L’agriculture est appelée à rester le plus important utilisateur d’eau à l’échelle mondiale dans les décennies à venir. Dans de nombreux pays, et en particulier ceux situés dans les régions arides et semi-arides, cette dépendance devrait même s’intensifier. C’est à partir de la révolution verte que l’agriculture a commencé à s’approprier des quantités d’eau de plus en plus importantes. La contribution de l’agriculture irriguée à la production alimentaire est appréciable mais son taux de croissance sera plus faible que par le passé. L’agriculture irriguée et non irriguée peut encore augmenter sa productivité, en particulier en améliorant la productivité de l’eau. On peut penser que l’expansion de l’agriculture irriguée a sauvé les personnes à la limite de la dénutrition d’une mort prématurée, et préservé des étendues boisées et marécageuses de l’envahissement par les agriculteurs aux abois. Néanmoins, la menace de l’envahissement de ces terres persiste.
Dans les conditions démographiques actuelles, la sécurité alimentaire mondiale s’améliore lentement et vers 2050, l’ensemble de la population mondiale pourrait accéder à une nourriture suffisante. Le fait que dans les pays en développement près de 800 millions de personnes sont actuellement ravagées par la malnutrition chronique n’est pas dû à une incapacité mondiale de produire la nourriture nécessaire, mais aux conditions sociales, économiques et politiques qui règnent à l’échelle nationale et internationale qui permettent, et parfois suscitent, des niveaux inacceptables de pauvreté. Lentement, la sous-alimentation s’atténue, et la baisse de la part de la nourriture dans le budget des ménages pourrait offrir à l’agriculture de meilleures perspectives d’internalisation de ses coûts. L’eau présente encore de vastes possibilités inexploitées pour contribuer à atténuer la pauvreté et la sous-alimentation. A cet effet, la gestion de l’eau en agriculture devra encore mieux s’intégrer avec l’utilisation de l’eau dans les ménages ruraux et participer davantage à la gestion de l’environnement. L’objectif d’une alimentation suffisante pour tous pourrait être atteint beaucoup plus tôt que les prévisions ne l’envisagent, à condition que les politiques qui s’imposent soient appuyées par les ressources nécessaires. Le coût économique, social et écologique de l’insécurité alimentaire persistante que subissent des centaines de millions de personnes est très élevé.
L’agriculture peut utiliser l’eau plus efficacement que ne le font les pratiques actuelles. Il existe des technologies assurant un transport efficace de l’eau du site de prélèvement jusqu’au champ et une distribution aux cultures avec un minimum de pertes. Elles sont progressivement appliquées dans les zones où l’eau est rare. L’efficience d’utilisation de l’eau d’irrigation augmente lorsque les politiques adéquates sont en vigueur et que les marchés offrent des perspectives intéressantes. Lorsque la concurrence pour des ressources en eau limitées et la nécessité d’internaliser les impacts sur l’environnement augmentent dans un certain nombre de pays, l’agriculture, et l’irrigation en particulier, se voient encore davantage contraintes de modifier et d’adapter leurs politiques et institutions, dont celles qui régissent les droits sur l’eau et les systèmes d’attribution. Dans les conditions qui caractérisent la région du Proche-Orient/Afrique du Nord, l’efficience d’utilisation de l’eau est actuellement relativement élevée et devrait encore augmenter. Les données indiquent une faible valeur agrégée d’utilisation de l’eau dans la région de l’Amérique latine où l’eau est abondante, qui ne devrait pas s’accroître de manière significative à l’avenir parce qu’il n’existe pas de concurrent important à l’agriculture. Une bonne efficience a toutefois été observée dans cette région à l’échelle locale dans les zones de pénurie d’eau. L’agriculture peut également utiliser davantage les eaux recyclées et celles issues de sources non classiques.
