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Module 5: Le système de règlement des différends de l’OMC


Objectif
Points clés
5.1 Introduction
5.2 Le mécanisme de règlement des différends de l’OMC
5.3 Les faits saillants des derniers différends portant sur des produits agricoles
5.4 Les dispositions visant à renforcer la participation des pays en développement à ce système
Bibliographie


J. Haddock and R. Sharma
Division des produits et du commerce international

Objectif

L’objectif de ce module est d’expliquer les règles et procédures fondamentales qui président à l’initiation puis à l’instruction du règlement d’un différend.

Points clés

· Le Mémorandum de règlement des différends (MRD) succède au Mécanisme de règlement des différends qui, sous l’égide du GATT, se particularisait par ses lenteurs, ses incohérences et par une mise en œuvre au caractère aléatoire et inadapté.

· Les derniers différends qui ont porté sur des produits agricoles font référence aux incohérences entre l’Accord sur l’agriculture et d’autres accords ou articles du GATT de sorte que, pour comprendre ces différends, il est nécessaire de connaître ces autres accords et le GATT de 1994.

· Diverses formes d’assistance peuvent être fournies aux pays en développement pour renforcer leur participation à ce système.

5.1 Introduction

Un nouveau mécanisme de règlement des différends a été instauré durant le Cycle d’Uruguay

Un système s’appuyant sur la réglementation n’est opérationnel que s’il existe un moyen de résoudre les conflits. Un mécanisme de règlement des différends est par conséquent un élément essentiel pour assurer la sécurité et la prévisibilité du système commercial multilatéral. Le GATT de 1947 prévoyait un mécanisme de ce type dans les Articles XXII et XXIII. Mais au cours du temps, les défauts de ce système sont devenus évidents et il a fallu améliorer son efficacité. Ceci a conduit à l’élaboration du Mémorandum d’accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends, qui a institué plusieurs nouvelles règles et procédures.

Le nouveau Mémorandum sur le règlement des différends (MRD) couvre 30 pages et comprend 27 articles et quatre appendices décrivant dans le détail les procédures régissant l’ouverture et la conduite d’une action de règlement des différends. Pour des raisons de place, il est impossible de présenter ici toutes ces caractéristiques, aussi le lecteur devra-t-il consulter les références indiquées à la fin de ce document. L’objectif du présent module est de fournir les éléments de base pour comprendre le sujet. Il aborde les aspects suivants:

· le MRD
· les faits saillants des derniers différends concernant les produits agricoles
· les dispositions visant à renforcer la participation des pays en développement à ce système.

5.2 Le mécanisme de règlement des différends de l’OMC

5.2.1 Le mécanisme de règlement des différends dans le GATT de 1947

Deux articles du GATT de 1947 traitaient du règlement des différends. L’Article XXII - Consultations - établissait un droit de consultation entre les Parties contractantes (Membres), alors que l’Article XXIII - Protection des concessions et des avantages - stipulait que ce droit s’appliquait dans le cas où un Membre considérait qu’il ne profitait pas d’un avantage auquel il pouvait prétendre en vertu du GATT, et ce du fait des agissements d’un autre Membre. Dans une première étape, l’accent a toujours été mis sur la recherche d’une solution mutuellement satisfaisante, par voie de consultations. En cas d’échec, l’ensemble des membres du GATT devait examiner la question et statuer ou formuler des recommandations selon le cas, et autoriser des sanctions, si nécessaire. Un groupe spécial de trois (ou parfois cinq) experts était généralement désigné. La recommandation du groupe spécial devenait contraignante à dater de son adoption par le Conseil des représentants du GATT. Plus de 120 groupes spéciaux de ce type ont été institués entre 1948 et 1994.

Les défauts du mécanisme du GATT

Le mécanisme du GATT avait en particulier deux défauts. Premièrement, le système reposait sur le consensus. Les décisions prises par le Conseil devaient refléter le consensus des membres, tout au long du processus, qu’il s’agisse de l’établissement du groupe spécial, de la détermination de son mandat et de sa composition ou de l’approbation de ses recommandations. Il s’ensuit que n’importe quel Membre pouvait bloquer le processus. Deuxièmement, la situation a empiré après 1979, avec l’entrée en vigueur d’un certain nombre d’accords sur des mesures non tarifaires, qui n’intéressaient qu’un nombre limité de Membres - les fameux «codes», négociés durant le Cycle de Tokyo. Sept d’entre eux avaient leur propre procédure de règlement des différends et des obligations de codes distinctes de celles du GATT, d’où un risque réel d’incompatibilité entre les différents verdicts. Le système se particularisait en conséquence par ses lenteurs et ses incohérences et par une mise en œuvre au caractère aléatoire et inadapté.

Cette expérience et le fait d’avoir à introduire les toutes nouvelles obligations dérivant des accords GATS - sur les services - et ADPIC - sur la propriété intellectuelle - ont conduit à la décision de doter l’OMC d’un ensemble unique de procédures de règlement des différends qui s’appliquerait à tous les secteurs des relations commerciales couverts par la nouvelle organisation, et dont la marche ne pourrait plus être bloquée par la nécessité d’adopter les décisions par consensus.

5.2.2 La nouvelle procédure de règlement des différends du Cycle d’Uruguay

Cette procédure est décrite dans le Mémorandum d’accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends (Mémorandum sur le règlement des différends ou MRD). Pour administrer ces règles et procédures, l’Article 2 du MRD a institué un organe de règlement des différends (ORD), dont il a énuméré les fonctions. L’ORD a le pouvoir d’établir des groupes spéciaux, d’adopter les rapports des groupes spéciaux et de l’organe d’appel, d’assurer la surveillance de la mise en œuvre des décisions et recommandations, et d’autoriser la suspension de concessions et d’autres obligations qui résultent des accords visés. L’ORD informe les Conseils et Comités compétents de l’OMC de l’évolution des différends en rapport avec les dispositions des accords visés respectifs. L’ORD se réunit aussi souvent qu’il est nécessaire pour s’acquitter de ses fonctions.

Le concept du «consensus» est une caractéristique importante de l’ORD. Dans les cas où les règles et procédures du MRD prévoient que l’ORD doit prendre une décision, il doit le faire par consensus. La note de bas de page du paragraphe 4 de l’Article 2, précise comment doit être entendu ce consensus: «L’ORD sera réputé avoir pris une décision par consensus sur une question dont il a été saisi si aucun Membre, présent à la réunion de l’ORD au cours de laquelle la décision a été prise, ne s’oppose formellement à la décision proposée».

Le processus de règlement des différends

Le processus officiel de règlement des différends, avec ses différentes étapes et leur calendrier, est décrit à l’encadré 1. Il est important de noter à ce propos que les parties au différend sont encouragées, à tous les stades, à se consulter pour régler l’affaire à l’amiable.

Le lancement du processus

En résumé, durant la première étape, les parties concernées s’efforcent de résoudre le différend entre elles, par voie de consultations. En cas d’échec, la procédure du groupe spécial est engagée et va se dérouler en trois phases: le lancement du processus, l’étape opérationnelle puis l’adoption. La phase de lancement correspond à la décision d’établir un groupe spécial, à la fixation de son mandat et à la détermination de sa composition.

Encadré 1: Les différentes étapes possibles d’un règlement des différends1

1 Les durées indiquées sont, selon le cas, minimales ou maximales, obligatoires ou facultatives. D’une manière générale, l’accord est flexible à cet égard.

A tous les stades, les pays parties prenantes du différend sont encouragés à se consulter pour régler l’affaire «à l’amiable»

60 jours

Consultations, médiation, etc.


Avant la 2ème réunion de l’ORD

Etablissement du groupe spécial par l’ORD


0-20 jours
20 jours (+10 si composition déterminée par le D-G)

Mandat
Composition



Examen du groupe spécial (normalement deux réunions avec les parties; une réunion avec des tierces parties)

Groupe consultatif d’experts


Phase de réexamen intérimaire (remise de la partie descriptive du rapport aux parties pour observations. Remise du rapport intérimaire aux parties pour observations).

Réunion de réexamen avec le groupe spécial, sur demande

6 mois à partir de la date de la composition du groupe spécial; 3 mois si urgence

Remise du rapport du groupe spécial aux parties.


9 mois au maximum après l’établissement du groupe spécial

Distribution du rapport du groupe spécial à l’ORD

Examen en appel

60 jours pour le rapport du groupe spécial, sauf en cas d’appel

L’ORD adopte le(s) rapport(s) du groupe spécial/organe d’appel, avec les éventuelles modifications apportées au rapport du GS par le rapport d’appel

30 jours pour le rapport de l’organe d’appel

Le «délai raisonnable» est proposé par le membre et approuvé par l’ORD; ou convenu par les parties au différend; ou déterminé par arbitrage (env. 15 mois dans ce cas)

Mise en œuvre, la partie perdante propose un plan de mise en œuvre, dans un «délai raisonnable»

En cas de non mise en œuvre, les parties négocient une compensation en attendant la mise en œuvre intégrale

Différends au sujet de la mise en œuvre: poursuites possibles; y compris saisie du groupe spécial initial

30 jours après expiration du «délai raisonnable»

Sanctions; à défaut d’accord sur la compensation, l’ORD autorise la sanction, en attendant la mise en œuvre intégrale

Sanctions-croisées, même secteur, autres secteurs, autres accords

Possibilité d’arbitrage, au sujet du niveau de la suspension ou des procédures et des principes de la sanction

Source: Repris du site Web de l’OMC http://www.wto.org/wto/dispute/dispute.htm également consultable dans WTO (1999), p. 29.

La phase opérationnelle

La phase opérationnelle comprend le processus d’examen et de réexamen du groupe spécial, la remise de son rapport aux parties concernées puis sa soumission à l’ORD1. La fonction des groupes spéciaux est définie à l’Article XI du MRD et consiste à:

1 Cette phase comprend un réexamen intérimaire, durant lequel le groupe spécial consulte les parties au différend et leur remet un rapport intermédiaire contenant ses résultats et ses conclusions.

· procéder à une évaluation objective de la question dont le groupe spécial a été saisi, ce qui inclut l’évaluation des faits, l’évaluation des possibilités d’applications des accords pertinents et l’évaluation de la conformité des faits avec les dispositions des accords visés;

· formuler d’autres constatations propres à aider l’ORD à émettre des recommandations ainsi qu’il est prévu dans les accords visés;

· consulter régulièrement les parties en litige et leur offrir les possibilités correspondantes d’élaborer une solution mutuellement satisfaisante.

La phase finale

La phase finale du processus correspond à l’adoption du rapport. Le groupe spécial peut alors recommander qu’une partie se conforme aux règles de l’OMC et suggérer la façon pour y parvenir. Le rapport du groupe spécial est adopté dans les 60 jours suivant la date de sa distribution aux Membres de l’OMC, à moins qu’il ne fasse l’objet d’une procédure d’appel.

La procédure d’appel

La procédure d’appel démarre lorsqu’une des parties en litige s’oppose aux conclusions. L’affaire est alors portée devant l’Organe d’appel, une des instances permanente de l’ORD. La durée de la procédure proprement dite ne doit pas dépasser 60 jours. L’appel doit se limiter aux questions de droit abordées par le rapport du groupe spécial et aux interprétations de la législation données par celui-ci. L’Organe d’appel peut confirmer, modifier ou infirmer les constats et conclusions juridiques du groupe spécial. Le rapport de l’Organe d’appel est automatiquement adopté par l’ORD à moins que celui-ci ne décide par consensus de le rejeter, dans les 30 jours suivant sa distribution aux Membres de l’OMC. Tout rapport adopté doit être accepté sans condition par les parties en litige.

L’ORD surveille la mise en œuvre des recommandations émanant du groupe spécial ou de l’Organe d’appel et demande en particulier au perdant de l’informer de ses intentions concernant leur mise en œuvre. Si ce dernier ne peut se conformer immédiatement aux recommandations, il pourra profiter d’un délai - pouvant aller jusqu’à 15 mois - pour apporter les changements requis. A défaut de le faire dans le délai convenu, le plaignant peut demander l’application de mesures de réparation ou d’un arbitrage. Le niveau des mesures de réparation jugé admissible par l’OMC est généralement équivalent au niveau des dommages et préjudices subis par le plaignant. Si le perdant estime ce niveau de sanction injuste, c’est-à-dire supérieur au niveau des dommages et préjudices, il peut demander un arbitrage.

Le droit des tierces parties

Une des caractéristiques les plus intéressantes du système de règlement des différends de l’OMC tient à ce qu’on appelle le droit des tierces parties. L’Article 10 du MRD stipule que tout membre ayant un intérêt substantiel dans une affaire portée devant un groupe spécial et ayant informé l’ORD de cet intérêt constitue alors ce qu’on appelle une «tierce partie» qui devra avoir la possibilité de se faire entendre par le groupe spécial et de lui présenter des communications écrites. Ces communications devront être transmises aux parties en litiges et le rapport du groupe spécial devra en faire état.

On trouve aussi dans certains accords des dispositions spéciales en matière de règlement des différends qui ont été conçues pour répondre à leurs besoins spécifiques. A titre d’exemples, on peut citer les clauses prévues dans certains accords (SPS et OTC) qui concernent le recours à des experts qualifiés comme membres de groupes spéciaux ou de conseillers, ou encore les procédures accélérées concernant les litiges au titre de l’Accord sur les subventions. Les accords sur les mesures anti-dumping, sur les textiles, sur l’évaluation en douane, sur les droits de la propriété intellectuelle et sur les Services contiennent aussi ce type de dispositions spéciales.

5.3 Les faits saillants des derniers différends portant sur des produits agricoles

L’encadré 2 expose succinctement quelques-uns des derniers différends portant sur des produits agricoles. Il faut noter que bien que toutes ces affaires concernent des produits agricoles, elles invoquent presque toujours des incohérences avec d’autres accords et avec des articles du GATT - l’Accord sur l’agriculture (AsA) n’étant parfois pas même cité. Il est donc nécessaire de se familiariser avec les autres accords et avec le GATT de 1994 pour comprendre les différends.

Trois des différends présentés dans l’encadré ont un rapport plus étroit avec l’Accord sur l’agriculture. La première affaire - Canada: Mesures visant l’importation de lait et l’exportation de produits laitiers - invoque des incompatibilités entre les règles de l’Accord sur l’agriculture concernant les subventions à l’exportation et les engagements du Canada en la matière (ainsi que des violations de quelques règles concernant les contingents tarifaires). La deuxième - Canada: Mesures visant les exportations de produits laitiers - invoque également des articles sur la concurrence à l’exportation, ainsi que l’Article XI du GATT sur les restrictions quantitatives. Le troisième litige - Hongrie: Subventions à l’exportation des produits agricoles - se fonde sur l’Article 3.3 et la partie V de l’AsA (sur les subventions à l’exportation) pour contester à la Hongrie des subventions à l’exportation non spécifiées dans sa liste et dépassant ses niveaux d’engagement.

Plusieurs autres différends figurant dans l’encadré citent également un ou plusieurs articles de l’AsA, mais la contestation semble principalement se référer à d’autres accords et au GATT de 1994. L’Article XI du GATT - Élimination générale des restrictions quantitatives - est fréquemment invoqué dans les différends intéressant des produits agricoles, sans doute parce qu’il justifiait dans certains cas l’adoption de restrictions quantitatives à l’importation dans le secteur agricole.

Encadré 2: Sélection de quelques cas de différends relatifs aux produits agricoles portés devant l’OMC

Communauté européenne - Régime applicable à l’importation, la vente et la distribution de bananes, plaintes de l’Équateur, du Guatemala, du Honduras, du Mexique et des Etats-Unis. Les plaignants allèguent que le régime de la Communauté européenne applicable à l’importation, la vente et la distribution de bananes est incompatible avec les Articles I, II, III, X, XI et XIII du GATT, et avec les dispositions de l’Accord sur les licences d’importation, l’Accord sur l’agriculture (AsA), celui sur les Mesures concernant les investissements qui touchent au commerce (MIC) et l’Accord général sur le commerce des services (GATS). Un groupe spécial a été créé le 8 mai 1996. Ce groupe a constaté que le régime d’importation des bananes de la Communauté européenne, et en particulier les procédures de licences d’importation, était incompatible avec le GATT. Il a en outre statué que, si la dérogation de Lomé supprimait l’incompatibilité avec l’Article XIII du GATT, celles découlant du régime de licences subsistaient. La CE ayant fait appel, l’Organe d’appel a confirmé l’ensemble des constatations du groupe spécial mais infirmé celles selon lesquelles l’incompatibilité avec l’Article XIII du GATT serait supprimée par la dérogation de Lomé et que certains aspects du régime de licences constitueraient une violation de l’Article X du GATT et de l’Accord sur les licences d’importation. En septembre 1997, le rapport de l’Organe d’appel et le rapport modifié du Groupe spécial ont été adoptés par l’ORD. Par la suite, un arbitrage a statué que le «délai raisonnable» de mise en œuvre s’étalerait du 25 septembre 1997 au 1er janvier 1999.

Le différend est entré dans une nouvelle phase lorsque les plaignants ont contesté la compatibilité avec l’OMC des mesures introduites par la CE. Le 15 décembre 1998, la CE avait en effet demandé la création d’un groupe spécial afin de déterminer si les mesures qu’elle avait mises en œuvre devaient être considérées conformes aux règles de l’OMC tant qu’elles ne seraient pas contestées. A peu près au même moment, l’Equateur avait également demandé le rétablissement du groupe spécial initial afin d’examiner si les mesures prises par la CE étaient compatibles avec les règles de l’OMC. L’ORD a accepté le 12 janvier 1999 de reconvoquer le groupe spécial initial pour examiner les requêtes de l’Equateur et de la CE. Le 14 janvier 1999, s’appuyant sur le MRD, les Etats-Unis ont demandé l’autorisation de suspendre les concessions à l’égard de la CE à hauteur de 520 millions de dollars EU, niveau qui a été contesté par la CE. Dans le même temps, le groupe spécial initial statuait que le régime de la CE applicable aux bananes n’était pas encore pleinement compatible avec l’OMC. En ce qui concerne la question des concessions, les arbitres ont déterminé que le niveau des préjudices subis par les Etats-Unis s’élevait à 191,4 millions de dollars EU. Le 19 avril 1999, l’ORD a donc autorisé la suspension des concessions à ce niveau.

Inde - Restrictions quantitatives à l’importation de produits agricoles, textiles et industriels, plainte des Etats-Unis. Les Etats-Unis contestaient les restrictions quantitatives à l’importation maintenues par l’Inde sur un grand nombre de produits agricoles, textiles et industriels. Ils estimaient notamment que plus de 2 700 lignes tarifaires relatives à des produits agricoles et industriels notifiées à l’OMC étaient incompatibles avec les obligations de l’Inde au titre des articles XI:1 et XVIII:11 du GATT de 1994, de l’Article 4.2 de l’Accord sur l’agriculture, et de l’Article 3 de l’Accord sur les procédures de licences d’importation. Le groupe spécial, institué le 18 novembre 1997, a constaté que les mesures en cause étaient incompatibles avec les obligations de l’Inde découlant des articles XI et XVIII:11 du GATT de 1994 et, pour autant qu’elles s’appliquent aux produits visés par l’Accord sur l’agriculture, avec l’Article 4.2 de l’Accord sur l’agriculture. L’Inde a fait appel.

Canada - Mesures touchant les importations de lait et exportations de produits laitiers, plainte des Etats-Unis. Les Etats-Unis soutenaient que les subventions à l’exportation des produits laitiers prétendument accordées par le Canada et l’administration par ce pays de contingents tarifaires sur le lait faussaient les échanges sur le marché des produits laitiers et avaient un effet négatif sur les ventes américaines de produits laitiers. Les Etats-Unis invoquent des violations des Articles II, X et XI du GATT de 1994, des Articles 3, 4, 8, 9 et 10 de l’Accord sur l’agriculture, de l’Article 3 de l’Accord sur les subventions et des Articles 1, 2 et 3 de l’Accord sur les procédures de licences d’importation. Un groupe spécial a été institué le 25 mars 1998. Ce groupe a constaté que les mesures faisant l’objet de la plainte étaient incompatibles avec les obligations du Canada au titre de l’Article II:1(b) du GATT de 1994, et de l’Article 9:1(a) et (c) de l’Accord sur l’agriculture. Le rapport du groupe spécial a été distribué le 17 mai 1999.

Canada - Mesures touchant les exportations de produits laitiers, plainte de la Nouvelle-Zélande au sujet d’un prétendu programme de subventions à l’exportation de produits laitiers mentionné sous le nom de programme «des classes spéciales de lait». La Nouvelle Zélande soutient que le programme canadien «des classes spéciales de lait» est incompatible avec l’Article XI du GATT, et avec les Articles 3, 8, 9 et 10 de l’Accord sur l’agriculture. Le 25 mars 1998, il a été décidé que le groupe spécial établi pour l’affaire précédente (Canada... produits laitiers) serait aussi chargé d’examiner ce différend.

République de Corée - Mesures touchant les importations de viande de bœuf fraîche, réfrigérée et congelée, plainte des Etats-Unis. Cette plainte, présentée en février 1999, porte sur une réglementation coréenne qui créerait, entre autres, une discrimination à l’égard de la viande de bœuf importée car les ventes de viande de bœuf importée seraient cantonnées à certains magasins spécialisés, sa présentation serait limitée et les possibilités de vente de viande de bœuf importée seraient par ailleurs restreintes. Il est également dit que la République de Corée impose une majoration de prix sur les ventes de viande de bœuf importée, limite l’autorisation d’importer à certains «super-groupes» et à l’Organisation de commercialisation des produits de l’élevage (LPMO) et octroie au secteur de l’élevage bovin un soutien interne dont le montant dépasse la mesure globale du soutien mentionnée dans sa liste. Les Etats-Unis soutenaient que ces restrictions ne s’appliquaient qu’à la viande de bœuf importée, ce qui constituait un refus d’accorder le traitement national aux importations de viande de bœuf, et que le soutien accordé à la branche de production nationale équivalait à des subventions intérieures contraires aux dispositions de l’Accord sur l’agriculture. Les Etats-Unis invoquent des violations des Articles II, III, XI et XVII du GATT de 1994, des Articles 3, 4, 6 et 7 de l’Accord sur l’agriculture, et des articles 1 et 3 de l’Accord sur les procédures de licences d’importation. Un groupe spécial a été établi en mai 1999. L’Australie, le Canada et la Nouvelle-Zélande ont invoqué leur droit en tant que tierces parties.

Philippines - Mesures touchant les viandes de porc et de volaille, plainte des Etats-Unis, au sujet de la mise en œuvre, par les Philippines, de contingents tarifaires pour les viandes de porc et de volaille. Les Etats-Unis estimaient en particulier que la lenteur des formalités d’accès pour les quantités entrant dans les limites des contingents et le régime de licences utilisé pour administrer l’accès à ceux-ci, étaient incompatibles avec les obligations des Philippines au titre des Articles III, X, et XI du GATT de 1994, de l’Article 4 de l’Accord sur l’agriculture, des Articles 1 et 3 de l’Accord sur les procédures de licences d’importation, et des Articles 2 et 5 de l’Accord sur les Mesures concernant les investissements qui touchent au commerce (MIC). Il leur apparaissait en outre que ces mesures portaient dommages et préjudices aux avantages sensés résulter directement ou indirectement des accords cités. Le 12 mars 1998, les parties ont fait connaître la solution convenue d’un commun accord qui règle leur différend.

Hongrie - Subventions à l’exportation des produits agricoles, plainte de l’Argentine, de l’Australie, du Canada, de la Nouvelle-Zélande, de la Thaïlande et des Etats-Unis, qui ont fait valoir, en mars 1996, que la Hongrie enfreignait les dispositions de l’Accord sur l’agriculture (Article 3.3 et Partie V) en accordant des subventions à l’exportation pour des produits agricoles non spécifiés dans sa liste, ainsi que des subventions à l’exportation à des niveaux supérieurs à ses engagements. Un groupe spécial a été institué en février 1997 mais en juillet de la même année, l’Australie, s’exprimant au nom de tous les plaignants, a notifié à l’ORD que les parties en litige étaient parvenues à une solution à l’amiable qui prévoit que la Hongrie devra demander une dérogation à certaines obligations découlant de l’OMC. Dans l’attente de l’adoption de cette dérogation, la plainte n’a toutefois pas été formellement retirée.

Source: Site Web de l’OMC: Vue d’ensemble sur l’état d’avancement des différends portés devant l’OMC, mise à jour le 25 juin 1999.

De la même manière, l’administration des contingents tarifaires (notamment Article XIII du GATT) s’est trouvée au cœur de plusieurs litiges se rapportant à des produits agricoles. Ceci est compréhensible car les régimes d’importation basés sur les contingents tarifaires sont très répandus dans ce secteur. L’Accord sur les licences d’importation est presque toujours cité dans les plaintes au sujet de contingents tarifaires, du fait que ceux-ci sont habituellement administrés au moyen de licences (voir le différend sur la banane).

Enfin, de plus en plus de différends relatifs aux produits agricoles et halieutiques font état de violations d’un ou plusieurs articles des Accords sur l’application des mesures sanitaires et phytosanitaires (SPS) et de l’Accord sur les Obstacles techniques au commerce (OTC). Ceci est sans doute dû à la croissance rapide du commerce des produits transformés pour lesquels les normes sont plus drastiques.

5.4 Les dispositions visant à renforcer la participation des pays en développement à ce système

5.4.1 Le traitement spécial et différencié

Les droits des pays en développement

Plusieurs dispositions du MRD établissent des procédures ou des délais spéciaux qui s’appliquent lorsqu’un pays en développement est partie à un différend. Une de ces dispositions institue en tant que droit le fait qu’un des membres au moins du groupe spécial soit un ressortissant d’un pays en développement. Une autre disposition concerne la procédure des bons offices qui consiste à demander à une tierce partie de jouer un rôle de conciliation et de médiation. De par ses fonctions, le Directeur général peut lui-même proposer ses bons offices. Au cours des consultations, les Membres doivent ensuite accorder une attention spéciale aux problèmes et aux intérêts des pays en développement et un délai supplémentaire peut être autorisé. En outre, la procédure des groupes spéciaux prévoit qu’un temps suffisant soit accordé aux pays en développement impliqués dans des litiges afin qu’ils puissent préparer leur argumentation. De plus, le rapport du groupe spécial doit expressément indiquer comment les dispositions sur le traitement spécial et différencié en faveur des pays en développement ont été prises en compte. Durant la mise en œuvre, l’ORD doit accorder une attention particulière aux intérêts des pays en développement et, s’il s’agit d’un recours déposé par un pays en développement, il doit alors étudier quelles autres mesures seraient nécessaires, en plus de la surveillance normale, pour prendre en compte non seulement l’impact commercial des mesures qui font l’objet de la plainte mais aussi leur incidence sur l’économie du pays en question. Les pays en développement peuvent aussi demander au Secrétariat une assistance juridique (voir plus loin).

L’Article 24 du MRD prévoit quelques procédures spéciales dans le cas des pays les moins avancés (PMA)2. L’une stipule qu’à tous les stades d’une procédure de règlement des différends, une attention particulière sera accordée à la situation spécifique des pays les moins avancés (les Membres doivent ainsi faire preuve de modération lorsqu’ils soulèvent des questions, demandent une compensation ou sollicitent l’autorisation de suspendre l’application de concessions). Une autre stipule que, dans un différend impliquant un PMA pour lequel aucune solution satisfaisante n’a été trouvée durant les consultations, le PMA peut demander au Directeur général ou au Président de l’ORD d’offrir ses bons offices en matière de conciliation et de médiation afin d’aider les parties à régler leur différend avant qu’une demande de constitution d’un groupe spécial ne soit faite.

2 Pour information, parmi les Membres, aucun PMA n’a encore été impliqué dans les différends de l’OMC portant sur des produits agricoles.

5.4.2 L’assistance technique et juridique aux pays en développement

L’assistance technique de l’OMC

La fourniture d’une assistance technique et juridique aux pays en développement est prévue à l’Article 27:2 du MRD qui stipule ce qui suit:

Le Secrétariat de l’OMC a pour fonction d’aider les Membres à régler leurs différends. Dans ce but, il s’avèrera peut-être nécessaire de fournir un conseil et une aide juridiques additionnels aux Membres des pays en développement. Pour ce faire, le Secrétariat mettra à la disposition de tout pays en développement, Membre de l’OMC, qui en fera la demande, un expert juridique qualifié des services de coopération technique de l’OMC. Cet expert devra aider le pays membre d’une façon qui garantisse l’impartialité ultérieure du Secrétariat.

La Division de la coopération technique et de la formation (TCTD) de l’OMC est chargée de fournir une assistance juridique aux pays en développement, conformément aux dispositions de cet article.

5.4.3 Quelques propositions d’assistance juridique

Les propositions d’assistance pour le prochain cycle

Quelques Membres de l’OMC ont fait des propositions pour renforcer les services d’assistance juridique - soit par l’intermédiaire de la division TCTD, soit en établissant une unité distincte indépendante relevant directement du Directeur général. L’Unité serait financée sur des fonds fiduciaires réservés à cet usage.

Une unité juridique consultative de l’OMC. L’Union européenne a proposé de créer une unité de ce type qui aurait les fonctions suivantes:

· L’analyse préliminaire des prétendus problèmes commerciaux afin de déterminer si ils contreviennent réellement aux droits et obligations découlant des accords de l’OMC et d’identifier les dispositions pertinentes de l’OMC et la jurisprudence antérieure.

· Le conseil pour la préparation des consultations prévues dans le cadre du MRD et dans les accords de l’OMC.

· L’appui à la préparation d’un «état succinct» récapitulant les «pour» et les «contre» d’une affaire.

· La médiation, si elle est demandée (conformément à l’Article 5 et à l’Article 24:2 du MRD), afin d’encourager une résolution à l’amiable des différends et d’offrir la possibilité de réduire le nombre d’affaires traitées dans le cadre du système.

Le rôle de l’Unité n’irait cependant pas jusqu’à représenter le Membre lors des audiences telles que celles des groupes spéciaux ou autres - il se limiterait à fournir des conseils juridiques et d’analyse hors de toute procédure formelle.

Programme de formation à Genève ou dans les capitales des pays donateurs. Il s’agit également d’une formule proposée par l’UE. Dans le cadre de ce programme, des juristes de pays en développement seraient intégralement financés pour travailler pendant un an avec des experts juridiques, à la Délégation de l’UE, à Genève (ou dans les délégations, ou les capitales des autres pays acceptant de les accueillir). De 30 à 50 juristes seraient ainsi formés sur une période de trois ans. A la fin de la formation, ces juristes auraient non seulement acquis une expérience directe du fonctionnement du système mais aussi développé des contacts personnels avec des experts en droit commercial, qui pourraient leur être utiles par la suite.

Création de compétences juridiques dans le pays en développement lui-même. Cette formule est évidemment tout à fait souhaitable et devrait représenter l’objectif final. Une disposition de l’Article 27:3 du MRD stipule d’ailleurs que «le Secrétariat organisera des stages de formation spéciaux à l’intention des Membres intéressés, qui porteront sur les procédures et les pratiques de règlement des différends de manière à permettre aux experts des Etats Membres d’être mieux informés en la matière». Ces stages de formation pourraient avoir lieu à Genève ou dans les pays mêmes.

Information sur les différends portés devant l’OMC et les procédures permettant de les régler

Informations supplémentaires

Le site Web de l’OMC fournit des informations complètes et détaillées sur ce sujet. La page Règlement des différends de l’OMC donne des renseignements sur les points suivants:

· Règlement des différends - Présentation des procédures et du processus d’examen du groupe spécial.

· Vue d’ensemble sur l’état d’avancement des différends - Fournit un état de tous les différends portés devant l’OMC depuis sa création sous la forme reprise dans l’encadré 1 du présent module.

· Rapports de Groupes spéciaux et de l’Organe d’appel - Textes intégraux de tous les rapports de Groupes spéciaux et de tous les rapports de l’Organe d’appel, certains couvrant plusieurs centaines de pages.

· Mémorandum d’accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends - Texte juridique intégral du Mémorandum.

· Procédures de travail pour l’examen en appel - Texte intégral des procédures de travail.

· Règles de conduite - Règles de conduite relatives au mémorandum d’accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends.

· Rapports de Groupes spéciaux adoptés dans le cadre du GATT de 1947 - Résumés de 3 à 5 pages d’anciennes affaires relevant du GATT (antérieures au 1er janvier 1995).

Bibliographie

Kohona, P.T.B. 1994. Dispute Resolution under the WTO. Journal of World Trade, 28(2): 23-47.

OMC, site Web, whttp://www.wto.org/wtodispute/dispute.htm, Règlement des différends.

OMC. 1994. Résultats des négociations commerciales multilatérales du Cycle d’Uruguay: Textes juridiques. Genève.

OMC. 1995. The WTO Dispute Settlement Procedures: A Collection of Legal Texts. Genève.

OMC. 1999. Guide to the Uruguay Round Agreements. WTO Secretariat and Kluwer Law International.

Vermulst E. et Driessen, B. 1995. An overview of the WTO dispute settlement system and its relationship with the Uruguay agreements. Journal of World Trade 29(2): 131-161.


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