FAO/SMIAR - Rapport sur l'Afrique No.2, Août 1999 - page 4

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PREMIERE PARTIE: VUE D'ENSEMBLE

Une forte sécheresse, des troubles intérieurs persistants, l'insécurité et des infestations de ravageurs ont gravement porté atteinte à la production vivrière dans plusieurs parties de l'Afrique sub-saharienne. En Afrique de l'Est, les mauvais résultats de la campagne principale ("Gu") et la recrudescence des affrontements entre factions rivales ont engendré en Somalie une situation alimentaire inquiétante. De même, les mauvais résultats de la campagne "Belg" en Éthiopie ont augmenté considérablement le nombre de personnes ayant besoin d'une aide alimentaire. En Afrique australe, les perspectives alimentaires en Angola sont alarmantes, du fait de l'intensification du conflit civil qui déchire le pays. Dans la région des Grands Lacs, les troubles intérieurs, particulièrement en République démocratique du Congo et en République du Congo, continuent de provoquer le déplacement d'un très grand nombre de personnes et de nuire gravement aux activités agricoles.



L'AFRIQUE DE L'EST CONNAÎT DE GRAVES DIFFICULTES D'APPROVISIONNEMENT ALIMENTAIRE

La Somalie connaît une grave crise alimentaire. Les effets conjugués du mauvais temps, d'un conflit civil interminable et des fléaux mal maîtrisés que sont les maladies et les ravageurs ont précipité les conditions d'une famine généralisée dans le pays, surtout dans les régions méridionales. Des pluies irrégulières et insuffisantes, des invasions de chenilles légionnaires et des températures anormalement élevées sont en grande partie responsables des mauvais résultats de la campagne principale en cours ("Gu"). Cette situation alarmante a encore été aggravée par la recrudescence des combats entre factions rivales. La contre-performance des récoltes en cours vient s'ajouter à une série de six mauvaises moissons depuis 1996, conséquence des sécheresses et des inondations sans précédent du début de l'année 1998 imputables au phénomène El Niño.

Les perspectives alimentaires pour 1999 et au-delà sont extrêmement préoccupantes. Du fait de l'insuffisance des précipitations, les niveaux d'eau du fleuve Shabelle sont inférieurs à la normale, ce qui limite les possibilités d'irrigation. On signale des invasions de chenilles légionnaires dans le Bas et le Moyen Juba, le Bas Shebelle, ainsi que dans les régions de Bakool et de Hiran. La plupart des ménages ont pratiquement épuisé toute la gamme des possibilités que leur offrent les mécanismes traditionnels d'adaptation. Les activités économiques et commerciales ont été sérieusement réduites par les luttes entre factions rivales et par l'insécurité, qui ont condamné un nombre important de personnes à partir à la recherche de vivres et de sécurité. Les prix des céréales sont en hausse, ceux du bétail continuent de baisser. On estime qu'un million de personnes environ sont menacées par de graves pénuries alimentaires et que plus de 400 000 risquent la famine.

Selon les estimations de la FAO, la totalité des besoins d'aide alimentaire s'élève à 125 000 tonnes pour la campagne de commercialisation 1998/99 (août/juillet) dont 52 000 tonnes d'aide alimentaire d'urgence. A la mi-juillet, un quart seulement de celle-ci était déjà acheminé. Compte tenu de la médiocrité des résultats de la principale campagne, il faudra toutefois continuer à assurer une aide alimentaire jusqu'à une période avancée de l'an 2000. Il sera également nécessaire de fournir à la plupart des ménages les semences et autres intrants agricoles nécessaires aux semis qui auront lieu pendant la prochaine période de végétation.

En Ethiopie, les récoltes de la campagne "Belg", qui se déroulent normalement à partir du mois de juin, ont été en général infructueuses en raison de l'insuffisance des précipitations. Cette situation a augmenté l'ampleur des pénuries alimentaires dans le pays, qu'il s'agisse du nombre de personnes touchées ou de régions concernées. Le nord-ouest de la région d'Amhara est la zone la plus touchée, avec deux millions de personnes exposées à de graves pénuries alimentaires. Le gouvernement a récemment lancé un appel pour la fourniture de 425 000 tonnes d'aide alimentaire en faveur de quelque 5,3 millions de personnes vulnérables, notamment celles qui subissent les effets de la contre-performance de la campagne Belg ainsi que les 385 000 individus déplacés à l'intérieur du pays par le conflit qui se poursuit avec l'Erythrée. Malgré les pluies qui sont tombées ces derniers mois, les zones pastorales, dans le sud et l'est du pays, subissent encore les séquelles de plusieurs années consécutives de sécheresse et de pénuries d'eau. Le 31 mai 1999, la FAO et le PAM ont approuvé une opération d'urgence visant à fournir une aide alimentaire à 1,2 million de personnes pour un montant de 40,5 millions de dollars E.-U..
Les premières perspectives des récoltes de la campagne " Meher " de 1999 sont incertaines, malgré des précipitations favorables aux mois de juin et juillet. En raison de l'insuffisance des pluies en avril et en mai, il a fallu différer la préparation des terres et les semis des cultures à cycle long dans certaines parties du pays. De plus, 350 000 hectares ont déjà été traités contre les infestations de chenilles légionnaires, mais on ignore encore l'étendue des dégâts subis par les cultures.

En Tanzanie, les rapports officiels récents signalent dans plusieurs régions d'importantes pertes de récolte localisées, notamment dans la région de Shinyanga, où la production des cultures commerciales et vivrières devrait chuter jusqu'à 40 pour cent par rapport au niveau de l'année dernière. Selon les premières estimations, l'ensemble de la production céréalière (maïs, riz, blé, sorgho et millet) de 1999 s'élève à 3,76 millions de tonnes, soit un recul de neuf pour cent par rapport à la production de l'an dernier, qui s'explique par l'irrégularité des précipitations, l'usage limité des semences et des engrais améliorés ainsi que par une invasion de chenilles légionnaires. Les perspectives pour les cultures non céréalières (légumineuses, pommes de terre, manioc et plantains) sont toutefois satisfaisantes.

L'arrivée de la saison sèche dans les zones centrale et septentrionale du pays entraîne une réduction des pâturages et des réserves d'eau et crée donc des conditions défavorables pour les éleveurs. Dans les régions de Dodoma et de Singida, où de nombreux ménages reçoivent une aide alimentaire depuis octobre 1998, la dernière récolte a amélioré la situation des approvisionnements alimentaires. Sur le plan national, les prix du maïs ont baissé depuis le mois d'avril, après la récolte et l'arrivée de céréales d'importation, mais restent beaucoup plus élevés que l'année dernière à la même époque. Le gouvernement constitue des stocks et a prévu d'importer 175 000 tonnes, dont 50 000 tonnes sont déjà parvenues dans le pays.

En Erythrée, malgré la bonne récolte de 1998, la situation alimentaire est très critique pour les personnes déplacées en provenance des zones touchées par le conflit avec le pays voisin, l'Ethiopie. Les agriculteurs qui ont dû quitter les zones frontalières de Gash-Barka et Debub ne pourront rien cultiver pendant la campagne actuelle, ce qui va accentuer le problème des approvisionnements alimentaires. Une opération d'urgence approuvée conjointement par la FAO et le PAM en avril 1999 prévoit sur une période de neuf mois la fourniture d'une aide alimentaire à 268 000 personnes très éprouvées par la guerre, dont 21 500 personnes déportées en provenance d'Ethiopie.

Les semis des cultures de 1999 sont en cours. Les premières perspectives sont incertaines, les précipitations ayant été un peu partout inférieures à la moyenne pendant le mois de juin, irrégulières et insuffisantes durant la première campagne entre mars et mai. Des invasions de chenilles légionnaires ont été signalées dans certaines parties du pays à la fin du mois de juin. La région la plus touchée dans ce domaine est la province d'Anseba. Des mesures de lutte ont été prises mais on prévoit une extension du fléau.

Au Kenya, les cultures de maïs de la campagne principale de 1999 ont souffert de précipitations irrégulières, d'un approvisionnement insuffisant en intrants agricoles et d'invasions localisées de chenilles. Selon les premières estimations officielles, la production de maïs devrait atteindre 1,95 millions de tonnes, contre les 2,44 millions de tonnes de l'année dernière et par rapport à une moyenne de 2,5 millions de tonnes au cours des cinq dernières années. On signale d'importantes chutes de la production dans les provinces de l'Est, du Centre et de la vallée du Rift.

La situation des approvisionnements alimentaires est critique dans les zones de pâture du nord et du nord- est. Les précipitations ont été irrégulières et insuffisantes pendant la campagne actuelle, créant une situation néfaste pour les pâturages et l'approvisionnement en eau jusqu'à l'arrivée en octobre de la prochaine saison des pluies. D'importantes pénuries alimentaires ont également été signalées dans certaines parties des provinces du Centre et de l'Est. Le gouvernement a distribué environ 4 000 tonnes de vivres aux ménages vulnérables dans la province de l'est et les zones de pâture. L'épuisement des stocks alimentaires devant vraisemblablement empirer la situation au cours des prochains mois, il faudra continuer à fournir une aide alimentaire aux personnes en difficulté.

Dans le sud du Soudan, la recrudescence des conflits intérieurs, en particulier dans la région de Bahr El Ghazal, et le récent afflux de rapatriés qui a eu lieu pendant la période de soudure ont aggravé la situation déjà précaire des approvisionnements alimentaires. Les conditions de végétation sont cependant favorables pour l'instant, grâce aux abondantes précipitations dont a bénéficié la région en mai et en juin. Les conditions sont satisfaisantes pour les pâturages dans la plupart des régions, surtout dans l'Etat du Haut Nil, où des inondations se sont produites l'an dernier.

Dans les autres parties du Soudan, les semis des cultures de la campagne principale de 1999 sont bien avancés, et les premières estimations sont devenues plus optimistes en raison des pluies propices tombées au mois de juillet.

En Ouganda, on signale des pénuries alimentaires dans les régions occidentales du pays, conséquence d'une sécheresse prolongée qui a touché la production agricole et nui au bétail. Plus d'un demi-million d'agriculteurs ont besoin d'une aide d'urgence, et on signale que des milliers d'autres se dirigent vers le nord de la Tanzanie pour y trouver de l'eau et des pâturages. Les comtés les plus touchés sont ceux de Nyabushozi, de Kashari et d'Ibanda dans le district de Mbarara, celui de Ruhinda dans le district de Bushenyi et celui de Ruhaama dans le district de Ntungamo. Des difficultés d'approvisionnement alimentaire persistent dans le nord et dans l'ouest, régions où l'insurrection ne cesse de provoquer de vastes déplacements de population.

Dans les autres zones, les perspectives des récoltes de la campagne principale sont dans l'ensemble favorables. Dans le bassin du Lac Victoria et dans la région de l'est, on s'attend à une récolte normale, malgré le temps sec qui a régné à la fin du mois de mai et en juin. Dans le nord, où la saison des pluies se prolonge jusque dans le courant du mois de novembre, les cultures bénéficient de conditions normales. La production agricole devrait s'accroître à Kitgum et à Gulu grâce à d'abondantes précipitations, à la disponibilité des intrants, ainsi qu'à un renforcement de la sécurité qui a permis d'utiliser plus de terres cultivables.



LA SITUATION ALIMENTAIRE DE L'ANGOLA EST TRÈS PRÉOCCUPANTE ET ON PRÉVOIT DES DIFFICULTÉS D'APPROVISIONNEMENT DANS PLUSIEURS RÉGIONS DE L'AFRIQUE AUSTRALE

Malgré les conditions climatiques favorables dont a bénéficié la principale période de végétation de 1999, l'Angola connaît de sérieuses difficultés alimentaires en raison d'une aggravation du conflit civil depuis le mois de décembre 1998. La reprise des hostilités a provoqué le déplacement d'un million de personnes, auxquelles il faut fournir une aide alimentaire dans les plus brefs délais. Les constants mouvements de population ayant nui au déroulement normal des activités agricoles, les récoltes ont été faibles même pour les agriculteurs bien établis. La situation alimentaire suscite une vive inquiétude dans les villes et municipalités de province qui accueillent un très grand nombre de personnes déplacées mais sont pratiquement coupées du reste du monde suite à la fermeture de la plupart des axes routiers. Les prix des vivres sont en hausse dans ces zones urbaines, et la situation risque d'empirer dans les mois à venir. Dans bien des villes, les transports aériens, coûteux, sont le seul moyen pour acheminer l'aide alimentaire d'urgence.

Le 14 juin 1999, le Directeur général de la FAO et le Directeur exécutif du PAM ont approuvé une opération de secours d'urgence visant à distribuer 180 000 tonnes de vivres à 798 000 personnes, pour un montant de 38 millions de dollars E.-U..

Dans les autres parties de l'Afrique australe, on prévoit une aggravation de la situation des approvisionnements alimentaires dans plusieurs pays où les récoltes ont été réduites du fait de l'irrégularité des précipitations. La production de l'Afrique du Sud est inférieure à celle de l'an dernier, qui était déjà limitée. Au Botswana, au Lesotho, en Namibie et au Zimbabwe, la production céréalière devrait être inférieure à la moyenne pour la deuxième année consécutive. On prévoit cependant que les capacités d'importation de ces pays vont leur permettre de stabiliser leur situation alimentaire globale.


ENCADRE: SITUATION DES RÉCOLTES ET DES APPROVISIONNEMENTS ALIMENTAIRES EN ANGOLA

Une récente mission FAO/PAM d'évaluation des récoltes et des approvisionnements alimentaires a constaté que la reprise des combats à la fin de 1998 avait donné lieu à d'importants déplacements de population dans les régions agricoles. Un million de personnes seraient concernées, ce qui porte à 1,7 million le nombre total de personnes déplacées, chiffre qui devrait encore augmenter. Cette situation a été préjudiciable à la situation vivrière malgré de très bonnes conditions de végétation.

Presque toutes les provinces ont été le théâtre d'hostilités, mais les plus touchées ont été celles du centre, qui est la principale région productrice de maïs. C'est en décembre que se sont produites les flambées de violence et qu'ont eu lieu la plupart de déplacements de population, à un moment où les
opérations de semis étaient terminées ou déjà bien avancées. Bien que les réductions de semis n'aient pas été dans l'ensemble très importantes, on prévoyait une très nette réduction des rendements dans de nombreuses régions où les champs avaient été laissés à l'abandon. Même des agriculteurs bien établis ont
eu des rendements plus faibles dans les zones les plus touchées par la violence des combats. Des mouvements incessants de population ont empêché le déroulement normal des activités agricoles, notamment dans les provinces de Bie, Huambo, Malange, dans l'est de Kuanza Sul, au nord-est de Moxico et au nord de Huila.

La mission prévoit une production céréalière de 533 000 tonnes pour 1998/99, résultat inférieur de 11 pour cent à celui de l'année dernière. La production de manioc, une denrée de base importante, devrait être légèrement inférieure à celle de l'année dernière, celle de haricots pourrait enregistrer une baisse de 21 pour cent.

La mission a estimé que les disponibilités intérieures de céréales, estimées à 562 000 tonnes, seraient nettement insuffisantes pour couvrir les besoins de consommation du pays pendant la campagne de commercialisation 1998/99 (avril-mai). Les besoins d'importation céréalière sont estimés à 505 000 tonnes, par rapport aux 420 000 tonnes qui ont effectivement été importées durant la précédente campagne de commercialisation. La mission a estimé que, sur l'ensemble prévu des importations, 325 000 tonnes seraient acheminées par les voies commerciales. Il reste donc un déficit de 180 000 tonnes qui devra être couvert par la fourniture d'aide alimentaire.

La recrudescence des conflits intérieurs a encore mis à rude épreuve un système de commercialisation déjà inefficace. L'acheminement des excédents vers les zones déficitaires, d'une province à l'autre ou à l'intérieur d'une même province, est à la fois onéreux et risqué, tout comme la livraison des autres produits de base des ménages. C'est ce qui explique les grandes variations entre les prix des denrées sur les différents marchés de province.

Lorsque la mission était sur place, elle a constaté que les prix du maïs pouvaient passer de 150 000 KZR/kg à Malange à 555 000 KZR/kg à Benguela. De même, les prix dans la province de Huambo étaient deux fois plus élevés que dans la province voisine de Huila. Les prix des denrées de base sont en hausse dans les zones urbaines en raison de l'isolement des villes à l'intérieur du pays. Au cours de l'année écoulée, l'évolution générale des prix sur les marchés de Huambo a montré que les prix des produits de base ont pu augmenter jusqu'au quintuple, ce qui dépasse nettement le taux d'inflation de l'année 1998. Du fait de cette hausse des prix, une forte partie de la population a de grandes difficultés à se procurer les denrées indispensables.

L'insécurité alimentaire touche plus particulièrement les personnes déplacées, mais la reprise des hostilités a compromis la sécurité alimentaire de la plus grande partie de la population. Selon les estimations effectuées par la mission, le nombre de personnes qui ont besoin d'aide a quasiment doublé par rapport aux prévisions de 1998. De plus, il faudra distribuer des terres cultivables aux personnes déplacées et leur fournir des intrants agricoles indispensables pour la prochaine campagne qui va commencer en octobre. L'acheminement de l'aide alimentaire ne peut se faire que par de coûteux transports aériens, l'accès par les voies terrestres étant rendu très difficile à cause du conflit. C'est pourquoi il est impératif de fournir dans les plus brefs délais le support logistique qui permettra de hâter la distribution de l'aide humanitaire.

 



LA PRODUCTION VIVRIERE RESTE FORTEMENT COMPROMISE EN REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO, ET LA REPRISE RESTE FRAGILE DANS LA REGION DES GRANDS LACS

En République démocratique du Congo, on espérait que l'accord de cessez-le-feu signé le 10 juillet à Lusaka serait le gage d'une sécurité accrue. Mais les factions rebelles ayant refusé de signer cet accord, son application reste bien incertaine.

La poursuite ininterrompue des combats a provoqué d'importants déplacements de population dans diverses régions. On estime pour l'instant à 660 000 le nombre de personnes déplacées, et à 285 000 le nombre de réfugiés en provenance des pays voisins (Angola, Soudan, République du Congo, Rwanda et Burundi). Dans la province de Katanga, au sud-est du pays, les opérations militaires ont contraint des milliers de personnes à quitter leur foyer pour trouver refuge à Lubumbashi, où ils peuvent compter sur une aide limitée.

Au nord et au sud de la province de Kivu, on signale que quelque 240 000 familles (soit 1,2 million de personnes) ont été touchées par les récents conflits intérieurs. Les attaques menées contre les villages ont considérablement augmenté le nombre de personnes qui se sont enfuies vers la Tanzanie. A Kivu, les cultures de la campagne B viennent d'être moissonnées et on prévoit une production nettement inférieure à la normale.

A Kinshasa, la situation des approvisionnements alimentaires reste difficile. Une étude nutritionnelle effectuée récemment montre que 10 pour cent de la population de Kinshasa souffrent d'une malnutrition aiguë, contre 6 pour cent en 1998. Suite à l'augmentation des prix du carburant, celui des denrées alimentaires de base a subi une forte hausse; qui plus est, l'insécurité et les problèmes économiques limitent l'acheminement de vivres vers la capitale.

En République du Congo, la reprise des combats entre les forces gouvernementales et la milice Ninja au milieu du mois de mai a provoqué de nouveaux déplacements de population à l'intérieur de Brazzaville. On estime qu'au moins 10 000 personnes ont été déplacées. La distribution des vivres et les systèmes de commercialisation ont été profondément désorganisés, et l'état de santé et le niveau nutritionnel des personnes déplacées sont considérés comme alarmants.

Au Burundi, les cultures de la campagne B, qui ont été moissonnées récemment, ont souffert d'une arrivée tardive et d'un arrêt prématuré des précipitations, conjugués à des invasions de chenilles légionnaires. Les cultures de légumineuses ont été les plus touchées, avec un recul estimé à 22 pour cent par rapport à l'année dernière. La production de céréales a baissé de 10 pour cent. La production des autres denrées de base - racines et tubercules, bananes et plantains - n'a que très légèrement diminué. L'ensemble de la production vivrière devrait enregistrer une baisse de 6 pour cent par rapport aux résultats de la campagne B de 1998.

La production réduite de céréales s'explique par une récolte inférieure à la moyenne pendant la première campagne, au début de l'année. Cette situation va rendre l'approvisionnement en céréales et en légumineuses difficile dans les prochains mois. On signale une hausse des prix déjà élevés des haricots sur les marchés de Bujumbura. L'embargo imposé au pays a pris fin en janvier cette année, mais cela n'a pas encore permis une relance des activités économiques. Au contraire, une nouvelle dévaluation de la monnaie nationale s'est traduite par une hausse du prix des importations, rendant l'acquisition des denrées alimentaires ou autres encore plus difficile pour une grande partie de la population.

Le niveau de sécurité a considérablement baissé au cours des derniers mois, comme en témoignent les agressions dont ont été victimes les membres d'organisations d'aide humanitaire qui travaillent dans le pays. Dès le début du mois de juillet, le PAM a donc décidé une suspension temporaire de la distribution d'aide alimentaire en dehors de la capitale. On estime que 543 000 personnes déplacées vivent encore dans des camps de regroupement.

Au Rwanda, les récoltes de la campagne B, qui viennent d'être engrangées, sont moins importantes que celles de la campagne de 1998, notamment en ce qui concerne les céréales et les haricots. En raison de l'arrivée tardive des pluies, il a fallu différer les semis; l'arrêt précoce des précipitations a par ailleurs entraîné une réduction des rendements, notamment pour les céréales qui poussent dans des régions situées à haute altitude. La production vivrière a également souffert dans certains endroits d'une pénurie d'intrants agricoles, essentiellement de semences. On ne dispose pas encore d'une estimation définitive de la production de cette campagne. Les prix des denrées alimentaires, en baisse au cours du premier semestre, viennent d'amorcer une hausse.

Dans les préfectures de Gisenyi et Ruhengeri, dans le nord-ouest du pays, ainsi que dans certaines parties de Kibuye et de Gitarama, des déplacements de population à grande échelle continuent de restreindre fortement la production vivrière, malgré l'amélioration des conditions de sécurité.



LES PREMIÈRES PERSPECTIVES SONT FAVORABLES EN AFRIQUE DE L'OUEST, MAIS LA SITUATION ALIMENTAIRE RESTE PRÉCAIRE EN SIERRA LEONE

Dans les pays du Sahel, la saison des pluies a généralement commencé au moment prévu, avec parfois même une certaine avance dans le sud du Sénégal; mais les précipitations, dans l'ensemble supérieures à la normale pendant la première quinzaine du mois de mai, ont considérablement diminué au cours des deux premières semaines du mois de juin, notamment au Burkina Faso et au Niger. Cette insuffisance a toutefois pu être compensée, dès la fin juin, par des précipitations étendues et supérieures à la normale, qui ont arrosé amplement la plupart des régions productrices du Sahel.

Les semis sont bien avancés. Au Burkina Faso et au Niger, il a fallu ajourner les semis à cause de la période sèche du mois de juin, et parfois procéder de nouveau à l'ensemencement dans certaines zones. La production pourrait s'en ressentir, si les précipitations ne se prolongent pas jusqu'à une période avancée de la campagne. En ce qui concerne les criquets pèlerins, la situation reste calme pour l'instant.

En Sierra Leone, la signature d'un accord de paix entre le gouvernement et les mouvements des rebelles devrait améliorer le niveau de sécurité et faciliter les opérations de secours ainsi que les activités de remise en état dans le pays. Compte tenu du fait que la campagne agricole est déjà bien avancée, l'accord de paix n'aura vraisemblablement que peu d'heureux effets sur le résultat des récoltes de 1999. Selon les indications actuelles, la production ne devrait pas être très différente de celle de l'année dernière, malgré les conditions climatiques favorables dont a bénéficié le pays jusqu'à présent.

La distribution de l'aide alimentaire est en cours, grâce à la réouverture des principaux axes routiers qui partent de Freetown, mais elle est insuffisante, eu égard au nombre important de personnes déplacées. On signale des pénuries alimentaires dans de nombreuses régions du pays, notamment dans le nord et dans l'est, et le prix des denrées alimentaires reste très élevé. Les missions humanitaires d'évaluation examinent pour l'instant l'état des besoins dans les régions qui étaient inaccessibles avant le cessez-le-feu. Même si les accords de paix sont pleinement respectés et appliqués, le pays restera pendant quelques années fortement tributaire de l'aide alimentaire.

En Guinée Bissau, la situation en matière de sécurité s'est grandement améliorée, et les activités agricoles ont pu reprendre, bénéficiant de conditions de végétation favorables. On s'attend cependant à des pénuries de semences dans certaines zones, en raison de la récolte inférieure à la moyenne de 1998.

Selon une mission d'évaluation organisée conjointement par le gouvernement et le CILSS à la fin avril, la production céréalière totale de 1998, inférieure à la moyenne, serait de 131 300 tonnes, dont 87 200 tonnes de riz et 44 100 tonnes de céréales secondaires. La Guinée Bissau importe normalement 40 pour cent des céréales nécessaires pour couvrir ses besoins de consommation. La quasi totalité de ces importations transite par le port maritime de Bissau. Les besoins d'importation céréalière pour la campagne de commercialisation 1998/99 (novembre/octobre) sont estimés à 87 000 tonnes, contre les 76 000 tonnes qui ont été importées en 1997/98.

Au Libéria, grâce à des conditions climatiques favorables et à une plus grande sécurité, les perspectives des récoltes sont meilleures que l'année dernière. Les activités de remise en état, la distribution d'intrants et l'aide alimentaire ont permis d'améliorer la situation des approvisionnements alimentaires. Le pays continue cependant à dépendre étroitement de l'aide alimentaire fournie par les organismes humanitaires.



DOMAINES D'INTERVENTION PRIORITAIRES

La situation peu encourageante des approvisionnements alimentaires suscite de graves inquiétudes en Somalie, où un million de personnes ont besoin d'une aide alimentaire d'urgence. En Ethiopie, le nombre d'individus menacés par de graves pénuries alimentaires a augmenté, suite aux mauvais résultats de la campagne Belg. La recrudescence du conflit civil en Angola a entraîné de vastes déplacements de population, qui ont profondément perturbé la production vivrière. En République démocratique du Congo, où la violence et l'insécurité sont permanentes, la situation des approvisionnements alimentaires reste précaire. En Sierra Leone, les difficultés d'approvisionnement alimentaire persistent, mais l'accord de paix signé récemment devrait permettre une amélioration de la situation.

Dans ce contexte, l'attention de la communauté internationale est appelée sur les quatre domaines suivants, où une intervention est requise:

Premièrement, il est urgent d'annoncer des opérations de secours supplémentaires en faveur de plusieurs pays de l'Afrique de l'Est qui ont été frappés par la sécheresse, notamment la Somalie et l'Ethiopie, où des millions de personnes sont menacées par de graves pénuries alimentaires.

Deuxièmement, il faut fournir une aide alimentaire à grande échelle aux nombreuses personnes qui ont été déplacées en Angola, et qui se trouvent actuellement assiégées dans des villes et des municipalités. Il importe notamment de fournir dans les plus brefs délais le support logistique qui permettra l'acheminement des vivres par voie aérienne.

Troisièmement, il convient de déployer un effort concerté pour faire respecter l'accord de cessez-le-feu signé le 10 juillet à Lusaka, en Zambie, afin de faciliter la fourniture de l'aide alimentaire aux populations en difficulté qui en ont désespérément besoin.

Quatrièmement, le soutien des donateurs est indispensable au relèvement du secteur agricole en Sierra Leone, au Libéria, au Rwanda et au Burundi.


FAO/SMIAR - Août 1999
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