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Pinus radiata, essence exotique

C. W. SCOTT, Fonctionnaire de l'Assistance technique de la FAO

Cet article résume l'un des chapitres d'une prochaine publication de la FAO sur Pinus radiata, commandée par la Division des forêts et produits forestiers. Il expose l'essentiel de l'expérience acquise dans les cinq pays où cette essence a été le plus largement employée - Nouvelle-Zélande, Chili, Australie, Espagne et Union sud-africaine. L'ouvrage complet traitera des sujets suivants: caractères botaniques, écologie et croissance de Pinus radiata dans son aire d'origine; rôle en tant qu'essence exotique; techniques de plantation, d'éclaircie et d'élagage; régénération naturelle, accroissement et production; pathologie et protection; méthodes d'exploitation; technologie et utilisation du bois; débouchés et commerce.

Pinus radiata a été introduit sur une grande échelle et avec succès dans quatre pays situés au sud de l'équateur, la Nouvelle-Zélande, le Chili, l'Australie et l'Afrique du Sud, et dans un pays de l'hémisphère nord, l'Espagne. C'est surtout depuis 1923 environ qu'on l'utilise largement; bien auparavant on avait établi de petites plantations qui, dans des stations et sous un climat convenables, avaient révélé ses qualités de rusticité et de rapidité de croissance, et montré que son bois était susceptible de nombreuses applications. Aux environs de 1956-57, la surface plantée en P. radiata dans ces cinq pays correspond à quelque 630 000 hectares.

Le tableau 1 indique les surfaces plantées dans chaque pays, en distinguant, lorsqu'on dispose d'informations suffisantes pour le faire, la part qui revient à l'Etat, aux grandes sociétés, aux organismes locaux ou aux particuliers.

Les résultats obtenus dans chacun de ces cinq pays donnent des indications intéressantes sur ce qu'il faut faire ou ne pas faire avec ce pin ou avec tout autre exotique analogue. Ces cinq pays planteurs fournissent sur cette question un assez grand nombre de renseignements.

A. D. Lindsay (1937), G. B. Rawlings (1957) et des études de climatologie faites en Nouvelle-Galles du Sud (Australie) (1957) démontrent nettement les faits suivants: P. radiata se développe bien sous un climat de type méditerranéen, caractérisé par des pluies d'hiver et des étés secs, une précipitation annuelle au moins égale à 380 millimètres complétée en été par du brouillard, des brumes ou d'autres formes d'humidité de ce genre; la moyenne des températures maxima des mois d'été ne doit pas dépasser 21°C; il supporte les gelées hivernales, mais lorsqu'elles surviennent au cours de la saison de végétation, les arbres, selon leur intensité, sont endommagés ou tués; la grêle peut être un facteur limitant, en facilitant l'attaque du champignon Diplodia. Il ne faut pas oublier que dans son aire d'origine, en Californie, l'espèce ne s'étend pas au-delà de 10 kilomètres du bord de la mer et ne dépasse pas 300 mètres d'altitude. En Nouvelle-Zélande et en Australie, on réussit parfois à le faire pousser beaucoup plus loin de la mer, et, en altitude, jusqu'à 600 ou 1 200 mètres.

Monterey, la patrie de P. radiata en Californie, est situé à une latitude voisine de 37° N., et Concepcion au Chili, où cette même essence a été introduite et se développe remarquablement bien, est à une latitude voisine de 37°S. En Nouvelle-Zélande et en Australie, les deux plus grandes plantations de P. radiata se situent vers 38°S. de latitude; il s'agit de la région de Rotorua pour le premier pays et de celle de Mount Burr (Australie-Méridionale) pour le second. Dans les Etats australiens de Victoria et de Nouvelle-Galles du Sud les immenses et magnifiques peuplements de P. radiata se trouvent entre les latitudes 34° et 37°S, mais, en Nouvelle-Zélande, il y en a d'excellents qui atteignent 46°S. et en Espagne, sur la côte nord, 43°N. De plus, d'après des travaux récents sur le croisement naturel ou artificiel de P. radiata avec ses proches parents, P. attenuata et P. muricata, et sur P. radiata var. binata deux aiguilles que l'on trouve dans l'île mexicaine de Guadalupe à 830 kilomètres au sud de son aire principale, sous 29°N. de latitude, il semble que l'on puisse envisager l'extension de l'aire où P. radiata peut être introduit avec succès.

Tableau 1. - Surfaces plantées en Pinus radiata dans les cinq pays ou se trouvent les peuplements les plus importants, 1956


Etat

Grandes sociétés

Organismes locaux et petits propriétaires privés

Total de P. radiata

Pourcentage de P. radiata dans l'ensemble des conifères exotiques


Hectares

Nouvelle-Zélande

80 800

114 000

34 000

228 800

60

Chili

-

-

-

200 000

99

Australie

86 800

-

35 600

122 400

76

Espagne

20 000

-

31 000

51 000

100

Afrique du Sud

12 000

-

* 9 200

* 21 200

8

TOTAL

-

-

-

623 4000

58

* Chiffres approximatifs.

Les systèmes généraux de classification des climats mondiaux, tels que ceux de Köppen ou de Thornthwaite, se révèlent jusqu'à présent inutilisables pour déterminer les zones où P. radiata doit réussir, car d'autres facteurs peuvent intervenir favorablement. Les Australiens ont remarqué que, pour une région entièrement comprise dans un seul type de climat du système de Thornthwaite, il y a des zones où P. radiata réussit et d'autres où il ne pousse pas du tout. Il est conseillé au forestier d'étudier les caractéristiques du climat et tous les autres facteurs de la station envisagée et, si la conjoncture se révèle assez favorable, de faire des essais de plantation de faible ou moyenne importance. On trouve facilement de la graine, à bon marché, et on peut tirer rapidement les conclusions de l'essai. L'expérience menée en Nouvelle-Galles du Sud est peut-être particulièrement intéressante, car on y a honnêtement enregistré aussi bien les échecs que les réussites certaines.

P. radiata se complaît dans des sols bien drainés de 1 à1,2 mètres de profondeur; dans son aire il se révèle moins exigeant, au point de vue édaphique, que Pseudotsuga menziesii ou Pinus ponderosa, mais, en Australie, il est plus exigeant que Pinus pinaster (maritima). P. radiata demande un sol moins humide que Pseudotsuga menziesii mais plus humide que Pinus ponderosa.

En ce qui concerne la question fort controversée des risques encourus par des plantations pures effectuées sur de grandes surfaces, il est bon de se reporter aux publications de la FAO: La protection des plantations forestières contre les maladies et les insectes parasites (Cahiers de mise en valeur des forêts, N° 3) et Choice of tree species (N° 13) où figurent les arguments concernant ce problème général.

J. J. de Gryse (1955) et G. B. Rawlings (1957) ont également fait d'intéressantes études sur le problème, en particulier sur celui des plantations pures de P. radiata. Tous ceux qui connaissent bien la question sont d'accord sur la nécessité absolue de ne maintenir ce pin que sous des climats et dans des stations assez favorables, et de lui apporter autant de soins, en particulier des éclaircies rationnelles, qu'il est rentable de le faire. Il est également prudent de répartir les risques dus aux épidémies ou à des changements imprévisibles de la qualité des bois demandés par les consommateurs, en plantant dans une proportion raisonnable des essences intéressantes autres que P. radiata. Le fait que de nombreux forestiers, du secteur public ou privé, envisagent la plantation de grandes surfaces avec P. radiata pur ou presque prouve qu'il s'agit d'une essence dont l'introduction est exceptionnellement facile et économique et la production remarquable. Cela signifie aussi qu'il n'est pas facile de trouver une autre essence qui soutienne la comparaison avec P. radiata en ce qui concerne le coût de l'installation et le profit à en attendre. Il faut poursuivre les recherches sur la façon de réduire les risques d'une monoculture d'arbres, pour faciliter les mélanges d'essences ou de races, maintenir un sol forestier sain et assurer un revenu continu.

Ceux qui se font les avocats des forêts irrégulières et mélangées pied à pied doivent tenir compte de ce que les industriels ont une préférence marquée pour les grandes coupes équiennes et d'une seule essence, ce qui simplifie et concentre l'exploitation et permet d'approvisionner à tous moments les usines de pâte ou les scieries en lots aussi homogènes que possible. Il faudra peut-être arriver à un compromis entre les exigences culturales qui imposent de planter des essences différentes selon les stations et celles de l'industriel qui préfère, parce que plus économique, une production homogène; on arriverait ainsi à une solution optimum qui permettrait d'éviter la création de peuplements malvenants et inadaptés sans augmenter excessivement les coûts de transformation. Pour des conifères tels que P. radiata, la meilleure solution consiste peut-être à créer des parcelles suffisamment étendues, équiennes et pures; les espèces et les races seraient choisies rationnellement, et varieraient selon les parcelles; les âges seraient répartis de façon à assurer un rendement continu. En Nouvelle-Zélande, on a fait une très intéressante suggestion: on préconise de faire pousser un peuplement équienne de P. radiata traité à la révolution de 20 ans pour produire du bois à pâte sous un peuplement équienne traité à la révolution de 40 ans pour produire des sciages, ce qui donnerait une forêt à deux étages.

On examinera chacun des cinq pays qui ont introduit P. radiata sur de grandes surfaces, dans un ordre dicté par l'importance de la surface totale consacrée à ce pin. La plupart des renseignements concernant les trois pays du Commonwealth britannique (Nouvelle-Zélande, Australie et Afrique du Sud) ont été pris, après autorisation, dans des rapports qu'ils avaient préparés à l'occasion de la septième Conférence forestière du Commonwealth qui s'est tenue en 1957 en Australie et en Nouvelle-Zélande. La documentation concernant tous les exotiques de ces pays doit être insérée dans une prochaine édition en cours de révision à Oxford de l'ouvrage de R. S. Troup, Exotic Forest Trees in the British Commonwealth (1932).

Nouvelle-Zélande

En Nouvelle-Zélande, les plantations ont été faites à un rythme si rapide et sur des surfaces si grandes qu'on a commis, il faut le reconnaître, quelques erreurs; mais il est réconfortant de considérer l'ampleur d'ensemble du succès obtenu.

Récemment, un difficile inventaire forestier national de toutes les forêts indigènes du pays, mené à bien entre 1946 et 1955, a été complété malgré la charge et les problèmes qu'impliquent 400 000 hectares de conifères exotiques. On estime que les forêts naturelles ont jadis couvert environ 70 pour cent du pays et que leur superficie atteignait peut-être 18 millions d'hectares. En 1957, il ne restait que 6 millions d'hectares après les défrichements habituels effectués au profit de la culture, du pâturage, ou de l'exploitation du bois. En plaine, certains défrichements s'imposaient; en montagne, certains autres ont déclenché des phénomènes d'érosion; on a beaucoup gaspillé en brûlant des peuplements primitifs de grande qualité. Il s'agissait de forêts du type sempervirente tempérées mélangées, dont les éléments essentiels étaient des Podocarpacae, des Agathis, et le hêtre de l'hémisphère sud (Nothofagus). Elles ressemblaient beaucoup aux forêts naturelles du Chili.

Vers 1890, il est nettement apparu que les ressources en bois d'œuvre des forêts de Podocarpus diminuaient très vite, et que, par suite de leur croissance lente et de l'absence de régénération, il était difficile d'envisager l'application des règles de conservation et d'aménagement en vue d'un rendement soutenu. A ce moment-là également on a prouvé que des conifères exotiques venant d'Amérique du Nord, tels que Pinus radiata et Pseudotsuga menziesii, le premier en particulier, se développaient exceptionnellement bien en Nouvelle-Zélande et poussaient très vite. Ainsi, aux environs de 1890, l'Etat commença à planter méthodiquement; l'effort fut poursuivi, sur des surfaces d'étendue faible ou moyenne, jusqu'en 1923; c'est alors que brutalement, la cadence de plantation augmenta de façon considérable. Entre 1923 et 1936, il a été planté quelque 240 000 hectares, en 12 ans environ, à la cadence moyenne de 20 000 hectares par an, la moitié à peu près par l'Etat la moitié par des particuliers. 40 pour cent des plantations domaniales et 85 à 90 pour cent des forêts privées sont à base de P. radiata. En comptant les plantations effectuées avant 1923 et depuis 1936, la superficie totale occupée en 1957 par les conifères exotiques couvre environ 380 000 hectares.

L'engouement pour les plantations d'exotiques entre 1923 et 1936 est responsable de grosses erreurs et a provoqué des pertes d'argent. Les reboiseurs particuliers en ont spécialement souffert, à tel point qu'une enquête officielle importante fut ouverte en 1934; elle aboutit à une 'amélioration des organismes de reboisement. Il ne faut pas attribuer ces échecs au choix de l'espèce principale, P. radiata. Ils étaient dus à une mise en œuvre défectueuse. Les succès enregistrés plus tard ont démontré que, correctement utilisé, ce pin était excellent et produisait du bois de bonne qualité. Parmi les principales erreurs commises en matière de plantation d'exotiques, le Service forestier de Nouvelle-Zélande considère que les plus importantes sont les suivantes: stations qui ne conviennent pas, mauvaises graines et mauvaises techniques de plantation, manque de soins (désherbage et éclaircie), trop large espacement, protection insuffisante contre le feu, mauvaise distribution des classes d'âge, et parfois situation géographique défavorable pour la vente. C'est une liste impressionnante; il est facile d'éviter ces erreurs grâce à l'expérience acquise à la lumière des premiers résultats. Le principal, c'est de s'inspirer de cette expérience en établissant les programmes de plantation actuels ou futurs, et de reconnaître tout ce qui a pu être fait grâce à Pinus radiata, en dépit d'erreurs commises dans le passé, erreurs qui auraient pu être évitées.

Cet exotique californien, qui ne joue, chez lui, aucun rôle économique, a effectivement comblé une lacune importante dans l'approvisionnement en bois de la Nouvelle-Zélande. Il fournit la matière première d'une vaste industrie de bois d'œuvre et de pâte et alimente un substantiel courant d'exportations. Jusqu'en 1930, les besoins en bois de la Nouvelle-Zélande étaient satisfaits dans la proportion de 90 pour cent par les forêts naturelles, qui étaient en train de disparaître sous cette charge. En 1956, les plantations d'exotiques fournissaient presque la moitié du volume réalisé annuellement, et 95 pour cent du volume de bois d'exotiques exploité est représenté par P. radiata. Maintenant, les exotiques introduits fournissent presque la moitié du bois de construction utilisé dans le pays. La totalité de la production de pâte et de papier est assurée par P. radiata. Au cours des dernières années, on a exporté annuellement 82 600 mètres cubes de bois d'exotiques. Enfin il faut se rappeler qu'en 1957, une faible proportion seulement des peuplements d'exotiques avaient plus de 40 ans. Le Service forestier de Nouvelle-Zélande pense qu'il ne faut pas sous-estimer la production des plantations effectuées il y a vingt-cinq à trente ans, mal conduites et le plus souvent installées sur des stations qui ne convenaient pas. Leur production est supérieure à ce qu'on pouvait en attendre; il est difficile de trouver dans la gamme des conifères introduits en Nouvelle-Zélande une essence qui donne un meilleur bois que P. radiata, quelle que soit l'utilisation envisagée.

Climat

Le climat de la majeure partie de la Nouvelle-Zélande est typiquement maritime; il n'est pas méditerranéen; les précipitations annuelles sont en général comprises entre 625 et 2 000 millimètres, à l'exception de certaines régions montagneuses qui sont beaucoup plus humides, et de deux régions plus sèches de l'île du Sud (l'Otago central et les plaines de Canterbury). Les précipitations ont tendance à être uniformément réparties au cours de l'année, mais dans l'île du Nord on enregistre un minimum estival peu marqué; lorsqu'il est plus accusé, dans d'autres pays, ce phénomène se révèle important pour P. radiata. L'humidité atmosphérique est en général élevée dans le centre de l'île du Nord où se trouvent les principales plantations de P. radiata (Rotorua - Kaingaroa); le climat de cette région est qualifié de très humide. Les températures sont favorables à la croissance des arbres presque toute l'année, en particulier dans l'île du Nord; ainsi, les forêts d'exotiques bénéficient d'une longue saison de végétation. Cependant, on enregistre des gelées hors saison, qui portent préjudice aux exotiques et réduisent dans une certaine mesure l'aire où l'on peut les introduire sans risque. En somme, le climat des régions de Nouvelle-Zélande où se trouvent la plupart des P. radiata est très favorable à une croissance rapide, bien qu'il ne s'agisse pas d'un type de climat méditerranéen semblable à celui sous lequel il se développe dans son aire naturelle ou dans la région de Concepcion au Chili.

G. B. Rawlings (1957) a indiqué les dangers qui menacent cette espèce lorsque les étés sont trop chauds et trop humides. D'après lui, dans la partie de la Nouvelle-Zélande située au nord de la latitude 39°S., où se trouvent l'importante plantation de Kaingaroa ainsi que d'autres peuplements de P. radiata couvrant 160 000 hectares au moins, le climat se rapproche plus du type tempéré humide que du type maritime occidental qui prévaut au sud de 39°S. de latitude. Cette classification climatique peut ne pas être approuvée par tout le monde, mais il n'est pas douteux qu'il existe un danger pour P. radiata si l'été est trop chaud et trop humide.

Sols et terrains consacrés aux plantations

La plupart des plantations de P. radiata se trouvent sur des sols à pierre ponce podzolisés qui se sont formés à partir de retombées de cendres rhyolitiques. Ils ont une consistance sableuse mais conservent assez bien l'humidité. De tels sols couvrent la majeure partie des plaines de Kaingaroa; ils étaient faciles à planter. On relève d'un climat de type méditerranéen vrai avec un été sec. Les peuplements du Chili sont donc particulièrement bien venants; ils le sont même plus que ceux de Nouvelle-Zélande. Cependant, on doit faire très attention aux épidémies car les principaux peuplements de conifères exotiques sont constitués presque uniquement de P. radiata et l'ensemble des plantations de la grande région à pino insigne comporte 92 pour cent de sujets de cette essence.

Dans la forêt naturelle chilienne, on trouve les essences dominantes suivantes: hêtres de l'hémisphère sud (Nothofagus) et «tepa» (Laurelia serrata), ainsi que des conifères indigènes ayant des liens de parenté avec ceux de la Nouvelle-Zélande, tels que des Araucaria et divers Podocarpus. Ces forêts sont en voie de disparition rapide sous l'action du feu et de la hache, non seulement sur des terres à vocation agricole et pastorale, mais aussi, malheureusement, sur des terres à vocation forestière. Devant cet état de fait, on a recours, comme en Nouvelle-Zélande, aux exotiques, et en particulier au pino insigne, qui jouent un rôle important en fournissant du bois d'œuvre bon marché et du bois à pâte sur le marché intérieur et pour l'exportation. Toutefois, on ne plante pas d'exotiques en haute montagne, où la conservation des forêts naturelles s'impose si l'on veut éviter l'érosion et les inondations.

Pino insigne a été introduit au Chili en 1885 par Arturo Junge. On a commencé à faire de grandes plantations dans un certain nombre d'endroits vers 1935; la surface plantée annuellement était en moyenne de l'ordre de 8 000 à 10 000 hectares; puis celle-ci a augmenté pour atteindre un maximum de 16 000 hectares entre 1947 et 1949. Ces chiffres ne sont qu'approximatifs car la plupart des plantations ont été faites par des propriétaires privés, et il est difficile de trouver des rapports détaillés et précis à leur sujet. Plus de 80 pour cent de toutes les plantations de P. radiata du Chili se trouvent rassemblées dans la partie centrale du pays qui couvre 7 de ses 25 provinces et que l'on appelle la zone de Concepcion. Celle-ci jouit heureusement d'un excellent climat, peut-être le meilleur du monde pour ce pin. 85 pour cent des plantations appartiennent à des particuliers; 15 pour cent seulement appartiennent à l'Etat ou à des organismes semi-publics. 70 pour cent environ de ces pins avaient moins de 15 ans en 1958, alors qu'en Nouvelle-Zélande 65 pour cent avaient 30 ans ou moins à la même date.

L'Etat a encouragé les plantations en les exonérant d'impôt pendant les 30 premières années, en distribuant des plants et en prenant diverses autres mesures. Cependant, l'initiative des plantations revient à l'entreprise privée: particuliers ou sociétés qui ont cherché à gagner de l'argent en produisant du bois à pâte ou du bois d'œuvre. Il faut espérer que ces projets légitimes n'échoueront pas, par manque de capitaux ou de technicité pour la construction et la marche des scieries, des usines de pâte et des papeteries, ou par suite de l'insuffisance de l'équipement en routes, voies ferrées et ports, ou de l'absence d'organisation du marché. Il faut en effet que la production des plantations, qui augmente rapidement, puisse être absorbée.

Bien que la plupart de ces pins n'aient que 15 ans ou moins, leur production, déjà importante, indique l'ampleur des économies ainsi réalisées au profit des forêts naturelles. On estime la production actuelle de bois de pino insigne à environ 120 000 à 140 000 mètres cubes, dont 10 à 30 pour cent environ ont été exportés ou vont l'être, suivant la demande étrangère. Deux usines de pâte ou de papier qui fonctionnent depuis quelques années utilisent, au moins dans une certaine proportion, du pino insigne; deux nouvelles usines ont été construites et on en prévoit quatre autres. Vers 1960-61, on envisage d'exporter 100 000 tonnes de pâte, entièrement fabriquées à partir de pino insigne.

Enfin, il faut signaler que la plupart des plantations se trouvent sur des terres pauvres, impropres à la culture permanente, et susceptibles de s'éroder sans la protection de la forêt ou d'un couvert végétal quelconque. Il est possible que, grâce à des techniques modernes, les terrains de cette catégorie puissent convenir à un pâturage soigneusement contrôlé; mais sur les 1 500 000 hectares de terres de la région de Concepcion que l'on estime impropres à la culture et favorables au pin, il semble qu'il y ait assez de place à la fois pour créer des pâturages et planter des pins à la mesure des besoins des marchés intérieurs et extérieurs.

Climat

Comme il a déjà été dit, c'est dans les sept provinces situées autour de Concepcion, entre 35°15'S. et 38°30'S., que se trouve la région à pino insigne qui englobe plus de 80 pour cent des plantations. Cette zone a un climat typiquement méditerranéen, semblable à celui de l'aire de P. radiata en Californie, avec des étés relativement secs et des pluies qui tombent surtout en hiver. Sous un tel climat, cette essence se développe vigoureusement; sa croissance y est rapide. Dans les régions plantées, la précipitation annuelle varie en général de 1 000 à 1 300 millimètres; certaines parties ne reçoivent que 700 millimètres; d'autres reçoivent peut-être plus de 1 600 millimètres lorsqu'il s'agit de zones plus élevées. Les vents et le froid ne sont pas à craindre, la neige ou la grêle ne font pas de dégâts sérieux.

Au cours de sa visite au Chili, G. B. Rawlings (1957) a remarqué que les plantations de moindre importance, installées au nord de la région de Concepcion sous un climat plus sec, avaient tendance à moins bien pousser; il a trouvé des indices certains de mauvais développement révélé par des défoliaisons pathologiques, et des dégâts dus au vent et à la neige, dans les plantations qui se trouvent au sud de Concepcion où l'été est plus arrosé, les précipitations annuelles plus importantes, jusqu'à 3 000 millimètres, le vent et la neige plus fréquents.

Sols et terrains consacrés aux plantations

Le comportement de P. radiata au Chili confirme le point de vue de A. D. Lindsay (1937) et de divers auteurs qui affirment que cette essence trouve les meilleures conditions de développement, dans son aire naturelle ou ailleurs, sur un sol bien drainé de 1 à 1,2 mètres de profondeur. Dans une région à P. radiata comme celle de Lota, près de Concepcion, la hauteur, à un âge donné, et le taux d'accroissement, sont nettement proportionnels à la profondeur du sol. Lorsque le sol est superficiel et repose sur une roche mère quantique, l'accroissement annuel en hauteur peut être égal ou inférieur à 50 centimètres, ce qui est très inférieur à l'accroissement enregistré sur des sols plus profonds et moins acides. Un forestier expérimenté de Lota estime n'y trouvait que très peu de gros arbres, mais seulement des touffes de graminées (Poa caespitosa), des fougères (Pteridium esculentum), ou, à l'état dispersé, du «manuka»(Leptospermum scoparium) ou une végétation basse de «monoao» (Dracophyllum subulatum). On a installé dans cette zone environ 240 000 hectares de conifères exotiques dont environ les deux tiers sont des P. radiata. A l'époque où l'on plantait beaucoup, entre 1923 et 1936, on pensait que ces sols à pierre ponce ne convenaient pas pour la culture ou le pâturage; mais depuis on a découvert qu'en corrigeant leur carence en cobalt, qui est un oligo-élément, ces sols deviennent presque tous d'excellentes terres agricoles.

Dans l'extrême nord de l'île du Nord, les sols sont moins favorables; on y trouve des sols podzolisés lourds, peu fertiles, qui dans certains cas ont évolué sous des forêts incendiées de «kauri» (Agathis). Dans l'île du Sud, à l'est de la principale chaîne de montagnes, on trouve, à basse altitude, du loess mélangé à de l'argile et des galets, et en altitude des sols instables. Ces derniers posent de graves problèmes de conservation des sols et de protection contre l'érosion; les exotiques peuvent y jouer un rôle utile.

Surface plantée: prévisions de plantation

C'est la Nouvelle-Zélande qui a la plus grande surface de P. radiata du monde: 231 000 hectares. Ce pin constitue à peu près les deux tiers de l'ensemble des peuplements de conifères exotiques. Dans les plantations privées, il y a jusqu'à 85 pour cent ou plus de P. radiata, mais dans les plantations domaniales, la proportion n'est que de 40 pour cent environ, ce qui répartit mieux les risques et donne une meilleure garantie contre les épidémies. Environ 65 pour cent des plantations domaniales de P. radiata se rangent dans la classe d'âge 1921-1930. Une très importante proportion des plantations de P. radiata appartenant à des sociétés date de la période 1923-1936. Le programme actuel de l'Etat prévoit la plantation d'environ 1 200 à 1 600 hectares de P. radiata, mais on est en train d'étudier un programme beaucoup plus important dans lequel le pourcentage de P. radiata sera au moins aussi grand que précédemment (40 à 50 pour cent).

Choix des stations

On a trouvé que ce pin s'accommodait d'un grand nombre de sols, depuis les sables jusqu'aux argiles, y compris les dunes de sable côtières. C'est sur les limons sableux profonds, bien drainés, moyennement fertiles, capables de porter des fougères (Pteridium) de végétation moyenne à vigoureuse, qu'il semble le mieux se développer. Il ne vient pas bien dans les stations humides ou dans les argiles podzolisées peu fertiles où il tend à dépérir; les cimes se dégarnissent et il perd ses aiguilles. Il est résistant à la sécheresse, mais les jeunes sujets sont sensibles au froid. Sur les sols peu profonds, en particulier lorsqu'il y a une croûte ou une couche compacte, les chablis sont fréquents.

D'après de récents travaux, les besoins en matières nutritives dans le sol des pins exotiques de Nouvelle-Zélande s'inscriraient dans l'ordre suivant:

Le moins exigeant

P. pinaster (maritima)

Un peu plus exigeants

P. elliottii et taeda

Les plus exigeants

P. radiata et patula

Résultats et possibilités

Si l'on considère les importants résultats obtenus grâce à P. radiata en Nouvelle-Zélande, on voit qu'en dépit d'erreurs et dans certains cas d'une mauvaise utilisation, cet exotique fournit depuis peu environ la moitié du volume de bois exploité dans le pays, ou en d'autres termes a permis de réduire de moitié la consommation de bois d'essences indigènes, telles que les Podocarpus qui sont en voie de disparition. Il est l'unique source de matière première d'une importante industrie de pâte et de papier qui assure l'approvisionnement du pays et alimente un courant d'exportations, industrie dont l'avenir est prometteur, il fournit à l'exportation une quantité appréciable de sciages. Les résultats obtenus sont d'autant plus remarquables que les arbres abattus ont au maximum 40 ans. La production annuelle de bois de P. radiata s'élève à 1 500 960 mètres cubes de grumes de sciage, 9 629 mètres cubes de grumes écorcées à placage, et 708 000 mètres cubes de bois à pâte; la production annuelle de sciages de P. radiata s'élève à 684 400 mètres cubes.

Dans une station moyenne de Nouvelle-Zélande, on estime que le rendement moyen est de 367 mètres cubes par hectare à 20 ans, 690 mètres cubes par hectare à 30 ans, et 867 mètres cubes par hectare à 40 ans, les mesures étant prises sous écorce jusqu'à un diamètre minimum de 15 centimètres au fin bout.

Les possibilités d'utilisation de P. radiata en Nouvelle-Zélande sont très importantes. Il peut en particulier jouer un rôle essentiel comme principale essence de substitution dans les forêts naturelles qui disparaissent; parce qu'elles sont surexploitées. Apparemment, les essences indigènes ne peuvent satisfaire les besoins en bois du pays sur la base d'une production soutenue et rentable; cependant, elles peuvent jouer un rôle important et utile comme forêts de protection contre l'érosion et en assurant la conservation de l'eau. De plus, P. radiata est un excellent producteur de pâte et de papier, soit pour la consommation intérieure, soit pour l'exportation; bien conduit, il peut produire, à bon marché, un excellent bois d'œuvre exportable. En faisant des éclaircies, peut-être des élagages, et surtout en utilisant un matériel sélectionné ayant des branches plus fines et moins de gros nœuds, on améliore la qualité moyenne du bois produit. Actuellement, il y a trop de bois de qualité caisserie, et pas assez de qualités exportables telles que du bois de construction.

L'avenir de P. radiata et de tous les autres exotiques dépend de la façon dont on pourra les protéger contre les graves épidémies et éviter la dégradation des sols. Les progrès réalisés dans ce domaine en agriculture permettent de penser qu'il en sera de même en foresterie.

Chili

L'histoire des exotiques du Chili, en particulier celle de P. radiata (que, dans ce pays, on appelle toujours pino insigne), a beaucoup de points communs avec celle des exotiques de Nouvelle-Zélande. Une première différence vient de ce que, au Chili, en 1958, les 200000 hectares de pino insigne étaient plus jeunes de 15 à 20 ans en moyenne que les 240 000 hectares plantés en Nouvelle-Zélande. Une autre différence correspond au fait que la zone de Concepcion, au Chili, où se trouvent les plus importantes plantations de P. radiata, qu'en gros, dans les provinces de Concepcion et Arauco, 50 pour cent des sols plantés ont moins de 50 centimètres de profondeur, 40 pour cent ont entre 50 et 100 centimètres de profondeur et 10 pour cent ont plus de 1 mètre de profondeur. Il ressort des visites faites par différentes personnes dans les grandes plantations des bassins du Laja et de l'Itata, à l'est de Concepcion, que le pin a une faible croissance, ou même reste rabougri, lorsque le sol est très superficiel et lorsque la roche ou un horizon d'alios existent à faible profondeur. L'inventaire par échantillonnage en 1953-54 des plantations de P. radiata de la région de Concepcion fait apparaître un pourcentage étonnamment élevé de plantations à ranger dans la classe de qualité inférieure. Ce résultat est probablement dû en partie au fait que trop de plantations furent installées sur des sols plus pauvres et plus superficiels où l'accroissement et la production sont bien inférieurs à ceux enregistrés sur de meilleurs sols.

Ainsi qu'il en a été fait mention, on estime qu'il y a, dans la région de Concepcion, 1500 000 hectares de terres qui ne conviennent pas à la culture et qui peuvent être plantées ou consacrées au pâturage. Il y a par conséquent assez de place pour étendre les plantations sans faire appel aux stations de qualité très inférieure dont le sol est superficiel ou défavorable pour une autre raison.

Le rendement moyen obtenu au Chili est estimé à un chiffre légèrement inférieur à celui obtenu en Nouvelle-Zélande.

Choix des stations

L'effort a surtout porté sur la Cordillère côtière et sur la plaine située entre cette chaîne et les Andes dans la région de Concepcion, comme il a été précisé ci-dessus. Les stations choisies sont très variées et vont des zones très favorables, caractérisées par un sol profond, en particulier sur les basses collines proches de la côte, à des zones généralement plus pauvres et plus plates, situées plus à l'intérieur. Sans vouloir généraliser, il arrive que, pour ces dernières, le sol soit trop superficiel ou trop défavorable pour que l'on puisse obtenir une production de grande qualité. Mais, même sur ces stations plus pauvres, si l'on exclut les plus mauvaises, la production reste importante et intéressante, en particulier pour les bois à pâte, si l'on se trouve dans les limites de la zone de prospection d'une usine.

Résultats et possibilités d'avenir

Une grande partie de ce qui a déjà été dit pour la Nouvelle-Zélande s'applique au Chili. Les principaux peuplements de pino insigne sont encore très jeunes; la plupart ont 15 ans ou moins. Ils permettent déjà d'alléger le prélèvement fait dans les forêts naturelles surexploitées, en donnant satisfaction à une part importante de la consommation intérieure et en fournissant du bois pour l'exportation. Les peuplements d'exotiques contribuent aussi à limiter l'érosion et à conserver l'eau dans la Cordillère côtière et en plaine. Il n'y a pas de plantations dans les Andes.

L'ère de la pâte et du papier ne fait que commencer au Chili, elle dépend entièrement de pino insigne et son avenir est brillant. La capacité de production des 200 000 hectares de P. radiata du Chili est énorme. Pour que tous ceux qui s'en occupent, y compris les nombreux petits propriétaires forestiers, en tirent profit, il est urgent d'activer la construction de scieries, de papeteries, d'usines à pâte, de routes, de ports et de tout ce qui est nécessaire pour assurer la fabrication de produits de qualité et leur vente sur tous les marchés que l'on peut trouver et conserver en donnant satisfaction aux consommateurs.

Dans la principale zone de plantation, les peuplements de pino insigne sont actuellement très bien venants et indemnes de toutes maladies. Il est essentiel de les conserver dans cet état, en prenant économiquement toutes les précautions utiles. Leur avenir est assuré si le sol est maintenu en bon état et si on évite les attaques de parasites.

Australie

L'Australie comprend six Etats, plus le Territoire de la capitale australienne (A.C.T.). Chacune de ces sept unités a son administration forestière propre et chacune plante des conifères exotiques, parmi lesquels P. radiata. Vu le peu de place dont nous disposons, il n'est pas facile de donner un aperçu valable de cette question, même très brièvement.

Tableau 2. - Plantations de conifères exotiques, spécialement Pinus radiata, en Australie (Hall, 1951)

Etat

Pinus radiata

Pourcentage de Pinus radiata par rapport au total des conifères exotiques

Programme de plantation (pour tous les conifères)

Etat

Particuliers

Total

Objectif total

Tranche à réaliser annuellement


Milliers d'acres


Milliers d'acres

Australie-Méridionale

97

38

135

95

200

3 à 4

Victoria

33

46

79

88

200

1

Nouvelle-Galles du Sud

53

1

54

70

200

5

Territoire de la capitale

17

-

17

89

40

1

Tasmanie

11

4

15

100

50

1,2

Australie-Occidentale

5

-

5

22

100

2

Queensland

1

-

1

3

200

5

TOTAUX

217

89

306

76

990

18,2 à 19,2

Tous les chiffres sont approximatifs, et arrondis pour concorder autant que possible avec les totaux exacts.

D'après G. J. Rodger N. Hall (1951), les conifères indigènes en Australie représentent seulement 5 pour cent environ du volume total des ressources en bois du pays, et, avant 1939, les bois tendres (conifères) représentaient la moitié de la consommation annuelle, ce qui entraînait des importations onéreuses. Un vaste programme de plantations portant sur des conifères indigènes et exotiques fut donc adopté. En 30 ans, de 1919 à 1949, il fut poursuivi de façon effective, si bien que vers 1949, les plantations de conifères couvraient environ 120 000 hectares, 87 pour cent appartenant aux Etats et 13 pour cent à des particuliers. Ce total comprenait une part importante représentée par l'espèce indigène Araucaria cunninghamii, et des pins exotiques; mais en 1951, la surface plantée en exotiques dépassait celle des espèces indigènes, le principal exotique étant P. radiata, surtout dans le Territoire de la capitale et dans tous les Etats, excepté l'Australie-Occidentale et le Queensland. Dans ces deux derniers, en raison des sols médiocres ou des étés humides, on a dû s'adresser surtout à d'autres pins, tels que P. pinaster (maritima) et P. elliottii.

En 1949, un nouveau programme fut adopté, prévoyant la plantation de 400 000 hectares de conifères, total qui pourrait être atteint en 35 ans environ, si le rythme actuel, qui a permis de planter déjà 120 000 hectares dans les divers Etats, se poursuit régulièrement. Le tableau 2 donne: les surfaces totales à planter en conifères et le rythme annuel estimé d'après le plan de 1949, la surface totale en P. radiata dans le Territoire de la capitale et dans chaque Etat en juin 1957 et, dans chaque cas, le pourcentage de P. radiata par rapport à l'ensemble des conifères exotiques.

Climat

Les régions d'Australie où la pluviosité est suffisante pour permettre l'existence de forêts spontanées ou introduites sont assez limitées; elles présentent donc un grand intérêt. Dans l'extrême sud-est de l'Australie-Méridionale et dans l'extrême sud-ouest de l'Australie-Occidentale, il existe des zones de climat méditerranéen, avec une bonne pluviosité hivernale et des étés secs, qui conviennent à P. radiata. Les plus grandes surfaces boisées avec ce pin sont situées dans la zone méditerranéenne de l'Australie-Méridionale, où le climat et le sol favorables ont été parfaitement mis à profit. En Australie-Occidentale, les régions où le sol convient à P. radiata sont beaucoup plus limitées, mais les plantations sont effectuées partout où cela est possible.

Les Etats de Victoria et de Nouvelle-Galles du Sud le Territoire de la capitale et la Tasmanie possèdent des zones climatiques où P. radiata peut prospérer. Il a été essayé dans la Nouvelle-Galles du Sud sur une grande échelle, dans quatre régions de climats très différents. Il réussit seulement dans une région, sur les quatre qui bénéficie d'une bonne pluviosité avec maximum hivernal et sécheresse estivale. Toutes les plantations de P. radiata sont maintenant concentrées dans cette zone, notamment dans les régions de Tumut-Batlow, à environ 100 kilomètres à l'ouest-sud-ouest de Canberra et de Jenolan-Oberon, à environ 135 kilomètres à l'ouest de Sydney. Les plantations de P. radiata dans la zone de pluviosité estivale d'Armidale, dans la région côtière de Tuncurry où la pluviosité est uniformément répartie dans l'année, et dans la zone intérieure sèche et chaude de Forbes, n'ont pas suffisamment réussi pour qu'il soit intéressant de les poursuivre. Il faut noter qu'en Australie-Méridionale, en Australie-Occidentale et dans certaines parties de la Tasmanie, la plupart des plantations sont situées à basse altitude, c'est-à-dire au-dessous de 300 mètres. Dans les autres Etats, elles s'élèvent jusqu'à 1 000 mètres ou plus. Dans l'Etat de Victoria, divers rapports indiquent que P. radiata présente la croissance maximum sous une pluviosité de 875 millimètres ou plus, une croissance satisfaisante avec 650 à 875 millimètres et une croissance lente si la pluviosité annuelle est inférieure à 650 millimètres.

Le Queensland possède peu de régions où le climat convienne à P. radiata; mais on y plante activement et avec succès, dans les régions à pluviosité estivale, l'espèce indigène Araucaria cunninghamii et P. elliottii provenant du sud-est des Etats-Unis. Il existe un point, dans l'extrême sud-est de l'Etat (Passchendaele, près de Stanthorpe), où P. radiata paraît pouvoir pousser assez bien sans subir d'attaques cryptogamiques. Là, la pluviosité annuelle atteint 850 millimètres, elle est assez uniforme, mais un peu plus faible en été qu'en hiver; l'altitude est de 1 000 mètres et la latitude 28° 30°S.

Sols et terrains consacrés aux plantations

Dans les deux Etats d'Australie-Méridionale et d'Australie-Occidentale, où existent de vastes régions soumises à un climat méditerranéen, la plupart des sols sableux des régions côtières sont considérés comme marginaux pour P. radiata. En Australie-Occidentale, de tels terrains sont jugés trop pauvres pour cette espèce, notamment lorsque la teneur en P2O5 dans les horizons superficiels est inférieure à 0,25 pour mille.

Le Service forestier d'Australie-Occidentale (1957) souligne que la teneur en P2O5 doit être considérée seulement comme une indication et pas nécessairement comme un facteur direct de la production; la culture du sol peut le rendre propre à porter des P. radiata sans aucun apport de P2O5, ainsi qu'il ressort des analyses. En Australie-Méridionale, il a été établi que des applications de superphosphates peuvent permettre de planter P. radiata dans des sols où sans cela il ne pourrait prospérer. Dans ces deux Etats, le sol est carencé en zinc et l'on doit corriger cette carence en pulvérisant le feuillage des jeunes pins avec une solution aqueuse à 2,5 pour cent de sulfate de zinc, ce qui donne d'excellents résultats. Il faut cependant se rappeler l'avertissement judicieux émis par N. W. Jolly (1950), qui estimait que les sols à pins de l'Australie-Méridionale ne sont pas fertiles et souvent presque marginaux. Il faut donc prendre garde, avec les pins à croissance rapide traités à une rotation relativement courte, que cette rotation ne soit pas trop courte pour assurer le maintien de la fertilité du sol. L'apport de superphosphates, comme en agriculture, s'il est économiquement possible, influencera sans doute le choix de la rotation en vue d'un profit maximum et d'un rendement soutenu.

La demande en bois tendre est si aiguë en Australie-Méridionale et le succès de P. radiata y a été si net qu'on a pu récemment utiliser des terrains un peu meilleurs, où la forêt donne un revenu au moins aussi bon que la culture. En Australie-Occidentale, les sables côtiers se sont montrés bien meilleurs pour P. pinaster (maritima) que pour P. radiata et ce dernier est maintenant planté avec succès surtout sur les limons sableux brun-rouge dérivés de roches éruptives basiques (dolérite) sur les montagnes et le plateau de Darling Range, jusqu'à 300 mètres d'altitude. P. radiata ne réussit pas sur les latérites ou sur les sols peu colorés dérivés de roches acides qu'on rencontre également dans la région de Darling.

L'expérience acquise avec P. radiata dans les autres Etats et dans le Territoire de la capitale montre que la profondeur du sol est un facteur important, que les sols basaltiques donnent une meilleure croissance, et - en Nouvelle-Galles du Sud - que les sols sur roches gréseuses doivent, si possible, être évités. Dans l'Etat de Victoria, on a montré que les limons sableux conviennent pourvu qu'il existe une couche d'argile perméable entre 1 et 1,5 mètres de profondeur, mais que les sols filtrants très profonds, tels que les sables de 3 mètres ou plus d'épaisseur, sont tout à fait défavorables sous ce climat. Les programmes de plantation de P. radiata, relativement ambitieux dans le Territoire de la capitale et tous les Etats autres que l'Australie-Occidentale et le Queensland - où le sol ou le climat limitent beaucoup son emploi - montrent que ces territoires possèdent tous de bons terrains pour de telles plantations et font largement confiance à cette espèce.

Surface plantée et prévisions de plantation

En 1957, l'Australie a planté à peu près 122 000 hectares de P. radiata et cette espèce représente environ 76 pour cent de tous ses conifères exotiques. Les programmes de plantations de conifères exotiques et indigènes prévoient que le total actuel de 160 000 hectares pour toutes les espèces sera porté à 1400 000 hectares en 30 ans environ à la cadence de 8 000 hectares par an. Comme nous l'avons vu, P. radiata doit être le principal conifère exotique dans tous les Etats, sauf dans les deux où le sol et le climat limitent son emploi. Cette importance accordée à P. radiata montre de façon frappante l'intérêt exceptionnel de l'Australie pour une production à bon marché des bois d'œuvre et des bois à pâte très demandés, et mettra à rude épreuve la compétence des forestiers responsables de l'hygiène des plantations et du bon état du sol.

Choix des stations

En Australie-Méridionale, il a été établi que les facteurs limitants sont l'exposition et la teneur en eau du sol pendant l'été. Les fougères (Pteridium) sont un indicateur précieux de la perméabilité du sol à l'eau et à l'air, mais pour P. radiata, cette indication d'une station favorable est valable pour les terrains argileux lourds mais non pour les sables profonds où le sol peut être trop pauvre pour ce pin. Dans les grandes régions de plantation, dans l'extrême sud-est de l'Etat la plupart des boisements de P. radiata sont situés au-dessous de 50 à 60 mètres d'altitude. En Australie-Occidentale, seules les stations qui possèdent les caractéristiques pédologiques dont nous avons parlé, et notamment une teneur suffisante en P2O5, sont favorables; elles sont situées à des altitudes allant jusqu'à 300 mètres. En Victoria, comme ailleurs, les stations très humides ou trop sèches ne conviennent pas et les plantations sont faites depuis le niveau de la mer jusqu'à 1000 mètres d'altitude. Dans la Nouvelle-Galles du Sud, la limite supérieure des plantations varie, suivant le climat, de 600 à 1400 mètres, la neige causant des dégâts aux altitudes plus fortes. Les sols dérivés des grès doivent être évités. Dans le Territoire de Canberra, les plantations ont lieu de 500 à 1 100 mètres et les meilleures croissances sont obtenues sur les limons rouges profonds avec au moins 625 millimètres de pluviosité annuelle. En Tasmanie les stations s'étagent du niveau de la mer à 800 mètres, les meilleurs résultats étant obtenus là où la pluviosité est d'environ 1250 millimètres, à condition qu'il n'y ait pas de bris de neige. Dans le Queensland, P. radiata est confiné dans un seul centre de plantation et sur les sols de 60 centimètres au moins de profondeur.

Résultats et possibilités

L'Australie n'est actuellement que le troisième pays du monde pour la surface boisée en P. radiata, mais elle a atteint un niveau tout à fait remarquable en ce qui concerne l'entretien et l'aménagement de ces forêts. L'Australie-Méridionale a 54 000 hectares boisés avec cette espèce; plus de 80 pour cent des peuplements à éclaircir sont soumis à des règlements d'éclaircie réguliers, au moins dans les plantations domaniales qui représentent 70 pour cent ou plus. Aussi, depuis 80 ans environ (au début sur une échelle modeste) que l'on plante ce pin en Australie-Méridionale, il n'a subi aucune attaque sérieuse de parasite, et les difficultés dues à la pauvreté de certains sols ont été surmontées grâce aux recherches faites dans cet Etat et en Australie-Occidentale.

B. H. Bednall (1957) a montré que dans une période de 15 ans, de 1938 à 1953, la production indigène du bois, surtout de P. radiata, est passée en Australie-Méridionale de 33 000 à 146 300 mètres cubes par an; cela représente une augmentation de 19 à 48 pour cent de la consommation de bois indigènes - à l'exclusion des traverses - par rapport à la consommation totale. P. radiata produit non seulement du bois de caisserie, mais aussi un excellent parquet, et beaucoup d'autres catégories de bois d'œuvre. Lorsque les importations ont été interrompues, ces approvisionnements locaux ont été particulièrement appréciés. Il est probable que d'aussi bons résultats ont été obtenus dans les autres régions d'Australie, suivant l'étendue et l'âge de leurs plantations; partout où cette espèce a été employée pour la pâte et le papier, elle s'est révélée excellente, comme en Nouvelle-Zélande.

Les possibilités d'avenir sont claires: elles découlent de l'objectif total, 400 000 hectares de plantations de conifères, P. radiata en tête, et du volume de la production, très élevé lorsque les peuplements sont en bonne santé et bien traités. Comme en Nouvelle-Zélande et au Chili, l'espoir d'une forte production dépend de la protection des peuplements et du maintien du sol en bon état, tâche pour laquelle la recherche forestière australienne se révèle aussi éminente que pour les études parallèles portant sur la transformation et l'emploi des arbres pour le bois d'œuvre, la pâte et le papier, les bois injectés, poteaux de lignes, poteaux de clôture et traverses, les contre-plaqués, les panneaux de fibres et de particules.

Espagne

L'Espagne est faiblement boisée, les forêts qui méritent ce nom représentent moins de 10 pour cent de la surface totale. Malgré le climat sec de la plus grande partie du pays, une politique de reboisement très active a permis de créer entre 1940 et 1956 près de 1 million d'hectares de forêts nouvelles. La situation de ce pays spécialement en ce qui concerne les résultats et les programmes de reboisement, a fait l'objet d'un article paru dans Unasylva, vol. 12 n° 1, 1958, sous le titre «Le programme de boisement en Espagne». L'objectif est le reboisement de 5 millions d'hectares sans empiéter sur la surface agricole actuelle, mais en utilisant surtout les terrains montagneux consacrés au pâturage. Aujourd'hui, il existe un pâturage extensif aussi bien en forêt que sur les terres à vocation forestière et le revenu de cette activité est environ la moitié de celui que donnerait la production de bois sur le même terrain. On espère cependant améliorer le pâturage sur un tiers de ces surfaces, de sorte que cette fraction puisse porter autant de bétail qu'en porte aujourd'hui la superficie totale, les deux autres tiers étant consacrés à la forêt.

Sur le million d'hectares plantés dans la période 1940-56, 95 pour cent environ ont été réalisés par l'Etat sur des terrains domaniaux et 5 pour cent par des propriétaires particuliers. On estime qu'une proportion atteignant 22 pour cent du total boisé a été plantée avec des espèces à croissance rapide, indigènes ou exotiques: une race particulière de P. pinaster (maritima) de Galice (nord-ouest de l'Espagne), des eucalyptus, et Pinus radiata. Les autres espèces à croissance plus lente sont surtout des pins indigènes, P. pinea, P. halepensis, P. nigra, P. sylvestris, P. uncinata, l'exotique P. canariensis et les peupliers, ces derniers étant limités par leurs exigences en ce qui concerne le sol et l'alimentation en eau.

Les deux exotiques les plus remarquables utilisés en Espagne sont les eucalyptus et P. radiata. Les premiers couvrent une surface de quelque 170000 hectares, soit plus de la moitié de la surface totale plantée en eucalyptus dans la région méditerranéenne de l'Europe. Cinquante et un mille hectares ont été plantés en P. radiata, 39 pour cent par l'Etat et 61 pour cent par des particuliers; toutes ces plantations sont situées dans le nord et le nord-ouest de l'Espagne, à moins de 167 kilomètres du golfe de Biscaye ou de l'Atlantique. P. radiata est surtout employé comme bois de papeterie et comme bois de mine avec une rotation courte, de 16 à 30 ans suivant la fertilité de la station. Sa production par hectare et par an est environ six fois celle des conifères indigènes courants, c'est donc un placement particulièrement rentable. Il y a ou il y avait, dans un parc de Lequeitio, à 40 kilomètres à l'ouest de St-Sébastien un sujet particulièrement remarquable qui, en 1928, âgé de 68 ans, avait un diamètre de 1,14 mètres et montrait comment cette espèce peut réussir dans les stations abritées de la côte nord de l'Espagne.

Climat

P. radiata réussit bien sous le climat caractéristique de la zone côtière du nord de l'Espagne; le climat plus sec et plus chaud qui règne dans toutes les autres régions du pays convient aux eucalyptus mais non à P. radiata.

Sols et terrains consacrés aux plantations

P. radiata prospère dans le nord et le nord-ouest de l'Espagne, sur les sols profonds et bien drainés, à pouvoir de rétention en eau élevé, comprenant des argiles siliceuses et des sols acides. La profondeur, la pente et la structure du sol sont considérées comme les éléments essentiels du pouvoir de rétention en eau qui conditionne la bonne croissance des pins dans cette zone. De grandes surfaces conviennent à P. radiata le long de la côte nord, surfaces suffisantes pour produire le bois de papeterie pour les besoins actuels et futurs du pays en pâte chimique et mécanique.

Surfaces plantées et prévisions de plantation

La surface totale plantée en P. radiata s'établit, en 1958, à 51 000 hectares répartis dans les provinces de La Corogne, Lugo, Orense, Pontevedra, Santander, Guipúzcoa, Biscaye et Alava, c'est-à-dire entre la frontière française à l'extrémité ouest des Pyrénées et la frontière portugaise, au sud de Vigo. Soixante et un pour cent de ces plantations appartiennent à des particuliers et 39 pour cent appartiennent à l'Etat ou sont sous son contrôle. La répartition exacte des âges n'est pas connue mais on sait qu'il existe peu de grands peuplements âgés de plus de 20 ans. Dans la plupart des cas, la rotation est égale ou inférieure à 20 ans. L'importance des plantations futures dépend beaucoup des propriétaires privés intéressés et pourra peut être atteindre en moyenne de 1 500 à 2 000 hectares par an.

Choix des stations

Cette espèce se plaît dans les vallées, les creux, et tous les endroits abrités du vent, pourvu que l'humidité et la profondeur du sol soient suffisantes. Elle vient mal sur les pentes exposées au vent, avec un sol superficiel, et y est beaucoup plus sensible aux attaques des champignons et des insectes. Les tables de production montrent clairement l'effet considérable de la qualité de la station sur la croissance, effet qui peut presque doubler la rotation nécessaire pour produire même du bois de papeterie, et la porter de 16 à 30 ans. Il est déconseillé de planter à plus de 500 mètres d'altitude en raison de la pauvreté habituelle des sols et des risques de chablis dus au vent ou à la neige.

Résultats et possibilités

Comme dans les trois autres pays déjà étudiés, les résultats de P. radiata en Espagne sont très satisfaisants et encourageants, partout où le climat et le sol sont favorables et les plantations bien entretenues. Les forestiers espagnols pensent qu'il est très important de maintenir une densité convenable, avec des éclaircies légères ou modérées tous les trois ans pour éviter que les arbres ne se gênent, et des élagages artificiels bien conduits, à faible hauteur, du type connu au Royaume-Uni sous le nom de «brashing».

La classe de qualité est en général la classe III avec un accroissement annuel moyen en volume réel d'environ 12 m³ par hectare. Ce chiffre contraste avec les chiffres moyens d'environ 1 à 2 m³ par hectare et par an obtenus avec les conifères indigènes courants dans la plus grande partie de l'Espagne. Echeverria (1942, 1943, 1956) de l'«Instituto Forestal de Investigaciones y Experiencias, Madrid», donne tous les détails sur la production de P. radiata dans le nord de l'Espagne d'après un grand nombre de places d'expériences établies dans quatre provinces et suivies pendant 13 ans ou plus. Ces articles traitent également de l'espacement des plantations, de l'intensité des éclaircies et des qualités papetières du bois. Martinez (1942) cite les principaux champignons qui attaquent cet arbre dans les stations défavorables.

La plupart des peuplements sont traités à une rotation voisine de 20 ans, 90 pour cent des produits allant à la papeterie et 10 pour cent à la caisserie. Pour les quelques peuplements traités à une rotation supérieure à 20 ans, on estime que la production se répartit ainsi: 55 pour cent pour la papeterie, 25 pour cent de poteaux de mine, 10 pour cent de coffrages, et 10 pour cent pour les autres bois de sciage.

Les possibilités de Pinus radiata dans la région côtière du nord de l'Espagne sont excellentes. à condition que les arbres soient maintenus en bonne santé et le sol en bon état. Comme nous l'avons dit, il est probable que cette région, très favorable aux plantations, pourrait couvrir tous les besoins actuels et futurs de l'Espagne en bois de papeterie.

Afrique du Sud

L'Union sud-africaine occupe 1 222 480 kilomètres carrés et possède moins de un pour cent de forêts naturelles, non compris les savanes. Il n'est donc pas étonnant que des essences exotiques aient été plantées sur une très grande échelle, près de 800 000 hectares, un quart environ par l'Etat et trois quarts par les particuliers. Ce total comprend à peu près 300 000 hectares de «Australian tan wattles» (Acacia mollissima et A. decurrens) cultivés principalement pour le tanin de leur écorce 280 000 hectares de conifères, surtout des pins autres que P. radiata, et 176 000 hectares d'eucalyptus. Le dernier de ces chiffres date de 1953 et les autres de 1955-57.

R. J. Poynton (1957) donne tous les renseignements sur l'état actuel de ces exotiques, y compris P. radiata. Il signale que l'accroissement annuel moyen dans une futaie naturelle classique est seulement de 2,5 mètres cubes par hectare contre 18 à 29 mètres cubes par hectare dans les plantations du principal pin exotique (P. patula) et dans les boisements peu nombreux mais intéressants de P. radiata. Il donne également des chiffres frappants concernant le revenu en argent pour la période 1953/54, respectivement pour les forêts indigènes et les plantations d'exotiques. Les premières ont produit au total 43 000 livres S.A. alors que les plantations d'exotiques ont fourni une production de bois d'œuvre, de feu et de papeterie d'une valeur de 4 700 000 livres, non compris 6 à 7 millions de livres pour l'écorce à tan des acacias.

Voici ce qu'il dit de P. radiata en Afrique du Sud: Les possibilités de cette espèce sont très limitées en raison de sa sensibilité aux dégâts de grêle, suivis par des attaques de Diplodia pinea, et par son insuccès sur les sols pauvres et mal drainés. En conséquence, les plantations devront être concentrées dans l'avenir sur des stations bien choisies dans l'ouest et le sud-est de la province du Cap. Dans ces régions et dans ces stations, c'est pourtant la meilleure espèce, aussi bien pour la rapidité de croissance que pour la qualité du bois; il devra donc être employé partout où les conditions écologiques seront favorables. Même dans les stations marginales, il est souvent planté de préférence à d'autres espèces, car les planteurs estiment que la production d'un peuplement de P. radiata assez quel conque sera probablement meilleure que celle d'un excellent peuplement d'une autre espèce.

P. radiata fut introduit en Afrique du Sud à peu près au même moment qu'au Chili, c'est-à-dire vers 1883 ou même un peu plus tôt. Le climat de l'Afrique du Sud, moins favorable que celui du Chili à ce pin, a été la cause principale de la limitation de son emploi, et de son remplacement comme essence dominante dans les plantations de conifères en Afrique du Sud, par d'autres pins et en particulier le pin mexicain P. patula. Il faut noter, comme un point important de l'histoire des conifères exotiques en Afrique du Sud, le travail remarquable réalisé par le Ministère des forêts sur la sylviculture et l'utilisation de ces exotiques, y compris P. radiata. Dans le cadre de recherches classiques, des techniques particulières furent mises au point avec succès: espacement, éclaircies et élagages des plantations par I. J. Graib (1939-1947) et d'autres auteurs; technologie et utilisation du bois par J. N. Turnbull (1937-1947), M. H. Scott et R. P. Stephens (1947-1953) et d'autres auteurs.

Climat

Le climat de l'Afrique du Sud a été très bien étudié et analysé dans ses rapports avec les essences exotiques par les forestiers de ce pays. Leur classification des climats fut publiée par R. S. Troup (1932). Ce système, qui comprend 15 zones climatiques, est basé sur la pluviosité annuelle et sa répartition ainsi que sur la température moyenne.

Métro (1955) résume et applique le système de Troup et montre que les eucalyptus sont principalement concentrés en Afrique du Sud dans huit de ces 15 zones climatiques. P. radiata est planté avec succès dans 5 de ces zones, celles où la pluviosité annuelle est supérieure à 625 millimètres avec, soit un maximum hivernal soit une répartition uniforme, et une température moyenne annuelle de 13 à 18°C; les plantations sont beaucoup plus limitées lorsque la pluviosité annuelle varie de 450 à 625 millimètres avec, par ailleurs, les mêmes conditions que ci-dessus; leur succès n'est plus assuré lorsque la pluviosité annuelle varie de 825 à 875 millimètres avec un maximum estival et une température moyenne annuelle de 13 à 17°C.

La cause essentielle des limitations climatiques de P. radiata en Afrique du Sud paraît être l'effet défavorable d'un été chaud et humide, avec des dégâts de grêle qui permettent à un champignon, Diplodia pinea, favorisé par l'humidité et la chaleur, d'attaquer les pins blessés et de causer des dommages toujours graves et parfois mortels. Mais, même s'il n'y a pas de grêle, l'excès de chaleur et d'humidité pendant l'été est très défavorable à ce pin, en Afrique du Sud comme dans les autres régions du monde. En d'autres termes, le succès est d'autant plus assuré que l'on s'écarte moins du climat méditerranéen avec étés secs et l'effet défavorable des pluies estivales est aggravé si elles sont accompagnées de grêle ou d'une forte chaleur. R. J. Poynton (1957) note que P. radiata est résistant au froid, assez résistant à la neige, et supporte la sécheresse à peu près comme P. pinaster (maritima). Les régions où P. radiata réussit bien ou assez bien sont les zones montagneuses situées à moins de 167 kilomètres de la mer, c'est-à-dire à peu près seulement dans l'extrême sud et ouest de l'Afrique du Sud.

Sols et terrains consacrés aux plantations

Ce pin est considéré en Afrique du Sud comme assez exigeant pour le sol; il présente son meilleur développement dans les sols assez fertiles, profonds et bien drainés et vient assez mal dans les stations acides, tourbeuses ou mal drainées. Sur les sols sableux pauvres, avec un taux d'humus faible, par exemple sur les versants supérieurs des montagnes, P. pinaster pousse mieux que P. radiata. Ce dernier exige un sol bien drainé, surtout dans les régions où la pluviosité est uniforme. Là, sur les sols d'argile compacte, ou sur les sols présentant un horizon argileux imperméable à faible profondeur, il est sévèrement attaqué par Diplodia pinea et reste rabougri et peu vigoureux.

Surfaces plantée et prévisions de plantation

En mars 1955, les plantations domaniales de P. radiata couvraient au total 12 000 hectares, la plupart ayant été réalisées en 1920-25 et en 1940-55, après un recul, pendant la période 1926-39, dû à l'échec de plantations faites dans des zones climatiques défavorables et aux attaques de Diplodia pinea. Lorsque la cause de ces échecs fut connue, le rythme des plantations augmenta à nouveau. Dans l'avenir les plantations se poursuivront probablement sur une échelle assez réduite, partout où elles seront possibles, dans des régions bien limitées et des stations favorables.

Choix des stations

Les stations humides et froides sont favorables, ainsi que les expositions sud et est - dans l'hémisphère austral les expositions sud sont plus froides et plus humides que les expositions nord. P. radiata supporte bien les stations exposées au vent de mer.

Résultats et possibilités

Il est clair que dans les régions limitées d'Afrique du Sud où P. radiata trouve des conditions de climat et de sol favorables, il réussit de façon tout à fait remarquable. Dans ces conditions, on considère qu'il donne la meilleure production en bois résineux, à la fois pour la quantité et pour la qualité. Le fait que, sur le total des conifères exotiques, l'Afrique du Sud possède un pourcentage de P. radiata beaucoup plus faible (8%) que la Nouvelle-Zélande (60%), le Chili, l'Espagne (99 à 100%) et l'Australie (76%) est dû d'une part aux restrictions imposées en Afrique du Sud par le climat et le sol, et d'autre part à une sage politique qui consiste à planter délibérément des espèces variées, afin de réduire les risques d'épidémie. Les bons résultats obtenus doivent beaucoup à la qualité de l'entretien des plantations et des techniques d'utilisation, fruit d'une recherche prévoyante poursuivie et appliquée sur une grande échelle. En Afrique du Sud, le souci d'étudier les marchés et les désirs des utilisateurs reste toujours présent à l'esprit des sylviculteurs et de tous ceux qui ont la responsabilité des cultures forestières. En même temps, l'hygiène des plantations et le bon état des sols ont fait l'objet d'études fructueuses. Les possibilités d'avenir de cette espèce en Afrique du Sud peuvent être considérées comme excellentes, à l'intérieur des zones limitées qui lui conviennent et qu'on peut lui offrir.

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