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5. Evolution et devenir du commerce des PFNL

5.1 Evolution

Tous les acteurs de la filière interviewés (importateurs, détaillants et consommateurs) sont unanimes sur l'évolution constante du commerce des PFNL dans les grandes villes. Mais en raison de l'absence des statistiques officielles sur les échanges (volumes et valeur), nous avons choisi de le faire à travers trois critères : l'évolution de la population, les éléments de l'histoire du commerce des PFNL et l'augmentation du nombre de points de vente.

5.1.1 Evolution de la population subsaharienne : cas de la France

Plus grand marché potentiel des PFNL de l'Afrique subsaharienne, la France abrite une population africaine qui n'a cessé d'évoluer depuis les années 60. Celle-ci est passée de 27 388 personnes en 1968 à 209 952 personnes en 1994 (cf. Tableau 20), ce qui correspond à une croissance de 87 % en 30 ans. Cependant, le taux de croissance de cette population est en diminution constante, passant de 61,5% entre 1968 et 1975 à 3% entre 1990 et 1994. Cette chute serait due, sans doute, à la promulgation de nouvelles lois européennes sur l'immigration qui rendent difficile l'obtention des visas d'entrée en Europe à partir d'Afrique.

Tableau 20 : Evolution du nombre des Africains en France

Année

1968

1975

1982

1990

1994

Population

27 388

71 180

134 033

170 113

209 952

5.1.2 Eléments de l'histoire du commerce des PFNL africains

L'histoire du commerce des PFNL dans les pays visités n'a pas été facile à reconstituer. Face à l'absence des documents scientifiques sur l'histoire de ce commerce, nous nous sommes appuyés sur les témoignages oraux recueillis auprès des premiers acteurs de la filière (importateurs et détaillants) et de certains anciens immigrés. N'ayant pu rencontrer ces personnes pendant notre séjour à Londres, Madrid et Lisbonne, nous sommes contentés de restituer l'histoire du commerce en France et en Belgique.

En France, l'histoire du commerce des PFNL se confond avec celui du commerce des aliments africains en Europe et surtout celle de l'immigration des ressortissants de l'Afrique subsaharienne. Selon les plus anciens détaillants rencontrés à Paris, le marché serait né sous l'impulsion des étudiants et stagiaires venus étudier en Europe après les indépendances.

En France, le commerce des PFNL alimentaires d'Afrique Centrale a débuté vraisemblablement dans les années 60, après l'accession des différents pays de l'Afrique Centrale et de l'Afrique de l'Ouest à l'indépendance. A cette époque, plusieurs étudiants et stagiaires sont admis dans les Universités et les Ecoles de Formation en France. Retournant régulièrement au pays, certains d'entre eux ramènent des produits alimentaires destinés soit à l'autoconsommation, soit à un cadeau à des amis, soit à la commercialisation auprès des membres de la communauté, nostalgiques des saveurs ou soucieux de conserver leurs habitudes alimentaires. Mais c'est entre les années 65 et 70 que ce commerce occasionnel va intéresser certains épiciers français dont Monsieur Joulin, tenancier de l'épicerie Le Village Africain, sise au N°1 de la rue de l'Arbalète dans le quartier Mouffetard, dans le 5ème arrondissement, et Monsieur Déléage, tenancier de l'épicerie Antilles-Afrique sise au N° 11 de la rue Léopold Robert au Métro Raspail, dans le 15ème arrondissement.

D'après nos entretiens avec Monsieur Déléage, Le Village Africain fut la première épicerie spécialisée dans la vente de produits vivriers tropicaux. Ce n'est qu'après que lui-même s'est également intéressé à ce créneau. Spécialisés tous deux à l'origine dans l'alimentation générale, Messieurs Joulin et Déléage s'orientent progressivement vers la distribution de ces aliments, au fur et à mesure que leurs clients originaires des pays tropicaux (Antillais et Africains) le leur demandaient. Ne connaissant pas les produits et les réseaux de production en Afrique, ils étaient approvisionnés et conseillés par les Africains et les Antillais. Ce n'est que plus tard qu'ils commenceront à aller en Afrique pour nouer des contacts commerciaux. Ils vont ainsi développer une gamme importante de produits tropicaux et leurs épiceries deviennent vite incontournables dans le commerce des produits vivriers destinés à la communauté afro-antillaise de Paris.

La spécialisation de ces deux épiceries s'explique par le fait qu'elles étaient situées à proximité des endroits fréquentés par la communauté afro-antillaise. Le Village Africain était situé non loin d'un bal du 5ème arrondissement où se rendaient fréquemment la communauté afro-antillaise de Paris. Quant à l'épicerie Afrique-Antilles, elle était située à proximité de l'Ecole d'Administration Coloniale qui accueillait des étudiants et des stagiaires africains et asiatiques. Ceux-ci informaient leurs compatriotes qui finissent par découvrir ces deux points de vente.

Devant ce succès commercial, de nouveaux commerçants sont attirés et s'installent. C'est le cas de Monsieur Elombo, d'origine camerounaise qui se lance dans ce créneau dans les années 70. Il s'implante dans le 20ème arrondissement de Paris par le fait que, contrairement au 5ème et au 15ème arrondissements de Paris, on y trouve plus de populations issues de l'immigration. Il se spécialise, sans doute du fait de ses origines, dans la distribution des PFNL alimentaires, d'origine camerounaise en particulier, mais aussi de l'Afrique Centrale très souvent. Il est importateur, grossiste et détaillant. Le développement de ses activités entraîne l'arrivée, en 1974, de Monsieur Ben Hamza, d'origine Tunisienne et d'autres détaillants, notamment d'origine camerounaise, à partir de 1975. Ces nouveaux acteurs choisissent de s'installer soit dans le 18ème arrondissement de Paris, soit à Saint Ouen, en banlieue nord de Paris. Ils s'approvisionnent tous auprès d'Elombo.

De 1975 jusqu'à 1980, on assiste à l'arrivée de nouveaux acteurs, notamment des détaillants Camerounais, mais aussi des importateurs français, comme Anarex qui s'installe en 1979 dans la filière. Contrairement à Elombo, Anarex importe des produits de différentes origines. Il cible aussi bien les Africains de France que tous les originaires des zones tropicales (Antillais, Latino-américains et Asiatiques).

Les produits importés et vendus proviennent aussi bien de cultures que de la flore spontanée. Mais ce sont surtout les premiers qui prédominent, car ils sont consommés couramment par la plupart des ressortissants des zones tropicales. C'est le cas de la banane plantain (Musa spp.), des racines de manioc (Manihot esculenta), des ignames (Dioscorea spp.) et de la patate douce (Ipomoea batatas). Quant aux produits de la flore spontanée, ils sont représentés par les noix de kola (Cola nitida ou Cola acuminata) et les maniguettes (Aframomum spp.) qui sont plus tôt des stimulants que des aliments, importés de l'Afrique de l'Ouest et de l'Afrique Centrale. De cette dernière zone, viennent aussi des aliments tel que le fumbua et des épices (mangue sauvage, njansan, pèbè, etc.) et les noix de palme comme le montre le Tableau 21.

Tableau 21  : Les PFNL vendus à Paris avant les années 82

Types de PFNL

1968

1980

Les PFNL cultivés

banane plantain, taro, igname, patate douce, les noix de palme,

banane plantain, igname, patate douce, taro, le safou

Les PFNL transformés

l'huile de palme, le kwanga, le foufou

l'huile de palme, le kwanga

kwanga, bobolo, miondo,

Les PFNL spontanés

fumbua, njansan, mangue sauvage, pèbè, ekolabuab, les noix de palme.

fumbua, njansan, mangue sauvage, pèbè, ekolabuab, les noix de palme,

Durant cette période, les produits sont importés par avion et sont destinés principalement aux épiceries où viennent s'approvisionner les consommateurs et les tenanciers des restaurants spécialisés dans la préparation des plats afro-antillais. Ils sont soit Européens, soit Antillais, soit Africains. Le premier restaurant africain aurait ouvert dans les années 70 à Paris d'après Dasylva (1993), ce que confirment les témoignages oraux que nous avons recueilli auprès de certains africains présents en France à cette époque.

Comme nous venons de le voir, cette époque est caractérisée par l'éparpillement des points de vente dans plusieurs arrondissements de Paris. On les trouvait dans le 5ème, le 15ème, le 18ème et le 20ème. Il existait trois types de points de vente : les épiceries spécialisées dans les produits tropicaux (Le Village Africain), les épiceries spécialisées dans les produits de l'Afrique Centrale (l'épicerie de Monsieur Elombo) et les magasins vendant les produits du monde entier y compris ceux des pays chauds (Hédiard et Fauchon et la Maison Comptaco par exemple). Ces maisons sont très connues à l'époque des Français qui recherchent des produits tropicaux (café, cacao, sucre de canne, épices, rhum, etc.). Ils disposaient d'une large gamme de produits, ce qui leur permettait d'atteindre la communauté afro-antillaise, les Asiatiques, mais aussi les Français de retour des colonies et ceux restés en métropole.

Quant aux acteurs impliqués dans ce commerce, on trouve les permanents et des occasionnels. Ces derniers sont souvent des personnes revenant de vacances ou de passage à Paris. Ils vendent leurs produits soit aux détaillants, soit directement aux membres de la communauté. Les agents permanents se composent d'importateurs, de grossistes et de détaillants. Ils sont d'origine française, maghrébine et africaine. La distribution des produits durant cette période se faisait donc par le biais de deux canaux : le circuit ultra court et le circuit court. La stratégie utilisée par chaque importateur était de cumuler trois fonctions : l'importation, la vente en gros et la vente au détail. Ainsi, Monsieur Elombo était à la fois importateur, grossiste et détaillant. De même, Messieurs Joulin et Déléage étaient à la fois importateurs et détaillants au début de leur activité, avant de se consacrer progressivement à la vente au détail uniquement. Le Tableau 22 montre comment les différents acteurs se répartissent et leur nationalité avant 1982.

Tableau  22 : Origine ethnique des acteurs dans les années 70 jusqu'en 80

Les agents

1968

1980

Importateurs permanents

2 Français

1 Africain

Importateurs occasionnels

Africains

Africains

Détaillants

2 Français

4 Camerounais et 1 Tunisien

Restaurateurs

-

2 Camerounais

Le circuit ultra court ou circuit direct implique uniquement l'importateur et le consommateur. A cette époque, tous les importateurs étaient également tenanciers des épiceries. Ils pratiquaient donc la vente directe. Le produit passait de l'importateur au consommateur.

En ce qui concerne le circuit court, il débute avec Monsieur Elombo. En tant qu'importateur et grossiste, il fournissait à tous les détaillants qui à leur tour, mettaient le produit à la disposition des consommateurs. De même, les rares restaurants de l'époque s'approvisionnaient chez lui. Ce qui justifie les deux cas de circuits courts ci-dessous.

Quant aux prix, les personnes rencontrées affirment que ceux-ci étaient élevés en raison sans doute d'une faible demande, car peu d'Africains et d'Antillais étaient au courant de l'existence et de l'implantation des points de vente. Ces prix étaient même tellement élevés, que la majorité des consommateurs africains considéraient ces denrées comme des aliments de luxe. Aussi, leur consommation était limitée souvent aux périodes des fêtes, notamment pendant les fêtes de fin d'année. En dehors des fêtes, les consommateurs réguliers étaient des diplomates, nous a confié un ancien détaillant. Mais vers la fin des années 70, on assiste à une amorce de la baisse des prix, suite à une publicité de bouche à oreille sur les produits vendus par Elombo et la qualité de ceux-ci. Les témoignages oraux recueillis sur le fonctionnement de cette épicerie rapportent qu'il fallait se munir d'un ticket pour être servi. Elle restait ouverte après une heure du matin voire plus, en raison de l'affluence des clients qui ne se lassaient pas d'attendre pendant de nombreuses heures.

Quant à la promotion, aucun moyen n'était utilisé par les différents acteurs de la filière, sinon le bouche à oreille. Il était le seul moyen qui permettait aux membres de la communauté afro-antillaise d'être informés. Pour combler ce vide, Elombo commença à faire la publicité de son point de vente dans la revue Bingo destinée à l'homme " noir ". Ce journal n'est plus publié et il a fait place à une autre revue intitulée Amina, destinée à la femme afro-antillaise et noire-américaine. Dans les colonnes de cette revue, on trouve entre autres des publicités et adresses des restaurants et épiceries afro-antillaises de France, d'Europe et d'Amérique du Nord.

Cette époque se termine par l'arrivée d'un nouvel acteur : l'entreprise Exodom. Basée à Lyon, elle importe des produits issus des vergers villageois, des jardins de case et des autres systèmes agroforestiers tenus par les paysans de l'Ouest du Cameroun. Contrairement aux produits importés par ses collègues, les siens sont certifiés biologiques et sont destinés principalement à une clientèle européenne, à la recherche de produits issus d'une agriculture exempte d'engrais de synthèse.

En Belgique, le commerce des PFNL a démarré quasiment dans les mêmes conditions et circonstances qu'en France. Il était initié par les étudiants et stagiaires africains, originaires principalement des trois colonies belges (le Congo-Kinshasa, le Burundi et le Rwanda). Ceux-ci étaient accueillis et guidés par Monique Van De Straten Wallet qui, plus tard, créera la Maison Africaine.

Tout comme en France, une première période peut être reconnue allant de 1960 au delà des années 80. En effet, après l'accession des pays africains à l'indépendance, s'est posé le problème de formation des dirigeants devant remplacer les cadres belges. Dans cette perspective, plusieurs jeunes Africains ont été envoyés dans les universités belges en qualité d'étudiants ou de stagiaires. Ces derniers, souvent pères de famille, sont venus étudier en compagnie de leur famille. A leur arrivée, ils étaient installés à la Maison Africaine à Bruxelles.

Au cours de cette période, un commerce des produits africains s'était mis en place au sein de la Maison Africaine entre étudiants et stagiaires. Certaines personnes, prises par l'instinct commercial, achetaient des pagnes en Hollande et venaient les vendre soit aux femmes africaines, soit aux personnes ayant terminé leurs études ou leur stage. D'autres, de retour du pays, ramenaient des PFNL alimentaires (kwanga, poisson fumé, gibier, etc.) qu'ils vendaient aux femmes, qui les recherchaient, afin de garder le contact culturel avec le pays.

Parmi les produits importés, on trouvait aussi bien des produits cultivés que des produits de cueillette. Les plus importés étaient les produits séchés ou de longue conservation. Ils étaient tous destinés aux ménages africains (étudiants, stagiaires et diplomates) de Bruxelles et à un restaurant distribuant des plats africains et fréquenté par des Belges ayant vécu dans les trois colonies (Congo-Kinshasa, Rwanda et Burundi). Le Tableau 23 montre les différents produits importés durant cette période, parmi lesquels on trouve davantage de produits frais issus aussi bien de la flore spontanée que des cultures.

Tableau 23 : Les PFNL vendus à Bruxelles avant 1982

Les PFNL

1968

1981

Les PFNL cultivés

banane plantain, patate douce, etc.

banane plantain, patate douce, etc.

Les PFNL spontanés

noix de palme, saka saka, huile de palme, foufou, kwanga, gibier fumé, etc.

fumbua sec, mbinzo séché, mundongo, kwanga, banane plantain, etc.

Les PFNL transformés

gibier fumé, mbinzo séché, kwanga, huile de palme

gibier fumé, mbinzo séché, kwanga, huile de palme

En raison de l'absence de point de vente, la distribution de ces produits se faisait de deux façons : la livraison à domicile et la vente directe au domicile de l'importateur. Dans le premier cas, l'importateur livrait directement ses clients dès la réception de la marchandise. Dans le deuxième cas, informées de l'arrivage des produits, certaines familles préféraient s'approvisionner directement au domicile de l'importateur. Ainsi, elles pouvaient choisir les produits de meilleure qualité.

Le premier point de vente est ouvert en 1977 par Madame Van Der Pluym, d'origine Belge, détentrice auparavant d'une épicerie d'alimentation générale située à proximité de la Maison Africaine. Elle s'installe dans la Rue Longue Vie, voisine de la Chaussée de Wavre, dans la commune d'Ixelles et se spécialise dans la distribution des PFNL alimentaires importés du Congo-Kinshasa. Profitant de la présence de la communauté africaine dans le quartier, elle développe une gamme de produits africains dans sa boutique au fur et à mesure que la demande augmente. Le succès de cette entreprise familiale donne des idées aux Africains, qui à leur tour, s'installent. Certains ne tiennent pas longtemps et font faillite, d'autres en revanche résistent, restent et continuent leur activité. C'est le cas de la Maison Longue Vie, ouverte par un Camerounais en 1980.

Comme nous venons de le voir ci-dessus, le marché belge était dominé par un seul agent : l'épicière belge. En conséquence, elle avait mis en place la stratégie de cumul des fonctions, pratiquée également par les acteurs parisiens. Elle importait et pratiquait la vente en détail, fonction qu'elle partageait avec les détaillants ambulants.

Quant à la distribution, elle était faite selon deux circuits : le circuit ultra court (vente directe) et le circuit court. Le circuit ultra court était le plus utilisé en raison de l'importance de la demande et du nombre réduit, voire inexistant des détaillants. En revanche, le circuit court était utilisé lorsque le seul restaurant de Bruxelles partait s'approvisionner directement chez l'importateur. Le premier circuit était également utilisé par les importateurs ambulants et occasionnels. Les produits importés sont livrés directement au consommateur. Dans le deuxième circuit, les produits passent de l'importateur au restaurateur avant d'atteindre les consommateurs dont la majorité sont des Belges et des diplomates africains installés à Bruxelles.

A l'image du marché Français, la période d'avant 1982 est marquée par des prix élevés. Si à Paris ces prix étaient justifiés par l'absence de la promotion des points de vente, en revanche à Bruxelles ils s'expliquent par le fait qu'il n'y a qu'un seul point de vente. Les prix gardent ce niveau jusqu'à l'arrivée en 1980 des détaillants africains. Mais, c'est à partir de 1981 que les consommateurs constatent une légère baisse de prix, ce qui fait augmenter la demande.

Quant à la publicité, aucun moyen moderne n'est utilisé, contrairement à la France ou des tentatives de publicité dans les revues afro-antillaises de Paris étaient faites. A Bruxelles, le seul moyen de communication utilisé est le bouche à oreille  au sein de la communauté africaine, dans la mesure où il y avait une concentration de la majorité des consommateurs à la Maison Africaine et ses environs. Dans ce cas, les importateurs ne voyaient pas l'utilité de mettre en place d'autres formes de publicité, dont les résultats n'étaient pas garantis. A l'arrivée des produits, l'importateur informait lui même toute la communauté africaine par le bouche à oreille .

En France, le développement du commerce débute principalement en 1982, année correspondant au début de l'arrivée massive des ressortissants de l'Afrique Centrale en France et en Belgique (Tabuna, 1999). Ce développement est marqué par les facteurs suivants : l'apparition de nouveaux produits, le développement des épiceries de province, l'apparition et le développement des zones spécialisées dans le commerce des produits africains et la multiplication des points de vente.

Il s'agit des restaurants et des épiceries. Ces dernières ont connu en 20 ans une croissance fulgurante. A Château Rouge à Paris, leur nombre a été multiplié par 50 entre 1982 et 1999, ce qui correspond à l'ouverture de trois épiceries par an. Cette croissance est aussi observée à Matongué où le nombre d'épiceries est passé de 1 en 1977 à 10 en 1999, ce qui favorise l'émergence de concentration d'épiceries dans des zones spécialisées.

Une zone d'activité tropicale (ZAT) est une zone où il y a une forte concentration de diverses activités (commerciales, culturelles, etc.) intéressant principalement les groupes ethniques issus de l'immigration des régions tropicales (Tabuna, 1999). Dans le cas de la France, il s'agit par exemple des zones ou quartiers abritant plusieurs boutiques distribuant des produits (biens et services) destinés aux Guadeloupéens, aux Réunionnais, aux Guyanais, aux Asiatiques et aux ressortissants de l'Afrique subsaharienne (Béninois, Camerounais, Centrafricains, Congolais, Ivoiriens, Sénégalais, etc.). A Paris, il s'agit du quartier de la Goutte d'Or dans le 18ème arrondissement (Vuddamalay, 1986) et de la Porte de Choisy dans le 13ème arrondissement (Costa-Lascoux et al., 1995). Nous reviendrons sur le fonctionnement et l'organisation des ZAT que nous avons visité à Londres, Lisbonne, Bruxelles et Paris.

Le développement du marché dans les villes de province a été favorisé par le développement des produits stabilisés tels que les produits surgelés (ex : saka saka ou cassava leaves surgelé) et les produits secs (ex : fumbua séché). En effet, avant les années 90 le marché était dominé par les légumes frais. Etant donné l'absence des infrastructures de conservation, leur écoulement dans les villes de province ne donnait pas satisfaction aux détaillants. C'est le cas des villes de province de France et de Belgique où s'est développé, pendant les années 80 et 90, les épiceries spécialisées dans la distribution des aliments africains. On distingue des épiceries spécialisées tenues soit par les Congolais aussi bien du Congo-Kinshasa que du Congo-Brazzaville, soit par des Camerounais. A côté d'elles, se trouvent des épiceries tenues soit par des Européens, soit par d'autres immigrés (Chinois, Pakistanais, Malgaches, Ivoiriens, Béninois, etc.), vendant des produits de toutes origines. Le développement de ces points de vente s'observe dans les grandes villes de France (ex : Marseille, Toulouse, Bordeaux, Lille) et de Belgique (ex : Anvers, Liège et Namur). D'autres villes de taille moyenne abritent également ces points de vente. Citons en France le cas des villes d'Orléans, de Dijon, de Rouen et de Pau.

Selon les importateurs, cette extension du marché vers les villes de province, aussi bien en France qu'en Belgique, a été plus favorisé par le lancement de produits surgelés. Nous en avons distingué deux types : les produits surgelés de grande importance parce qu'ils sont largement vendus  et les produits surgelés marginaux. Les premiers sont représentés par le saka saka et le ndolè, tandis que les seconds sont constitués principalement des légumes-feuilles préparés (biteku téku, ngai ngai par exemple). Leur apparition peut s'expliquer par deux raisons. Ceci s'expliquerait par le changement du comportement des consommateurs qui, en raison des contraintes professionnelles, rechercheraient des produits prêts à préparer ou à être utilisés.

5.2 Devenir du marché

Le devenir du marché est une question centrale chez les acteurs rencontrés, car l'environnement socio-économique, politique et juridique européen change. Parmi ces facteurs, il y en a deux qui sont fondamentaux : la diminution du taux de croissance du nombre d'Africains en Europe et le renforcement de contrôle de la qualité des produits dans les aéroports européens. Les deux facteurs ont des conséquences énormes sur le maintien et le développement du commerce actuel. Si le deuxième dépend des exportateurs, en revanche les acteurs installés en Europe sont plus concernés par le premier facteur.

Comme nous l'avons vu, la chute du taux de croissance du nombre d'Africains en Europe est constante depuis plusieurs années. Si elle n'a pas contribué à la régression du commerce des PFNL, elle est la source d'un début de stagnation, voire d'une diminution de la demande dans certains pays. Ce constat est évoqué par l'un des dirigeants d'Exotic Product, entreprise installée à Bruxelles depuis 1977. Depuis quelques années, celui-ci a constaté d'abord la stagnation et après la baisse de son chiffre d'affaires. Selon lui, deux raisons expliqueraient ses résultats commerciaux. En premier lieu, il y a le départ de plusieurs immigrés soit dans leur pays d'origine, soit dans d'autres pays européens à la suite de l'expiration de leur séjour en Belgique. En second lieu, il y a une régression des arrivées de nouveaux immigrés africains en Belgique.

Face à ce nouvel environnement, les acteurs (importateurs et détaillants) sont obligés de réagir et de trouver des solutions. L'une des solutions serait l'ouverture du commerce à d'autres consommateurs dont les Européens. Ceci en raison de la croissance actuelle de la demande par les Européens des aliments dits ethniques, c'est-à-dire des aliments portant une forte "charge culturelle ou identitaire". Ce nouveau comportement alimentaire des Européens est favorisé par plusieurs facteurs. Citons entre autres : le développement des voyages à l'étranger, l'internationalisation des échanges, le développement constant des restaurants étrangers, la multiculturalité des grandes agglomérations européennes (Paris, Londres, Lisbonne, Bruxelles, Amsterdam), les scandales alimentaires perpétuels (ex : ESB ou vache folle et poulet à la dioxine). En tenant compte de tous ces éléments, il est clair que la nouvelle étape du développement du commerce des PFNL passe par trois voies : l'extension du marché vers les consommateurs européens, la vulgarisation et l'utilisation des principaux produits au sein de toute la diaspora et le développement d'autres débouchés.

5.2.1 La consommation des PFNL au sein de la diaspora afro-caraïbéenne

Le développement des PFNL au sein de la diaspora afro-caraïbéenne consiste à étendre la consommation d'un produit ou de plusieurs produits, d'abord à tous les Africains et après à toute la diaspora Afro-caraïbéenne. Cet objectif tient au fait qu'il existe plusieurs PFNL dont la consommation actuelle est limitée soit à une nationalité, soit aux ressortissants d'une région d'Afrique, ce qui limite leur marché potentiel. Or, nombreux de ces PFNL, notamment les PFNL cultivés sont connus des autres ressortissants des zones tropicales. Citons le cas du Manihot esculenta cultivé dans plusieurs zones tropicales (Antilles, Asie, Indonésie et l'Amérique Latine) uniquement pour ses racines et non pour ses feuilles. Et pourtant, ce sont ces dernières qui sont appelées saka saka dans les épiceries Afro-Antillais de Paris et consommées par les originaires de l'Afrique Centrale. Aussi, pensons-nous que cette catégorie de consommateurs serait plus réceptif et attentionné en découvrant la comestibilité de ce légume-feuille. Mais avant de voir comment atteindre ces consommateurs néophytes, il nous paraît important de faire une typologie des PFNL selon leur consommation actuelle. Nous avons distingué trois types de PFNL : les PFNL à large consommation, les PFNL à consommation régionale et les PFNL à consommation limitée à certaines nationalités.

Les PFNL à large consommation sont des produits consommés quasiment par la majorité des ressortissants de l'Afrique subsaharienne et les ressortissants des autres régions tropicales. C'est le cas des mangues issues des vergers villageois importés de l'Afrique de l'Ouest et de l'Afrique Centrale, les ignames ou yam importés principalement du Ghana et destinés aussi bien aux Africains, aux Asiatiques, aux Caraïbéens et aux Latino-américains. Dans cette catégorie, on peut également ranger le fumbua ou okasi et la mangue sauvage ou l'ogbono consommés par les ressortissants de l'Afrique de l'Ouest et de l'Afrique Centrale.

Les PFNL à consommation régionale sont des produits dont la consommation est limitée aux ressortissants d'une région d'Afrique. Il s'agit par exemple des produits consommés soit par des ressortissants de l'Afrique de l'Ouest, soit par ceux de l'Afrique Centrale. C'est le cas du safou consommé uniquement par les Nigérians et les ressortissants de l'Afrique Centrale, du nététou (Parkia biglobosa) et du kinkéliba (Cassia occidentalis) consommés par les ressortissants de l'Afrique de l'Ouest et du kwanga destiné exclusivement aux ressortissants de l'Afrique Centrale.

Les PFNL à consommation limitée sont des produits dont la consommation est limitée à certaines nationalités. Citons le cas des chenilles importées principalement du Congo-Kinshasa et destinées aux Congolais aussi bien du Congo-Brazzaville que du Congo-Kinshasa. Il est vrai que ce PFNL est consommé dans plusieurs pays d'Afrique (Malaisse, 1997), mais les produits vendus en France ne sont achetés que par les Congolais. D'autres produits font également partie de cette catégorie. C'est le cas de l'attiéké et du placali destiné principalement aux Ivoiriens.

d. Les PFNL à développer

Le fonctionnement actuel du marché montre l'existence de trois micro-marchés, ce qui réduit le marché potentiel de certains produits et par conséquent le chiffre d'affaires généré. C'est le cas des PFNL à consommation limitée et les PFNL à consommation régionale. Il serait intéressant pour les importateurs que ces deux types de produits soient découverts par de nouveaux consommateurs. Ces derniers peuvent être soient des Africains, soient des Afro-Caraibéens (Jamaïcains, Martiniquais, Guadeloupéens, Haïtiens, etc.), soient des Latino-Américains, soient des Asiatiques, soient des Indo-Pakistanais, soient des Indonésiens. Une telle perspective augmenterait, par exemple, la taille du marché de certains produits dont l'utilisation alimentaire est limitée soit aux Africains, soit à certaines nationalités africaines. Citons encore le cas du saka saka ou cassava leaves. Largement consommé en Afrique Centrale et dans certains pays africains (Sierra Leone, Madagascar, Comores), il ne l'est pas en Martinique, en Guadeloupe et en Indonésie. En ciblant par exemple la communauté afro-antillaise (Guadeloupéens, Guyanais et Martiniquais), le marché potentiel du saka saka, initialement estimé à 97 653 personnes, concernerait 556 823 personnes, soit 459 170 consommateurs potentiels nouveaux. Il est clair que pour atteindre ces derniers, il faut mettre en place une politique de communication visant à atteindre ces différentes communautés. Le but est de faire connaître les produits, leur mode de préparation et les manières de les consommer. Trois démarches peuvent être envisagées : proposer des dégustations dans les épiceries fréquentées par les populations visées, développer des produits prêts à être consommés par des néophytes et organiser des séances d'échanges de savoir-faire dans les quartiers. Dans le dernier cas, on peut imaginer, par exemple, des échanges des savoir-faire culinaires entre les femmes d'Afrique Centrale et les femmes des autres régions tropicales (Afrique de l'Ouest, Haïti, Comores, Madagascar, Vietnamiennes, etc.) habitant la même ville. Cette sorte de publicité de proximité est actuellement expérimentée dans le cadre du projet AVAL (Action de Valorisation des savoir-faire locaux) menée en Afrique de l'Ouest.

Le projet AVAL regroupe quatre pays d'Afrique de l'Ouest (Bénin, Burkina Faso, Mali, Sénégal). Il vise l'organisation des opérations d'échange et de transmission de savoir-faire culinaire entre les femmes de l'Afrique de l'Ouest. Ainsi en 1994, deux femmes burkinabés (une éducatrice sociale et une restauratrice) ont été formées, au Bénin, à la fabrication de huit produits sélectionnés. De retour dans leur pays, elles ont pu partager ce savoir-faire avec certaines de leurs compatriotes, au cours d'un séminaire de formation sur la gastronomie des pays voisins. Ainsi, on assiste à une vulgarisation des cuisines de chaque pays aussi bien dans les ménages que dans les restaurants de la sous région. La réalisation de ce type de promotion a pour but est de ne pas laisser la diffusion des savoir-faire culinaires ou de certains produits se faire par le biais des facteurs naturels comme l'immigration, car un marché se construit (Bom Kondé, 1997). L'exemple à retenir au niveau de l'Afrique de l'Ouest est la diffusion de l'attiéké ivoirien. Grâce à l'immigration, il a été découvert dans les personnes venues des pays voisins. En retournant dans leur pays d'origine, celles-ci ont diffusé ce produit et les utilisations qui lui sont associées. Ainsi, sa valeur marchande s'est développée davantage, ce qui offre de nouveaux débouchés aux producteurs ivoiriens. Ce phénomène régional est également observé à l'échelle nationale. En effet, les produits à consommation nationale furent jadis limités à une ethnie. C'est le cas du ndolè plat national camerounais qui à l'origine était un plat des douala. Aujourd'hui, il s'est largement répandu au delà de ses frontières d'origine.

5.2.2 L'extension du marché aux Européens

L'extension du marché vers les Européens consiste à sortir les PFNL de l'Afrique subsaharienne des circuits de distribution spécialisés et à les destiner aux consommateurs européens. En prenant l'exemple des PFNL alimentaires, il est question d'envisager leur intégration dans les circuits de la Grande Distribution où sont vendus les 3/4 des produits agro-alimentaires en Europe. Cette perspective permet de cibler plus de 370 millions des consommateurs vivant dans la Communauté Européenne et dans d'autres pays (Suisse et Norvège), ce qui constitue une opportunité très intéressante pour les exportateurs des PFNL. De plus, elle est envisageable suite à l'émergence de nouveaux modèles de consommation des Européens. En effet, ces derniers affichent de nouveaux comportements alimentaires qui les poussent à rechercher : de nouvelles saveurs, des produits issus d'une agriculture exempte d'engrais chimiques de synthèse, des produits à forte " charge culturelle " et une diversification de leur alimentation. Ces nouveaux besoins ont donné naissance à des marchés dit de niche qui, depuis quelques années, connaissent des taux de croissance en perpétuelle évolution. En conséquence, ils attirent de plus en plus aussi bien les PME que les filiales des grands groupes agro-alimentaires y compris la Grande Distribution. Parmi ces marchés de niche, il y a celui des aliments dits ethniques.

L'expression aliments ethniques, traduit du terme anglais d'ethnic food bien connu chez les anglo-saxons, suscite des discussions chez certains chercheurs de l'espace francophone. Dans ce rapport, nous adhérons aux chercheurs qui défendent l'utilisation de cette expression. Pour nous, les aliments ethniques et les produits ou les aliments de terroir constituent les aliments à forte " charge culturelle " ou des aliments " porteurs d'identité " ou encore ce que Rastoin (1993) appelle les produits à forte identité (PAFI). Ils véhiculent des représentations et sont chargées des valeurs symboliques spécifiques à une culture. Dans le contexte du marché agro-alimentaire européen, les aliments ethniques désignent les aliments consommés par les immigrés. C'est le cas des aliments consommés par les Africains, les Jamaïcains, les Indo-Pakistanais, les Indonésiens, les Latino-Américains et les Américains installés en Europe. Quant aux produits ou aux aliments de terroir, ce sont des aliments européens porteurs de l'identité ou de la tradition d'une région. Dans le cas de la France, citons la bouillabaisse, un plat provençal. Sur le marché des produits agro-alimentaires, les produits à forte " charge culturelle " se distinguent des produits sans identité, sans repère historique lié ni à un continent, ni à un pays, ni à une région, encore moins à une nationalité. Ce sont les aliments du quotidien résultant de l'imagination de l'industrie agro-alimentaire. Fishler (1990) les appelle des objets comestibles non identifiés (OCNI).

Initialement vendus dans les réseaux spécialisés (épiceries et restaurants spécialisés), les aliments ethniques séduisent les consommateurs européens pour des raisons que nous avons évoqué plus haut. Ce succès est tel qu'ils ont intégré les circuits de la Grande Distribution où ils sont présents sous plusieurs formes : plats cuisinés en conserve, plats cuisinés surgelés, sauces, etc. En passe de devenir des aliments de masse, ils intéressent tous les acteurs du système alimentaire européen dont les filiales des multinationales. La croissance de la demande de ce type de produit peut se mesurer à travers le Salon Ethnic and Speciality Food de Paris. Inaugurée à Paris en 1997, cette manifestation commerciale rassemble les fabricants et les professionnels de l'agro-alimentaire européen (Grande Distribution, Restauration commerciale, Consultant, ..). Non ouvert au public, elle enregistre près de 500 visiteurs par jour et le nombre d'exposant est passé de 30 en 1997, 47 en 1998 et 110 en 1999. Parmi les exposants, il y a en majorité les fabricants où les importateurs des aliments asiatiques, indo-pakistanais, indiens et autres. Les aliments africains sont quasiment absents. En trois éditions, il y a eu deux entreprises de la Côte d'Ivoire, trois du Cameroun et une tenue par un Togolais de Paris. Cette dernière fabrique ses produits au Costa Rica à partir des recettes importées d'Afrique. Le chemin est encore long, mais prometteur pour les entreprises africaines. En effet les professionnels pensent que l'Afrique subsaharienne, en raison de sa pluriethnicité et sa diversité alimentaire, devrait jouer un rôle important sur la diversification de l'offre des aliments ethniques en Europe, actuellement faible. En attendant, les produits présents ou pas sur le sol européen doivent sortir de l'anonymat et se révéler aux Européens. Cette perspective nécessite évidemment la mise en place de nouvelles stratégies marketing pour les importateurs des PFNL subsahariens, car les attentes et les exigences des consommateurs européens diffèrent de celles des Africains. Pour cela, une segmentation du marché actuel se pose. Il s'agit d'identifier les PFNL susceptibles de satisfaire les besoins de la Grande Distribution et des consommateurs européens. Selon l'organisation actuelle du marché des aliments tropicaux en Europe, nous avons distingué deux types de PFNL : les PFNL alimentaires exotiques et les PFNL alimentaires ethniques.

Les PFNL alimentaires exotiques (transformés et non transformés) sont des produits, connus ou non sur le marché international, dont les goûts et les saveurs sont connus en Europe. Leur utilisation n'exige pas une longue expérience culinaire ou un séjour dans le pays producteur. Ils peuvent provenir aussi bien de la flore spontanée que des systèmes agroforestiers. C'est le cas de tous les fruits spontanés et issus des vergers villageois, au goût sucré et acide et leurs produits dérivés. Malheureusement, peu de fruits spontanés sont écoulés sur le marché actuel des PFNL en Europe, alors que l'Afrique subsaharienne regorge de plusieurs fruits locaux (Vivien et Faure, 1988 ; Bourobou Bourobou, 1994). Cette absence pourrait s'expliquer soit parce qu'ils ne sont pas encore cultivés, soit parce que les quantités ramassées sont insuffisantes et ne peuvent faire l'objet d'exportation, soit parce que leur vente se limite aux points de vente inaccessibles aux exportateurs, soit parce que leur conservation pose un problème. Mais l'hypothèse la plus probable est le fait qu'ils ne soient pas cultivés, ce qui confirme les résultats obtenus par Vivien et Faure (1988). Ces auteurs avaient remarqué que sur 70 espèces fruitières plantées au Cameroun, 10 seulement étaient issues de la flore spontanée.

Les PFNL alimentaires ethniques standards sont des produits "porteurs d'identité", adaptés aux attentes du marché européen et présentant des caractéristiques proches des produits vendus dans les circuits de distribution. Leurs méthodes de fabrication sont plus proches des technologies modernes que traditionnelles. Ils sont soit prêts à être consommés, soit prêts à être utilisés. En conséquence, ils sont stabilisés à partir des méthodes physiques (surgélation, congélation, séchage, etc.), de la cuisson sous vide, d'emballage sous vide, etc. Les divers produits surgelés, comme le ndolè ou bitter leaf et saka saka ou cassava leaves peuvent être classer dans cette catégorie. Toutefois, il faut savoir que ces deux produits sont très longs à cuisiner, ce qui les rend non conformes aux attentes actuelles des consommateurs européens. Cependant, ils constituent une étape intermédiaire entre les PFNL alimentaires ethniques authentiques et les PFNL alimentaires ethniques standards. Ainsi, on peut distinguer deux types de PFNL alimentaires ethniques standards. Il y a les PFNL alimentaires ethniques standards intermédiaires et les PFNL alimentaires ethniques standards finis. Ces derniers sont des produits prêts à être consommés recherchés par les consommateurs européens. Certaines entreprises sont en voie de développer ce type de produit. Citons le cas de PROEXOCOM qui vient de lancer du saka saka ou cassava leaf précuits surgelés. C'est ce type d'innovation-produit qu'il faut encourager jusqu'à l'élaboration des plats cuisinés. Ainsi, nous pourrons assister à la valorisation des savoir-faire culinaires Africains et l'émergence des entreprises agro-alimentaires spécialisées dans la fabrication et l'importation de PFNL cuisinés. Un tel défi n'est pas insurmontable, en raison, entre autre, de la richesse de la cuisine africaine, comme l'ont montré Grimaldi et Bikia (1972) et Bell et al.(1996) au Cameroun.

a.2.2 Les PFNL alimentaires ethniques authentiques

Les PFNL alimentaires ethniques authentiques sont des produits spécifiques aux habitudes de consommation des ressortissants de l'Afrique subsaharienne. En Europe, tous ces produits sont vendus dans les épiceries tels qu'ils le sont en Afrique. Leur utilisation et leur consommation exigent une longue expérience. C'est le cas des chenilles, du fumbua ou okasi (Gnetum spp.), de l'ogbono (Irvingia gabonensis) et du kwanga (Manihot esculenta). Ils sont les plus nombreux parmi les PFNL importés en Europe, ce qui confirme que les Africains constituent la principale cible des importateurs.

En guise de conclusion, on peut dire que l'offre des PFNL principaux est constituée principalement des PFNL alimentaires ethniques authentiques, car un seul PFNL exotique (mangue issue des vergers villageois) est importé. Quant aux PFNL alimentaires ethniques authentiques, tel que nous les avons définis, ils ne sont représentés que par deux produits : le ndolè ou bitter leaf surgelé et le saka saka ou pondu ou cassava leaves surgelé. En conséquence, des efforts de développement des PFNL alimentaires exotiques, notamment des fruits, et des PFNL alimentaires ethniques standards doivent être consentis par les importateurs. Si le développement des PFNL alimentaires ethniques standards exigent des investissements importants, en revanche les fruits spontanés ou cultivés peuvent être exporter à court terme. Les vergers villageois et les forêts africaines abondent en fruits souvent inexploités (Nkaloulou, 1984) et dans la flore spontanée (Makita-Madzou, 1986 ; Makita-Madzou, 1991 ; Bourobou-Bourobou, 1994 ; Malaisse, 1996). Jadis délaissés au profit des fruits améliorés, les fruits des vergers villageois et d'autres systèmes agroforestiers peuvent être écoulés dans la Grande Distribution.

Constituée par des Hypermarchés et des Supermarchés, la Grande Distribution s'est spécialisée dans la distribution de masse. Parmi les plus grandes entreprises, on trouve Carrefour-Promodès (France), Métro (Allemagne), Edeka (Allemagne) Rewe (Allemagne), Sainsbury (GB), Leclerc (F), Tesco (UK), Ahold (Pays Bas), Delhaize le Lion (Belgique) Migros (Suisse), GB (Belgique), Pryca (Espagne), Intermarché (Portugal). Nous avons visité certains magasins de ces enseignes  à Paris (4 magasins Carrefour, 4 magasins Auchan, 3 magasins Intermarché), à Londres (2 magasins Tesco), à Bruxelles (3 magasins GB et 3 magasins Delhaize le Lion), à Lisbonne (1 magasin intermarché, 1 magasin Pingo-Doce) et à Madrid (1 magasin Pryca, 1 magasin Alcampo).

Dans le domaine de l'agro-alimentaire, la Grande Distribution vend aussi bien les produits alimentaires standards ou produit du quotidien que les produits à forte " charge culturelle" (aliments ethniques et produits de terroir) et les produits exotiques. Ces derniers sont constitués des fruits frais connus et peu connus, comme la banane plantain, le gingembre, les racines de manioc et la patate douce. Tous ces produits sont importés soit de l'Amérique Latine, soit des îles espagnoles (les Canaries) et portugaises (Madère) où sont cultivées la canne à sucre et la banane dessert. Quant au marché des aliments ethniques, il est constitué des plats préparés, des boissons ethniques et des ingrédients (ex : épices). La demande des aliments ethniques concerne plusieurs pays européens dont huit d'entre eux sont les plus importants. Il s'agit de la France, la Belgique, le Royaume-Uni, la Suède, les Pays-Bas, l'Espagne, l'Italie et l'Allemagne. Le chiffre d'affaires généré par ce marché était évalué à 6 milliards de dollars $US en 1997 dont 1 milliard $US (soit 60 %) est généré par le marché du Royaume-Uni est les premier marché en Europe. Il est suivi par le marché français avec 240 millions de dollars et le marché belge avec 170 millions de dollars. Dans tous ces pays, on trouve les aliments asiatiques (chinois, vietnamiens, thaïlandais), indonésiens, texan-mexicains (tex-mex), indo-pakistanais, jamaïcains et antillais. Les produits de toutes les zones tropicales sont présents sauf l'Afrique subsaharienne alors que les professionnels pensent que l'Afrique, en raison de sa pluralité ethnique et la diversité de sa cuisine, peut jouer un rôle dans la diversification de l'offre sur le marché. Des parts de marché importants restent donc à prendre pour les exportateurs ou les importateurs des produits africains dont les PFNL alimentaires.

Au vu de cette organisation de la vente des produits agro-alimentaires dans la Grande Distribution, seuls PFNL alimentaires exotiques et les PFNL alimentaires ethniques standards peuvent intégrer la Grande Distribution (cf. Fig. 1). Cependant cette intégration ne peut se faire sans contraintes. L'une d'elles consiste à mettre en place, notamment dans le cadre des PFNL alimentaires ethniques standards, une politique de marketing efficace. En effet, la dynamique du marché des aliments ethniques se heurte à trois obstacles principaux : l'insuffisance de l'offre, la méconnaissance des utilisations des produits par les européens et le déficit d'information sur les valeurs autres que nutritionnelles des produits. Les consommateurs européens des aliments ethniques veulent découvrir, en consommant ce type d'aliments, les valeurs culturelles dont ils sont le support. Aussi exigent-ils de plus en plus d'informations, non seulement sur la façon d'utiliser le produit, mais également sur ses valeurs symboliques. En plus, une politique visant à faire connaître les produits est indispensable. Plusieurs stratégies peuvent être envisagée, mais selon les professionnels le développement des restaurants africains est un passage obligatoire. C'est ainsi que les aliments asiatiques se sont révélés aux Français et aux Belges (Daineffe, 1994 ; Askenazi, 1997 ; Van Der Linden, 1997). Ils ont constitué la deuxième étape lors du passage des aliments asiatiques des pays exportateurs au consommateur européen. Aussi, les commerçants asiatiques ont développé les restaurants dans toute l'Europe. En France leur nombre est estimé à 20 000 (Le Huu Khoa, 1996) dont 7 000 à 10 000 dans l'agglomération parisienne. Quant aux restaurants africains, leur présence reste discrète. Des parts de marché importantes restent à conquérir par la cuisine africaine en France, qui est riche et diversifiée tant en Afrique sahélienne qu'en Afrique forestière (Grimaldi et Biyoki, 1982 ; Andriamirado, 1997 ; Bakayoko et al., 1998).

5.2.3 Prospection de nouveaux débouchés

Outre le marché des aliments ethniques, il existe actuellement une forte demande d'autres types de produits par les consommateurs européens. Citons le cas des produits biologiques, des aliments santé ou alicaments, des plantes aromatiques séchées et des plantes à parfum séchées. Sur ces marchés et sur d'autres évoqués par Iqbal (1993b) et Aube (1996), les exportateurs africains peuvent écouler les PFNL présents actuellement sur le marché européen et ceux qui ne le sont pas encore. Il s'agit aussi bien des PFNL animaux que végétaux transformés ou pas, multiples et diversifiés, largement inventoriés au cours de nombreux travaux de recherche menés en Afrique subsaharienne. Une liste exhaustive de ces travaux et des plantes et des animaux utiles ne peut être donnée dans ce rapport. Cependant, il faut signaler que chaque pays doit mettre en place une base de données de ces ressources. Celle-ci est très importante dans la prospection de nouveaux débouchés et le choix des produits à développer. De même, nous n'allons pas aborder ici tous les marchés susceptibles d'être utiles pour l'exportation des PFNL de l'Afrique subsaharienne, tellement qu'ils sont nombreux et diversifiés (Iqbal,1993a, 1993b). Cet auteur a montré l'existence de nombreux marchés internationaux des PFNL sur lesquels, l'Afrique est malheureusement absente, sauf dans le cas des produits suivants : le Cinnamon et la Cassia, la gomme arabique et le karité l'Afrique. C'est pourquoi Aube (1996) pense que l'Afrique, riche en biodiversité, a des parts de marché importantes à prendre sur certains débouchés internationaux (le marché de peaux de reptiles, le marché de cire d'abeille et le marché du miel) auxquels il faut ajouter le marché des produits biologiques, le marché des huiles essentielles.

A l'image du marché des aliments ethniques, le marché des produits biologiques est en croissance constante en Europe, notamment en Italie et en Europe du Nord (Glandières, 1998). Bien que ses parts de marché restent encore faibles (0,5 % à 2,5 %), il connaît une croissance de 20 % en France. Les prix pratiqués sont jusqu'à 30 % voire 50 % plus chers chez certains produits. Longtemps réservés à certaines catégories des consommateurs (végétariens et écologistes), les produits biologiques s'ouvrent au grand public. Aussi, pénètrent-ils progressivement dans la Grande Distribution. Le développement de ce marché tient à trois raisons : le souci de santé, la garantie des produits sains et les préoccupations écologiques ou environnementales notamment chez les jeunes (les consommateurs de demain). L'Europe, les Etats Unis et le Japon sont les principaux marchés. L'Europe représente sur le plan mondial le marché le plus important avec un chiffre d'affaires de 4,5 millions de dollars en 1997 (Guillaume-Gentil, 1999). Les leaders sont l'Allemagne, les Pays Bas, la Suisse, l'Autriche et depuis quelques années l'Italie. En France, le marché du "bio" a généré un chiffre d'affaires de 4 milliard de FF en 1997 alors qu'il était de 3 milliards en 1994 (Glandières, 1998), ce qui correspond à une croissance annuelle de 26 %. Les segments porteurs sont les fruits et les légumes frais. Une étude du cabinet Frost & Sullivant, cité par Guillaume-Gentil (1999), estime que celui des légumes biologiques en Europe devrait être en 2003 de taille similaire des légumes conventionnels (soit environ 510 millions de dollars). Bien qu'alléchant, le marché "bio" à une contrainte incontournable : la certification. Dans les pays en voie de développement, notamment en Afrique, la certification représente des coûts souvent élevés pour les opérateurs locaux car les organismes de certification sont pour une large majorité des entreprises étrangères. C'est l'une des principales raisons de l'insuffisance de l'offre des pays africains. Cependant, il faut encourager les initiatives de plusieurs pays comme le Cameroun, le Togo, Madagascar, le Kenya, le Ghana, la Côte d'Ivoire et le Zimbabwe. Comparativement à l'Amérique du Sud (Argentine et Brésil), l'Afrique subsaharienne présente des conditions agro-écologiques et économiques compatibles avec l'agriculture biologique. Ainsi, plusieurs PFNL spontanés ou cultivés pourront être destinés au marché européen des produits biologiques. A côté des fruits et légumes frais, l'Afrique subsaharienne pourra développer des aliments bio destinés aussi bien à l'alimentation humaine qu'animale. La recherche de nouvelles sources de protéines pour l'élevage avicole biologique et même conventionnelle, suite aux scandales de la dioxine, ouvre une opportunité aux PFNL animaux (ex : les chenilles riches en protéines).

On apelle aliment santé ou alicaments, des aliments ayant des effets thérapeutiques, c'est-à-dire présentant une ou des promesses de santé. Le marché des aliments santé est en pleine croissance en Europe. Il doit son émergence au nouveau comportement des consommateurs européens consistant à rechercher des aliments présentant des promesses de santé. Ce sont des aliments destinés par exemple aux diabétiques. En France, c'est un marché de 1,5 milliard de FF en croissance constante (Aubril et al., 1998). En raison de sa diversité biologique et sa richesse en plantes à la fois alimentaires et médicinales, l'Afrique pourrait accéder à ce marché. Les études ethnobotaniques et floristiques menées en Afrique par Profizi et al. (1993) listent ces nombreux PFNL ayant des effets thérapeutiques. Citons le cas d'omi (Afrostyrax lepidophyllus), un condiment entrant dans la préparation de plusieurs mets alimentaires dont le saka saka ou cassava leaves. Selon Hecketsweiler et Mokoko Ikonga (1991), l'omi est également utilisé contre les troubles gastro-intestinaux. Il en est de même de la mangue sauvage ou ogbono utilisé comme un épaississant d'aliments. Il en est de même de Xylopia aethiopica condiment présentant des effets contre l'asthme. A titre d'exemple 62 % des personnes recherchent en France des produits ayant ces propriétés thérapeutiques et 79% des personnes pensent que l'alimentation est un moyen de prévenir les maladies (Aubril et al., 1998). Le profil du consommateur est proche de celui des produits biologiques, car on a remarqué en France que 63 % des acheteurs de produits biologiques achètent aussi des aliments santé. Aussi, le créneau, resté longtemps l'apanage des PME, intéresse les grands groupes agro-alimentaires. En France, Nestlé s'est doté d'une division appelée "nutrition active" pour produire des aliments capables d'avoir des impacts positifs sur les performances physiques et intellectuelles. Danone développe des aliments santé destinés aux enfants, fabriqués également par des industries pharmaceutiques. Parmi les produits commercialisés, on trouve des aliments surgelés pour diabétiques, hypertendus, cardiaques, des aliments riches en fibre, des produits traiteurs, etc. Ce marché apparaît donc intéressant pour les PFNL alimentaires de l'Afrique Centrale dont beaucoup possèdent des effets thérapeutiques recherchés par le consommateur Européen (Adjahanahoun, 1988 et Hladik, 1996). Certains fruits, comme le Pentadiplandra brazzeana, possédant une protéine au goût extrêmement sucré, peuvent être utilisés dans les régimes de basse calorie. Il en est de même pour de nombreux fruits riches en vitamine C qui pourraient être commercialisés en tant que complément alimentaire. Il en existe plusieurs autres, qui sont soit riches en oligo-éléments, soit riches en vitamines, soit porteurs d'effets contre certaines maladies (tension, diabète, cancer, etc..). C'est le cas de Lippia multiflora qui a des effets hypotenseurs (Bissangou, 1993). Tous ces produits peuvent être développés pour ce créneau. C'est donc là un débouché à exploiter par les exportateurs de l'Afrique Centrale.

Les huiles essentielles (HE) sont des substances volatiles extraites généralement à partir des plantes spontanées et des plantes cultivées. Elles sont considérées comme des produits à très haute valeur ajoutée destinés à plusieurs secteurs industriels : l'industrie agro-alimentaire, l'industrie chimique et la parfumerie et l'aromathérapie. Ce dernier débouché contribue actuellement à l'émergence du marché des huiles essentielles biologiques. Mais, le marché conventionnel est le plus ancien et le plus connu. Il est évalué à 1 milliard de dollars pour une production de 50 000 tonnes dont 54,9 % viennent des pays en voie de développement (Verlet, 1997). 85 % des HE des PVD sont produits par le Brésil, l'Inde, le Brésil, le Maroc, l'Egypte,

l'Indonésie et la Turquie. Mais comme le montre le Tableau 24, les pays de l'Afrique subsaharienne, riche en biodiversité, ne participent pas à ces échanges mondiaux. C'est le cas des pays d'Afrique Centrale, abritant de nombreuses plantes à huiles essentielles et des plantes aromatiques (Bissangou, 1993 ; Eyele-Mve-Mba, 1997) n'exporte paradoxalement pas des huiles essentielles. Une exception est faite pour les pays de l'Océan Indien (Comores et Madagascar) qui sont les premiers importateurs d'Ylang Ylang.

Tableau 24 : Répartition de la production des huiles essentielles dans les PVD

PAYS

PART DANS LA PRODUCTION (%)

Brésil

13, 1

Chine

30, 7

Egypte

3, 1

Inde

6,6

Indonésie

9,7

Maroc

9,1

Turquie

10, 4

Autres pays

17, 3%

Outre le marché des alicaments et le marché des produits biologiques, il faut signaler l'émergence des entreprises fabricant les aliments biologiques destinée à l'aviculture et des entreprises de l'industrie chocolatière n'utilisant plus le beurre de cacao.". A l'image de plusieurs industries agro-alimentaires, ces deux débouchés peuvent être utilisés par les exportateurs des PFNL de l'Afrique subsaharienne. Le succès de la gomme arabique (Acacia senegalensis) et du karité (Vitellaria paradoxa ou Butyrospermum paradoxum) exportés vers des débouchés industriels européens et nord-américains en est une parfaite illustration. Tout comme le beurre de karité, le beurre du moabi (Baillonella toxysperma) peut gagner des parts de marché dans la nouvelle industrie chocolatière. De même, l'industrie agro-alimentaire est aussi un débouché intéressant pour les nombreux PFNL ayant un pouvoir sucrant supérieur au saccharose, comme le Pentadiplandra brazzeana étudié par Hladik (1996). La demande croissante dans l'industrie agro-alimentaire du ndé-bian ou taline (Thaumatococcus danielli) produite en Côte d'Ivoire et au Cameroun est incitative à ce propos.

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