limite pas aux pays membres des organisations adhérentes. D’autres partenaires potentiels, comme les organisations non gouvernementales (ONG) et la Banque mondiale, sont invités à contribuer au processus. Une coopération avec MERCOSUR est envisagée (voir ci-dessous).

On compte à ce jour les interventions clés suivantes:

En 2007, une conférence régionale se tiendra afin d’échanger les leçons apprises avec les pays et les sous-régions et de formuler des messages et recommandations pour la mise au point et la réalisation des PFN dans les pays et à l’intention des niveaux régional et international. Des décideurs de haut niveau devraient y participer; la conférence mettra donc l’accent sur la promotion de l’engagement politique, principalement dans le cadre des premier et septième

Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), et sur le renforcement des synergies avec les processus internationaux tels que le FNUF et les conventions internationales sur la biodiversité, la désertification et les changements climatiques. Les résultats seront présentés lors de processus internationaux et partagés avec les organisations des Nations Unies, les ONG, les organisations du secteur privé et les chefs d’autres régions et secteurs, permettant leur inclusion dans d’autres processus.

Groupes de travail des centres de liaison des PFN et d’autres pendant l’atelier sous-régional du Cône Sud à Santiago, Chili – échange des enseignements tirés des études nationales et identification de questions communes
W. Thies

RÉALISATIONS

Six mois à peine après le démarrage de l’Initiative Puembo II, les pays participants ont déclaré que le Processus de Puembo a crée un «langage commun» et une compréhension partagée des questions forestières. Ils ont commencé à parler des quatre thèmes clés de Puembo et à identifier les domaines compris dans les thèmes qui non seulement les intéressent mais concernent aussi la région.

Les besoins suivants ont été identifiés par tous les pays:

Les sujets du dialogue sur les forêts varient entre les pays, mais des domaines comme l’exploitation illégale et les critères et indicateurs de gestion forestière durable ont été estimés pertinents pour la plupart des pays et pour les débats au niveau régional.

Plusieurs organisations régionales et multilatérales (le Mécanisme pour les programmes forestiers nationaux, l’UICN Sud, la Coordination paysanne et autochtone d’Amérique centrale pour l’agroforesterie communautaire, l’Alliance régionale pour la biodiversité forestière, coordonnée par le Secrétariat de la CDB et le Centre agronomique tropical de recherche et d’enseignement (CATIE), la Banque mondiale et le Conseil centraméricain pour l’agriculture) ont déjà inclus ou manifesté l’intention d’inclure leurs thèmes dans le Processus de Puembo, soulignant l’importance d’une telle plateforme régionale pour le dialogue sur les forêts et les PFN. La CFALC a inséré son soutien au processus et ses quatre thèmes clés dans son plan de travail méso-américain biennal.
Les quatre thèmes clés du Processus de Puembo et les résultats des études nationales préparées pendant l’Initiative Puembo II forment la base du nouveau Programme forestier régional stratégique (Programa Estratégico Regional Fores­tal, PERFOR) présenté pour approbation au Comité centraméricain des forêts de la Commission centraméricaine de l’environnement et du développement. Le PERFOR sera l’un des programmes qui met en œuvre le plan pour l’environnement de la région centraméricaine (Programa ambiental para Centroamérica) dans le cadre de la stratégie forestière centraméricaine (Estrategia Forestal Centroamericana). La Banque mondiale, qui financera une initiative régionale relative à l’application des lois forestières et la gouvernance au titre du PERFOR, a donc inclus les objectifs de Puembo dans sa planification.

Dans la zone du Cône Sud, MERCOSUR, notamment le Groupe de travail sur l’environnement, s’est montré intéressé à soutenir le Processus de Puembo dans ses pays membres. MERCOSUR, comme la Commission centraméricaine de l’environnement et du développement et l’Organisation du Traité de coopération amazonienne, pourrait fournir les réseaux nécessaires au renforcement du dialogue sur les questions forestières parmi ses pays membres.

PERSPECTIVES

L’Initiative Puembo II a une durée de deux ans et s’achèvera à la fin de 2007. Pour encourager sa poursuite, des efforts sont en cours visant à promouvoir les idées et les objectifs du processus parmi les organisations régionales, les ONG et d’autres donateurs bilatéraux et multilatéraux, et à mobiliser les crédits nécessaires pour continuer les activités après 2007. Premier signe encourageant est l’intention manifestée par plusieurs organisations régionales de joindre leurs objectifs à ceux du Processus de Puembo. C’est ainsi que le processus servira de plateforme pour le suivi de l’atelier de la FAO sur la planification intersectorielle des politiques forestières en Amérique centrale tenu en octobre 2006 au Costa Rica.

Au niveau national, les centres de liaison des PFN examineront, avec l’appui du Groupe de soutien technique de Puembo II, les résultats des ateliers sous-régionaux pendant des ateliers nationaux participatifs, et définiront les activités de suivi à mettre en œuvre avant la Conférence régionale de Puembo en 2007, comme l’inclusion des résultats de l’atelier sous-régional centraméri­cain dans les politiques nationales, et l’identification des thèmes nationaux qui devront être soulevés et traités par les organisations régionales.

On trouvera plus d’informations sur l’Initiative de Puembo II à l’adresse suivante: www.puembo.org

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