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INTRODUCTION

La définition de la pêche artisanale et de la pêche industrielle en Côte d'Ivoire peut être sujette à discussions. Certains affirment que les activités spéculatives d'une compagnie piroguière munie d'un moteur et d'une senne tournante pourrait être assimilée à une activit industrielle, d'autant plus qu'il est habituellement dans ses intentions d'augmenter son capital pour armer d'autres pirogues.

Nous avons choisi le partis pris de différencier les deux pêches à partir des facteurs suivants: -puissance des bateaux, organisation des moyens de production et organisation sociale-. On peut également ajouter que toute la flotte industrielle considérée (parfoi appelée “artisanale industrielle” pour les petits chalutiers) ne peut accoster qu'à Abidjan ( et rarement à San Pedro qui ne possède pas les infrastructures nécessaires à la commercialisation du poisson industriel.)

On peut donc dire que la flotte industrielle ivoirienne ou étrangère débarque son poisson au port de pêche d'Abidjan où du reste transite également le poisson importé congelé. La flotte artisanale, de par sa souplesse, est libre en général de débarquer ses produits dans les lieux de son choix, en fonction des marchés et également des conditions physiques qui lui permettent de passer la barre sans trop de difficultés.

La flotte industrielle emploie des matelots salariés dont la durée des contrats varie entre une marée de quelques jours et plusieu années. Ces employés sont en général assurés. En Côte d'Ivoire, ils sont formés pour la plupart de nationaux étrangers - Ghanéens, Malien Bourkinabés etc…- bien que le gouvernement désire augmenter l'effectif des Ivoiriens à 60%.

La flotte artisanale se compose de pirogues individuelles ou d'équipes appelées compagnies qui peuvent être formées de 3 à 15 pêcheurs environ. Les petites compagnies piroguières maritimes étrangères sont organisées de manière à inciter les membres à entretenir le matériel et à augmenter la production. En effet, même si les moyens de production n'appartiennent qu'à un seul individu, des parts sont partagées entre les pêcheurs sur le modèle -grossièrementdes actions d'une société anonyme. D'autre part, bien que l'organisation du travail soit spéculative, elle est régie par des coutumes qui rythment son activité: pratiques incantatoires, interdit sacrifices, arrêts de pêche lors de décès etc…

La pêche artisanale dont nous parlons ici est principalement un activité professionelle destinée à produire une accumulation de capital. Elle n'est pas pratiquée en temps qu'activité secondaire d'appoint. Pour fonctionner elle n'a pas besoin d'infrastructures aussi lourdes que celles qui sont exigées par la pêche industrielle, ni d'un investissement en capital aussi important. Les affinités ethniques déterminent la formation des compagnies et souvent des campements bien que l'on trouve parfois exceptionnellement des compagnies artisanales formées de pêcheurs de différentes nationalité Les moyens de production appartiennent parfois à des personnes qui ne pratiquent pas la pêche, Ivoiriens ou étrangers, et qui reçoivent une part du bénéfice.

Les conflits entre pêche artisanale et pêche industrielle ont tous lieu en mer à l'exception des conflits concernant le partage de la même ressource comme les crevettes par exemple où les pêcheurs lagunaires sont égalament concernés.

Les pêcheurs artisanaux maritimes sont presque tous des étrangers, Ghanéens, Béninois, Togolais, Sénégalais etc… ayant une très forte tradition de pêche. Les Ivoiriens qui pêchent en mer, Alladians et Nanakrous pour la plupart s'adonnent surtout à une pêche de subsistance, et utilisent du reste des techniques (palangrottes, lignes etc…) qui ne les exposent pas aux conflits avec les bateaux industriels. Ces pêcheurs étrangers ne sont plus autorisés par les autochtones à pêcher en lagune (ex: Vridi, Sassandra).

Les conflits peuvent être dûs à plusieurs causes et ils peuvent être exaspérés par différents facteurs: - ociaux; sur-population, donc compétition plus grande - économ ques; navires industriels pêchant près des côtes à cause du rencherissement du prix du gasoil, -technologiques; pêche excessive avec des engins non discriminatoires, destruction des juvéniles etc…

Nous avons tenté d'analyser les causes de ces conflits, leur localisation dans l'espace, la manière dont ils éclatent, leurs conséquences à long terme et à court terme. Egalement leurs conséquences économiques et sociales pour les deux pêches. Nous avons également essayé d'apprécier dans quelie mesure les ressources partagées par les deux pêches sont géneratrices de conflits, particulièrement en ce qui concerne l'exploitation des sardinelles et celle des crevettes où, nous l'avons dit, ne sont plus impliqués cette fois des pêcheurs artisanaux maritimes, mais lagunaires, Béninois pour la plupart.

Le manque de statistiques a été le plus gros obstacle auquel nous avons été confronté. L'ordinateur du Centre de Recherches Océanographiques où sont enregistrées les statistiques tenues à jour régulièrement était en panne lors de notre sé jour *. On peut a jouter également que la pêche artisanale maritime est mal connue en Côte d'Ivoire aussi bien au niveau de son organisation et de sa production. De plus l'exactitude des statistiques disponibles laisse à désirer.

* Pour les problèmes de la pêche crevettière nous avons regretté l'absence de M. Lhomme qui aurait pû nous donner de précieux renseignements.

Les statistiques industrielles ont été tiré, des bilans annuels du port industriel, et les statistiques artisanales des rapports des centres des pêches ou des rapports de la Direction des pêches à Abidjan.

Les statistiques de la production industrielle figurent en page 21, celles de la pêche artisanale maritime sont estimées annuellement à 20 000 tonnes, mais ce n'est qu'une estimation. Les points de débarquements sont en effet si nombreux et les filières commerciales tellement étendues, qu'il n'a pqs été possible jusqu'ici de recueillir les statistiques de production.

La littérature concernant les conflits en Côte d'Ivoire est inexistante à notre connaissance, pourtant certains conflits concernant les destructions d'engins artisanaux par des navires industriels sont souvent mentionnés dans les rapports de la Direction des pêches qui les a aimablement mis à notre disposiion.

Les études de M. Garcia nous ont été d'un grand secours pour comprendre les problèmes de la pêche crevettière. Pour le reste il nous a semblé indispensable de partir sur le terrain afin de recueillir les témoignages des pêcheurs artisanaux sur le littoral et à Vridi, et égamement ensuite au port de pêche d'Abidjan où nous avons contacté les armateurs, les agents des services du port et les équipages de bateaux.

Le temps qui nous a été imparti pour cette étude a été malheureusement trop court et nous éspérons avoir recueilli les renseignements les plus fiables possibles.

Les renseignements récoltés indiquent que les conflits ont liēu entre sardiniers, chalutiers, parfois cargos et pêcheurs artisanaux, les thonniers ne sont jamais concernés.

Nous avons divisé notre étude en plusieurs chapitre dont nous donnons le résumé ci-après :

  1. Conflits entre sardiniers et pêche artisanale.

  2. Conflits entre pêche chalutière et pêche artisanale.

  3. La pêche crevettière - ressource partagée.

  4. Concurrence au niveau de la commercialisation entre production artisanale et production industrielle.

  5. La Direction des pêches, procédure de réglements des conflits, problèmes d'encadrement.

  6. Conclusion. Elle reprendra la problématique dans un cadre plus général.

Un effort pour limiter les conflits et pour les résoudre s'inscrit dans le cadre plus général de l'aménagement des pêches en Côte d'Ivoire. La politique actuelle semble bien timide pour prendre efficacement en charge ces problèmes qui, s'ils sont résolus, le sont au coup par coup sans qu'au fond la problématique de base soit modifiée. Depuis plus d'une année par exemple, un arrêté ministériel (voir annexe) a redéfini la zone côtière interdite aux chalutiers sans grande conséquence puisque cette zone est violée de plus belle et les accidents toujours plus nombreux. La situation de la pêche crevettière en lagune n'a pas trouvé les remèdes qui permettraient d'apaiser les conflits et éventuellement d'augmenter la production et l'entrée des devises pour le gouvernement.

Pourtant des expériences intéressantes ont lieu dans le domaine de la pêche maritime artisanale dans le Sud-Ouest qui, si l'effort est augmenté et soutenu pourrait ouvrir la voie à une politique de développement intéressante. Mais il nous semble que la coordination efficace entre les différents services et des contacts plus serrés avec les pêcheurs eux-mêmes sont des conditions sans lesquelles il n'est pas possible d'envisager quelque chose de sérieux.

Notre analyse, du côté de la flotte industrielle s'est limitée à la flotte ivoirienne puisqu'elle est seule aujourd'hui à pêcher dans les eaux nationales. Le chalutier “Capitaine Cook” pêche dans les eaux ivoiriennes et guinéennes, mais toute sa production est ramenée sur Abidjan.


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