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Harmonisation des politiques et des programmes forestiers en Afrique centrale

J.P. Koyo et R. Foteu

Le Plan de convergence de la Commission des forêts d’Afrique centrale (COMIFAC) fournit un cadre pour harmoniser les politiques et les programmes forestiers, et sert de base pour la formulation de programmes forestiers nationaux.

Jean Prosper Koyo est Chef du Service de la conservation des forêts, Département des forêts, FAO, Rome.
Roger Foteu est coordonnateur du Projet FAO/COMIFAC sur l’harmonisation des politiques et des systèmes de contrôle forestier dans les pays d’Afrique centrale, Yaoundé (Cameroun).

L’élaboration de politiques et de programmes forestiers harmonisés pour gérer les écosystèmes forestiers et conserver leur biodiversité est une question qui préoccupe depuis longtemps la communauté internationale et les gouvernements nationaux.

C’est dans ce contexte que s’inscrivent diverses initiatives visant à élaborer des critères, principes, normes et paramètres techniques pour la gestion des forêts, tels que les Principes relatifs aux forêts adoptés à la Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement (CNUED), les directives pour la gestion durable des forêts, et les conventions et accords internationaux liés aux forêts. Le même souci transparaît dans les délibérations du dialogue international sur les forêts engagé depuis 10 ans dans le but de mettre en place un instrument juri­dique pour régir la gestion des forêts au niveau mondial.

En Afrique centrale, l’harmonisation des politiques forestières est le dénominateur commun des objectifs assignés à toutes les initiatives de coopération sous-régionale intéressant le secteur forestier. Une telle démarche est sans doute inéluctable pour des pays qui se partagent les mêmes écosystèmes forestiers et qui souhaitent unir leurs efforts pour les gérer de manière durable. Tous les pays de la sous-région (voir carte) doivent procéder à des améliorations institutionnelles dans les domaines suivants:

Les États d’Afrique centrale peuvent s’appuyer sur un certain nombre de facteurs favorables pour aligner leurs instruments de gestion forestière. Par exemple:

Les Chefs d’État de la région de l’Afrique centrale ont mis l’harmonisation des politiques forestières au centre de l’attention en en faisant l’enjeu prioritaire du Plan de convergence approuvé au deuxième Sommet de Brazzaville (Congo). On estime que l’harmonisation de la gestion durable des forêts favorisera une mise en œuvre flexible du Plan de convergence. Toutefois, des disparités dans les instruments de développement et de gestion des forêts entravent la création de synergies entre ces pays.

HARMONISATION DES POLITIQUES

L’harmonisation des politiques est un processus graduel dans lequel les parties prenantes commencent par identifier et hiérarchiser un certain nombre de problèmes communs, puis s’accordent sur les voies, les moyens et les étapes nécessaires pour les résoudre.

Il ne s’agit donc pas forcément d’une opération d’homogénéisation ou d’uniformisation, mais plutôt d’une approche comparative visant à identifier les aspects divergents et à cibler les points pouvant faire l’objet d’ajustements progressifs pour perfectionner les instruments de gestion forestière. L’expérience acquise et la spécificité des divers écosystèmes doivent être prises en compte. Le processus doit culminer dans des directives permettant d’assurer la cohérence et pouvant être étayées par des arrangements institutionnels, la législation, des programmes d’action ciblés, etc.

La démarche devra être dynamique et flexible pour intégrer les éventuelles modifications qui s’imposeraient compte tenu de l’évolution des circonstances et de l’expérience acquise.
Il est indispensable que les parties prenantes ressentent avoir un rôle essentiel dans le processus et que les résultats soient régulièrement suivis et vérifiés. En outre, un organe spécialisé doit être mis en place au niveau sous-régional pour assurer le suivi et l’arbitrage.

Pays membres de la COMIFAC

PLAN DE CONVERGENCE

Au terme de leur premier Sommet sur les forêts, tenu à Yaoundé en 1999, les Chefs d’État de l’Afrique centrale ont publié une déclaration commune (la Déclaration de Yaoundé) par laquelle ils s’engagent à unir leurs efforts pour garantir la conservation et la gestion durable de leurs écosystèmes forestiers, qui constituent le deuxième bloc forestier tropical de la planète (les forêts du bassin du Congo).

Les 12 résolutions de la Déclaration de Yaoundé couvrent presque tous les aspects de la foresterie moderne et les Chefs d’État se sont fixé pour objectif ambitieux et irrévocable de soumettre les forêts de la sous-région à un aménagement durable.

L’introduction de la gestion conjointe des aires protégées transfrontalières est un élément particulièrement novateur de la Déclaration de Yaoundé. Cette mesure est importante car elle constitue le premier exemple de gestion commu­nautaire concertée des espaces forestiers par différents pays. La gestion collective des aires transfrontalières est aussi une stratégie pour lutter contre l’exploitation et le commerce illicites des produits forestiers et sécuriser les frontières et, en tant que telle, elle pourrait contribuer au maintien de la paix.

Au lendemain de cette initiative, le premier défi pour les Ministres en charge des forêts – et désormais aussi du suivi –était de traduire les résolutions des Chefs d’État en action, en mettant en place divers arrangements législatifs et institutionnels et le mécanisme de planification nécessaire à cette fin. Il importait en particulier d’établir un consensus (à l’aide d’une approche participative) autour d’un programme d’action couvrant toutes les initiatives en cours et associant toutes les parties prenantes à sa mise en œuvre.

L’approche adoptée par les experts a consisté à concevoir et à mettre en place une série d’actions destinées à servir de point de référence pour définir les interventions des divers partenaires. Il a donc été décidé de donner le titre de «Plan de convergence» à ce document de planification, pour exprimer la communauté de vues des pays intervenant dans la planification des forêts.

La première version du Plan de convergence a été élaborée en octobre 1999 puis approuvée en décembre 2000 par la première session de la Conférence des Ministres en charge des forêts d’Afrique centrale (COMIFAC, désormais appelée Commission des forêts d’Afrique centrale). Les pays participants l’ont approuvée comme document d’encadrement pour l’élaboration de leurs propres composantes nationales.

Le plan a été mis à jour en 2003 avec l’appui de la FAO (voir encadré). La dernière version a été approuvée par la suite à la Conférence des Ministres (mai 2004), par l’ensemble des parties prenantes du Partenariat pour les forêts du bassin du Congo (juin 2004) et, enfin, par le Sommet des Chefs d’État de Brazzaville (février 2005).

Le coût nécessaire à la mise en œuvre du plan a été estimé à 1,5 milliard de dollars EU étalé sur une période de 10 ans, et les priorités ont été définies dans un plan d’action triennal (2004-2006).

Le Plan de convergence est donc le fruit d’un processus de planification itératif, et il est reconnu par l’ensemble des partenaires et des parties prenantes comme un cadre approprié pour les activités et les programmes forestiers dans la région de l’Afrique centrale, conformément à la Déclaration de Yaoundé. Le Plan a en outre l’avantage de:

FAO – faciliter la coordination des politiques
forestières des pays de la COMIFAC

En mars 2003, à la demande du Secrétariat exécutif de la COMIFAC, la FAO a lancé un projet d’assistance financière et technique pour la mise à jour et l’entrée en vigueur du Plan de convergence de la COMIFAC. La FAO répondait ainsi à l’appel de l’Assemblée générale des Nations Unies qui, dans sa Résolution 54/214 de décembre 1999, invitait la communauté internationale à appuyer les pays du Processus de Yaoundé dans leurs efforts de développement forestier.

Outre ce projet d’assistance visant directement à soutenir la COMIFAC et le Plan de convergence, la FAO aide, seule ou avec ses partenaires, les pays de la COMIFAC à mettre en œuvre un certain nombre d’activités liées aux enjeux stratégiques du Plan de convergence. Ainsi, par le biais de projets de pays, la FAO soutient: des boisements agroforestiers et périurbains pour la production de bois de feu et de construction au Burundi; la gestion et la conservation participatives de la diversité biologique des mangroves au Cameroun; la formulation d’une stratégie nationale en matière de foresterie urbaine et périurbaine à Bangui (République centrafricaine); et la foresterie communautaire en République démocratique du Congo. Les projets sous-régionaux incluent un appui à l’Initiative centrafricaine sur les forêts-Patrimoine mondial, et un renforcement de la sécurité alimentaire basé sur les produits forestiers non ligneux en Afrique centrale. Dans le cadre de sa stratégie d’appui dans le bassin du Congo, la composante forêts du Programme de partenariat FAO/Pays-Bas (PPFPB) facilite l’harmonisation des politiques, de la législation, des institutions forestières et des systèmes de suivi des pays participants.

L’ouverture d’un Bureau sous-régional de la FAO pour l’Afrique centrale à Libreville (Gabon) en octobre 2006 facilitera les efforts de la FAO dans la sous-région. fice for Central Africa in Libreville, Gabon in October 2006 will facilitate FAO’s efforts in the subregion.

Structure

Le Plan de convergence repose essentiellement sur 10 enjeux stratégiques, qui traduisent l’orientation opérationnelle des résolutions de la Déclaration de Yaoundé. Les 10 enjeux sont articulés autour d’une série d’outils, de mesures et d’actions à mettre en place aux niveaux régional et sous régional.

Le Plan de convergence a deux séries de composantes, à savoir les actions transversales devant être exécutées par l’ensemble des pays participants, et les actions dévolues à chaque pays pour qu’il les mette en œuvre individuellement. Les pays constituent donc le creuset de la mise en œuvre de la Déclaration de Yaoundé.

Le plan opérationnel triennal récapitule les paramètres nécessaires pour la mise en œuvre de chaque action à savoir: l’objectif, les résultats escomptés, les étapes, les activités à effectuer, les indicateurs d’avancement, les modali­tés d’exécution, les parties prenantes concernées, etc. Un système est également en place pour le suivi de la mise en œuvre du plan, et une évaluation est présentée à chaque session du Conseil ordinaire de la COMIFAC.

APPROCHE ADOPTÉE PAR LA COMIFAC POUR L’HARMONISATION DES POLITIQUES ET DES SYSTÈMES DE CONTRÔLE FORESTIERS

Depuis juin 2005, La COMIFAC a entrepris d’harmoniser les politiques et les systèmes de suivi et d’évaluation forestiers, avec un appui de la FAO (voir encadré). Ce processus consiste à mettre au point un certain nombre d’instruments normatifs et juridiques pour garantir une gestion forestière cohérente au niveau sous-régional. Les résultats escomptés de ce processus sont les suivants:

L’approche adoptée par la COMIFAC comporte six étapes essentielles, à savoir:

Réalisations en matière d’harmonisation des politiques

Au stade actuel, quatre des étapes ci-dessus ont été achevées. Les deux autres devraient l’être en 2007.

Les activités d’harmonisation des politiques ont débuté en juin 2005, avec la formulation des rapports nationaux.

En octobre 2005, un atelier sous-régional comprenant des membres de la société civile a évalué les rapports nationaux et recommandé des ajustements en vue de les parachever dans des forums nationaux. Il a été demandé aux participants d’identifier les points forts et les points faibles des projets de rapports concernant les instruments de gestion forestière en vue de formuler des recommandations concrètes.

Un second atelier sous-régional pour la préparation des forums nationaux, organisé en février 2006 par un projet FAO d’assistance à la COMIFAC, avec l’appui de l’Agence allemande de coopération technique (GTZ), a fait fond sur les expériences des institutions d’intégration sous-régionale en matière d’harmonisation des politiques, et identifié les principaux points d’intérêt.
S’appuyant sur les résultats obtenus dans les forums nationaux, un Conseil extraordinaire de la COMIFAC, tenu à Libreville (Gabon), en avril 2006, a recommandé d’accélérer la synthèse régionale afin que la discussion sous-régionale puisse avoir lieu dans les meilleurs délais, et qu’un programme d’action soit proposé à la session suivante du conseil.

Le Forum sous-régional, qui s’est tenu à Douala (Cameroun) en septembre 2006, a approuvé 17 centres d’intérêt, ainsi que des méthodologies et approches opérationnelles pertinentes, pour élaborer des supports d’harmonisation. Les recommandations du forum sous-régional ont été adoptées par un Conseil extraordinaire de la COMIFAC à Malabo (Guinée-équatoriale) le 28 novembre 2006.

CONCLUSION

Avec les deux Sommets des Chefs d’État tenus en 1999 et 2005, l’adoption du Plan de convergence par les principaux acteurs du secteur forestier, y compris le Partenariat pour les forêts du bassin du Congo, et les premières étapes de sa mise en œuvre, le dialogue forestier a pris un bon départ en Afrique cen­trale. Il est trop tôt pour évaluer l’effet que ce processus aura sur les forêts et sur ceux qui en sont tributaires. Ce qui compte à ce stade, c’est que le processus de promotion de la gestion durable des forêts soit en place, et qu’il ait été politiquement accepté par l’ensemble des dirigeants du secteur forestier de tous les pays de la région. Les efforts concertés que font les pays pour harmoniser leurs politiques forestières et leur mise en œuvre, grâce à l’alignement de leurs programmes forestiers nationaux, sont autant de jalons sur la voie d’une gestion forestière améliorée.

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