Perspectives de l'Alimentation, Décembre 1997 (FAO/SMIAR)

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MANIOC



Légère hausse de la production de manioc en 1997

La production mondiale de manioc en 1997 devrait augmenter de 1 pour cent et s’établir à 164 millions de tonnes, du fait principalement des hausses enregistrées en Afrique et en Asie. En Amérique latine et aux Caraïbes, la production est estimée à un niveau pratiquement inchangé par rapport à l’an dernier. En Afrique, principale région productrice, elle devrait atteindre 83 millions de tonnes, du fait surtout des bonnes conditions météorologiques et, parfois, des mesures prises par les pouvoirs publics pour accroître la production vivrière intérieure dans le but de réduire les importations alimentaires. Les pertes de récolte provoquées par les ravageurs et les maladies devraient également diminuer grâce à l’introduction de variétés résistantes aux ravageurs, et à l’établissement réussi d’ennemis naturels du tétranyque vert du manioc, dans le cadre du programme de lutte biologique coordonné par l’Institut international d’agriculture tropicale (IITA). La production devrait être en légère hausse dans les pays suivants: Angola, République démocratique du Congo, Madagascar, Mozambique, Tanzanie, Togo et Ouganda. Par contre, de mauvaises récoltes sont signalées au Tchad et au Rwanda où, du fait respectivement de la sécheresse et d’une attaque du virus de la mosaïque du manioc, les semis et les rendements sont en baisse. En République démocratique du Congo et en Sierra Leone, les troubles intérieurs qui ont perturbé les activités agricoles ont également contribué au recul de la production. Dans les autres pays de la région, peu de changements sont attendus en ce qui concerne la production.

En Asie, la production de manioc en 1997 est estimée à 48,5 millions de tonnes, soit une légère augmentation par rapport à l’an dernier. En ce qui concerne les principaux pays producteurs de la région, la production de la Thaïlande s’établirait à 18,1 millions de tonnes, soit une hausse de 4 pour cent par rapport à l’an dernier, tandis qu’en Indonésie elle progresserait de 1 pour cent pour s’établir à 17,2 millions de tonnes, du fait essentiellement de bonnes conditions météoro-logiques. Par contre, au Viet Nam, la production devrait être en légère baisse par rapport à l’an dernier du fait de l’abandon de semis traditionnels de manioc au profit de cultures plus rémunératrices comme le riz et le maïs. Toutefois, dans le sud, de nouvelles zones (terres jusque là en friche) sont aujourd’hui consacrées à la culture intensive du manioc, avec de nouvelles variétés à haut rendement, ayant une forte teneur en amidon, ce qui traduit le fort intérêt des industries amidonnières. La production des autres pays de la région ne devrait pas enregistrer de grands changements.

PRODUCTION MONDIALE DU MANIOC 1/
 
1995  1996  1997 prélim. 
(. . . millions de tonnes . . .) 
Total mondial  165,3  162,0  164,1
Afrique  84,7  82,1  83,0
Congo, Rép, dem.  18,9  16,8  16,8
Ghana  6,6  7,1  7,1
Madagascar  2,4  2,4  2,4
Mozambique  4,2  4,7  5,3
Nigéria  31,4  31,4  31,4
Ouganda  2,2  2,2  2,3
Tanzanie  6,0  4,3  4,4
Asie  48,2  47,7  48,5
Chine  3,5  3,5  3,5
Inde  6,0  4,7  4,7
Indonésie  15,4  17,0  17,2
Philippines  1,9  1,9  1,9
Thaïlande  18,2  17,4  18,1
Viet Nam  2,2  2,2  2,1
Amérique latine et les Caraïbes  32,2  32,1  32,4
Brésil  25,3  24,9  25,4
Colombie  1,8  2,0  1,8
Paraguay  2,7  2,6  2,6
 

En Amérique latine et aux Caraïbes, la production de manioc en 1997 est estimée à 32,4 millions de tonnes, pratiquement inchangée par rapport à l’an dernier. Au Brésil, deuxième producteur industriel dans le monde, la production en 1997 devrait atteindre 25,4 millions de tonnes, soit une hausse de 2 pour cent par rapport à 1996, imputable à une légère augmentation des superficies cultivées. Au Paraguay, la production serait proche du niveau de 1996, du fait de la concurrence accrue des autres cultures, des retards dans l’application de nouvelles technologies et du soutien limité des pouvoirs publics. De faibles hausses sont attendues en Bolivie, en Equateur, au Nicaragua et au Pérou. Toutefois, la production devrait fléchir dans plusieurs pays, comme la Colombie, le Costa Rica, la République dominicaine, du fait principalement de la diminution des superficies cultivées et parfois de la sécheresse.


Hausse de la demande

En Afrique, la consommation de manioc et produits du manioc frais (gari, attiéké, foufou etc.) augmentera vraisemblablement en 1997, en partie à cause de la hausse des prix intérieurs des céréales, elle-même alimentée par les prix élevés à l’importation et par la désorganisation des systèmes commerciaux provoquée par les troubles intérieurs dans certains pays. En Tanzanie, par exemple, on estime qu’une grande partie du déficit alimentaire en céréales sera couvert par des cultures vivrières non céréalières, comme le manioc et d’autres racines et tubercules. La hausse de la demande pour les produits de remplacement des céréales a également fait monter les prix intérieurs de ces produits. On estime, par exemple, que les prix du manioc sont actuellement le double de ceux de l’an dernier. En Sierra Leone, du fait du récent bouleversement politique, la consommation de manioc et d’autres racines et tubercules a considérablement augmenté.

En Asie, notamment en Chine, au Viet Nam et en Thaïlande, on prévoit en 1997 une hausse de l’utilisation du manioc dans la production d’aliments pour animaux, d’alcool et de fécules. En Chine et au Viet Nam, on estime que l’activité de réduction en copeaux et de séchage au niveau de l’exploitation pour l’alimentation animale est particulièrement forte et que 40 à 60 pour cent des disponibilités totales sont employées à cet effet. En Thaïlande, le plus gros producteur et exportateur de granulés de manioc, la part des racines de manioc transformées en fécule a considérablement augmenté du fait de la forte demande et de la politique officielle visant à encourager la production de fécule, dont une partie provient de la transformation du manioc en granulés. Sur une production de racines de manioc estimée cette année à 18,1 millions de tonnes, 10 millions de tonnes environ seront transformés en copeaux et granulés, et 8 millions de tonnes environ seront utilisés dans la production de fécule de manioc, dont une moitié est destinée à la consommation intérieure et l’autre à l’exportation.

Dans la plupart des pays d’Amérique latine et des Caraïbes, le manioc passe d’une position de culture de base traditionnelle à celle d’une matière première commerciale utilisée dans la fabrication de produits destinés à l’alimentation humaine ou animale et à l’industrie. L’activité industrielle de la réduction en copeaux et de séchage du manioc est en pleine croissance dans de nombreux pays comme le Brésil, la Colombie et l’Equateur. Par exemple, dans la région du Nord-Est au Brésil, la consommation de farina de mandioca a augmenté parce qu’elle remplace la farine de blé, plus onéreuse, dans les produits boulangers et dans les industries de fermentation. De même, l’utilisation de fécule acide augmente en même temps que les applications dans le secteur de la restauration rapide et de la boulangerie.

Dans les pays développés, notamment dans la CE, l’utilisation du manioc en 1997 dans l’alimentation animale devrait rester stable par rapport au niveau de l’an dernier. En effet, la demande de produits pour l’alimentation animale due à l’expansion attendue de l’élevage a été modérée par l’apparition de la peste porcine et par la baisse de la production porcine qui s’en est suivie en Belgique, en Allemagne, aux Pays-Bas et en Espagne du fait des programmes d’abattage qui ont été appliqués dans la première partie de l’année.


Faible croissance du commerce du manioc en 1997

Les échanges mondiaux des produits secs du manioc en 1997 sont actuellement estimés à 6,0 millions de tonnes (soit 15 millions de tonnes en équivalent racines fraîches), ce qui représente une hausse de 3,4 pour cent par rapport au volume estimatif révisé de 1996. Cette augmentation est pour l’essentiel le résultat d’exportations plus soutenues vers les pays hors CE, qui sont aujourd’hui estimées à 2,5 millions de tonnes, soit une hausse de 9 pour cent par rapport à l’an dernier. On estime que les achats sous forme de copeaux, de granulés et de farine ont fortement augmenté pour la Chine, l’Indonésie, la République de Corée, la Malaisie, les Philippines, Singapour et Israël. Les importations de la CE devraient se maintenir aux niveaux de 1996 .

La Thaïlande et l’Indonésie sont restées les principaux fournisseurs du marché mondial avec respectivement 80 et 10 pour cent de parts de marché. Les expéditions totales de produits secs du manioc en provenance de la Thaïlande en 1997 sont estimées actuellement à 4,8 millions de tonnes, soit une hausse de 4 pour cent par rapport à l’an dernier, les exportations de copeaux et de granulés représentant à elles seules 3,8 millions de tonnes. Toutefois, le volume total des exportations serait inférieur au contingent annuel de 5,25 millions de tonnes que la Thaïlande peut exporter vers la CE. Pour cette raison, il n’y a pas eu lieu d’appliquer en 1997 le système de contrôle des stocks, selon lequel le Gouvernement thaïlandais accordait des licences d’exportation de copeaux et de granulés de tapioca vers la CE compte tenu des stocks et des exportations antérieures de chaque exportateur. Ce changement a permis de réduire les coûts entraînés par la détention de stocks et a encouragé la concurrence entre les exportateurs de copeaux, de granulés et de farine de tapioca.

Entre janvier et août de cette année, la Thaïlande a expédié un total de 2,6 millions de tonnes de copeaux et de granulés, dont 2,2 millions de tonnes à destination de la Communauté, principalement des Pays-Bas (en partie pour y être transbordées), du Portugal, de l’Espagne, de l’Allemagne et de la Belgique. Ces deux derniers pays avaient suspendu leurs achats depuis 1994, mais ont acheté près de 50 000 tonnes de copeaux et de granulés au cours des huit premiers mois de 1997. 400 000 tonnes ont également été exportées vers les pays hors CE, comprenant la Chine, Israël, le Japon, la République de Corée, les Philippines, la Pologne, la Turquie et la Province de Taïwan.

COMMERCE MONDIAL DU MANIOC 1/
 
1995  1996  1997 prélim.
( . . millions de tonnes . . ) 
Exportations mondiales  5,2  5,8  6,0
Thaïlande  3,9  4,6  4,8
Indonésie  0,5  0,4  0,4
Chine 2 0,4  0,4  0,4
Autres pays  0,4  0,4  0,4
Importations mondiales  5,2  5,8  6,0
CE 3 3,3  3,5  3,5
Chine 2 0,5  0,3  0,3
Japon  0,3  0,3  0,4
Corée, Rép, de  0,2  0,6  0,6
Autres pays  0,9  1,1  1,2
 

Malgré des perspectives de récolte favorables, les ventes indonésiennes à l’étranger ne devraient pas dépasser les niveaux atteints en 1996 en raison d’une forte demande intérieure; en fait, sur le contingent annuel de 866 000 tonnes, seules 97 500 tonnes ont été exportées vers la CE, pendant les neuf premiers mois de 1997. La Chine ne remplira vraisemblablement pas non plus son contingent d’environ 367 000 tonnes à destination de la CE, alors que le Viet Nam devrait expédier environ 80 pour cent de son contingent de 30 000 tonnes. L’ensemble des livraisons des autres exportateurs d’Afrique, d’Amérique latine et des Caraïbes devraient s’élever à environ 400 000 tonnes.
 

 

PRIX DU MANIOC, DE LA FARINE DE SOJA ET DE L’ORGE DANS LA CE
 
Granulés de 
manioc 1/ 
Farine de soja 2/  Mélange manioc/ farine de soja 3/  Orge 4/
( . . . . . . . . . . . . .dollars E.-U./ tonne . . . . . . . . . . . . .) 
1990  167  208  175  225
1991  178  197  186  222
1992  183  204  187  235
1993  137  208  151  197
1994  144  192  154  182
1995  177  197  181  209
1996  152  268  175  194
1997 5 110  279  144  165
 

Les prix des granulés de manioc ont atteint leur niveau le plus bas



Dans la CE, les prix à l’importation des granulés de manioc, qui sont le principal produit du manioc faisant l’objet d’un commerce international, ont poursuivi, dans les neuf premiers mois de 1997, la baisse amorcée en septembre 1996, la moyenne s’établissant à 110 dollars E.-U. la tonne, soit un recul de 29 pour cent par rapport à la même période en 1996. Il s’agit là du niveau le plus bas atteint ces dix dernières années. Ce fléchissement est imputable à la faiblesse relative de la demande d’importation dans la CE pour les copeaux et granulés de tapioca par rapport à l’an dernier, ce qui s’explique par l’épidémie de peste porcine, la baisse des prix des céréales et la hausse des prix des farines de protéine, notamment de soja, avec en conséquence une augmentation de l’utilisation des céréales fourragères produites localement. Toutefois, en dépit de la hausse des prix des farines de soja, les mélanges manioc/soja sont restés concurrentiels par rapport à l’orge en Espagne (voir tableau des prix) du fait des prix très inférieurs du manioc. Sur le plan de l’offre, la baisse des prix s’explique également par une forte production de racines de qualité médiocre, des stocks de report plus importants, une diminution des subventions et la suppression du régime fondé sur le contrôle des stocks en Thaïlande. Dans ce pays, les prix intérieurs des racines de manioc sont tombés pendant le premier trimestre à 37 dollars E.-U. la tonne, soit un recul de 30 pour cent par rapport à la même période l’an dernier.





Perspectives incertaines de la production et des échanges en 1998

Les premières indications concernant la production mondiale de manioc en 1998 laissent entrevoir une baisse potentielle des prochaines récoltes dans l’hémisphère Sud où les effets négatifs de El Niño pourraient se faire sentir vers la fin de cette année ou au début de la prochaine. Si des baisses de la production étaient enregistrées en Asie et en Amérique latine et aux Caraïbes, les prix pourraient subir des pressions à la hausse l’an prochain. Le volume des échanges en 1998 dépendra également de divers facteurs, dont l’évolution des prix des céréales fourragères et de la farine de soja sur le marché de la CE, et les disponibilités de manioc dans les principaux pays exportateurs. Les disponibilités exportables pourraient être particulièrement affectées par une possible révision de la politique d’exportation de la Thaïlande, qui est actuellement à l’étude eu égard au contingentement de la CE, et la mise en place probable de subventions aux exportations vers les pays hors CE.


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