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Politiques forestières et développement national

K.F.S. King

K.F.S. King, ancien Ministre du développement de la Guyane, est maintenant Sous-Directeur général, à la tête du Département des forêts de la FAO. Le présent article est inspiré d'un rapport qu'il a présenté en septembre 1974 à la 10e Conférence forestière du Commonwealth à Oxford.

Les politiques forestières doivent être formulées rationnellement, comme partie intégrante des plans de développement nationaux. En affectant des terres à la forêt il faut tenir compte de l'aptitude de la sylviculture à améliorer les niveaux de vie. Les forestiers n'ont pas à redouter de passer au second rang si ces critères sont utilisés. En effet, forêts, sylviculture et industries forestières peuvent, de par leur nature même, contribuer à résoudre de nombreux problèmes du sous-développement et, en même temps, supprimer bien des désagréments de l'industrialisation.

Dans le passé, les politiques forestières ont souvent été formulées dans l'idée que les forêts constituaient le facteur le plus important de la définition d'une politique forestière. En fait, les forêts ont parfois été considérées comme le seul facteur important.

C'est pourquoi il n'est pas étonnant qu'un examen des politiques forestières en vigueur révèle entre elles une extraordinaire et inquiétante similitude. Cette similitude existe, que les forêts du pays considéré appartiennent aux forêts tropicales humides sempervirentes, ou aux forêts résineuses de climat tempéré, que la nation soit technologiquement développée ou sous-développée à l'extrême, qu'elle soit bien boisée ou n'ait qu'un couvert forestier de superficie modeste, qu'il y ait dans le pays un chômage endémique marqué ou un niveau d'emploi relativement élevé, que la balance des paiements soit gravement déficitaire ou favorable, que l'économie soit tributaire d'un ou deux types de produits ou qu'elle soit bien diversifiée.

ETABLISSEMENT D'UNE CARTE POUR PROSPECTION AÉRIENNE il s'agit de bien cadrer

Il n'est pas non plus que les gouvernements, tout en édictant ces politiques, auxquelles ils n'accordent qu'un intérêt symbolique, se montrent rarement enclins à les prendre au sérieux, et ne les appliquent pas souvent.

Nous voudrions montrer dans cet article que les politiques forestières ne doivent pas être formulées in vacuo; qu'elles doivent être partie intégrante du développement socio-économique de toute nation; qu'il ne faut pas penser seulement aux forêts et aux arbres, mais tenir compte, lorsqu'on essaie de les formuler, d'un ensemble de facteurs embrassant presque tous les domaines. De plus, et ce n'est pas le moins important, les politiques forestières ne peuvent pas être traitées comme si elles étaient immuables, à la manière des lois des Mèdes et des Perses, car elles dépendent des conceptions politiques et économiques des nations et d'une gamme étendue de conditions socio-économiques toujours en évolution. Elles doivent être soumises à une révision périodique, et modifiées à mesure qu'une nouvelle technologie et de nouveaux concepts le justifient.. Ce ne sont pas seulement la stratégie du développement et la mise en œuvre qui doivent changer avec le temps; les circonstances peuvent exiger une modification des politiques elles-mêmes.

On a déjà fait remarquer (King, 1972), que a l'accroissement rapide de la population du globe, les nouvelles préoccupations touchant le développement économique et la croissance, les progrès rapides de la technologie et de la science, l'intérêt récent pour l'environnement, et l'émancipation de vastes territoires de la domination politique étrangère ne sont que quelques-uns des éléments qui ont contribué à rendre anachroniques beaucoup des dogmes sacrés du passé, et à rendre nécessaires des approches nouvelles à la solution des problèmes mondiaux. Certains principes sacro-saints de politique forestière ont été sérieusement remis en question par Zivnuska (1966), King (1968), Nautiyal et Smith (1968) et Muthoo (1970). Il faut donc faire appel a des méthodologies nouvelles. Cependant, avant de les examiner, il peut être opportun de rappeler les caractéristiques de la sylviculture, des forêts et des industries forestières, afin de disposer d'une somme d'informations convenant: à la formulation d'une politique forestière.

On ne peut certes pas décrire comme il le faudrait dans un article de ce genre, le domaine et l'étendue de l'art et de la science de la sylviculture. Il est cependant important d'esquisser quelques-unes de ses caractéristiques essentielles, afin de démontrer le caractère systémique des activités forestières, et de souligner que même si la sylviculture peut être décrite comme un système, celui-ci n'est pas et ne peut pas être considéré comme clos. La foresterie est lice, de façon inextricable à d'autres secteurs nationaux et internationaux, et on ne peut pas l'étudier valablement sans se référer à eux.

OUVRIERS FORESTIERS EN SOMALIE il y a fort à faire

Les forestiers créent, entretiennent, sauvegardent ou régénèrent une forêt non parce que les arbres, individuellement, ou les forêts, en tant qu'unités, possèdent, par eux-mêmes et sans qu'il soit tenu compte des produits et services qu'ils fournissent, une valeur intrinsèque. En fait, on pourrait considérer l'existence des arbres et des forêts comme un «manque à gagner» et un obstacle à d'autres types de développement économique et social.

C'est la valeur attribuée par la société aux produits et aux services de la forêt qui est la raison d'être de l'activité forestière. Il s'ensuit donc que l'aménagement des ressources forestières ne peut être examiné de façon isolée; il doit être lié aux avantages qu'on en attend. Et, ce qui est encore plus important, on doit assurer, chaque: fois que c'est possible, les stades ultérieurs de développement qui garantiront l'utilisation de la matière première - arbre ou forêt - entretenue avec tant de soins.

Par exemple, si on doit exporter des grumes, il faut construire des routes allant aux ports d'exportation. Si elles sont destinées à la transformation il faut: prévoir et créer les installations indispensables. Si J. on veut aménager des forêts pour leur valeur récréative ou esthétique, il faut s'assurer que le public en profite.

Westoby (1962) a décrit quelques autres caractéristiques, utiles pour la formulation des politiques forestières. Selon lui,

- les forêts peuvent fournir des produits différant considérablement à la fois par leurs propriétés et par les usages auxquels ils peuvent être affectés;

- il est possible de choisir la forme sous laquelle on récolte La production de la forêt, et de faire varier le volume et le moment de La récolte dans des limites assez larges;

- il est possible d,- renouveler les ressources forestières après les avoir utilisées;

- le délai entre la régénération et la récolte peut varier entre des périodes courtes - trois ans environ - et des périodes de plus d'un siècle,

- les industries forestières vont des plus simples aux plus complexes, exigeant un apport plus ou moins grand de capital et de main-d'œuvre et différents niveaux de technicité;

- les industries forestières possèdent, en amont et en aval, des liaisons importantes;

- il n'est guère de pays, quels que soient son degré de développement économique et l'état de ses ressources, dans lequel la sylviculture et les industries forestières ne puissent constituer des activités appropriées.

CONSEILS AUX FONCTIONNAIRES INTERNATIONAUX

Peu de temps après être devenu le Chef du Département des forêts de la FAO, M. K.F.S. King a prononcé une allocution lors d'une réunion de ses collaborateurs. En voici quelques extraits.

Tâche plus difficile

De nombreux pays en développement ont accédé à l'indépendance depuis un temps qu'ils tiennent pour relativement long. Malheureusement, le rythme de développement réalisé par beaucoup d'entre eux n'a pas répondu à leurs espoirs - espoirs qui ne font que s'accroître. Cela rend évidemment notre tâche encore plus difficile que dans le passé. Les pays en développement ont adopté une attitude plus critique à l'égard des organisations qui les ont aidés dans leur planification, dans l'identification et l'étude de la faisabilité de leurs projets, ainsi que dans le bilan de leurs ressources

Engagement et humilité

Désormais, le fonctionnaire international est appelé à travailler avec des gens disposant d'un meilleur bagage technique et qui connaissent de mieux en mieux leurs propres conditions socio-économiques. Sa tâche est plus complexe. Il est accueilli par des gens non plus remplis d'admiration naïve et d'espérance, mais informés et quelquefois sceptiques. Dans ces conditions, le sens de l'engagement et l'humilité dont j'ai parlé deviennent encore plus importants. Nous ne devons en effet jamais oublier que nous travaillons pour le progrès de tous les peuples du monde et que notre raison d'être est la nécessité de ce progrès.

Idéalisme

Les problèmes que pose le développement aux organisations internationales sont immenses et souvent difficiles à résoudre, et nous avons besoin de nous sentir soutenus par un idéal pour en venir à bout. Je suis convaincu que cette organisation, comme les autres organisations internationales, ne peut pas continuer d'exister ni être efficace sans un personnel possédant un sens de l'humain qui transcende les frontières nationales, la volonté de comprendre les cultures étrangères, et le dévouement nécessaire.

Au service du développement

L'essentiel dans le système des Nations Unies, dans la FAO, et dans son Département des forêts, est que nous tous, qui avons le privilège et l'honneur d'être des fonctionnaires internationaux, sommes engagés au service du développement. Quelles que soient nos qualifications et notre expérience, si nous ne ressentons pas profondément cet engagement, notre travail n'aura guère de valeur, si même il en a.

Il y a d'autres qualités de la sylviculture et des industries forestières qui reçoivent rarement l'attention et l'importance qu'elles méritent dans la littérature de la profession. Les forêts et les industries forestières étant en général situées en zone rurale, la pratique de la sylviculture et des activités qui s'y rattachent freine souvent l'émigration des campagnes vers les villes. Elle favorise donc non seulement la réduction du chômage dans les zones urbaines, mais aussi une répartition plus équitable de l'activité économique dans une région ou un pays donnés. Un autre avantage - peut-être même plus important en ces temps de chômage sans cesse croissant - est qu'en général les activités forestières procurent plus d'occasions d'emplois par unité de capital investi que la plupart des autres secteurs de l'économie. En outre, le système d'agro-sylviculture (ou taungya, ou shamba), pratiqué par les forestiers dans de nombreuses parties du monde depuis plus d'un siècle, s'il est mené rationnellement et scientifiquement, offre des possibilités intéressantes de développer à la fois la sylviculture et l'agriculture, afin de faire face à la demande croissante de produits alimentaires et d'un approvisionnement régulier en bois.

Outre ces avantages, les forêts rendent des services appréciables à la communauté. Elles purifient les eaux et en régularisent le débit, réduisent l'érosion sur leur périmètre et sur les terrains adjacents, contribuent au maintien et à l'amélioration des sols, elles protègent les cultures et les animaux contre les effets néfastes du vent, elles procurent à la communauté des moyens de récréation, et assurent à la faune sauvage abri et nourriture. L'écosystème forestier absorbe la chaleur et le bruit, et agit comme modérateur du climat dans de nombreuses régions du monde. Enfin, ce qui est très important, le secteur de la sylviculture et des industries forestières donne les assises d'un système intégré de développement rural au sein duquel l'agriculture et la sylviculture peuvent progresser et atteindre leur potentiel maximal.

Ceux à qui il incombe de donner des avis pour l'élaboration des politiques forestières ont donc connaissance d'un ensemble de faits qui attestent que les forêts peuvent être utiles à l'humanité de différentes manières: elles peuvent jouer un rôle important dans la lutte contre le sous-développement économique, et améliorer la qualité de la vie dans les domaines autres que matériels. Elles peuvent apporter des avantages aux pays développés, industrialisés, et souvent pollués, et aider les pays en développement à augmenter leur croissance économique, et à diminuer le chômage.

Cependant il n'est pas recommandé de faire de tous ces avantages que procure la forêt les objectifs d'une politique forestière. Et cela pour deux raisons principales.

La première, c'est que beaucoup de ces avantages ne peuvent être pleinement réalisés que si certains inconvénients sont considérés comme tolérables. Par exemple, la maximisation de la production de bois de quelques forêts pourrait conduire à un appauvrissement de leur potentiel récréatif, à une augmentation de l'érosion et de l'envasement, et à une diminution de l'effet purificateur et régulateur des eaux. Il ne s'agit pas de contester qu'on puisse réussir, dans une certaine mesure, en adoptant des méthodes d'aménagement appropriées, à obtenir des avantages multiples. Si tout ce qu'on recherche est un certain avantage procuré par les diverses utilisations, il peut même être possible, en utilisant l'analyse de la courbe d'indifférence, et en appliquant la théorie de la production mixte, de calculer le dosage correct de gestion et autres facteurs pour obtenir le produit mixte souhaité (Gregory, 1955). Une autre approche, qui peut s'avérer utile à l'évaluation quantitative du degré de compatibilité entre elles d'un certain nombre d'utilisations, a été élaboré autour du concept de a fonctions antagonistes» multidimensionnelles (O'Brien et Roy, 1971). Ce qu'on affirme ici c'est qu'il est souvent impossible de maximiser la production de plus d'un produit ou d'un service à la fois. Néanmoins, «l'usage» permet de répondre à de nombreux besoins de la communauté grâce à un seul aménagement et à un seul cadre opérationnel, et, dans de nombreuses situations, les avantages que retire la communauté rapportés aux coûts sont plus aisément maximisés par cette méthode d'aménagement, que ce ne serait le cas si des utilisations primaires isolées étaient définies et assignées comme buts à l'aménagement par différentes autorités. C'est une méthode d'aménagement qui peut répondre efficacement aux changements intervenant dans les besoins de la communauté (Conseil forestier australien, 1974).

La deuxième raison, c'est que l'homme ne vit pas seulement de sylviculture. Les avantages qu'apportent la possession de forêts, la pratique de la sylviculture, la création et la gestion d'industries forestières, doivent être comparés à ceux qui pourraient découler d'autres formes d'activité économique. Le sous-secteur de la sylviculture doit être jugé dans le contexte de la vie socio-économique de la communauté tout entière. Il ne doit pas être examiné isolément.

Avant de formuler une politique forestière, il est souhaitable de rassembler les renseignements ci-après:

1. Données relatives aux facteurs influant sur la productivité des terres - climat, topographie, caractéristiques des sols.

2. Données sur la population actuelle et sa répartition (géographique et par classes d'âge).

3. Données sur les effectifs de la main-d'œuvre et leur répartition.

4. Tendances de la croissance démographique et de celle des effectifs de la main-d'oeuvre.

5. Revenu par habitant.

6. Tendances de la consommation des divers produits de la terre.

7. Possibilités de production - superficies, volume et types de forêts, productivité (celle des forêts naturelles et celle des forêts artificielles), productivité des autres cultures, etc.

8. Coefficient de rentabilité des divers modes d'utilisation des terres.

9. Durée de maturation des autres cultures (leur calendrier).

10. Capacité d'absorption de main-d'œuvre des diverses activités possibles et leur influence sur la fixation des populations.

11. Possibilité, d'utiliser les produits de la terre à des fins d'industrialisation.

12. Contribution possible des divers types d'utilisation des terres à l'équilibre des paiements.

13. Indices de liaison des différentes cultures.

Si cela est possible, il faudrait effectuer une étude systématique des sols du pays pour lequel la politique forestière est en cours d'élaboration et dresser un plan d'utilisation des terres.

SCIE A RUBAN DANS UNE SCIERIE COOPÉRATIVE AU PARAGUAY à faire sur place

Dans de nombreux pays la terre est une ressource rare, de même que le capital. C'est pourquoi il est souhaitable de voir le tableau d'ensemble, et de déterminer toutes les options possibles.

Cela ne veut pas dire qu'il faille attendre, pour formuler une politique forestière que le plan d'utilisation des terres soit établi. Si les renseignements nécessaires ne sont pas disponibles, et s'il apparaît qu'ils doivent se faire attendre, il faut élaborer la politique forestière sur la base des informations existantes. Cependant, sa complexité devrait être directement fonction de la quantité d'informations générales, non forestières, sur lesquelles elle, est ondée. Une politique formulée sur la base de données relativement peu nombreuses doit se réduire à une esquisse. Inversement, on doit pouvoir énoncer une politique plus affinée et globale si l'on dispose de toutes les informations extra-forestières requises, puisque la sylviculture aura été située dans la perspective convenable et qu'on aura pu tenir compte des interrelations des divers modes d'utilisation des terres.

Après que les besoins, souvent antagonistes, en terres et autres ressources rares auront été examines et conciliés, une attention plus approfondie devra être apportée au sous-secteur de la sylviculture elle-même. Les facteurs indiquant la proportion des ressources nationales à affecter à la sylviculture et aux industries forestières dépendent de l'approvisionnement et de la demande présents et futurs de produits et services procurés par les forêts; on considérera donc les études ci-après comme indispensables à la formulation de la politique forestière, et à l'intégration de cette dernière aux politiques économiques nationales (King, 1972).

- Evaluation des ressources forestières existantes, y compris les produits autres que le bois, ainsi que les services.

- Estimation des ressources forestières potentielles, y compris les produits autres que le bois et les services. - Estimation des rendements actuels et potentiels des forêts existantes et futures.

- Evaluation de la demande de produits forestiers.

- Evaluation de la demande de services fournis par la forêt.

- Etudes de faisabilité en vue de l'établissement de divers types de forêts et d'industries forestières.

- Etudes économiques concernant l'emplacement des forêts et des industries forestières.

Ces études indiqueront quelle superficie du territoire la nation doit consacrer à la sylviculture, et pendant combien de temps il conviendra d'y maintenir la production.

On dispose de méthodes assez poussées pour évaluer l'étendue des ressources forestières, estimer les rendements, évaluer la demande de produits forestiers, et procéder à des études de faisabilité en vue d'établir des forêts et des industries forestières. Cependant les méthodes permettant de prévoir la demande des divers types de services que peuvent procurer les forêts ne le sont pas autant, bien que les techniques s'affinent et s'améliorent rapidement.

Politique de protection

Lorsqu'on cherche à prévoir la demande de services de protection des forêts, on doit prendre tout particulièrement soin de lier la politique de protection avec les autres aspects de la politique globale de développement national. Outre les données sur la population, les tendances de la démographie et les revenus actuels et futurs, on doit obtenir des renseignements sur les plans de développement du secteur agricole, l'emplacement des projets agricoles actuels et projetés, ainsi que sur les besoins en eau présents et futurs de la communauté.

Il ne faut pas considérer qu'une politique nationale d'autosuffisance et d'autarcie en matière de bois et de produits dérivés du bois est toujours souhaitable. En fait, cette politique est souvent injustifiable. De plus, si une politique «d'autosuffisance» était jugée bonne, les besoins des autres secteurs de l'économie nationale risqueraient de la rendre inapplicable.

S'il n'y avait pas de communications entre les pays, si chacun d'eux était une île toute entière repliée sur elle-même, si les ressources nationales étaient abondantes, et si aucune nation ne possédait des avantages relatifs par rapport aux autres pour la production de certains produits, alors l'autosuffisance serait peut-être une nécessité. Mais les ressources sont rares et, à cause des différences de climat, de sols, de technologie, etc., telle nation est privilégiée par rapport à telle autre. Il s'ensuit que, toutes choses étant égales par ailleurs, il est économiquement avantageux pour chaque pays de se spécialiser dans la production des marchandises et la fourniture des services pour lesquels il est le mieux équipé.

Besoins conflictuels des autres secteurs

Le problème de savoir quelle fraction du territoire national devrait être affectée à la sylviculture ne peut donc pas être considéré comme résolu simplement lorsqu'on a estimé la demande future, évalué les rendements physiques, et calculé, à partir de là, la superficie voulue. Cela fait, il faudra concilier les besoins conflictuels d'autres utilisateurs des terres, et les exigences en capital et en main-d'oeuvre d'autres secteurs de l'économie. Comme il est indiqué plus haut, le meilleur moyen d'arriver à ce résultat est d'analyser la rentabilité relative, les différents calendriers de production, la contribution à la balance des paiements, la capacité d'absorption de main-d'œuvre, et les possibilités ouvertes à l'industrialisation par les diverses utilisations des terres.

Les responsables de la politique forestière disposent maintenant de deux séries de données: d'une part, l'estimation des besoins totaux en bois et produits dérivés ainsi que des services procurés par la forêt, et l'évaluation de la superficie nécessaire pour y répondre: d'autre part, l'estimation du montant des ressources que l'économie a les moyens d'affecter à la forêt, ou juge souhaitable de lui allouer. Si ces dernières données permettent la mise en application des premières, ils n'ont pas de problème; si tel n'est pas le cas, ils doivent ajuster leurs premières estimations, fondées sur l'autosuffisance en fonction des restrictions et des contraintes de l'économie prise dans son ensemble. La superficie qui pourra être finalement vouée à la sylviculture est ainsi déterminée, non seulement par les besoins du secteur forestier, mais aussi par ceux de l'économie générale et par ses ressources. C'est pourquoi la proportion ou la superficie des terres consacrées à la sylviculture, pas plus du reste qu'à un autre mode d'utilisation des terres, ne doivent être préalablement fixées. Les conditions physiques et socio-économiques propres à chaque pays seront les facteurs déterminants dans l'allocation des ressources.

Références

AUSTRALIAN FORESTRY COUNCIL. 1974, Report of Panel 3. Multiple use of forest resources. Forestry and Wood-based Industries Development Conference FORWOOD, Canberra.

GREGORY, G.R. 1955, An economic approach to multiple use. Forest Science, 1.

KING, K.F.S. 1968, The formulation of forest policies in developing economies. Rapport présenté à la neuvième Conférence forestière du Commonwealth britannique, New-Delhi.

KING, K.F.S. 1972, A plan of action for the next six years. A summary of the revised FAO study on forest policy law and administration. Rapport présenté au septième Congrès forestier mondial, Buenos-Aires.

MUTHOO, M.K. 1970, Renewable natural resource planning for regional development with special reference to Kashmir. Université d'Oxford (Thèse).

NAUTIYAL, J.C. et SMITH, J.H.C. 1968, Acceleration of economic development depends on harmonization of technical and economic objectives for forestry. Rapport présenté à la neuvième Conférence forestière du Commonwealth britannique, New-Delhi.

O'BRIEN, W.T. et ROY, G.G. 1971, The multi-objective management of natural resources. Rapport présenté au quarante-troisième Congrès d'ANZAAS, Brisbane.

WESTOBY, J.C. 1962, Les industries forestières dans la lutte contre le sous-développement économique. Unasylva, Volume 16 (4).

ZIVNUSKA, J.A. 1966, The integration of forest development Plans. Rapport présenté au sixième Congrès forestier mondial, Madrid.


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