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3.2.13 République de Guinée

LA GESTION DES FORETS TROPICALES SECONDAIRES EN AFRIQUE:

Réalité et perspectives

Rapport national de la République de Guinée

Ecrit par
Djiramba Diawara
M. Djiramba Diawara
Chef Division foresterie rurale
Direction nationale des eaux et forêts
BP: 624; Guinee Conakry
Tel: cell (224) 011.34.22.49 /43.00.20
Mél.: [email protected]

POUR

L’ATELIER FAO/EC LNV/GTZ SUR

LA GESTION DES FORETS TROPICALES SECONDAIRES EN AFRIQUE:

Réalité et perspectives

En collaboration avec l’UICN, ICRAF et CIFOR
Douala, Cameroun, 17 – 21 novembre 2003

RESUME

Le présent document analyse la situation actuelle et les tendances de l’évolution des forêts secondaires en Guinée. Il fait partie des rapports nationaux écrits dans la perspective de l’atelier sur la gestion des forêts secondaires tropicales en Afrique subsaharienne francophone (Douala, Cameroun, 17-21 novembre 2003).

Après une introduction exposant ses objectifs, le document nous plonge dans la réalité de la gestion de ces forêts en Guinée. Celles-ci occupent de vastes surfaces de territoire. Les causes en sont les défrichements culturaux, les feux de brousse, l’exploitation forestière, les aléas climaciques et l’abandon des terres utilisées.

Elles sont riches en espèces de valeur, fournissent aux populations des produits extrêmement variés et jouent par conséquent un rôle socioéconomique, écologique et environnemental important. Mais leur gestion fait partie des défis que tous les acteurs (en ce compris, les décideurs, les chercheurs, les experts et les développeurs), en collaboration avec leurs partenaires, tentent de relever. A cette fin, le Gouvernement a adopté en 1990 une nouvelle politique forestière.

Cette politique est complétée par le code forestier qui distingue les domaines forestiers de l’Etat, des collectivités décentralisées, privé et non classé. Mais ces mesures sont insuffisantes. Par exemple, la gestion des forêts secondaires est confrontée à la superposition des droits coutumier, religieux et moderne sur la terre de même qu’à la non définition des rôles et mandats des différents acteurs. Une harmonisation de ces droits avec les autres dispositions régissant la gestion des ressources naturelles est nécessaire.

Afin d’améliorer la gestion des forêts secondaires, un transfert effectif des responsabilités aux autorités locales, un accroissement de l’appui de l’Etat aux organisations de base ainsi que la mise en œuvre des réformes politiques et institutionnelles sont également recommandés.

INTRODUCTION

Depuis quelques années, les forêts primaires reculent et sont remplacées par des forêts secondaires. En Guinée, les feux de brousse, l’agriculture itinérante sur brûlis, l’exploitation minière, la croissance démographique, le surpâturage et l’élevage en sont les principaux facteurs. C’est dans ce contexte que les forêts secondaires font l’objet d’une attention particulière et que des chercheurs, des experts et des développeurs mettent en commun leurs connaissances et leurs expériences en vue d’améliorer leur gestion.

Analyser la situation actuelle de ces forêts et les tendances de leur évolution paraît donc essentiel. Tel est l’objectif de l’atelier qui sera organisé à Douala du 17 au 21 novembre 2003 par la FAO, en collaboration avec le CIFOR et l’UICN. Outre des experts invités à cette rencontre, les informations proviendront des rapports nationaux sur la réalité et les perspectives en matière de gestion des forêts secondaires. Malheureusement, en Guinée, nous sommes encore loin de bien connaître ces dernières : Quelles sont leurs caractéristiques et leur étendue ? Quelle est leur importance socio-économique et écologique ? Comment sont-elles gérées ? Comment pourrions-nous améliorer leur gestion ? Néanmoins, ce rapport donne un aperçu des réponses à ces questions que pourra développer l’atelier de Douala.

1. SITUATION SOCIOECONOMIQUE GENERALE DE LA FORESTERIE ET DE L’UTILISATION DES TERRES

La République de Guinée est située au sud-ouest de l’Afrique occidentale : 7° et 12°30’ latitude nord et 8° et 15°0 longitude ouest. Elle couvre une superficie de 245 857 km² divisée en quatre régions naturelles : la Basse Guinée, la Moyenne Guinée, la Haute Guinée et la Guinée forestière.

En 1997, la population était estimée à 7,6 millions d’habitants dont 32% d’urbains. La densité moyenne de population était de 29 habitants/km², forte en Moyenne Guinée (30 habitants /km²) et faible en Haute Guinée (12 habitants/km²). Cette population croît à un taux de 2,8% par an (ce taux est inégalement réparti entre les zones rurales,1,8%, et urbaines, 4,8%).

Entre 1986 et 1994, l’économie a cru en moyenne de 4% par an et le revenu par tête, de 1,2%. Les secteurs qui ont le plus contribué à cette croissance sont le commerce lié au secteur informel et le secteur agricole – en moyenne 9% par an du volume des exportations totales. Les revenus découlant du secteur minier – l’une des principales sources de revenus du pays - s’étaient effondrés, passant de 12% du PIB en 1987 à 3% en 1994. En outre, sur une valeur ajoutée totale du secteur primaire évaluée en 1998 à 824,74 milliards FG53, la part de la sylviculture et des forêts a été de 84,73 milliards FG (Ministère du Plan, 2000). Et si la part du secteur rural dans la croissance globale du PIB est passée de 3,4% en 1995 à 5,2% en 1998, celle de la sylviculture et des forêts par rapport à l’ensemble du secteur rural l’a été de 8% à 12%. C’est dire l’importance du secteur forestier dans l’économie nationale.

D’une manière générale, les décisions concernant l’utilisation des ressources naturelles procèdent à la fois des droits coutumiers, religieux et « positifs » et tiennent compte de la densité de population et de la disponibilité des terres. Dans ce système, l’usufruitier – un individu, une famille ou une communauté villageoise – a des droits sur le sol quand ceux-ci ne lui sont pas expressément contestés et quand il peut jouir de ses biens dans la paix. Dans le cas contraire, l’Etat ou la communauté engage la procédure visant à régulariser la propriété.

Pourtant, des litiges fonciers sont nombreux et sont souvent liés à la superposition des droits coutumiers, religieux et « positifs » sur une même parcelle. Tel est le cas autour de la forêt classée de Ziama où une enquête a révélé que près de 40% des parcelles enquêtées fait l’objet de litiges fonciers. La plupart de ces litiges proviennent de l’application des différents droits (coutumiers, religieux et « positifs ») lors de la cession des parcelles ; les autres portent sur les limites de celles-ci et sur leurs ayant droits.

Le droit coutumier sur la terre a un caractère hiérarchique, collectif et inaliénable. La terre appartient au premier occupant, mais la propriété réelle est en fait un usufruit puisque celle-ci appartient au groupe, aussi bien aux vivants qu’à leurs descendants. Elle ne peut être cédée définitivement à des tiers qui ne sont pas membres du groupe. Elle fait partie des biens successoraux qui sont transmis en ligne agnatique. Les terres offertes (tapades, parcelles pour le reboisement, construction d’une école, etc.) font généralement l’objet d’un accord verbal devant des témoins dans le village. Les terres acquises conformément au droit coutumier peuvent être prêtées à des voisins, des parents ou des amis. Au-delà, le métayage, la location et le bail sont des modes d’accès à la terre.

En outre, en Guinée forestière par exemple, la cession des droits sur une récolte dans un champ sert de gage pour le paiement d’une dette. La valeur de la récolte – le gage- varie avec la date du remboursement du prêt et celle du retour du champ à son propriétaire.

2. CARACTERISTIQUES ET ETENDUE DES FORETS SECONDAIRES

Presque toutes les forêts guinéennes peuvent être considérées comme secondaires. Elles incluent notamment les forêts denses humides, les forêts denses sèches et les mangroves. A l’intérieur de ces forêts, on peut rencontrer les principaux types de forêts tropicales secondaires reconnus et trouvés dans d’autres parties du monde à savoir : les forêts secondaires après exploitation, les forêts secondaires dans des jachères laissées par l’agriculture itinérante, les forêts secondaires remises en état, les forêts secondaires après incendie et les forêts secondaires après l’abandon d'autres utilisations des terres. Toutes ces forêts sont décrites ci-dessous de manière succincte.

2.1 Les forêts denses humides

Elles sont présentes dans le sud-est du pays. Leur superficie ne dépasse pas 300.000 ha. On pense qu’elles occupaient de vastes surfaces de territoire 50 ans plutôt. Il n’en reste aujourd’hui que des îlots, des galeries et quelques reliques peu accessibles et très sensibles au feu. Globalement, ces forêts présentent deux grands faciès :

- un faciès continental caractérisé, dans le Fouta-Djallon, par l’absence de Triplochiton scleroxylon et la présence d’Erythrophleum guineensis, de Khaya senegalensis et de Carapa procera ; dans les vallées marécageuses, par des peuplements à Mitragyna stipulosa, Raphia sudanica ou Raphia gracilis ; entre Kindia et Mamou, par un îlot de parasoliers (Musanga cecropioides) et

- un faciès côtier, dépourvu d’Erythrophleum guineensis et de Triplochiton scleroxylon, qui se compose notamment de Parinari excelsa, Canarium schweinfurtii, Aningeria robusta, Carapa procera, et Terminalia ivorensis.

A la lisière du Fouta-Djallon, des Parinari excelsa et des Parkia biglobosa sont encore abondants. Ceux-ci sont des reliques d’une forêt dense montagnarde qui se compose d’une flore très appauvrie et très largement détruite depuis longtemps (Mollien, 1819 ; Pobeguin, 1906). Les variantes de cette flore sont nombreuses : de petits îlots notamment à Parinari, Erythrophleum, Teclea afzelii, Psychotria entre 1.000 et 1.300 m ; des buissons de Syzygium guineense var. macrocarpa et une florule des micro-mares temporaires, de 1300 m aux cuirassées- les bowé.

En Basse Guinée, les forêts denses humides laissent la place à des brousses à Anisophyllea laurina, Trema guinensis et Alchrornea cordifolia ; à l’intérieur de cette région, émergent des savanes comprenant de gros Parinari excelsa, des Erythrophleum guineensis, des Cola cordifolia et des Parkia biglobosa ; en altitude, Parinari excelsa et Memecylon fasciculare dominent les formations boisées.

Les Monts Nimba54, la chaîne des Fon et la partie supérieure du massif de Ziama possèdent des peuplements denses à Parinari excelsa, Ochna membranacea et Cryptosepalum tetraphyllum avec des variations vallicoles, orophiles ou sur sols dégradés et de nombreuses plantes endémiques.

2.2 Les forêts denses sèches

Elles couvraient jadis très largement la moitié nord de la Guinée, à l’exception du Fouta-Djallon. Leur surface est aujourd’hui très limitée sous l’effet des défrichements et des feux de brousse. Ce sont des formations forestières élevées, environ 20 m de hauteur, qui possèdent une seule strate arborée, couverte de lianes plus ou moins clairsemées, un tapis de Graminées et un sous-bois irrégulier constitué de bambous (Oxythenanthera abyssinica).

A l’ouest du Fouta Djallon, elles se composent principalement de grandes légumineuses (Pterocarpus erinaceus, Erythrophleum africanum, Afrormosia laxiflora et Prosopis africana) où dominent Parkia biglobosa, Pterocarpus erinaceus et des bambous, avec quelques variantes : entre autres, des peuplements à dominance d’Afzelia africana au nord sur sol sableux, des forêts à Erythrophleum guineense et des peuplements d’ Erythrophleum guineense associés à Cordyla pinnata, Schrebera entre Gaoual et Labé, etc.

De l’est de Dabola à Kérouané, on trouve des forêts denses sèches à Isoberlinia doka, Isoberlinia dalzielli et Uapaca somon, des peuplements ouverts riches en bambous et des forêts à Daniellia oliveri, Pterocarpus erinaceus, Sterculia setigera, Bombax costatum, etc. Vers Kouroussa, subsistent de beaux peuplements d’Isoberlinia doka.

2.3 Les mangroves

Des mangroves secondarisées se sont développées sur la côte guinéenne. Au cours de leurs stades évolutifs, leur composition floristique varie selon la nature du banc. Si Rizophora racemosa GFW Meyer est l’espèce pionnière des bancs vaseux, Avicennia germinans L. (ou A. nitida) l’est lorsqu’ils sont sableux. En règle générale, les bancs de vases récents peu consolidés et riches en eau (souvent plus de 150 % en poids) sont colonisés préférentiellement par Avicennia accompagné ou non de Laguncularia. Rhizophora colonise rarement une vase consolidée mais encore soumise à une importante submersion. En bordure des canaux, Avicennia et Rhizophora sont associées à Languncularia racemosa (L.) Gaertn ; sur sol consolidé (en buisson et en prairies), à Drepanocarpus lunatus.

La colonisation des bancs vaseux par ces plantes se produit quand la surface du dépôt atteint le niveau moyen de la mer. L’envasement se poursuit alors en raison du ralentissement du mouvement des eaux de submersion par le tapis dense des pneumatophores d’Avicennia, ce jusqu’à ce que la végétation atteigne le niveau moyen des marées hautes de vives eaux.

2.4 Les forêts secondaires après exploitation

Généralement, il s’agit de forêts classées se régénérant après exploitation forestière. Parmi ces forêts, la mangrove présente des caractéristiques distinctes. Elle est fragile, sa régénération est fonction notamment du type d’intervention et du drainage. Ainsi, en cas de défrichement, si le drainage est défaillant, les terres se couvrent difficilement d’une végétation arborée ; elles évoluent vers des formations herbacées, restent nues ou se transforment en tanne vif. Dans le cas contraire, Avicennia colonise les terres abandonnées et leur mise en défens favorise leur développement.

La régénération des peuplements après la coupe est longue et complexe. Elle est compromise si les coupes sont rases sur de grandes surfaces (plusieurs hectares), si elles sont trop rapprochées (les arbres sont trop jeunes pour être en âge de produire des plantules fertiles) et si les parterres de coupes sont recouverts d’un amas de rémanents.

2.5 Les forêts secondaires dans les jachères laissées par l’agriculture itinérante et celles remises en état

Les forêts secondaires dans les jachères laissées par l’agriculture itinérante se sont développées sur des terres qui furent l’objet d’exploitations agricoles, puis abandonnées à cause des problèmes de santé et de croyances. C’est le cas de certaines forêts denses sèches de la Haute Guinée qui couvrent les terres abandonnées par des populations affectées auparavant par l’onchopsychose et qui, malgré les résultats positifs des actions de lutte contre l’onchocercose, ne veulent plus retourner sur ces terres.

Les forêts remises en état correspondent aux bosquets sacrés qui, sous la première République, furent profanés dans le cadre de la lutte contre le fétichisme et le charlatanisme et qui se sont reconstitués du fait de la renaissance culturelle que prône le Gouvernement.

2.6 Les forêts secondaires après incendie et celles après l’abandon d’autres utilisations des terres

Des forêts secondaires péri-villageoises se développent après des feux saisonniers sauvages que les populations n’ont pas réussi à maîtriser. Elles forment une ceinture autour des villages et sont entretenues par les populations.

Quant aux forêts secondaires après l’abandon d’autres utilisations des terres, elles se rencontrent au niveau des hameaux qui furent désertés à cause notamment de leur enclavement, de l’appauvrissement des terres de cultures et/ou de l’appauvrissement des pâturages. Tel est le cas des forêts secondaires de Balassou en Guinée forestière.

3. IMPORTANCE SOCIOECONOMIQUE ET ECOLOGIQUE DES DIFFERENTS TYPES DE FORETS SECONDAIRES

Selon la Banque Mondiale (1986), 73% de l’énergie consommée en 1984 étaient liés au bois et au charbon de bois, ce qui représentait environ 1. 582. 000Tep55. Les métiers (entre autres, brasseries, boulangeries, pêcheries pour le fumage du poisson, forges et bijouteries) utilisent environ 30% de la consommation nationale de bois de chauffe et 15% de charbon de bois. La carbonisation du bois est peu développée. Les familles consomment plus de bois que de charbon : environ 100% en milieu rural contre 80% dans les zones urbaines, Conakry utilisant plus de charbon de bois que les autres villes.

Une autre production forestière est constituée par les bois de service (perches, poteaux, piquets, bois ronds, tiges de bambous, etc.) qui sont exploités pour des utilisations diverses : notamment, toitures, échafaudages, tapades sèches, hangars, ponts rustiques, supports de barbelés. Ces produits font l’objet d’un commerce florissant à Conakry et dans les autres villes comme Labé, Mamou Kankan et N’Zérékoré.

La production nationale de bois d’œuvre a été de 105.000 m3 en 1994 (OGUIB, 1995). Le bois est scié à la tronçonneuse et vendu aux commerçants sous forme de madriers grossiers. Ceux-ci représentent près de 80% du marché. Les scieries couvrent 1 à 2% de la consommation nationale, environ 3.000 m3.

En ce qui concerne les produits forestiers non ligneux, ils font l’objet d’échanges considérables. Il s’agit notamment de bâtons masticatoires, de colas, de noix, de la paille pour les toitures, de fibres de tissage, du vin de palme, de la viande de brousse et de plantes médicinales.

Au-delà, il faut faire remarquer que la sculpture et l’ébénisterie dépendent étroitement de la forêt de même que les rites initiatiques qui se déroulent à l’écart des regards indiscrets.

Au plan environnemental, les forêts secondaires protègent les bassins versants des fleuves soudano-sahéliens, tels le Sénégal, la Gambie, le Niger, le Corubal, protègent les sols contre l’érosion et abritent de nombreux animaux. Tel est le cas du massif du Fouta Djallon.

4. CONNAISSANCE ET EXPERIENCES EFFECTIVES EN MATIERE DE GESTION DES FORETS SECONDAIRES

De nombreux programmes de recherche d’appui au développement forestier ont été exécutés. On peut citer ceux qui suivent. Sylviculture des espèces de forêts denses humides, elle a été exécutée par le Centre Forestier de N’Zérékoré et a porté sur le suivi de la croissance de 88 espèces de forêts denses humides dans différentes conditions écologiques. A l’issue de cette étude, 36 espèces ont été recommandées pour être utilisées dans des reboisements, 39 méritent d’être étudiées davantage et il a été conseillé de ne pas utiliser les autres dans les reboisements.

Etude sur la diversité des symbioses fixatrices d’azote et leur utilisation dans la revégétalisation précoce des Monts Nimba, elle a été financée par la mission française de Coopération. Elle a amélioré la connaissance de la diversité des symbioses fixatrices d’azote et mycorhiziennes des arbres du sud de la Guinée ainsi que celle des effets en pépinières de l’inoculation des Acacia (A. mangium et A.auriculiformis)56 avec des rhizobiums et de Afzelia africana avec les champignons ectomycorhiziens

Programme d’aménagement des jachères ligneuses, il a identifié 104 espèces dans des jachères de la Basse Guinée dont 18 recensées comme des essences de valeur (celles productrices de bois de service, de bois d’œuvre ou de bois de valeur commerciale reconnue dans la région).

Quant au programme d’installation de placettes échantillon permanentes en zone de mangroves, il a fournit des informations nécessaires à la compréhension de la régénération des peuplements purs de Rizophora racemosa et Avicennia germinans (accroissement annuel en diamètre, taux de mortalité et nombre de plants régénérés).

S’agissant des expériences en matière de gestion des forêts secondaires l’Etat s’était attribué, de l’indépendance à 1984, la propriété de tout le domaine forestier, particulièrement des forêts classées et des réserves. Il reconnaissait cependant aux populations le droit d’usage sur ces forêts et réglementait les défrichements pour des activités agricoles.

Dans ce contexte, les redevances étaient exclusivement versées à l’Etat ; le service forestier, chargé principalement de réprimer les infractions ; les activités des communautés villageoises à l’intérieur du domaine forestier - autres que celles relevant du droit d’usage-, considérées comme illégales. Ce système sous-estimait, voire ignorait, la capacité de ces communautés à assurer elles-mêmes la gestion des forêts. Il explique, dans une large mesure, leur désintérêt pour les ressources forestières, qu’elles ne considéraient plus comme faisant partie de leurs biens, et par conséquent l’aggravation du déboisement.

Il n’empêche. Entre 1959 et 1965, les populations guinéennes ont investi dans des actions de reboisement. En 1973, le Gouvernement a créé des bosquets après avoir lancé ce mot d’ordre : « 2 ha de reboisement par le pouvoir révolutionnaire local (PRL) et le Collège d’enseignement rural ». Dans la même année, des brigades de jeunes dans les villages et des comités RDA (Rassemblement démocratique africain) ont été constitués pour lutter contre les feux de brousse. En 1976, dans le cadre de la lutte contre la sécheresse, le Gouvernement guinéen a promulgué la Loi Fria qui invitait les citoyens à planter 2 ou 3 arbres à l’occasion des décès, des naissances et des mariages. Ces interventions ont eu un impact positif sur la foresterie communautaire.

Cependant, c’est à partir de 1984 que des stratégies de conservation des ressources naturelles et de développement du Fouta Djallon ont été élaborées (projet RAF/81/060 financé conjointement par le PNUD, l’UNSO et le Gouvernement guinéen) et expérimentées de 1988 et 1993 à travers le projet de Restauration et d’Aménagement du Bassin représentatif pilote de Guétoya.

A partir de 1984, fin de la première République, la Guinée a opté pour un développement fondé sur une politique d’économie libérale. Sous l’influence de cette politique, plusieurs dynamiques politiques et socioéconomiques sont apparues, notamment la décentralisation et le développement de la foresterie participative. Celle-ci valorise les dynamiques de cogestion, de gestion intégrée et d’autogestion locale des ressources naturelles. Ainsi, nombre de communautés rurales ont pris part à la conception, à la prise de décision et à la réalisation des actions relatives à la gestion des forêts secondaires : entre autres, la formulation de la politique forestière, la révision du code forestier et de faune et la gestion des forêts communautaires de Pita (1990-1999).

Actuellement, tous les programmes et tous les projets en cours d’exécution privilégient l’implication de tous les acteurs dans la gestion des ressources naturelles en général et des ressources forestières en particulier ; ces opérations contribuent à la réduction de la pauvreté dans les zones d’intervention. Il s’agit notamment du programme d’appui à la gestion intégrée des ressources naturelles dans les Bassins du Niger et de la Gambie (AGIR/Union Européenne) et du projet élargi de gestion des ressources naturelles (PEGRN/USAID-Guinée).

Malgré ces efforts, les populations locales doivent encore conquérir les droits de propriété et d’exploitation des ressources forestières. Parce que les défis de la mise en oeuvre de la décentralisation dans le secteur forestier sont multiples, complexes et difficiles à relever.

5. PRATIQUES COURANTES DE GESTION DES FORETS SECONDAIRES

Les prélèvements des ressources forestières, pour l’autoconsommation, sont autorisés. Le propriétaire d’une jachère a un contrôle sur les fruitiers –s’il en a planté- mais il n’empêche généralement pas la population de ramasser le bois, de couper le bois de service et de récolter les produits forestiers non ligneux.

En ce qui concerne l’exploitation de bois d’œuvre, le « scieur- tronçonneur » agréé négocie, de gré à gré, le prix de l’arbre sur pied avec le propriétaire de la jachère. Les exploitants industriels agréés, quant à eux, doivent d’abord obtenir un avis favorable des collectivités riveraines pour bénéficier d’une concession forestière, ce qui ne les empêche pas de négocier, avec les paysans, l’exploitation des espaces forestiers situés à l’intérieur de leurs concessions. Le bois coupé dans ces espaces est vendu par la collectivité et les recettes affectées à la construction des infrastructures sociales (ponts, écoles, dispensaires, mosquées, etc.).

La superficie des plantations forestières privées n’est pas importante dans le pays. Toutefois, les propriétaires des plantations forestières jouissent librement de leurs produits. Quant aux recettes découlant des plantations forestières de l’Etat qui furent réalisées sur les terres des communautés villageoises, leur répartition pose généralement problème du fait de l’absence d’une clef de répartition des recettes entre l’Etat et les collectivités.

6. POLITIQUE ET QUESTIONS INSTITUTIONNELLES RELATIVES A LA GESTION DES FORETS SECONDAIRES

Les principaux axes d’actions prioritaires de la politique forestière adoptée en 1990 sont notamment :

- l’élaboration de plans d’action forestiers préfectoraux ;

- l’aménagement intégré des bassins versants ;

- la mise en œuvre d’opérations de conservation de la biodiversité, de protection des écosystèmes fragiles et de production forestière ;

- la foresterie participative dans le cadre d’une gestion rationnelle des terroirs et

- le renforcement institutionnel.

Le cadre institutionnel est formé d’un service forestier, des institutions gouvernementales partenaires, des professionnels du bois et des organisations non gouvernementales. Le service forestier comprend la Direction nationale des eaux et forêts (DNEF) et l’Office guinéen du bois (OGUIB). La DNEF a cinq Divisions centrales, qui comportent chacune 3 ou 4 sections, 33 sections préfectorales, 5 sections communales et 303 cantonnements forestiers.

En outre, le pays compte plus de 100 organisations non gouvernementales (ONG) nationales et étrangères dont les activités sont coordonnées par le service d’assistance aux coopératives et de coordination des ONG (SACCO).

Le cadre institutionnel dispose de nombreux atouts, entre autres :

- l’existence d’un cadre institutionnel servant de cadre d’expression aux différents acteurs ;

- l’émergence de plusieurs ONG actives dans le domaine de l’environnement ;

- l’existence de plans de développement élaborés avec la participation des populations ;

- la volonté de l’Etat de poursuivre et de renforcer la décentralisation ;

- les conventions internationales relatives à l’environnement ratifiées par le pays.

Mais l’amélioration de l’efficacité des institutions forestières est aussi fonction des contraintes pesant sur la gestion des forêts secondaires, notamment :

- les textes législatifs ne sont pas harmonisés ;

- le niveau de l’épargne intérieure est faible ;

- l’appui de l’Etat au secteur privé, aux ONG, aux groupements et aux associations pour le développement forestier est faible ;

- les conflits armés dans les pays voisins sont à l’origine de l’accroissement de la pression sur les ressources naturelles et des conflits fonciers entre les populations d’accueil et les réfugiés et

- les difficultés liées à la satisfaction des besoins immédiats des populations.

PRINCIPALES LEÇONS ET CONCLUSIONS

Presque toutes les forêts guinéennes sont secondaires. Elles sont riches en espèces de valeur, fournissent aux populations des produits extrêmement variés et jouent par conséquent un rôle socioéconomique, écologique et environnemental important. Mais de nombreuses contraintes (faiblesse institutionnelle, conflits armés dans les pays voisins, besoins immédiats des populations, superposition des droits coutumier, religieux et moderne sur la terre, non définition des rôles et mandats des différents acteurs, etc.) pèsent sur leur gestion. Les actions ci-après peuvent contribuer à leur durabilité. Il s’agit:

- au plan technique,

- de promouvoir le reboisement par l’Etat et la foresterie communautaire et privée ;

- de disposer de données fiables sur les ressources existantes pour une meilleure planification des interventions ;

- d’élaborer des schémas d’aménagement des forêts secondaires ;

- de développer des programmes de recherche sur des thèmes d’intérêt commun au niveau sous-régional ;

au plan juridico-institutionnel :

- d’améliorer la réglementation de la tenure foncière ;

- de définir les rôles et responsabilité des acteurs afin de leur permettre d’investir dans le secteur ;

- d’assurer une large diffusion des textes juridiques et réglementaires ;

aux plans matériel et financier,

- de mettre en place des mécanismes financiers adaptés au contexte ;

- de renforcer les capacités de gestion financière des services techniques, de la société civile et des populations (moyens matériels, formation, etc.) ;

au plan socioculturel:

- de dynamiser la sensibilisation, la formation de toutes les couches de la société à la gestion des ressources naturelles ;

- de valoriser les connaissances, les savoirs et les savoir-faire traditionnels favorables à une gestion durable des ressources naturelles et

- de promouvoir l’alphabétisation fonctionnelle des couches paysannes.

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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17. République de Guinée, Végétation et forêts- politique forestière et plan d’action- plan d’action forestier tropicale, Annexe 1, 1988.


53 1 $ USD = 2.125 FG (cours indicatif de négociation des devises au 14/10/03)

54 Sur le plan botanique, les Monts Nimba sont l’une des régions les mieux étudiées de la Guinée.

55 Tonnes équivalent pétrole.

56 Acacia mangium a été sélectionné à cause de sa capacité à fixer l’azote atmosphérique que les bactéries peuvent transformer en une forme assimilable pour les plantes. Les plants inoculés ont servi à l’installation d’essais en milieu paysan dans l’objectif d’étudier l’influence de l’inoculum sur leur survie et leur développement en hauteur et en diamètre.

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