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CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS DE LA HUITIEME SESSION DU GROUPE FAO D'EXPERTS DES RESSOURCES GENETIQUES FORESTIERES

La Huitième session du Groupe FAO d'experts des ressources génétiques forestières s'est tenue à Rome du 28 au 30 juin 1993. Le Groupe d'experts a passé en revue le travail accompli par la FAO dans le domaine des ressources génétiques forestières depuis la session précédente (décembre 1989, voir IRGF no18), et a présenté des recommandations pour les actions futures. On trouvera aux pages 55–56 d'IRGF no21 un bref résumé de cette réunion, dont les conclusions et recommandations sont présentées in extenso ci-dessous. Le rapport de cette Huitième session est disponible en anglais, français et espagnol auprès de la Division des ressources forestières, FAO, Viale delle Terme di Caracalla, 00100 Rome (Italie).

CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS

1. Le Groupe d'experts a noté les préoccupations croissantes au plan international parmi les dirigeants, les scientifiques, les techniciens et le grand public au sujet de la conservation du patrimoine naturel et de la nécessité de sauvegarder la diversité biologique sur le globe. Ces préoccupations ont connu leur plus forte expression dans les délibérations de la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement (CNUED) qui s'est tenue en juin 1992 à Rio de Janeiro (Brésil), et au cours de laquelle la conservation de la diversité biologique a focalisé l'attention. La Conférence a fortement souligné la complémentarité de la conservation et du développement et la nécessité de gérer avec prudence les ressources naturelles renouvelables afin qu'elles contribuent au maximum au développement aujourd'hui, tout en assurant leur pérennité en vue de leur utilisation et de leur mise en valeur par les générations futures. Les gouvernements qui ont participé à la Conférence se sont mis d'accord sur des mécanismes d'action et de suivi, en particulier plusieurs conventions mondiales (notamment la Convention sur la diversité biologique) et “l'Agenda 21”, qui constitueront jusqu'à l'an 2000 et au delà la plate-forme opérationnelle de la communauté internationale dans tous les grands domaines se rapportant à l'environnement et au développement durable.

2. Le Groupe d'experts a souligné que le recentrage des priorités depuis quelques années au niveau national, régional et international entraîne un besoin fortement accru dans le monde d'information, de conseil technique et d'action sur le terrain dans le domaine des ressources génétiques forestières. Les besoins d'appui financier et d'assistance technique sont encore amplifiés du fait de l'accent mis par les pays en développement sur le renforcement de leurs capacités locales et le transfert de technologie, et de la nécessité d'aider les pays à mettre rapidement sur pied des stratégies qui assurent un lien étroit entre la conservation et la gestion des ressources génétiques forestières d'une part, et l'aménagement des forêts dans un but de production et de protection d'autre part.

3. Le Groupe d'experts a noté avec satisfaction que la conservation et l'utilisation rationnelle de la diversité biologique et des ressources génétiques pour l'alimentation et l'agriculture bénéficient d'une priorité élevée dans le Programme de travail et le Budget biennal 1994–95 du Directeur Général. Il a noté que la majorité des ressources génétiques de plantes et animaux sauvages et des espèces parentes d'espèces cultivées se trouvaient dans les forêts et autres formations ligneuses et écosystèmes naturels relevant généralement des attributions des services forestiers nationaux. Au sein de la FAO, l'appui à l'aménagement et à la conservation de ces ressources entre essentiellement dans les compétences techniques et les responsabilités du Département des forêts. A cet égard, le Groupe d'experts souhaite que, dans l'affectation des ressources au sein de la FAO et du Département des forêts, l'on tienne dûment compte de l'accroissement continu des responsabilités liées aux tâches multiples, diverses et fondamentalement importantes que l'on regroupe sous la dénomination commune de “ressources génétiques forestières”. Le Groupe d'experts recommande en outre que des efforts soient faits pour appuyer l'impact actuel des activités de la FAO en matière de ressources génétiques forestières grâce à une collaboration continue et renforcée avec d'autres organisation internationales et bilatérales telles que par exemple l'Unesco, la CSIRO (Australie), le Centre de semences forestières de la DANIDA et le CIRAD-Forêt (France), et avec des Centres du GCRAI s'occupant de recherche forestière (CIFOR, ICRAF, CIRPG). Un “jumelage” adéquat entre les activités du programme de terrain et du Programme ordinaire de la FAO pourrait également contribuer à renforcer les programmes de ressources génétiques forestières et leur impact au plan national, régional et mondial.

4. Le Groupe d'experts a noté avec satisfaction la collaboration renforcée entre les départements de la FAO dans les domaines des ressources génétiques végétales et animales et de la diversité biologique, et a souligné que la coordination et la collaboration accrues tant au sein de la FAO qu'entre celle-ci et les autres organisations étaient nécessaires pour éviter les doubles emplois dispendieux et assurer la complémentarité des actions. Il a noté le nombre croissant d'institutions et d'organisations, au plan international, engagées dans des travaux sur les ressources génétiques forestières et domaines connexes, et le grand nombre de nouvelles initiatives dans le monde, qui pourraient entraîner un problème de dispersion de ressources limitées. En raison de son rôle intergouvernemental, de son mandat mondial, de ses compétences intersectorielles et de sa longue expérience dans le domaine des ressources génétiques forestières, le Groupe d'experts considère que la FAO est bien placée pour continuer d'aider à la coordination des actions internationales, et a en conséquence demandé à la FAO de continuer dans son rôle de centre de liaison pour l'harmonisation des programmes et projets internationaux et pour la diffusion d'information et de savoir-faire en matière de ressources génétiques forestières.

5. Le Groupe d'experts a reconnu le respect par le Secrétariat des recommandations faites à sa Septième session, dans les limites des ressources disponibles. Il a demandé à la FAO de maintenir un équilibre équitable dans son attention et son aide à l'égard des zones arides et humides d'une part, et de la conservation des ressources génétiques et activités connexes d'autre part. Il a recommandé que les essences à fins multiples importantes pour les communautés locales continuent d'occuper une place prédominante dans les activités de la FAO en matière de ressources génétiques forestières, sans toutefois négliger les essences à bois d'oeuvre dont la production est importante pour les économies locales dans les tropiques; ces dernières essences sont biologiquement mal connues, elles sont fréquemment surexploitées, et leurs peuplements sont insuffisamment aménagés. Il a été recommandé que l'on se réfère à cet égard aux listes de priorités élaborées par le Groupe d'experts.

6. Le Groupe d'experts a reconnu le rôle important de la conservation in situ des ressources génétiques forestières en tant que stratégie dynamique pouvant être harmonisée avec l'aménagement tant des forêts de production que des forêts de protection, et avec celui des parcs nationaux et autres aires protégées; ces dernières sont souvent divisées en différentes zones, et les effets de diverses intensités d'intervention pourraient faire l'objet d'une observation suivie dans ces zones. A cet égard, le Groupe d'experts a recommandé que l'Etude FAO: Forêts no 107, qui définit les principes et concepts de la conservation des ressources génétiques dans l'aménagement des forêts tropicales, soit complétée par un ou des guides sur les méthodologies et techniques. Une attention suffisante devrait être portée dans ces guides pratiques aux potentialités des “réserves de cueillette” et à la récolte de produits forestiers ligneux et non ligneux conduite en harmonie avec les principes génétiques, et à des méthodes d'observation à court, moyen et long terme des effets des interventions de gestion forestière sur les ressources génétiques des espèces exploitées. Il faudrait étudier les possibilités de collaboration dans cette tâche avec les Centres du GCRAI s'occupant de forêts. Le Groupe d'experts a en outre recommandé que la documentation sur les méthodes et techniques soit complétée par des études pilotes de conservation in situ, menées en collaboration avec des instituts nationaux de la zone tropicale tant humide que sèche.

7. Le Groupe d'experts a reconnu que, pour réussir, la conservation in situ doit s'appuyer sur des plans d'aménagement des terres rationnels et sur une mise en oeuvre de ces plans qui s'harmonise avec les besoins nationaux et locaux. Le Groupe d'experts a demandé à la FAO d'accorder toute son attention à des questions scientifiques en rapport qui demandent à être clarifiées, telles que: les effets du déboisement et de la dégradation des forêts sur les ressources génétiques forestières et la diversité biologique, les effets génétiques de la fragmentation des massifs forestiers, l'aménagement des mosaïques de végétation, les effets génétiques des actions de conservation portant sur les écosystèmes.

8. Le Groupe d'experts a noté que les stratégies de conservation in situ et ex situ sont complémentaires, et que la conservation est elle-même partie intégrante de stratégies d'amélioration génétique rationnelles. Il a reconnu la validité des actions en cours en Europe à la suite de la Conférence ministérielle de Strasbourg sur la protection des forêts en Europe (décembre 1990), comportant la mise sur pied de réseaux régionaux par essences dans lesquels on prête dûment attention à la conservation tant in situ qu'ex situ, et où les actions de conservation sont elles-mêmes étroitement liées à l'amélioration et à l'utilisation durable des ressources génétiques d'essences choisies ainsi qu'à l'aménagement forestier en général. Il a demandé à la FAO, en collaboration avec le CIRPG, de suivre de près, documenter et diffuser des informations sur des expériences susceptibles de s'appliquer à d'autres régions et d'autres essences forestières.

9. Le Groupe d'experts a noté que sa recommandation précédente relative à une inspection des peuplements de conservation ex situ mis en place en collaboration avec la FAO et d'autres organismes internationaux tels que le Centre de semences forestières de la DANIDA (DFSC) dans les années soixante-dix et quatre-vingts était toujours en suspens, faute de ressources. Une telle enquête serait très nécessaire pour compléter les documents récents de la FAO sur la conservation in situ (comprenant entre autres l'Etude FAO: Forêts no 107), et l'étude sur la conservation ex situ sous forme de graines et de pollen et de cultures in vitro, publiée par la FAO en 1993 en réponse à une recommandation de la Septième session du Groupe d'experts (Etude FAO: Forêts no113). Le Groupe d'experts a recommandé que la FAO et le DFSC, en collaboration étroite avec les pays concernés, unissent leurs moyens pour examiner et documenter les expériences de peuplements de conservation ex situ existants.

10. Le Groupe d'experts a examiné la coopération passée et en cours entre la FAO et des institutions nationales dans l'exploration, la récolte et l'échange de lots de semences de provenances dans un but de recherche et de conservation. Il a reconnu l'intérêt de ce travail, qui met à la disposition des pays intéressés des matériels de reproduction dans des conditions mutuellement consenties, et il en a souligné les avantages pour la promotion d'une collaboration entre instituts de pays en développement et le renforcement des capacités locales et de l'intérêt aux travaux sur les ressources génétiques forestières. Il a recommandé qu'une telle collaboration soit poursuivie dans l'avenir, et que les actions soient centrées sur les essences prioritaires désignées par le Groupe d'experts.

11. Le Groupe d'experts a recommandé que la FAO continue de diffuser l'information sur la documentation et la certification des semences forestières, et qu'elle aide les instituts des pays en développement à élaborer et appliquer des systèmes nationaux de certification des semences. L'emploi comme “modèles” de systèmes internationaux mondialement reconnus (tels que le Système OCDE pour les matériels de reproduction forestiers faisant l'objet d'un commerce international) devrait être encouragé, en vue de faciliter l'harmonisation ultérieure des systèmes de certification entre pays intéressés par une même essence.

12. Le Groupe d'experts a noté la préoccupation internationale croissante concernant l'échange et l'accessibilité de ressources phytogénétiques (notamment ressources génétiques forestières). Il a recommandé que des efforts soient faits pour faciliter la poursuite d'échanges de lots de semences d'espèces et de provenances d'essences forestières à des fins de recherche entre pays ayant des conditions écologiques et des besoins socio-économiques comparables, qui se sont avérés d'un grand profit mutuel au cours des décennies écoulées. Il a en outre recommandé que le Code international de conduite pour la récolte et le transfert de matériel génétique végétal, approuvé en avril 1993 par la Commission FAO sur les ressources phytogénétiques, serve à guider les accords passés entre pays à cet égard, dans l'esprit de l'Engagement international sur les ressources phytogénétiques et de la Convention sur la diversité biologique.

13. Le Groupe d'experts a pris note des récents progrès de la biotechnologie applicables à la forêt. Il a souligné que la biotechnologie fournit des outils pour l'amélioration génétique classique, et non un substitut, et il a recommandé que la FAO continue de suivre et diffuser l'information sur les technologies classiques éprouvées et sur les nouvelles, et les possibilités qu'elles offrent. A cet égard, le Groupe d'experts a souligné le rôle que la FAO peut jouer en aidant à combler l'écart croissant entre chercheurs scientifiques et généticiens forestiers de terrain, en cherchant à assurer un choix judicieux des priorités de la recherche ainsi qu'une application opportune des résultats de la recherche dans la pratique. Il a en outre été demandé à la FAO d'aider à renforcer la collaboration interinstitutionnelle en matière de recherche sur les ressources génétiques forestières et disciplines connexes, en apportant son appui aux accords de jumelage et de réseaux, et en encourageant la coopération technique entre pays en développement (CTPD).

14. Le Groupe d'experts a félicité le Secrétariat pour son action efficace en matière de diffusion de l'information sur tous les aspects de la conservation génétique. Outre la poursuite de la production de documents techniques sur des sujets précis, le Groupe d'experts a recommandé que la FAO rédige des “versions populaires” de documents publiés sur des sujets d'actualité, à l'usage des vulgarisateurs, des ONG et du grand public, ou encourage l'emploi de documents techniques de la FAO comme base pour la rédaction de textes localement adaptés.

15. Le Groupe d'experts a loué la FAO pour la qualité et l'utilité du bulletin d'information annuel “Informations sur les ressources génétiques forestières”, qui est considéré comme un véhicule unique et précieux pour la diffusion d'information à jour sur les activités et priorités concernant les ressources génétiques forestières au plan mondial, sur la disponibilité de matériels de reproduction d'essences forestières, et sur les résultats préliminaires des recherches. Le bulletin facilite en outre les contacts entre chercheurs, et fournit des éléments utiles pour la formation. Le Groupe d'experts a vivement recommandé la poursuite de la publication de ce document.

16. Le Groupe d'experts a souligné le rôle important de la FAO en matière de développement des capacités, renforcement institutionnel et formation tant dans des disciplines fondamentales, telles que la taxonomie végétale, que dans des applications pratiques telles que récolte et traitement des semences. Il a recommandé que la FAO continue d'apporter son appui et d'informer les utilisateurs potentiels des formations internationales, bilatérales et nationales se rapportant aux divers aspects de la conservation et de l'utilisation des ressources génétiques forestières.

17. Le Groupe d'experts a souligné la nécessité de stimuler une approche intégrée de la formation, de la recherche et de la vulgarisation, et de développer des approches novatrices visant à associer les populations locales dans tous les aspects de la conservation et de l'utilisation rationnelle des ressources naturelles. Le Groupe d'experts a également noté que la FAO, grâce à son réseau de contacts, pourrait jouer un rôle important en aidant les organisations et institutions nationales et régionales à localiser des experts dans des domaines spécifiques de compétence nécessaires pour la formation dans le pays dans le cadre de programmes nationaux de conservation et de formation.

18. Le Groupe d'experts a noté que des considérations éthiques sont souvent mises en avant dans les discussions sur la conservation de la diversité biologique et des ressources génétiques, que ce soit au niveau des dirigeants ou à celui du grand public, et que les forestiers manquent souvent de préparation dans ce domaine. Le Groupe d'experts a recommandé qu'une collaboration soit encouragée entre les groupes professionnels concernés par les aspects de production, de protection, de conservation et d'éthique afin de contribuer à l'étabissement de fondements philosophiques appropriés pour l'élaboration de politiques de conservation équilibrées.

19. Le Groupe d'experts a noté que sa prochaine session, la neuvième, est prévue pour 1995. Il a demandé au Secrétariat d'étudier la possibilité de lier cette réunion du Groupe d'experts avec d'autres réunions internationales, qui ne manquent pas sur le calendrier international.

20. Pour conclure, les membres du Groupe d'experts expriment leur satisfaction pour l'occasion qui leur est donnée de se réunir et de discuter de questions techniques et scientifiques se rapportant aux ressources génétiques forestières, et ont convenu d'intensifier encore leurs activités dans le cadre du Groupe, individuellement aussi bien que collectivement. Une attention particulière sera apportée par chaque membre du Groupe au renforcement des contacts avec un certain nombre d'instituts dans son pays et dans d'autres pays de sa région. Les membres du Groupe se sont engagés à fournir régulièrement des informations au Secrétariat FAO et aux autres membres. Le Groupe d'experts pourra ainsi constituer un organe de liaison permanente dans le domaine des ressources génétiques forestières entre le Secrétariat et le terrain, et une source d'information rapide et précise sur les nouvelles politiques gouvernementales et programmes intéressant le travail technique et scientifique au plan tant national qu'international.

Ressources Génétiques Forestières No 22. FAO, Rome (1995)


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