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UN PROGRAMME D'AMELIORATION POUR LES FEUILLUS DU SUD DES ETATS-UNIS 1

par
R.C. Purnell et R.C. Kellison 2

PROGRES RECENTS

Le rythme de plantation de feuillus dans le Sud des Etats-Unis est en accroissement notable; il est actuellement de 4 000 hectares par an. Les exigences stationnelles étroites des feuillus nécessitent l'emploi de 4 ou 5 essences, et il importe d'utiliser le meilleur matériel génétique disponible.

Le programme coopératif de recherche sur les feuillus entre l'Université d'Etat de Caroline du Nord et l'industrie a débuté en 1963, et depuis lors il a connu divers changements. Au départ on sélectionnait des arbres supérieurs en utilisant un indice qui combinait l'évaluation d'un certain nombre de caractères en une notation unique pour chaque arbre. Les caractères considérés étaient les suivants: volume, résistance aux parasites, forme de la cime, dominance de la pousse apicale, rectitude du fût, élagage naturel, absence de branches adventives, angle d'insertion des branches. Ce système était utilisé de préférence à la comparaison des arbres candidats pour la sélection avec des arbres voisins “témoins”, parce que la plupart des feuillus méridionaux poussent en peuplements mélangés inéquiennes, où les systèmes de sélection comparative ne sont pas appropriés.

Au total 709 arbres représentant 27 essences ont été sélectionnés en utilisant le système d'indices. De nombreux arbres sélectionnés ont été préservés dans des banques de clones, tandis que des individus supérieurs de liquidambar (Liquidambar styraciflua L.), platane (Platanus occidentalis L.), tulipier de Virginie (Liriodendron tulipifera L.) et frêne rouge (Fraxinus pennsylvanica Marsh.) ont servi à établir des vergers à graines clonaux (Tableau 1). Les descendances de ces arbres sélectionnés ont été incluses dans des tests génétiques en pollinisation libre.

La sélection d'arbres phénotypiquement supérieurs de feuillus méridionaux qui soient en même temps génotypiquement supérieurs est difficile, même en utilisant le système d'indices, parce que les peuplements feuillus naturels se composent de nombreuses essences, et sont issus aussi bien de semis que de rejets de taillis. Des arbres issus de rejets sont souvent sélectionnés par mégarde plutôt que des arbres issus de semis, parce qu'ils ont des caractéristiques supérieures de fût et de cime qui sont propres aux sujets propagés végétativement (Sweet et Wells, 1974). La difficulté de la sélection phénotypique dans les peuplements feuillus provient également du fait que de nombreux peuplements ont subi une sélection dysgénique par suite d'abattages partiels répétés.

Tableau 1. VERGERS A GRAINES ETABLIS IS PAR DES PARTICIPANTS AU PROGRAMME DE RECHERCHE SUR LES FEUILLUS MERIDIONAUX

EssenceVergers établisSurface
(ha)
Clones greffés
Platane (Platanus occidentalis)7  5,7130
Liquidambar (Liquidambar styraciflua)513,0  70
Tulipier de Virginie (Liriodendron tulipifera)1  2,4  22
Frêne rouge (Fraxinus pennsylvanica)1  1,6  17
Chêne noir et chêne à feuilles de saule Quercus nigra et Q. phellos)2 2,4a

a Vergers à graines de familles

La Coopérative de recherche sur les feuillus tourne ces difficultés et ces limitations en sélectionnant des arbres qui ont une valeur phénotypique supérieure à la moyenne pour la station mais ne répondent pas nécessairement à la norme exigée pour la sélection par indices. La valeur génotypique de ces arbres est alors déterminée par des tests de descendance en pollinisation libre (arbres mères). Les informations tirées de ces tests serviront à identifier les meilleurs arbres pouvant fournir des greffons pour les vergers à graines clonaux. En utilisant ce système de sélection extensive, on a sélectionné 513 arbres supplémentaires de 4 feuillus d'importance commerciale, qui sont testés dans des tests de descendance en pollinisation libre (Tableau 2).

Tableau 2. NOMBRE DE PHENOTYPES SUPERIEURS A LA MOYENNE TESTES DANS DES TESTS GENETIQUES EN POLLINISATION LIBRE

EssenceNb. d'arbres testés
Platane (Platanus occidentalis)231
Liquidambar (Liquidambar styraciflua)213
Chêne noir et chêne à feuilles de saule (Quercus nigra et et Q. phellos)
  31
Noyer noir (Juglans nigra)      38    
 513

1 Version abrégée d'un document présenté à la 17ème Conférence sur l'amélioration des essences forestières méridionales, Université de Géorgie, Athens, 6–9 juin 1983.

2 Respectivement assistant de recherche et directeur, Hardwood Research Cooperative, School of Forest Resources, North Carolina State University, Raleigh, N.C., USA.

Note de l'éditeur - Bien que se limitant à des essences du Sud-Est des Etats-Unis, cet article expose des principes et une méthodologie qui pourraient s'appliquer aux essences feuillues tropicales, pour lesquelles on rencontre les mêmes problèmes et contraintes.

L'AVENIR

Il faudra regrouper les arbres sélectionnés et testés dans les programmes de sélection intensive et extensive en un programme cohérent d'amélioration génétique. En dépit du grand nombre d'essences représentées par les arbres sélectionnés, seuls le platane, le liquidambar, le frêne rouge, le chêne noir et le chêne à feuilles de saule ont une importance commerciale suffisante dans tout le Sud des Etats-Unis pour justifier un programme régional. Etant donné que les surfaces plantées annuellement de chaque essence sont limitées, le mieux est d'opter pour un programme d'amélioration en pollinisation libre. Celui-ci permet d'obtenir un gain génétique à un coût qui est généralement inférieur à celui d'un programme en pollinisation dirigée, notamment pour des essences dont on connaît mal la biologie florale. Toutefois, il se peut qu'un accroissement du degré de parenté, accompagné de dépression de consanguinité, amène plus tard à recourir davantage à la pollinisation dirigée.

Pour un maximum d'efficacité et de gain génétique, un programme d'amélioration des arbres comporte deux phases distinctes - une phase de sélection génétique et une phase de production. La phase de sélection génétique permet une amélioration continue d'une génération à l'autre, et la phase de production permet de produire massivement du matériel amélioré sous forme de semences ou de multiplication végétative. Les individus utilisés dans la phase de production sont un sous-ensemble des meilleurs individus dans la population de sélection génétique.

Phase de sélection génétique

Afin de maintenir la diversité et l'intégrité génétiques des sources géographiques de semences, on a divisé le Sud-Est des Etats-Unis en régions génétiques pour chaque essence d'importance commerciale. Ce sont des zones qui ont des arbres génétiquement identiques et des conditions physiques et écologiques semblables. Par exemple, l'aire du liquidambar à l'est du Mississipi, territoire sur lequel travaille la Coopérative de recherche sur les feuillus, a été divisée en sept régions génétiques (Figure 1). Les arbres sélectionnés ne seront utilisés que dans leur région d'origine, jusqu'à ce que des tests aient montré qu'ils conviennent ailleurs.

Figure 1

Figure 1. Régions génétiques proposées pour le liquidambar

Les organisations coopérantes dans chaque région génétique continueront de sélectionner et évaluer des arbres de peuplements naturels et de plantations non améliorées, en utilisant les méthodes de sélection extensive jusqu'à ce que chaque région génétique ait sélectionné au moins 500 arbres supérieurs à la moyenne par essence. Les tests de descendance en pollinisation libre effectués sur ces arbres serviront à sélectionner les arbres supérieurs qui constitueront la population de sélection, en se basant sur les informations recueillies sur les familles et les arbres individuels. Les deux meilleurs arbres de chacune des familles constituant les meilleurs 50 pour cent de l'ensemble des familles seront les parents de la population de sélection de deuxième génération. Trois lots commerciaux témoins communs à chaque région seront inclus dans tous les tests de descendance de cette région.

Chaque test de descendance comprendra 50 familles, et sera mis en place dans deux localités. Dans chaque localité on aura dix répétitions, avec six arbres par famille et par répétition. Les six arbrs de chaque famille dans une répétition seront divisés en trois groupes de deux, et ces trois groupes seront dispersés à travers la répétition de telle sorte qu'un ensemble différent de familles entoure chaque groupe (Figure 2). Ces groupes permettront une éclaircie à 50 % dans les tests sans perdre aucune famille, et amélioreront également la pollinisation croisée entre familles. Les dispositifs de tests seront établis sur ordinateur à l'Université de Caroline du Nord. Le cycle se répétera aux générations suivantes, les individus sélectionnés pour la population de sélection étant à chaque fois choisis dans la précédente en fonction des informations recueillies sur les familles et les arbres individuels (Figure 3). Les vergers à graines clonaux, d'autre part, seront purgés en fonction des résultats des tests de descendance.

Figure 2
Dispositif expérimental
(ième répétition)
Figure 2
Répartition des 6 arbres d'une famille en placettes non contiguës dans les tests de descendance de 2ème génération

Des dispositions ont été prises pour poursuivre la sélection d'arbres supérieurs dans les plantations non améliorées, afin d'accroître l'ensemble génétique de la population de sélection pour les futures générations.

Phase de production

La phase de production du programme d'amélioration comporte la production massive de matériel amélioré, en utilisant le meilleur sous-ensemble d'arbres de la population de sélection. Ce matériel pourra consister soit en graines produites par les vergers à graines, soit en matériel de multiplication végétative. Cett dernière offre d'immenses possibilités pour les feuillus méridionaux, toutefois il faudra davantage de recherches avant qu'elle ne puisse être employée pour la production massive de matériel de reproduction.

Les vergers à graines clonaux sont préférés aux vergers à graines de familles, parce que le dispositif des tests de descendance de première génération ne se prête pas à une conversion en verger à graines. Les tests de deuxième génération s'y prêtent mieux, parce que les individus d'une famille sont disposés en parcelles non contiguës et non en parcelles linéaires. Toutefois, les gains à attendre de ces vergers à graines de familles de deuxième génération n'excéderaient pas ceux des vergers clonaux, parce que ces derniers peuvent utiliser les meilleurs individus de chaque test de descendance dans la région génétique (500 familles), tandis que le verger à graines de familles serait limité à un seul test (50 familles). Pour le verger à graines de deuxième génération, le mieux est d'utiliser les tout meilleurs individus parmi tous les tests de descendance de la région.

Figure 3

PLAN D'AMELIORATION GENETIQUE DES ARBRES
(N. C. STATE HARDWOOD RESEARCH COOPERATIVE)

Figure 3

On pourra sans doute obtenir une plus grande amélioration dans les vergers à graines de générations suivantes en y introduisant des arbres sélectionnés dans des populations de sélection d'autres régions génétiques. La possibilité de transférer des sources de semences d'une région à l'autre sera étudiée lorsque les populations de sélection seront constituées. Les descendances de cinq arbres supérieurs de chaque test d'une région seront utilisées pour établir des tests dans chacune des autres régions génétiques. Le dispositif de cet essai sera identique à celui de l'étude des arbres mères, comprenant six répétitions de parcelles linéaires de dix arbres.

Le dispositif des vergers à graines clonaux sera identique à celui des vergers à graines de feuillus existants, la taille du verger dépendant du rendement en semences de chaque essence. Les essences dioïques telles que le frêne rouge posent des problèmes particuliers pour la constitution de vergers à graines de production. En général on a à chaque emplacement d'un verger un arbre qui est à la fois mâle et femelle, tandis qu'avec le frêne il faut disposer pieds mâles et femelles de façon à avoir une pollinisation optimale.

Pour la première génération on a adopté un système de pollinisation libre pour croiser entre eux les arbres sélectionnés, mais aux générations suivantes la pollinisation dirigée pourra être nécessaire pour éviter une dépression de consanguinité et une diminution des gains fournis par les vergers à graines. Le recours à la pollinisation dirigée est particulièrement indiqué pour un programme de reboisement faisant appel à la multiplication végétative.

REFERENCES

Sweet, G.B. & L. Wells. 1974 Comparison of the growth of vegetative propagules and seedlings of Pinus radiata. New Zealand Jour. For. Sci. 4(2):399–409.


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