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Plantation d'arbres en Tanzanie: La voix des villageois

Il ne suffit pas que les gouvernements décident de planter des arbres - que ce soit pour obtenir du bois de feu, des aliments, du fourrage et des abris, pour accroître les revenus ou pour protéger l'environnement - , encore faut-il trouver des méthodes pour que les plans soient couronnés de succès. E.M. Mnzava présente l'expérience de la République-Unie de Tanzanie à cet égard. Le secret du succès se résume en un précepte lapidaire: écoutez la voix des paysans.

E.M. Mnzava

E.M. Mnzava est directeur de la Division des forêts du Ministère des terres, des ressources naturelles et du tourisme de la République - Unie de Tanzanie. Le présent article est tiré d'une étude qu'il a réalisée pour le compte de son gouvernement.

FEMME MASAÏ EN TRAIN DE REPIQUER UN PLANT une responsabilité locale

· Plus de 87 pour cent de la population de la République-Unie de Tanzanie, qui compte environ 19 millions d'habitants, vivent en milieu rural et tirent de la biomasse à peu près 96 pour cent de l'énergie qu'ils consomment, que ce soit pour les besoins de la famille et du village ou pour l'artisanat. De plus en plus de citadins, en particulier les pauvres, utilisent aussi la biomasse, surtout sous forme de charbon de bois. Plus de 85 pour cent des habitants des villes emploient le charbon de bois, soit exclusivement, soit pour compléter d'autres sources d'énergie (Nkonoki, 1981). Entre 1978 et 1982, la consommation de charbon de bois à Dar-es-Salaam est passée de 120-150 kg à 315 kg par habitant et par an.

La Tanzanie est le deuxième pays d'Afrique, après le Nigeria, pour ce qui est de la consommation de bois de feu, qui représente environ 2,5 m3 par habitant et par an (Nkonoki, 1981). Comme dans beaucoup d'autres pays en développement, très peu d'énergie commerciale est utilisée pour la cuisine. On estime la consommation actuelle de bois de feu à 35 millions de m3 par an; elle devrait atteindre 62 millions de m3 en l'an 2000 quand la population aura presque doublé (35,7 millions d'habitants). Or, la possibilité des formations forestières naturelles, dont provient plus de 98 pour cent du bois utilisé, ne dépasse pas quelque 19 millions de mètres cubes.

Coûts de directs de main-d'oeuvre pour la plantation d'un hectare (Première année)

Activité

Nombre de journées de travail

Coût (dollars U.S.)

Graines et pépinières

20

43.0

Préparation du terrain

25

53,8

Plantation

12

25,8

Regarni

3

6,5

Sarclage (4 fois)

35

753

Protection

2

4.3

Total

97

208.7

REBOISEMENT DE VILLAGE AU SÉNÉGAL une idée dont pourraient s'inspirer de nombreux pays

Pour combler le déficit, il faut un gros effort de plantation. La forêt naturelle disparaît rapidement, et les autres sources d'énergie n'ont jusqu'à présent qu'une importance négligeable, soit parce qu'elles sont inaccessibles ou trop coûteuses, soit parce qu'elles supposent des techniques relativement nouvelles et qui ne peuvent être généralisées du jour au lendemain.

Le choix des essences

Bien que la plupart des paysans sachent manifestement ce qu'ils veulent, les forestiers continuent en général à appliquer leurs critères stéréotypés pour le choix des essences: usages multiples, croissance rapide, aptitude à rejeter, etc., sans tenir compte des besoins des populations locales. Une des principales raisons de l'échec des plantations dans les communautés masaïs est qu'on leur impose souvent des essences ne produisant que du bois de feu, comme l'eucalyptus. Mais les Musais sont avant tout des éleveurs: leur vie, c'est leurs bêtes! Ils se nourrissent de viande et de lait et élèvent de grands troupeaux dans un environnement difficile pour faire vivre leurs familles. Ce qu'il leur faut, ce sont des arbres pour nourrir leurs animaux. Quand on leur impose les eucalyptus, qui ne leur conviennent pas, ils ne s'occupent ni de les planter ni de les entretenir, et on les accuse ensuite d'être des bergers rétrogrades.

Le même arbitraire est manifeste dans la préférence accordée aux essences exotiques, sous prétexte qu'elles poussent vite. Mais certaines essences indigènes, mieux adaptées à l'environnement et aux besoins locaux, méritent d'être prises en considération. Beaucoup d'arbres dont les paysans pouvaient cueillir les fruits quand ils allaient cultiver leurs champs, ramasser du bois ou garder leurs troupeaux ont maintenant disparu.

On n'a pas besoin d'avoir un attachement superstitieux à tout ce qui est local pour préférer les essences indigènes. En fait, celles-ci sont en général plus adaptées aux nombreux besoins des paysans. Certains arbres sont d'ailleurs respectés par l'agriculture. Si les Gogo ne coupent pas les baobabs, ce n'est pas parce que ce sont de trop gros arbres, mais parce qu'ils sont très utiles. De même, les paysans apprécient les arbres qui améliorent la fertilité des sols - par exemple en fixant l'azote - même s'ils ne comprennent pas comment cette fertilisation se produit.

Enfin, les paysans, et surtout les paysannes, connaissent la valeur énergétique de la plupart des essences. Ils savent quels bois ont un faible rendement thermique, brûlent trop vite, donnent de la fumée, produisent trop de cendres, ou projettent des étincelles qui menacent les toits de chaume. Une étude de l'Université de Dar-es-Salaam a révélé que les populations locales hésitent à acheter du charbon de bois de résineux - malgré son rendement thermique presque égal à celui du charbon tiré des essences feuillues les plus appréciées, et bien qu'il coûte moitié moins cher - parce qu'il brûle trop vite et produit plus de fumée. Toutefois, les pénuries obligent à accepter des sources d'énergie de moins bonne qualité.

Le libre déplacement des troupeaux fait qu'il est difficile de protéger les arbres et les plantations, d'autant plus que les troupeaux dépassent souvent la capacité de charge des terres.

Pépinières

Plus de 92 pour cent des pépinières qui approvisionnent les villages en plants sont encore situées dans des centres régionaux ou de district. Rares sont celles qui appartiennent aux villageois. On explique souvent cette situation par le manque de compétences des villageois. Or, la plupart d'entre eux ont leurs propres pépinières pour des cultures agricoles telles que le caféier, qui est un arbre. Les arbres forestiers sont-ils tellement différents des caféiers?

Dans ces conditions, les plants doivent être transportés sur de longues distances, parfois sur plus de 50 km. Le coût des transports et le manque de véhicules constituent un des principaux obstacles à la plantation d'arbres. La solution pratique consiste à décentraliser autant que possible les pépinières. Pour bénéficier des économies d'échelle, et aussi parce que les villages n'ont pas tous les conditions nécessaires à l'établissement de pépinières - par exemple des ressources suffisantes en eau - , plusieurs villages peuvent s'associer pour organiser une pépinière commune quand les circonstances le permettent. L'observation suggère que le mieux est de rattacher ces pépinières aux écoles primaires, ce qui permet de bénéficier d'une meilleure infrastructure et de compétences techniques.

Qu'elles soient d'Etat ou de village, les pépinières ne produisent pas suffisamment de plants au moment voulu. Cela tient surtout au manque de ressources, mais aussi au fait qu'on n'utilise pas de matériaux disponibles sur place. Par exemple, on emploie des sachets en polyéthylène - produit du pétrole, qui souvent manque sur le marché. Les forestiers attendent de longs mois l'arrivée des sachets. Il n'est donc pas étonnant que dans 70 à 90 pour cent des cas de plantations effectuées trop tard pendant les années 1970-1980, ce retard ait été dû à une rupture des approvisionnements en polyéthylène.

Or, il y a d'autres solutions. Des paysans utilisent depuis des siècles des peaux de banane pour leurs plants de caféier. Bien sûr, il n'y a pas de bananeraies partout. On a essayé dans le projet forestier de Sao Hill des pots arrondis d'argile ou de terre: ils coûtent à peine plus du tiers du prix d'un sachet en polyéthylène, et le taux de reprise est acceptable.

Plantations d'arbres

Le domaine forestier couvre 43 pour cent des terres, les pâturages grossiers 50 pour cent, les petites exploitations 4 pour cent, les grandes plantations 1 pour cent, et les villes, rochers et marécages 2 pour cent. La plupart des plantations d'arbres sont faites sur des terres agricoles (petites exploitations et grandes plantations) ou pastorales. Dans les pâturages grossiers, les troupeaux se déplacent librement. Ainsi, les déplacements saisonniers des bergers masaïs en quête de pâturage peuvent atteindre jusqu'à 20 km (Maris, 1981). Quatre-vingt-cinq pour cent des personnes interrogées par l'auteur en 1971-1972 dans les 257 villages du district de Dodoma ont déclaré qu'elles n'avaient pas assez de terrains de parcours. Lorsque l'enquête a été mise à jour en 1979-1980, ce pourcentage était monté à 94 pour cent. Le libre déplacement des troupeaux fait qu'il est difficile de protéger les arbres et les plantations, d'autant plus que les troupeaux dépassent souvent la capacité de charge des terres.

Dans la petite agriculture, la situation n'est pas bien meilleure. C'est elle qui regroupe l'essentiel de la population et du cheptel, et les problèmes sont aggravés, dans certaines parties de la Tanzanie, par les régimes fonciers traditionnels. Ainsi, dans la région du Kilimanjaro, le système d'héritage Kihamba entraîne un morcellement des terres répété à chaque génération. Ce morcellement est tel que certains villageois sont maintenant obligés d'émigrer vers d'autres régions. L'Etat a même dû donner une assistance à ces migrants. Dans ces circonstances, on ne plante guère d'arbres, ou bien on les relègue sur les terrains rocheux stériles et marécageux.

Enfin, dans de nombreuses régions très peuplées, une bonne partie des terres proches des villages sont occupées par des réserves forestières, des parcs de faune et des parcs nationaux; elles sont donc inaccessibles aux communautés locales.

Lorsque la terre manque, il faut encourager les villageois à planter des arbres hors forêt. Ils ne doivent pas nécessairement leur réserver des terrains spéciaux; il est tout à fait rationnel de planter près des bâtiments et en bordure des exploitations. En revanche, ce n'est pas à eux de planter des arbres en bord de route, hors des villages, comme le préconisent de nombreux forestiers. Qui serait alors responsable d'entretenir ces plantations? Cette tâche revient logiquement aux administrations locales ou à des organisations non gouvernementales. Le préjugé selon lequel il faut couper les arbres en place afin de libérer du terrain pour les plantations doit être abandonné. Dans bien des cas, les formations naturelles des villages n'ont besoin que d'être enrichies par des plantations - si possible d'essences indigènes - dans les trouées. C'est ce qui a été fait dans les forêts de Mbulu, de Mpwapwa, d'Iringa et de Mbeya. Cela donne de bons résultats.

Une des principales raisons de l'échec des plantations chez les Masaïs est qu'on leur impose souvent des essences ne produisant que du bois de feu, comme l'eucalyptus.

Plantations

Dans le système actuel, la Division des forêts produit des plants, les distribue aux villageois et continue à fournir des services jusqu'à l'exploitation des arbres. C'est à tort que Douglas et al. (1982) affirment que «la foresterie sociale (en l'occurrence la plantation d'arbres) se limite, en Tanzanie, à la distribution de plants».

Cependant, le succès n'est pas aussi éclatant en Tanzanie qu'il ne l'a été en Inde, en République de Corée et en Chine. Un des principaux problèmes que pose la plantation d'arbres, et en particulier les plantations de village, est que les travaux doivent se faire au même moment que les semailles ou l'entretien des cultures agricoles. Comment concilier les deux activités?

Le coût des transports et le manque de véhicules constituent un des principaux obstacles à la plantation d'arbres.

En cas de conflit, ce sont évidemment les cultures agricoles qui l'emportent. Dans beaucoup de régions semi-arides (districts de Dodoma, Maswa, Ngugu, Magu, etc.), les pluies sont si imprévisibles et irrégulières que le résultat de toute la campagne agricole risque de s'en ressentir si l'on ne profite pas de la bonne journée pour semer. Comme on ne peut pas vivre sans manger, les villageois sèment les plantes vivrières avant de planter des arbres. Selon les paysans interrogés par Scutsch (1982), la main-d'oeuvre ne manque pas pour la plantation et l'entretien des arbres. Mais on verra ci-dessous que la pénurie de main-d'oeuvre au moment voulu est une cause d'échec des plantations dans de nombreux villages.

Dans certains cas, des objectifs de plantation irréalistes sont proposés. Par exemple, le projet de reboisement de la Banque mondiale à Tabora, destiné à produire du bois de feu pour le séchage du tabac, a eu un résultat mitigé qui s'explique en partie par des objectifs trop ambitieux. Chaque village devait planter 25 ha par an, en plus du travail de production et de traitement du tabac (qui demande beaucoup de temps). Or l'expérience indique qu'un village ne peut pas planter plus de 2 à 5 ha par an.

Participation populaire

La participation populaire est une expression magique que l'on retrouve dans tous les projets et programmes de développement rural. C'est devenu un tel lieu commun que beaucoup d'auteurs ne se donnent plus la peine d'expliquer qui participe, à quel niveau, ni à quoi. Les bureaucrates emploient le terme «participation» par démagogie, ou pour obtenir plus vite l'approbation des pouvoirs politiques ou des donateurs. La participation se limite souvent à organiser des réunions avec les villageois et à créer des comités qui ne siègent jamais. Ce sont ces comités et réunions fantômes qui avalisent les décisions bureaucratiques prises en amont.

Cette attitude n'est toutefois pas très répandue dans le secteur rural en Tanzanie. Le programme de reboisement décentralisé a été lancé officiellement en 1967-1968. Il relève principalement des villages, encore que des organisations privées et des particuliers y participent aussi activement. L'Etat et les administrations locales produisent des plants d'arbres fruitiers et forestiers et distribuent des semences. Ils assurent aussi des services de vulgarisation, et notamment la fourniture de crédits de la Banque de développement rural de Tanzanie et d'autres organismes. Les collectivités locales participent à la préparation du terrain, à la plantation et à l'entretien des arbres. Une fois ces derniers arrivés à l'âge d'exploitabilité, les villageois les coupent. Ils se partagent le bois de feu ou le vendent; dans ce dernier cas, le produit de la vente est souvent déposé dans un fonds destiné à d'autres activités collectives.

Les administrations locales, en particulier les conseils de district, jouent aussi un rôle décisif dans les plantations destinées à produire de l'énergie ou à protéger l'environnement. Elles ne se contentent pas de distribuer les plants aux villageois, mais possèdent elles-mêmes des plantations. Ces derniers temps, des organismes non gouvernementaux, notamment des organismes confessionnels, ont distribué des plants, établi des plantations de bois de feu et montré aux paysans comment entretenir les arbres. Les écoles primaires sont particulièrement efficaces. Enfin, certains donateurs étrangers participent aussi à l'action. L'Office central suédois pour l'aide au développement international (SIDA), l'Agence pour le développement international (AID) et le Comité d'Oxford de secours contre la famine (Oxfam) méritent particulièrement d'être cités à cet égard.

L'avantage de la participation des organisations locales, et en particulier des villages, est évident. Non seulement la participation permet de sensibiliser les populations aux problèmes d'énergie et d'environnement, mais elle les incite aussi à s'aider elles-mêmes. Cela permet d'économiser de la main-d'œuvre et de l'argent, qui peuvent être investis dans d'autres secteurs (voir tableau).

Toutefois, la participation locale a ses limites. Tout d'abord, en l'absence d'autorité solide au niveau du village, les retards sont inévitables. Qui prendra la décision de planter les arbres et, une fois ceux-ci plantés, qui les entretiendra?

Deuxièmement, dans l'organisation villageoise, de même que dans certaines familles, les femmes ne participent guère aux décisions, pas plus qu'aux réunions générales. Sur les 257 villages étudiés dans le district de Dodoma en 1971-1972, les femmes ont assisté aux réunions dans environ 89 pour cent des cas, mais 7 pour cent seulement d'entre elles ont participé aux discussions. Les femmes sont souvent si écrasées de travail qu'elles n'ont pas le temps de se reposer et bien moins encore de planter des arbres.

Troisièmement, l'organisation féminine nationale, «Umoja wa Wanawake Tanzanie» (UWT), s'emploie activement à mobiliser les femmes locales pour divers projets, mais ne s'occupe guère de plantation de bois de feu, ni d'arbres en général.

Nourriture, bois de feu et revenus constituent la grande préoccupation des années 80.

Quatrièmement, dans les structures villageoises, personne ne semble responsable d'organiser les plantations d'arbres. Peut-être n'est-il pas possible de créer un comité à cet effet, mais on devrait au moins envisager un sous-comité.

Enfin, il faudrait renforcer les liaisons et la coordination entre villages. Si un village a une pépinière, les villages voisins doivent pouvoir obtenir des plants à des conditions qui devront être définies d'un commun accord.

Au-delà de la Tanzanie

Comme dans de nombreux autres pays en développement, les ressources forestières diminuent de façon inquiétante en Tanzanie, et il y a de graves pénuries de bois de feu. Le problème est très généralement reconnu. Au Malawi, on signale que de nombreux paysans plantent maintenant des arbres. Il en va de même au Soudan et dans d'autres pays du Sahel, en Inde (Gujarat), en Indonésie, en Thaïlande, en République de Corée, en Chine et au Pérou. pour ne citer que quelques exemples. Un phénomène constant dans tous ces pays est la participation des paysans. En fait, dans la plupart des pays, ce sont principalement eux qui prennent les décisions.

PLANTS D'EUCALYPTUS PRÊTS A ÊTRE MIS EN TERRE les essences Indigènes sont-elles préférables?

En outre, l'expérience de ces pays prouve que la plantation d'arbres n'est pas un problème proprement technique mais plutôt socio-économique. Nourriture, bois de feu et revenus constituent la grande préoccupation des années 80. C'est donc dans une optique plus vaste qu'il faut résoudre la crise du bois de feu. Un principe directeur doit être de mettre la foresterie au service des besoins alimentaires et agricoles.

La mission FAO/SIDA sur la foresterie au service des communautés locales, qui s'est rendue dans plusieurs régions de Tanzanie en 1982, a signalé que, aussi bien au niveau politique qu'au niveau technique, les pouvoirs publics ont authentiquement reconnu les besoins des populations. Une attitude analogue a été observée au Mali, au Niger, au Sénégal, en République de Corée et en Chine.

Une différence fondamentale entre la Tanzanie et les autres pays est qu'en Tanzanie, une fois les semences distribuées aux paysans, les pouvoirs publics n'interviennent plus guère. Cela ne veut pas dire qu'ils n'assurent pas des services de vulgarisation; simplement, ils ne plantent pas les arbres à la place des paysans pour appeler ensuite le résultat «plantation de village».

L'organisation ujamaa est particulièrement favorable à la participation populaire. Elle permet d'aborder sur deux fronts le problème de la pénurie de bois en encourageant les plantations à la fois au niveau de la famille et au niveau du village.

Recommandations

Qu'est-ce que les paysans attendent de nous, les forestiers? Nous devons respecter leurs préoccupations familiales, et les politiques officielles doivent s'en inspirer. Notre rôle doit consister principalement à chercher les occasions de les aider plutôt qu'à exiger une garantie que les plantations seront toujours réussies. Le véritable défi que doivent relever les forestiers est d'aider les paysans jusqu'à ce qu'ils réussissent à faire tout par eux-mêmes. voici quelques principes utiles pour y parvenir:

· Il faut s'efforcer de décentraliser les pépinières, qui doivent toutefois continuer à bénéficier de conseils de l'administration, des organisations non gouvernementales et des planteurs «modèles» tels que ceux. du district de Mbulu.

· Partout où cela est possible, il faudrait inciter les villages à vendre les plants qu'ils ont en trop à leurs voisins. Il s'agit principalement de plants d'arbres fruitiers car, pour les autres essences, les plants sont toujours distribués gratuitement.

· Il faudrait continuer à s'efforcer de concentrer les plantations d'arbres au lieu de disperser l'action.

· Jusqu'à présent, on n'a pas tiré parti pour les plantations des crédits fournis par diverses institutions tel les que la Banque de développe ment rural de la Tanzanie. Ces crédits pourraient atténuer la concurrence entre la foresterie et l'agriculture pour la main-d'œuvre.

· Le Village Act de 1978 de la Tanzanie autorise les villageois à conserver la redevance pour les produits forestiers si l'exploitation se fait dans le cadre du village. Mais cette redevance n'est généralement pas réinvestie dans la foresterie. Ce réinvestissement devrait être obligatoire.

· Actuellement, les vulgarisateurs de base ne sont pas motivés et n'ont aucune incitation. Il serait utile d'étudier les moyens pratiques de remédier à cet état de choses. En attendant, on devrait leur fournir du crédit pour acheter des bicyclettes et des motocyclettes, car leur travail souffre beaucoup du manque de transports.

· Pour mieux servir les villageois, le Service des forêts devrait être décentralisé, et les responsabilités au niveau de la division et du cercle devraient être accrues.

· La formation ne progresse pas au même rythme que les besoins de vulgarisation des paysans. Entre 1971-1972 et 1982-1983, à peine plus de 1600 agents de vulgarisation des divers niveaux ont été formés. Il faut d'urgence renforcer la formation et l'éducation.

· Enfin, Nkonoli (1981) suggère de créer des comités permanents de l'énergie rurale pour établir des plans et donner des directives au niveau des villages, des cercles, des divisions et des régions. En général, ces comités font preuve de beaucoup d'enthousiasme au départ et perdent ensuite une bonne partie de leur dynamisme. Comme tous les membres ne comprennent pas toutes les complexités de l'énergie rurale, les comités risquent de s'enliser dans des discussions oiseuses au lieu d'être de véritables groupes de travail permettant de résoudre les problèmes concrets. Il convient d'attribuer les responsabilités de la façon la plus spécifique possible.

Il est toujours plus facile de suggérer des solutions que de les appliquer, mais pour commencer, il est important de bien comprendre ce qui est possible et ce qui ne l'est pas. La République-Unie de Tanzanie a maintenant franchi ce premier pas.

Bibliographie

DOUGLAS, BARNES F. 1982 et al. Social forestry in developing nations. Resources for the Future discussion paper D.73 F. Washington, D.C.

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FAO. 1982 Support to village afforestation in Tanzania, par David Brokensha. Survey of Wood Fuels Supply Needs. Rapport final de consultant. Rome.

MORIS, JON R. 1981 A system perspective. Dans Managing induced rural development, p. 57-58. International Development Institute, Indiana.

NKONOKI, SIMON R. 1981 The pour man's energy crisis. Dans A report of the Tanzania Rural Energy Consumption Survey.

OFFICE CENTRAL SUÉDOIS POUR L'AIDE AU DÉVELOPPEMENT (avec Ethiopian Forestry et Wildlife Conservation Development Authority). 1983 International Seminar on Community Development report, p. 1. Stockholm.

SCUTSCH, MARGARET. 1982 Why people don't plant trees. Etude de cas sur la foresterie sociale en Tanzanie (projet de rapport), p. 110. Resources for the Future. Washington, D.C.

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