FAO/SMIAR - Rapport sur l'Afrique No.3, Décembre 1999 - page 4

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PREMIERE PARTIE: VUE D'ENSEMBLE


En cette fin d'année 1999, des difficultés d'approvisionnements alimentaires sont apparues dans plusieurs pays d'Afrique subsaharienne, notamment en Afrique de l'Est, en raison des intempéries, de l'intensification des troubles intérieurs et d'infestations de ravageurs. Au début de l'année, une forte sécheresse a provoqué une réduction importante de la production alimentaire de la campagne secondaire en Éthiopie, au Kenya, en Somalie, en Tanzanie et en Ouganda, alors que des pluies tardives et irrégulières ont, plus tard dans l'année, gravement compromis les récoltes de la campagne principale. En Somalie, la recrudescence du conflit civil est venue aggraver les difficultés d'approvisionnements alimentaires, entraînant le déplacement d'un nombre important de familles agricoles et la perturbation des activités de production vivrière et d'assistance aux victimes du conflit et de la sécheresse. Dans la région des Grands Lacs, outre les périodes de sécheresse dans certaines régions du Rwanda et du Burundi qui ont compromis la production vivrière, les flambées de violence dans certaines zones rurales du Burundi ont provoqué d'importants déplacements de populations et la suspension de toute aide humanitaire, et les perspectives alimentaires y sont plutôt sombres. En République démocratique du Congo, la situation des approvisionnements alimentaires demeure précaire dans la plupart des régions du pays en raison des déplacements constants de populations rurales et, partant, de l'interruption des activités agricoles. Les inondations à Kinshasa, au début du mois de décembre, sont venues aggraver la situation des approvisionnements alimentaires. En Afrique australe, les perspectives alimentaires demeurent sombres en Angola, où le conflit civil s'est intensifié. En Afrique de l'Ouest, malgré des perspectives de récoltes généralement favorables, certaines difficultés d'approvisionnements alimentaires demeurent en Guinée-Bissau, au Libéria et en Sierra Leone, en raison des séquelles prolongées des conflits civils.



L'AFRIQUE DE L'EST CONNAÎT DES DIFFICULTÉS D'APPROVISIONNEMENTS ALIMENTAIRES

La production céréalière globale pour 1999 dans cette sous-région devrait selon les prévisions baisser fortement par rapport à l'année précédente, en raison de la forte sécheresse qui a récemment sévi. La pluviométrie de la sous-région a été caractérisée par des périodes de sécheresse prolongées et par des précipitations irrégulières pendant presque toute l'année. Une sécheresse grave au cours de la première moitié de l'année a provoqué une forte diminution des récoltes de la campagne principale "Gu" en Somalie et de la production céréalière de la campagne secondaire "Belg" en Éthiopie, alors que des pluies tardives et irrégulières plus tard dans l'année ont fortement compromis les récoltes de la campagne principale au Kenya, en Ouganda, en Tanzanie et en Éthiopie. Seuls l'Érythrée et le Soudan, qui ont enregistré des précipitations normales ou supérieures à la normale dans la plupart des régions céréalières, font exception.

En Somalie, les effets de la sécheresse ont été aggravés par la recrudescence du conflit civil qui a entraîné le déplacement d'un grand nombre de familles agricoles et l'interruption des activités agricoles et de l'aide humanitaire aux populations affectées. Près de 1,6 million de personnes à Mogadishu, dans le Bas et le Moyen Juba, dans certaines régions de Gedo et du Bas Chébéli sont inaccessibles pour les organisations humanitaires. L'escalade de la violence a entravé la distribution des secours humanitaires et un certain nombre de morts de faim ont été signalés.

La production céréalière de la campagne principale 1999 "Gu" est nettement inférieure à la moyenne de l'après-guerre (1993-1998), en raison de la sécheresse, des ravageurs et des déplacements de populations. Les perspectives pour les récoltes secondaires "Deyr" 1999/2000, prévues pour janvier/février, ne sont pas non plus encourageantes en raison de la sécheresse qui a retardé les semis. En supposant que la récolte "Deyr" sera dans la moyenne, les besoins d'importations céréalières pour la campagne de commercialisation 1999/2000 (août à juillet) sont estimés à 310 000 tonnes, y compris une aide alimentaire estimée à 70 000 tonnes. Toutefois, compte tenu de la reprise récente du conflit civil et des incertitudes qui entourent la campagne "Deyr", les besoins d'aide alimentaire devraient augmenter.

En Tanzanie, suite à des sécheresses localisées dans plusieurs régions, la situation alimentaire est extrêmement difficile pour près de 1,2 million de personnes, principalement dans les régions de Dodoma, Mara, Shinyanga, Singida, Tabora, Tanga et au sud de Mwanza, qui enregistrent toutes leur troisième mauvaise récolte consécutive. Les premières perspectives de récoltes secondaires "Vuli" pour 1999/2000 pour les régions septentrionales ayant deux saisons des pluies et des récoltes céréalières pour la campagne principale 2000 dans les régions centrales et méridionales à une seule saison des pluies, où les semis sont en cours, sont également défavorables en raison de pluies tardives et irrégulières.

La diminution de la production a donné lieu à des besoins d'importations céréalières de 200 000 tonnes pour la campagne de commercialisation 1999/2000 (juin/mai). Toutefois, une bonne partie de ce déficit devrait être comblée par les substitutions des céréales par des cultures vivrières non céréalières et par des importations commerciales. Le PAM a prolongé son opération d'urgence actuellement en cours dans plusieurs régions jusqu'à la fin de 1999. Le résultat de la campagne "Vuli" sera crucial pour les approvisionnements alimentaires dans les régions septentrionales du pays affectées par de graves pénuries alimentaires.

Au Kenya, on signale de fortes baisses de la production céréalière dans les provinces de l'est, du centre, de l'ouest et de Nyanza en raison de la sécheresse, de l'insuffisance des approvisionnements en intrants agricoles et des infestations de chenilles légionnaires dans certaines zones. Les premières estimations officielles font état d'une production de maïs d'environ 2,1 millions de tonnes, contre 2,44 millions de tonnes l'an dernier et une moyenne de 2,5 millions de tonnes pour les cinq dernières années.

La situation des approvisionnements alimentaires est critique dans les régions d'élevage du nord et du nord-est, notamment dans le district de Turkana, où des rapports indiquent que près de 250 000 personnes ont besoin d'une aide alimentaire d'urgence. Au cours de la saison des "grandes pluies", les précipitations ont été trop irrégulières et insuffisantes pour assurer une régénération des pâturages et la reconstitution des ressources hydriques. On signale également de graves pénuries alimentaires dans certaines parties des provinces du centre et de l'est. Le gouvernement a récemment mis sur pied des comités de coordination des secours d'urgence et a distribué plus de 4 000 tonnes de vivres aux ménages vulnérables dans la province de l'est et dans les districts d'élevage. Une aide alimentaire plus importante devra être fournie aux populations affectées.

En Ouganda, les perspectives pour les cultures vivrières de la deuxième campagne 1999, dont la récolte aura lieu en janvier prochain, se sont améliorées grâce à des pluies suffisantes en octobre, à l'exception de quelques zones des districts de Mbarara, Rakai et Apac. Toutefois, la sécheresse prolongée que plusieurs régions ont connue au début de l'année a affecté les cultures de la campagne principale de 1999, qui sont presque totalement perdues dans certaines zones. Près de 700 000 personnes dans au moins 28 districts ont été touchées et ont besoin d'une aide d'urgence.

En Érythrée, la production céréalière 1999, dont la récolte est en cours, devrait être abondante, en raison des pluies normales dans les principales régions productrices. Toutefois, dans les zones touchées par la guerre avec le pays voisin, l'Éthiopie, la production devrait accuser un net recul en raison des déplacements de populations. Une assistance internationale est nécessaire pour plus de 550 000 personnes touchées par le conflit. En outre, la diminution substantielle des exportations de l'Éthiopie aura des répercussions négatives sur la situation des approvisionnements alimentaires du pays.

En Éthiopie, les estimations officielles établissent à 7 millions le nombre de personnes qui ont besoin d'une aide alimentaire, ce qui comprend des populations touchées par la mauvaise récolte de la campagne "Belg" de cette année, les populations dans les zones de pâture de l'Est et du Sud affectées par deux mauvaises récoltes consécutives et près de 385 000 personnes déplacées à l'intérieur du pays en raison du conflit avec l'Érythrée. La situation dans plusieurs régions où les perspectives pour la campagne "Meher" en cours ne sont guère encourageantes; en raison des intempéries, suscite de plus en plus d'inquiétudes. Une mission FAO/PAM d'évaluation des récoltes et de la situation des disponibilités alimentaires parcourt actuellement le pays afin d'évaluer la production "Meher" de 1999 et d'établir les besoins d'aide alimentaire pour l'an 2000.

Au Soudan, la récolte céréalière de la campagne principale 1999, essentiellement le sorgho et le millet, s'annonce bonne, grâce à une amélioration des conditions de sécurité, à des pluies abondantes et à une campagne relativement indemne de ravageurs. Toutefois, des mauvaises récoltes ont été signalées dans certaines zones, notamment dans les États septentrionaux de Bahr El Ghazal et Unity. En prévision de cette bonne récolte et compte tenu des niveaux élevés des stocks de report, les cours du sorgho demeurent bas.
La situation générale des approvisionnements alimentaires est favorable et devrait s'améliorer avec l'arrivée de la nouvelle récolte sur les marchés. Toutefois, les producteurs de sorgho s'inquiètent de la persistance des bas prix depuis la récolte record de l'an dernier. Le secteur mécanisé a déjà opéré une conversion du sorgho à des cultures de rapport, principalement le sésame. Une mission FAO/PAM d'évaluation des récoltes et des disponibilités alimentaires se trouve actuellement dans le pays pour évaluer la production céréalière de la campagne principale 1999 et estimer l'excédent céréalier exportable et les besoins d'aide alimentaire pour l'an 2000.



LES PERSPECTIVES DE RÉCOLTES SONT INCERTAINES DANS LA RÉGION DES GRANDS LACS, ALORS QUE LA SÉCURITÉ SE DÉTÉRIORE DANS CERTAINES RÉGIONS

La situation alimentaire d'un grand nombre de personnes déplacées à l'intérieur des pays, de réfugiés et d'autres groupes vulnérables de la région des Grands Lacs s'est détériorée.

Au Burundi, les perspectives pour les récoltes de la première campagne 1999/2000, qui seront moissonnées à partir de janvier prochain, ont été compromises par la sécheresse. Dans les principales régions productrices, notamment au Kirungo dans le nord, Mosso dans l'est et Imbo dans l'ouest du pays, les semis ont été retardés par la sécheresse, ce qui pourrait avoir des répercussions négatives non seulement pour les cultures de la campagne en cours, mais également pour celles de la prochaine campagne à partir de février 2000, puisque la moisson des cultures ensemencées tardivement au cours de cette campagne va chevaucher les semis de la prochaine campagne.

Le resserrement des approvisionnements de céréales et de légumineuses, suite à une diminution de la production au cours de la dernière campagne B, devrait encore s'aggraver avec une autre mauvaise récolte. La situation de disponibilités alimentaires pour les populations déplacées, suite à l'intensification récente des troubles civils, est particulièrement préoccupante. On estime que 821 000 personnes, soit plus de 13 pour cent de la population, vivent actuellement dans des camps mis en place par le gouvernement. Les conditions de vie de ces camps privés d'eau potable et de sanitaires sont extrêmement difficiles. On signale de plus en plus de cas de maladies et de malnutrition. Un nombre limité de personnes a accès à la terre, les autres ne survivant que grâce à l'aide alimentaire. Les opérations de distribution de vivres aux populations vivant dans les camps de regroupement, qui ont été suspendues pendant cinq semaines devant la détérioration des conditions de sécurité dont ont notamment été victimes des membres d'organisations humanitaires des Nations Unies, ont repris fin novembre. Le PAM a conclu des accords avec différentes organisations non gouvernementales pour distribuer des vivres aux populations regroupées dans le district de Bujumbura rural, dont le nombre est estimé à plus de 300 000. Les activités des organisations des Nations Unies demeurent suspendues. Si la communauté internationale doit engager tous les efforts possibles pour trouver une solution à un conflit qui a des racines profondes au Burundi, l'aide humanitaire doit reprendre de toute urgence pour améliorer les conditions extrêmement difficiles dans lesquelles les populations affectées vivent actuellement.

Au Rwanda, les perspectives pour les cultures vivrières de la campagne A 2000, qui seront engrangées à partir de janvier, sont entourées d'incertitudes. Une période de forte sécheresse au cours du mois d'octobre, en particulier dans les régions est et sud, ont compromis les semis qui sont normalement effectués de la mi-septembre à la mi-octobre. Au cours de la première décade de novembre, les précipitations ont été irrégulières, avec des pluies abondantes dans les régions orientales et un temps sec dans d'autres régions. Toutefois, ces pluies sont peut-être arrivées trop tard pour empêcher une diminution des superficies emblavées. La sécheresse a également placé dans des conditions difficiles les cultures semées en septembre. Une mission récente d'évaluation mise sur pied à l'échelon local et comprenant des représentants du Ministère de l'agriculture, de la FAO, du PAM, de l'USAID/FEWS et de l'Union européenne a constaté que les cultures étaient en très mauvais état dans les zones est et sud, particulièrement dans les zones de basse altitude (Akagera, Bugesera, Mayaga) où la production de haricots, la principale culture de cette campagne, devrait être en net recul. Toutefois, cette même mission a observé une augmentation appréciable des semis dans les préfectures du nord-ouest où les cultures n'ont été que marginalement affectées par la sécheresse. Le rendement de cette campagne sera donc étroitement tributaire des pluies des prochaines semaines.

Des pénuries alimentaires aiguës ont été signalées dans plusieurs régions. Les populations les plus touchées comprennent les ménages qui ont fait une mauvaise récolte lors de la dernière campagne, qui n'ont qu'un pouvoir d'achat limité et n'ont pas bénéficié d'une aide alimentaire. Elles comprennent également les populations des zones reculées où les infrastructures de commercialisation sont médiocres ainsi que les groupes les plus vulnérables accusant un déficit vivrier structurel même lorsque les récoltes sont bonnes. Le gouvernement estime qu'en tout 900 000 personnes dans les préfectures de Gitarama, Butare, Gikongoro, Kibungo et Umutara ont besoin d'une aide alimentaire d'urgence et il lance un appel à la communauté internationale pour obtenir des vivres et des semences pour la prochaine campagne. La mission d'évaluation a recommandé la distribution de 7 000 tonnes d'équivalent céréales par mois aux populations affectées, contre 4 700 tonnes qui sont distribuées depuis le début du deuxième semestre de 1999. Afin de répondre aux besoins immédiats dans les zones les plus touchées par les mauvaises récoltes, le PAM prévoit de fournir immédiatement 3 000 tonnes de vivres à 200 000 personnes et doubler la ration d'alimentation complémentaire dans tous les centres de nutrition. La FAO a lancé un appel à contributions pour fournir des semences, des outils et du bétail à 100 000 ménages vulnérables. La nécessité d'une aide alimentaire supplémentaire sera dictée par de nouvelles évaluations et par l'évolution de la situation.

En République démocratique du Congo, la situation des approvisionnements alimentaires demeure extrêmement difficile dans la plupart des régions. Un rapport récent de la FAO indique que plus de 10 millions de personnes vivent dans des conditions d'insécurité alimentaire. Les populations les plus durement touchées comprennent 831 000 personnes déplacées, 844 000 citadins vulnérables et quelque 300 000 réfugiés qui se trouvent actuellement dans le pays. Les autres populations affectées comprennent 5,1 millions de personnes vivant sur la ligne du front. La division du pays en deux depuis le début du conflit a pratiquement interrompu tout commerce intérieur formel, tandis que les déplacements de population ont fortement perturbé les activités agricoles. La détérioration du pouvoir d'achat de la population, une pénurie de biens de consommation et des inondations au début du mois de décembre sont venues aggraver les problèmes alimentaires.



LES PERSPECTIVES ALIMENTAIRES EN AFRIQUE DE L'OUEST SONT FAVORABLES, MAIS DES DIFFICULTÉS PERSISTENT EN SIERRA LEONE, EN GUINÉE-BISSAU ET AU LIBÉRIA

Des conditions de croissance des cultures généralement favorables, en particulier en août et en septembre, laissent présager une récolte exceptionnelle dans le Sahel pour la deuxième année consécutive, établissant un nouveau record de production. Les pluies ont commencé en général bien reparties, sauf au Sénégal où elles sont arrivées sur le tard dans centre et le nord. Il a fallu procéder à de nouveaux semis dans des zones très localisées. Les pluies ont été en général bien réparties, régulières et abondantes au cours des mois critiques de juillet, août et septembre, même si elles ont provoqué d'importantes inondations en Gambie, au Sénégal, en Mauritanie, au Mali, au Niger et au Tchad. En ce qui concerne les ravageurs, la situation a été dans l'ensemble plutôt calme. Les pluies abondantes ont permis également une régénération satisfaisante des pâturages et la reconstitution des réserves en eau.

La production céréalière totale pour 1999 des neuf pays membres du CILSS a été estimée par des missions d'évaluation des récoltes FAO/CILSS au chiffre record de 10,9 millions de tonnes, soit 2,3 pour cent de plus qu'en 1998 et 16 pour cent de plus que la moyenne des cinq dernières années. On prévoit des récoltes record au Cap-Vert, en Gambie, au Mali et en Mauritanie, ainsi qu'une production supérieure à la moyenne au Burkina Faso, au Niger, au Sénégal et au Tchad. La production devrait être inférieure à la moyenne en Guinée-Bissau en raison du conflit civil et des déplacements de populations en 1998. Il s'agit d'estimations provisoires, les enquêtes ayant été effectuées avant la fin de la récolte et comprenant des prévisions pour les cultures de décrue et les cultures de contre-saison, en particulier en Mauritanie où les cultures pluviales ne représentent qu'environ un tiers du total de la production. Ces estimations sont donc susceptibles d'être révisées au cours des prochains mois, mais il est peu probable que la situation générale change de façon marquée.

En Sierra Leone, la signature d'un accord de paix au début du mois de juillet entre le gouvernement et les forces rebelles a amélioré les conditions de sécurité et permis la reprise des activités de secours d'urgence et de redressement. La réouverture des routes reliant Freetown à Bo et Kenema, et la Guinée à Kambia a permis de procéder à la distribution de vivres qui sont toutefois en quantités insuffisantes pour répondre aux besoins du grand nombre de réfugiés et de personnes déplacées, notamment dans le nord et l'est. Les affrontements qui ont récemment éclaté dans les villes septentrionales de Makeni et de Lunsar ont interrompu les livraisons de vivres. Les estimations actuelles situent à 700 000 le nombre de personnes déplacées, dont l'état nutritionnel est jugé précaire.

Les conditions de croissance de cultures ont, dans l'ensemble, été favorables depuis le début de la campagne agricole, malgré des pluies plus faibles fin juillet et en août. Si les conditions de sécurité se sont améliorées dans de nombreuses zones rurales, cette amélioration s'est produite vers la fin de la campagne et risque donc de ne pas avoir une incidence positive très appréciable sur la production de 1999. Les conditions d'insécurité dans plusieurs régions du pays au début de la campagne ont entravé la livraison des intrants agricoles et perturbé les activités agricoles. La production devrait donc rester proche du niveau enregistré l'an dernier, malgré des conditions climatiques favorables. Il convient toutefois de souligner que même dans l'hypothèse d'une mise en oeuvre rapide et réussie de l'accord de paix, le pays continuera d'être fortement tributaire de l'aide alimentaire pendant plusieurs années. Une mission FAO d'évaluation des récoltes et des disponibilités alimentaires est actuellement dans le pays pour analyser les perspectives de récoltes.

Au Libéria, la situation alimentaire globale s'est nettement améliorée, la production de riz de 1998 atteignant 62 pour cent du niveau d'avant-guerre, contre 25 pour cent en 1995 et la production de manioc a presque atteint le niveau d'avant-guerre, alors qu'elle n'atteignait que 50 pour cent de ce niveau en 1995. On attend de nouvelles améliorations en 1999. Jusqu'à présent, les conditions de croissance des cultures étaient favorables et, à l'exception du comté de Lofa dans le nord, une paix relative règne dans le pays, ce qui a une influence positive sur les activités agricoles. Les superficies cultivées devraient être nettement plus importantes qu'en 1998 et les rendements nettement supérieurs au niveau d'avant-guerre. La distribution de semences et d'outils par les organismes d'aide a contribué de façon appréciable à l'augmentation de productivité.

Les approvisionnements alimentaires sur les marchés urbains sont relativement stables et, dans l'ensemble, les prix des aliments sont inférieurs à ceux de 1998. Les activités de réinstallation et de redressement ont encouragé les réfugiés et les personnes déplacées à l'intérieur du pays à regagner leurs foyers. Toutefois, une flambée récente d'insécurité dans le nord a perturbé l'exécution des programmes d'aide humanitaire pour les rapatriés du Libéria et pour les réfugiés de la Sierra Leone, dont on signale la dégradation de l'état nutritionnel et sanitaire. Environ 90 000 réfugiés de la Sierra Leone sont encore au Libéria. Sur la base des projections pour l'année 2000 des chiffres estimatifs de population, qui sont de l'ordre de 2,8 millions en 1999, la FAO estime que le Libéria devra importer 155 000 tonnes de céréales pour répondre aux besoins de consommation de l'année prochaine. On prévoit des importations commerciales de 100 000 tonnes de riz et de 5 000 tonnes de blé. Les 50 000 tonnes restantes devront être assurées par l'aide alimentaire.

En Guinée-Bissau, la situation générale des approvisionnements alimentaires s'est améliorée à la fin du conflit qui avait éclaté en 1998. Toutefois, certains groupes de population font encore face à des difficultés alimentaires, notamment dans les centres urbains. Les personnes déplacées et les rapatriés ont bénéficié d'une aide alimentaire.

En septembre et octobre, des pluies abondantes et bien réparties ont favorisé le développement des cultures et le cumul des précipitations est supérieur à la normale. Une mission FAO/CILSS d'évaluation des récoltes qui s'est déroulée du 11 au 15 octobre a estimé la production céréalière de 1999 à 138 666 tonnes, soit 6 pour cent de plus que l'an dernier, mais 6 pour cent de moins qu'en 1997/1998, avant la crise. La production de riz a diminué en raison des inondations et des infestations de ravageurs dans les basses terres et les zones marécageuses. En revanche, la production de céréales secondaires a augmenté, principalement en raison d'une augmentation des superficies ensemencées et d'une quantité suffisante d'humidité dans les sols.



L'ANGOLA EST TOUJOURS AUX PRISES AVEC UNE GRAVE CRISE HUMANITAIRE, MAIS LES PERSPECTIVES SONT GÉNÉRALEMENT FAVORABLES DANS LE RESTE DE L'AFRIQUE AUSTRALE

En Angola, on a signalé une légère amélioration des conditions de sécurité en novembre, suite à une offensive militaire de grande envergure amorcée à la fin du mois de septembre, au cours de laquelle le gouvernement a repris le contrôle des villes d'Andulo et de Bailundo, dans le plateau central, d'anciennes places fortes des rebelles de l'UNITA. La distribution des secours a repris pour des milliers de personnes dans certaines régions des provinces de Bie, Huila et Huambo, où l'on signale des cas de malnutrition grave et où l'aide alimentaire a été suspendue pendant plusieurs mois. Toutefois, le nombre d'accidents dus aux mines terrestres serait à la hausse, en particulier dans la province orientale de Moxico et l'accès total aux villes auparavant assiégées n'est toujours pas possible.

Les semis pour les récoltes de 1999/2000 sont en cours. Des semences sont distribuées aux personnes déplacées qui ont accès aux terres. Les perspectives générales de production vivrière sont toutefois incertaines. L'avance des forces gouvernementales dans les régions centrales au mois d'octobre a coïncidé avec le début de la période des semis et le front s'est déplacé vers d'autres régions, notamment les provinces de Kuito, Lunda, Moxico, Zaire et Uige, provoquant d'autres déplacements de population. Depuis un mois, le nombre d'Angolais fuyant la guerre vers la Zambie voisine a augmenté, plus de 1 500 réfugiés ayant franchi la frontière, contre 100 le mois précédent.

Si la situation alimentaire et nutritionnelle des ruraux déplacés est extrêmement préoccupante, les populations des villes isolées de l'intérieur subissent une forte hausse des prix des aliments. À Luanda, la capitale, une inflation galopante et la dévaluation rapide de la monnaie nationale ont fortement diminué le pouvoir d'achat de produits alimentaires pour la majorité de la population. Le PAM fournit actuellement une aide alimentaire d'urgence à 1,1 million de personnes.

Ailleurs en Afrique australe, les approvisionnements alimentaires sont stables, par suite de bonnes récoltes céréalières en 1999 dans certains pays (Malawi, Mozambique, Madagascar), d'un retour à des niveaux normaux dans d'autres pays (Lesotho, Swaziland, Zambie) et d'une capacité d'importations commerciales adéquate pour d'autres (Botswana, Namibie, Zambie et Zimbabwe), qui leur permet de couvrir leurs besoins.



BESOINS D'IMPORTATION ET D'AIDE ALIMENTAIRE EN 1999/2000

Les besoins d'importations de céréales de l'Afrique subsaharienne, aide alimentaire comprise, pour 1999/2000 devraient augmenter, en raison de la baisse des récoltes en Afrique de l'Est. Pour les 24 pays qui ont déjà amorcé la campagne de commercialisation 1999/2000, les estimations préliminaires du SMIAR pour la production 1999 et les besoins d'importation et d'aide alimentaire pour 1999/2000 sont résumés au Tableau 1. L'ampleur exacte de l'augmentation des besoins d'importation et d'aide alimentaire sera fonction des résultats de la campagne en cours dans les 24 autres pays.



DOMAINES D'INTERVENTION PRIORITAIRES

Des millions de personnes dans plusieurs régions de l'Afrique subsaharienne font face à des difficultés persistantes d'approvisionnements alimentaires, en raison de conditions climatiques adverses et/ou de troubles intérieurs, récents ou en cours ou pour ces deux raisons. La crise alimentaire grave en Somalie est extrêmement préoccupante. Dans le Sud de ce pays, près de 1,6 million de personnes sont hors de portée des organismes d'aide humanitaire en raison des conditions d'insécurité. Les difficultés d'approvisionnements alimentaires se sont également intensifiées au Burundi, en raison de la détérioration des conditions de sécurité et de conditions climatiques adverses. En Angola, l'escalade récente des hostilités a entraîné de nouveaux déplacements de populations rurales qui font face à des problèmes nutritionnels et sanitaires aigus. En Afrique de l'Est, l'Éthiopie, l'Ouganda, le Kenya et la Tanzanie font face à des graves pénuries alimentaires, un grand nombre de personnes ayant besoin d'une aide alimentaire d'urgence, principalement en raison de mauvaises récoltes dues à la sécheresse. Dans le sud du Soudan, malgré des conditions de végétation généralement favorables, près de 2 millions de personnes vivant dans des conditions d'insécurité et de déplacements fréquents ont également besoin d'une assistance alimentaire. En Afrique de l'Ouest, si les perspectives alimentaires sont généralement très favorables, il existe encore des difficultés d'approvisionnements alimentaires en Guinée-Bissau, au Libéria et en Sierra Leone, en raison des séquelles des troubles intérieurs.

Devant cette situation, l'attention de la communauté internationale est appelée sur les domaines suivants, où une intervention prioritaire est nécessaire:

Premièrement, la Somalie et l'Angola ont besoin d'une aide alimentaire supplémentaire de toute urgence pour mettre un terme à la grave crise alimentaire à laquelle ces pays sont confrontés et qui pourrait dégénérer en une famine généralisée.

Deuxièmement, au Burundi, l'aide humanitaire aux populations déplacées qui vivent dans des conditions extrêmement difficiles dans les camps doit reprendre de toute urgence.

Troisièmement, une aide alimentaire demeure nécessaire dans plusieurs pays, y compris le Libéria, la Sierra Leone, la Guinée-Bissau et le Rwanda, qui sortent à peine de conflits civils. En Afrique de l'Est, le Kenya, l'Éthiopie, la Tanzanie et l'Ouganda, où la sécheresse a récemment sévi, ont également besoin d'une aide alimentaire.

Quatrièmement, une aide constante des donateurs est nécessaire pour le redressement du secteur agricole au Rwanda, au Libéria, en Sierra Leone et dans d'autres pays où il existe des perspectives de paix durable.


FAO/SMIAR -Décembre 1999

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