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Chapitre 2 - L'effet de serre


5. Qu'entend-t-on par "effet de serre" et comment influence-t-il le climat de la terre?
6. Quels gaz sont considères comme gaz a effet de serre et quelles sont les sources de ces gaz?
7. Dans quelle mesure les activités humaines contribuent-elles aux GES?
8. Tous les GES ont-ils le même effet de réchauffement?
9. Quels sont les éléments prouvant que les niveaux de GES dans l'atmosphère sont en augmentation?
10. Quels sont les pays qui contribuent actuellement le plus aux niveaux élevés de GES?
11. Comment les aérosols peuvent-ils contrecarrer les effets des GES?

5. Qu'entend-t-on par "effet de serre" et comment influence-t-il le climat de la terre?

L'effet de serre est la rétention de chaleur dans la couche inférieure de l'atmosphère due à l'absorption et à la réémission par les nuages et certains gaz. La Terre reçoit son énergie du soleil sous forme de rayonnement solaire. Le rayonnement solaire (visible) à ondes courtes traverse l'atmosphère sans rencontrer d'obstacles ou presque et réchauffe la surface terrestre. Le rayonnement thermique à ondes longues émis par la surface réchauffée de la Terre est partiellement absorbé par un certain nombre de gaz à l'état de trace ou "à effet de serre" (GES). Ces gaz sont présents en petites quantités dans l'atmosphère et réfléchissent le rayonnement thermique à ondes longues dans toutes les directions. Une partie du rayonnement est dirigée vers la surface de la Terre (Fig 2.1).

La quantité de gaz à effet de serre dans l'atmosphère peut influer sur les températures globales. Si ces gaz devaient augmenter, les températures pourraient s'élever. S'ils devaient diminuer, les températures globales s'abaisseraient.

L'effet de serre est un phénomène bien compris reposant sur des principes scientifiques établis. La température moyenne de la surface de la Terre, par exemple, est supérieure d'environ 33°C à ce qu'elle serait sans la présence de ces gaz. Des observations par satellite du rayonnement émis par la surface terrestre et à travers l'atmosphère confirment l'action des gaz à effet de serre. La composition des atmosphères de Vénus, de la Terre et de Mars est très différente mais leurs températures de surface sont en accord avec les principes de l'effet de serre. Enfin, des mesures de carottes de glace remontant à 160 000 ans montrent que la température de la Terre a varié avec les quantités de dioxyde de carbone et de méthane, deux des principaux gaz à effet de serre présents dans l'atmosphère (Fig. 2.2). Les variations survenant dans les quantités de ces gaz peuvent expliquer, mais en partie seulement, les grandes différences de températures globales (5-7°C) entre les époques glaciaires et les périodes interglaciaires (Houghton, 1991). Selon certaines études récentes, les températures et les gaz à effet de serre sont si étroitement corrélés qu'il est difficile de déterminer quelle est la cause et quel est l'effet.

Figure 2.1 Diagramme simplifié de l'effet de serre (Source: Houghton, 1991).

Figure 2.2 - L'analyse de l'air piégé dans les carottes de glace de l'Antarctique montre que les concentrations de méthane et de dioxyde de carbone étaient en corrélation étroite avec les températures moyennes durant les 160 000 dernières années (Watson et al, 1990).

6. Quels gaz sont considères comme gaz a effet de serre et quelles sont les sources de ces gaz?

Les gaz à effet de serre (GES) présents dans l'atmosphère terrestre comprennent la vapeur d'eau (H2O), le dioxyde de carbone (CO2), le méthane (CH4), l'oxyde nitreux (N2O), les oxydes d'azote (NOx), l'ozone (O3), le monoxyde de carbone

(CO) et les chlorofluorocarbones (CFC). Les concentrations de ces gaz dans l'atmosphère terrestre ont varié au cours des périodes géologiques. Depuis la dernière période glaciaire, les niveaux de ces gaz sont restés relativement constants. A mesure que l'agriculture et l'élevage se développaient, que la population mondiale augmentait et que les sociétés s'industrialisaient, les niveaux de certains de ces gaz augmentaient sensiblement (Houghton, 1991). On trouvera ci-dessous une description des principaux GES et de leurs sources:

VAPEUR D'EAU (H2O) - La vapeur d'eau est le plus répandu des GES et celui qui exerce le plus fort effet de serre. La quantité de vapeur d'eau n'est affectée que dans une faible mesure par les activités humaines comme l'irrigation ou la construction de réservoirs. La quantité de vapeur d'eau augmente quand l'atmosphère se réchauffe. Des quantités accrues de vapeur d'eau pourraient renforcer l'effet de serre.

DIOXYDE DE CARBONE (CO2) - Le dioxyde de carbone est le plus important des GES influencé par l'activité humaine aussi bien en terme de quantité dans l'atmosphère que pour ses effets potentiels sur le réchauffement de la planète. Ce gaz provient de la respiration des animaux et des végétaux, de l'utilisation des combustibles fossiles et de la combustion ou de la décomposition des plantes et des arbres. Les cimenteries sont une autre source importante de CO2 (IPCC, 1992).

Depuis le début de la révolution industrielle, au milieu du XVIIIe siècle, l'utilisation de combustibles fossiles a augmenté. Il faut ajouter à cela la déforestation à grande échelle et le brûlage des déchets. Ces activités et d'autres interventions humaines ont entraîné une augmentation de près de 25% de la concentration de dioxyde de carbone dans l'atmosphère, de 290 ppmv (parties par million en volume) à 355 ppmv à l'époque actuelle. Cette augmentation a surtout eu lieu depuis 1940 (Hair et Sampson, 1992). On a observé dernièrement une diminution du taux de croissance du CO2 dans l'atmosphère (Sarimento, 1993, voir encadré 2.1).

METHANE (CH4) - La principale source de ce gaz est la décomposition anaérobie (décomposition par des microorganismes en absence d'oxygène libre dans l'air). Elle a lieu dans les rizières et les marécages. Le méthane provient également des bovins et autres ruminants, y compris des animaux sauvages, dont la digestion est fondée sur la fermentation entérique. Les termites, très abondants dans les forêts tropicales, sont une autre source de méthane (Zimmerman et al, 1982). D'autres sources comprennent la combustion de la biomasse et la décomposition des remblais et des marécages. Les incendies de forêt dégagent une unité de méthane pour 100 unités de dioxyde de carbone. Le niveau de méthane dans l'atmosphère qui était de 0,8 ppmv en 1850 atteint aujourd'hui 1,7 ppmv. Depuis 1970, pour des raisons inconnues, le taux de croissance du CH4 dans l'atmosphère terrestre a baissé, passant d'environ 20 ppbv/an à 10 ppbv/an (IPCC, 1992).

OXYDE NITREUX (N2O) - Ce gaz est dégagé par la déforestation et le feu qui y est associé, la combustion de la biomasse, l'intensification des processus de nitrification et dénitrification du sol dans des zones humides par intermittence, l'application d'engrais azotés et l'utilisation des combustibles fossiles.

Encadré 2.1 Qu'est-il arrivé aux niveaux de CO2 atmosphérique en 1991?

Selon tes données provenant de l'observatoire de Mauna Loa aux Hawaï, Etats-Unis, une tendance observée depuis 35 ans, à savoir l'augmentation régulière des niveaux de CO2 atmosphérique, s'est interrompue vers le milieu de 1991 alors que les concentrations de CO2 étaient d'environ 355 ppmv. Fin 1993, on a détecté une diminution de 1,5 partie par million (ppmv) du CO2 atmosphérique. Appliqué à l'ensemble de l'hémisphère nord, cela équivaudrait à une perte de 1,6 Gt (1,6 x 109 tonnes) de carbone. Cette réduction du taux d'accumulation de CO2 a commencé peu de temps après l'éruption du Mont Pinatubo, volcan philippin, en 1991 et s'est produite malgré le fait qu'un phénomène ENSO avait eu lieu en 1991-92. Les phénomènes ENSO entraînent normalement une augmentation temporaire du CO2 atmosphérique.

On ignore ta cause de ce phénomène. Selon certains scientifiques, il serait dû à un facteur naturel concernant les océans ou la biosphère terrestre. Il se pourrait que fa retombée de cendres riches en oxydes de fer provenant de l'éruption du Mont Pinatubo ait causé un enrichissement en fer des océans dont l'aptitude à absorber le CO2 s'est temporairement accrue (Sarimento, 1993). Si l'éruption du Pinatubo est la cause principale, ce ralentissement devrait être de courte durée

A l'heure actuelle, on possède relativement peu d'information sur les taux de libération de ce gaz par les sols dans les écosystèmes naturels et perturbés et par la combustion de la biomasse. Le niveau actuel de N2O dans l'atmosphère est d'environ 0,3 ppmv et il augmente de 0,2 à 0,3 % par an.

MONOXYDE DE CARBONE (CO) - Le monoxyde de carbone n'est pas un véritable gaz à effet de serre. Toutefois, il influe sur le pouvoir d'oxydation de l'atmosphère terrestre et contribue de ce fait à augmenter les concentrations de méthane et d'oxydes nitreux. Le brûlage des savanes herbeuses comme mode de gestion du bétail et des pâturages est peut-être la source la plus importante de monoxyde de carbone. En effet, les combustions lentes et incomplètes dégagent des quantités plus importantes de CO qu'un brûlage vif et rapide.

OXYDES D'AZOTE (NOx), ANHYDRIDE SULFUREUX (SO2), OZONE (O3) ET CHLOROFLUOROCARBONES (CFC-11 et CFC-12) - Ces GES proviennent de processus industriels, non biotiques, comme l'utilisation de combustibles fossiles, l'industrie chimique et certains appareils ménagers. La foresterie et les autres modes d'utilisation des terres ne sont pas sources de GES.

L'ozone est un gaz présent partout dans l'atmosphère bien qu'il réside surtout dans la stratosphère où il agit comme un écran protecteur et empêche les rayons ultraviolets nocifs d'atteindre la surface de la Terre. Dans la couche inférieure de l'atmosphère (troposphère), O3 se forme sous l'effet de la foudre ou comme une composante du brouillard photochimique. L'exposition à des niveaux élevés de O3 troposphérique peut causer des dommages aux plantes et nuire à la santé humaine. Certaines variétés de haricots et de tabac sont connues pour leur sensibilité à des concentrations élevées de O3 Plusieurs essences forestières peuvent être endommagées par une exposition à des concentrations élevées de ce gaz (Jacobson et Hill, 1970).

Les CFC, qui étaient utilisés autrefois comme propulseurs d'aérosols et servent encore pour la climatisation, favorisent la destruction de l'ozone stratosphérique et contribuent à son appauvrissement. On pense que c'est pour cette raison que des trous d'ozone apparaissent en certaines saisons au-dessus des régions polaires.

7. Dans quelle mesure les activités humaines contribuent-elles aux GES?

Les activités humaines sont responsables de l'émission de quantités croissantes de certains GES dans l'atmosphère. L'utilisation des combustibles fossiles, la déforestation (et le feu qui y est associé) afin de disposer de nouvelles terres pour la culture ou le pâturage, et la combustion du bois et du charbon de bois dégagent tous de grandes quantités de GES. Environ 7 Gt de CO2 ont été libérées dans l'atmosphère chaque année durant les années 80 par les activités humaines (voir question 23). Environ 75-80 % de cette augmentation est dû aux industries, et presque tout le reste à la déforestation et aux modes d'utilisation des terres (Watson et al, 1990). La production de paddy et l'élevage sont également des sources de GES, par leur émission de méthane.

Depuis plus d'un siècle, les scientifiques soutiennent que l'augmentation de ces émissions pourrait affecter le bilan radiatif de l'atmosphère, provoquant une élévation sensible et durable de la température du globe (Plass, 1959; Hepting, 1963).

8. Tous les GES ont-ils le même effet de réchauffement?

Non; les GES varient non seulement dans leur durée de présence dans l'atmosphère avant de se décomposer (temps de vie), mais aussi dans leur effet radiatif ou réchauffant par rapport au dioxyde de carbone. Les scientifiques ont choisi le dioxyde de carbone comme gaz de référence pour la mesure des propriétés de tous les autres GES. Pour comparer ces gaz, on a élaboré le concept de potentiel relatif de réchauffement global (GWP) pour tenir compte des différences à la fois dans le temps de vie et dans les effets radiatifs des GES (Tableau 2.1). Le méthane, par exemple, est un gaz à durée de vie relativement courte; par conséquent, des émissions de ce gaz manifesteraient leurs effets les plus forts sur le changement du climat pendant les premières décennies suivant leur libération. L'oxyde nitreux et les CFC, d'autre part, contribuent à l'effet de serre pendant des centaines d'années car ils sont plus stables et se décomposent très lentement dans l'atmosphère (IPCC, 1992, 1994).

9. Quels sont les éléments prouvant que les niveaux de GES dans l'atmosphère sont en augmentation?

Il est clairement démontré que les concentrations de plusieurs GES dans l'atmosphère ont augmenté au cours des 150 dernières années.

En 1958, les premiers programmes de suivi continu du CO2 ont commencé dans les stations de Mauna Loa (Hawaï) et en Antarctique. Les données obtenues montrent clairement une augmentation annuelle de la concentration moyenne de CO2. En 1990, la valeur moyenne globale était de 355 ppmv, ce qui représente 25% de plus que la valeur de 1850, qui était de 280-290 ppmv (Fig. 2.3) (Houghton 1991, Siegenthaler et Sanhuezza, 1991).

La concentration de méthane dans l'atmosphère est aujourd'hui de 1,7 ppmv, soit plus du double de la valeur de 1850. Les analyses de carotte de glace montrent que les niveaux de ce gaz sont restés assez constants durant les 2000 ans précédant l'industrialisation. Durant les périodes glaciaires, la concentration de méthane dans l'atmosphère était la moitié de celle d'aujourd'hui. La concentration actuelle de ce gaz est plus élevée qu'elle ne l'a jamais été au cours des 150 000 dernières années.

Durant les années 80, les taux de croissance du méthane ont baissé, passant de 16 ppbv/an en 1980 à environ 10 ppbv/an en 1990. Les taux d'émission de méthane ont ralenti considérablement en 1991 et 1992, mais il semblerait qu'ils ont de nouveau augmenté à la fin de 1993 (IPCC, 1994).

La concentration actuelle d'oxydes nitreux est d'environ 0,31 ppmv (parties par million en volume). Cette valeur représente 8% de plus que durant la période pré-industrielle. Les CFC proviennent exclusivement des activités humaines et ne sont présents que depuis peu dans l'atmosphère terrestre. Ils ont fait l'objet d'études approfondies non seulement en raison de leur effet de serre mais aussi parce qu'ils appauvrissent l'ozone de la stratosphère. En 1990, la concentration dans l'atmosphère des deux CFC les plus importants, le CFC-11 et le CFC-12 était de 0,28 ppmv et 0,48 ppmv respectivement (Houghton, 1990).

TABLEAU 2.1
POTENTIEL DE RECHAUFFEMENT GLOBAL DIRECT DE QUELQUES GAZ A EFFET DE SERRE REPRESENTATIFS PROJECTION A L'HORIZON 100 ANS (Source: IPCC 1992, 1994)

GES

Potentiel de réchauffement global dû au dioxyde de carbone

CO2

1

CH4

11

N2O

320

CFC-11

4000

CFC-12

8500

HCFC-22

1700

HFC-134a

1300

Figure 2.3 - Variations du taux de CO2 atmosphérique durant les 250 dernières années d'après l'analyse des données d'une carotte de glace de l'Antarctique et des mesures atmosphériques effectuées à Mauna Loa, Hawaï, depuis 1958 (Source: Siegenthaler et Sanhuezza, 1991).

10. Quels sont les pays qui contribuent actuellement le plus aux niveaux élevés de GES?

Les dix pays qui contribuent le plus aux émissions de gaz à effet de serre sont les Etats-Unis, l'ex-URSS, le Brésil, la Chine, l'Inde, le Japon, l'Allemagne, le Royaume-Uni, l'Indonésie et la France. Dans bon nombre de ces pays, le secteur de l'industrie et des services est très développé et utilise des volumes considérables de combustibles fossiles (Watson et al, 1990). En 1990, 36% des émissions globales de carbone dues à la consommation d'énergie provenait des pays en développement (y compris la Chine et l'ex-URSS). Cette valeur est en augmentation par rapport à l'estimation de 28% faite en 1970 (Global Environmental Change Report, 1994).

11. Comment les aérosols peuvent-ils contrecarrer les effets des GES?

Les aérosols consistent en poussière et autres particules très fines libérées dans l'atmosphère terrestre. De nombreux aérosols agissent comme noyaux de condensation des gouttelettes d'eau qui constituent les nuages. Sans noyaux de condensation, les nuages ne peuvent se former et il ne peut pas pleuvoir.

Il existe de nombreuses sources naturelles et humaines d'aérosols. La poussière provenant des volcans en éruption ou des tempêtes de sable dans le désert sont deux exemples de sources naturelles. La suie noire produite par les feux de forêts, de savanes et de parcours peut être soit d'origine naturelle, soit d'origine anthropique selon la cause de l'incendie. La source humaine d'aérosol la plus importante est l'émission de sulfates par les centrales électriques qui sont souvent à l'origine de pluies acides (IPCC, 1994).

Les aérosols peuvent contrecarrer l'effet de réchauffement dû aux concentrations élevées de GES. Ils aident à refroidir l'atmosphère de deux manières. L'effet principal est de disperser la lumière solaire, réduisant la quantité qui atteint la surface de la Terre. Une augmentation du niveau des aérosols peut modifier la densité et, partant, le degré de réflectivité des nuages et entraîner un refroidissement. Il est démontré qu'en Australie, aux Etats-Unis et dans les pays de l'ex-URSS, la couverture nuageuse est devenue plus dense. Certains climatologues prévoient donc que certaines régions du monde pourraient effectivement subir un effet de refroidissement dans l'avenir (Pearce, 1994).


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