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La gestion durable des forêts et l’approche fondée sur l’écosystème – une perspective australienne

S.M. Davey, J.R.L. Hoare et K.E. Rumba

Stuart M. Davey travaille auprès du Bureau des Sciences rurales, Kingston (Australie).
James R.L. Hoare et Karl E. Rumba y étaient aussi en poste au moment de la rédaction du présent article. James Hoare travaille maintenant auprès du Département de l’agriculture, des pêches et des forêts, Canberra (Australie), et Karl Rumba auprès du Département de l’industrie du tourisme et des ressources, Canberra.

L’Australie a su intégrer les principes et directives opérationnelles de l’approche fondée sur l’écosystème dans sa déclaration de politique forestière nationale, ses accords forestiers régionaux, ses normes de certification et ses autres arrangements institutionnels pour une gestion durable des forêts.

Partout dans le monde, les gouvernements s’efforcent d’instaurer un équilibre optimal entre la gestion de l’environnement, le développement économique et les valeurs sociales, afin de répondre de façon durable aux besoins de la société et ce, notamment en ce qui concerne les forêts. Au plan international, une approche équilibrée des questions forestières fait l’objet de débats dans deux organismes des Nations Unies en particulier: le Forum des Nations Unies sur les forêts (FNUF) et la Convention sur la diversité biologique (CDB). La gestion durable des forêts est un concept important pour le premier de ces organismes, alors que le deuxième promeut l’approche fondée sur l’écosystème.

L’Australie a su intégrer les principes et directives opérationnelles de l’approche fondée sur l’écosystème dans le concept de la «gestion écologiquement durable des forêts» (voir Chikumbo et al, 2001), au titre de sa déclaration de politique forestière nationale, et cette approche est désormais à la base des accords forestiers régionaux de l’Australie (Commonwealth d’Australie, 2000). Le présent article approfondit l’approche australienne de la gestion durable des forêts et décrit comment ce pays a appliqué systématiquement l’approche fondée sur l’écosystème à la gestion et à la conservation de ses forêts commerciales.

LA GESTION ÉCOLOGIQUEMENT DURABLE DES FORÊTS DANS LA POLITIQUE FORESTIÈRE AUSTRALIENNE

La déclaration de politique forestière nationale de l’Australie (Commonwealth d’Australie, 1992) définit le concept de gestion écologiquement durable des forêts et prévoit la mise en valeur écologiquement durable des forêts sur la base des principes du maintien des processus écologiques, de la conservation de la diversité biologique et de l’optimisation des avantages pour la communauté découlant de toutes les utilisations de la forêt, compte tenu des contraintes écologiques. Elle vise à assurer aux communautés un rendement équilibré de toutes ces utilisations, dans le cadre d’une planification régionale qui intègre les objectifs environnementaux, commerciaux, sociaux et ceux relatifs au patrimoine, afin que la gestion durable s’applique, dans la mesure du possible, à toutes les valeurs forestières. Telle est la stratégie nationale de l’Australie pour la gestion et l’utilisation durable des forêts, stratégie qui est conforme à l’article 6a de la CDB et aux Principes forestiers1 convenus lors de la Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement (CNUED) en 1992.

L’approche fondée sur l’écosystème – une stratégie de gestion intégrée des terres, des eaux et des ressources vivantes qui préconise la conservation de la diversité biologique et l’utilisation durable des ressources de manière équitable (CDB, 2001) – est un important élément constitutif de la déclaration et de la mise en oeuvre par l’Australie de la gestion durable des forêts. L’encadré de la p. 4 décrit les principes et les directives opérationnelles de cette approche. Elle peut s’appliquer à n’importe quelle unité opérationnelle et à n’importe quelle échelle (peuplement forestier, forêt, ou paysage).

Le concept australien de la gestion écologiquement durable des forêt peut être défini comme «l’intégration des valeurs commerciales et non commerciales de la forêt pour améliorer le bien-être (matériel et non matériel) de la société, tout en assurant que ces valeurs, tant comme ressource commerciale que pour la conservation, ne soit ni perdues ni dégradées mais sauvegardées pour les générations présentes et futures» (Davey et al., 1997).

Incorporé dans la gestion écologiquement durable des forêts est le concept de l’utilisation durable telle que la définit la CDB, à savoir «l’utilisation des éléments constitutifs de la diversité biologique d’une manière et à un rythme qui n’entraînent pas leur appauvrissement à long terme, et sauvegardent ainsi leur potentiel pour satisfaire les besoins et aspirations des générations présentes et futures» (CDB, 2001). Les objectifs primordiaux de ce type de gestion sont:

• le maintien de la vitalité de l’écosystème forestier (les processus écologiques au sein des forêts, y compris la formation des sols, les flux d’énergie et les cycles du carbone, des éléments nutritifs et de l’eau);

• le maintien de la diversité biologique des forêts;

• la gestion des avantages sociaux nets découlant du mélange des utilisations forestières en tenant compte des contraintes écologiques, pour de nombreuses années.

MISE EN ŒUVRE DE L’APPROCHE FONDÉE SUR L’ÉCOSYSTÈME DANS LES ACCORDS FORESTIERS RÉGIONAUX

Les accords forestiers régionaux (AFR) de l’Australie (Australian Government Department of Agriculture, Forestry and Fisheries, 2003) sont un exemple de l’approche fondée sur l’écosystème (Commonwealth d’Australie, 2000). Ils visent l’instauration d’un équilibre équitable entre la conservation et l’utilisation durable des forêts à des fins naturelles, culturelles, économiques et sociales dans les zones forestières commerciales d’Australie. Il existe maintenant des accords de 20 ans relatifs à 11 des 12 zones forestières commerciales (figure 1). (Les forêts n’appartenant pas aux zones couvertes par les AFR sont gérées et protégées au titre de la législation étatique et du Commonwealth).

Ces accords s’appliquent à toutes les formes de propriété foncière et fournissent un plan stratégique pour la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique forestière, telle qu’envisagée dans l’Article 6b de la CDB. Ils cherchent à harmoniser et à réaliser à longue échéance les intérêts des gouvernements, de l’industrie, de l’environnement et des communautés pour la gestion et l’utilisation forestières sur la base d’évaluations régionales détaillées, tout en répondant à des spécifications juridiquement fondées. Parmi les réalisations figure l’institution d’un système de réserves à des fins de conservation dont la couverture dépasse celle recommandée par l’Union mondiale pour la nature (UICN); l’accès assuré aux ressources forestières; des débouchés pour une industrie forestière compétitive au plan international; et une base à long terme pour la gestion durable des ressources forestières.

La Déclaration de politique forestière nationale (Commonwealth d’Australie, 1992) énonce les principes selon lesquels évaluer la durabilité de la gestion forestière aux plans des pratiques, de la conservation et de la gestion des ressources, et du développement industriel, en vue de mettre en oeuvre l’approche fondée sur l’écosystème.

Des évaluations scientifiques et la participation des parties prenantes ont servi à étayer l’élaboration et la négociation des accords forestiers régionaux australiens (Davey, Hoare et Rumba, 2002). Un certain nombre de nouvelles techniques d’évaluation et d’outils de négociation ont été conçus à diverses fins, notamment la diffusion des informations aux parties prenantes (Pressey, 1998). Souvent l’étape de la négociation était la partie la plus longue du processus préalable à un accord, prenant dans certains cas plus de temps que celle des évaluations scientifiques, sociales et économiques. L’apport et la participation des parties prenantes à la mise au point des accords variaient suivant les Etats et au sein des régions d’un même Etat. A contribué grandement au succès le mode d’intégration de leurs points de vue dans le document final.

1
En Australie, les forêts et les terres boisées ainsi que les régions sont soumises à des accords forestiers régionaux signés

Evaluations régionales détaillées

Dans l’élaboration des accords forestiers régionaux, on a réalisé des évaluations régionales détaillées, scientifiquement valables, conformément aux principes et directives opérationnelles de l’approche fondée sur l’écosystème. Les évaluations régionales portaient sur toute la gamme des valeurs forestières et de leurs relations fonctionnelles (Directives opérationnelles I) que la société estimait importantes, et concernaient tous les secteurs pertinents des disciplines sociales et scientifiques (Principe 12). La part du public dans la planification stratégique représentait un élément clé. L’un des objectif du processus d’élaboration des accords forestiers régionaux consistait à accroître, dans les zones forestières, les avantages sociaux nets tirés d’un mélange d’utilisations et de valeurs forestières (Directive opérationnelle 2) – dans les limites des contraintes écologiques – sous l’angle de la gestion des terres, des eaux et des ressources biologiques (Principe 6), tout en réservant une place aux choix pour l’avenir. Le rôle de la société était défini par des accords de participation publique; les mécanismes de cette participation variaient suivant les régions et comprenaient des forums et ateliers régionaux auxquels assistaient les parties prenantes, leur représentation dans les comités techniques et de direction, et leur participation à l’intégration de l’information et à la formulation de plans d’utilisation des ressources, qui étaient soumis pour commentaires au public (Directive opérationnelle 5). Le public et les parties prenantes ont pu formuler leurs observations sur les informations collectées moyennant le processus d’évaluation régionale détaillée et sur les options à examiner pour finaliser les accords (Principe 1).

Des évaluations scientifiques indépendantes des systèmes et processus étatiques de gestion forestière ont été réalisées pour déterminer dans quelle mesure la gestion durable des forêts s’appliquait à l’ensemble des valeurs forestières. Les systèmes et processus de gestion par l’Etat ont été testés vis-à-vis des exigences du modèle de système international de gestion de l’environnement (AS/NZ ISO 14001) (Standards Australia/Standards New Zealand, 1996), de sept critères de gestion durable des forêts identifiés par le Processus de Montréal (1995) et de deux grands principes (voir encadré). Pour les lacunes rencontrées, des recommandations visant leur correction ont été formulées et incorporées dans les accords définitifs. Ces derniers préconisaient l’amélioration permanente des systèmes de gestion forestière et l’emploi de critères et indicateurs permettant d’évaluer les progrès vers la gestion durable des forêts. Des critères et indicateurs ont été élaborés pour les niveaux tant national que régional. On a établi sur les terres publiques (Directive opérationnelle 3) des systèmes de gestion de l’environnement capables de s’adapter à différents calendriers, aux décalages et aux changements survenant dans les écosystèmes forestiers, afin de réaliser la gestion durable des forêts (Principe 8). Les systèmes de gestion de l’environnement pour les forêts de production devaient normalement concorder avec la norme ISO 14001 (Resource Planning and Development Commission, 2002, par exemple).

Critères et principes utilisés dans les évaluations régionales
de la gestion forestière en Australie

LES SEPT CRITÈRES D’ÈVALUATION

•Protection et conservation de la diversité biologique
• Maintien de la capacité productive des écosystèmes
• Maintien de la santé et de la vitalité de l’écosystème forestier
• Protection des sols et des eaux
• Maintien de la contribution de la forêt aux cycles mondiaux du carbone
• Maintien des valeurs naturelles et du patrimoine culturel
• Maintien et renforcement des avantages socioéconomiques à long terme pour répondre aux besoins de la société

LES GRANDS PRINCIPES

• Principes de précaution pour prévenir la dégradation de l’environnement
• Equité entre les générations pour assurer que les besoins de la génération présente soit satisfaits sans compromettre ceux des générations futures

 

Le système de réserves australien a été conçu pour la protection
d’une série de valeurs de biodiversité, ainsi que de forêts anciennes –
ici, une forêt ancienne d’Eucalyptus regnans de montagne,
dans les plateaux centraux du Victoria sous accord forestier régional
(Photo: M.F. RYAN)

Conservation de la biodiversité

La conservation de la diversité biologique au sein des réserves et au dehors est un important facteur de soutien à l’approche fondée sur l’écosystème et la gestion durable des forêts.

En Australie, les réserves comprennent des zones protégées classées par la législation, des réserves non officielles affectées à la protection dans les plans de gestion forestière, et des réserves forestières privées. Le système de réserves forestières était le principal instrument de conservation in situ appliquant les critères convenus par le Commonwealth et les gouvernements étatiques (JANIS, 1997). Il avait pour objectif de protéger une gamme de valeurs de conservation de la biodiversité, ainsi que les forêts anciennes et les espaces naturels, sur la base de principes de globalité, justesse et représentativité. Des principes, objectifs, normes et directives de globalité (couverture de toute la gamme des communautés forestières dans l’ensemble du paysage), justesse (maintien de la viabilité écologique et de l’intégrité des populations, espèces et communautés) et représentativité (biodiversité des communautés forestières réservées adéquatement représentée sur l’ensemble du paysage) ont été utilisés pour définir les résultats du système de réserves pour les accords forestiers régionaux (Davey, Hoare et Rumba, 2002).

Un aspect particulièrement important, dans le cadre des AFR, était la conservation de la biodiversité dans l’ensemble du paysage réalisée, non seulement par l’établissement d’un système officiel de réserves, mais aussi par des stratégies de gestion hors réserve visant une gestion complémentaire des forêts de production sur des terres publiques et privées (Principe 3). Cet objectif a été réalisé grâce à une combinaison, aux niveaux régional et local, de plans de gestion forestière approuvés, de codes de pratiques forestières et de prescriptions pour l’harmonisation de la production, de la conservation et protection de la flore, de la faune et de leurs communautés, ainsi que des valeurs représentées par les sols et l’eau (Principes 2 et 5 et Directive opérationnelle 4).

• Les plans de gestion forestière sont formulés par des gestionnaires et propriétaires forestiers et prévoient l’intervention du public. Le processus d’approbation varie en fonction des Etats australiens, mais normalement les organisations écologiques s’intéressent à la façon dont les besoins de la conservation et de l’environnement ont été pris en compte dans les plans.

• Suivant les Etats, dans les zones couvertes par les AFR, l’application des codes de pratiques forestières est obligatoire pour la récolte dans les forêts publiques, et obligatoire ou facultative dans les forets privées.

• On applique les prescriptions susmentionnées à la gestion des espèces et communautés qui sont rares et menacées, sensibles aux opérations d’exploitation ou au feu, ou qui exigent pour leur conservation des interventions particulières (protection des lieux de nidification et de repos). Les gestionnaires forestiers et de la flore et de la faune sauvages élaborent conjointement ces prescriptions, qui sont ensuite incorporées dans les codes, les plans de récupération des espèces et/ou les plans de gestion. Des experts scientifiques contribuent aussi à l’élaboration des prescriptions qui font l’objet d’une révision tous les cinq à 10 ans.

La conservation de la biodiversité se réalise non seulement par un système officiel de réserves,
mais aussi par la gestion complémentaire des forêts de production sur des terres publiques et privées –
ici, une forêt de production d’Eucalyptus maculata dans la Nouvelle-Galles du Sud méridionale sous accord forestier régional
(Photo: M.F. RYAN)

Equilibrer les valeurs sociales et économiques

Faisaient partie intégrante des accords forestiers régionaux l’évaluation des coûts et avantages économiques, l’emploi régional, les systèmes de compensation des communautés et de l’industrie forestière pour la perte d’accès aux ressources forestières et le manque à gagner, les initiatives et la restructuration industrielles, et l’amélioration de la rentabilité et des gains économiques découlant de l’utilisation durable des ressources forestières. On a effectué des évaluations des impacts sociaux probables des décisions prises sur la répartition et l’intensité de l’utilisation forestière au sein des régions, notamment dans les villes qui dépendent du bois pour leur survie, et on s’en est servi pour étayer les décisions finales sur l’ampleur des ressources forestières disponibles pour l’industrie et sur leur mode d’utilisation. Conformément aux principes de l’approche fondée sur l’écosystème, dans le processus d’accord forestier régional on est parvenu à des décisions sur la fonction économique (Principe 4), tout en reconnaissant que les objectifs de la gestion des terres, de l’eau et des ressources vivantes sont un choix de la société (Principe 1). La recherche d’un équilibre entre la conservation et l’utilisation de la diversité biologique (Principe 10) a montré que, dans certaines régions, la répartition des ressources traduisait l’intérêt majeur manifesté par la société pour la conservation de la diversité biologique par rapport aux valeurs économiques, notamment si cette diversité paraissait importante, limitée ou en danger. Les accords visent à équilibrer les valeurs sociales et économiques par l’établissement d’un système permanent de réserves protégé par la législation, et en assurant à l’industrie les ressources forestières restantes à utiliser et à gérer de façon viable.

Les accords forestiers régionaux visent à équilibrer les valeurs sociales et économiques par la mise à disposition assurée des ressources forestières non réservées à l’industrie pour leur utilisation et gestion durables – ici, un Eucalyptus obliqua coupé dans la région des plateaux centraux sous accord forestier (Photo: M.F. RYAN)

SUIVI DE LA DURABILITÉ FORESTIÈRE ET ÉLABORATION DE NORMES DE CERTIFICATION

L’élaboration et la mise en oeuvre de critères et indicateurs nationaux et sous-nationaux (régionaux) de gestion durable des forêts, à partir des travaux du Groupe de travail du Processus de Montréal (officiellement le Groupe de travail du Processus de Montréal sur les critères et indicateurs de conservation et gestion durable des forêts tempérées et boréales), est un progrès important de la gestion durable des forêts en Australie (Montreal Process Implementation Group, Australia, 1998). Les indicateurs ont été conçus de façon à être pratiques et rentables et capables de mesurer les changements dans les valeurs forestières à différentes échelles spatiales et temporelles, y compris les décalages. Cette approche permet à un large éventail de valeurs de l’écosystème, qui sont caractérisées par des changements dynamiques, d’être gérées sur une base spatiale et temporelle (Principes 7,8 et 9). Les indicateurs s’appliquent à toutes les zones forestières et sont utilisés pour surveiller et communiquer l’évolution de l’utilisation et des valeurs forestières (superficie forestière, répartition par régime de propriété, santé et état de la forêt, biodiversité et ressources en eau) et les résultats (emploi, statistiques des industries forestières, utilisation des ressources forestières), y compris ceux obtenus dans le cadre des AFR (Directive opérationnelle 3). L’efficacité des AFR est évaluée par le suivi des indicateurs de durabilité, ainsi que par un examen officiel des engagements tous les cinq ans (voir Resource Planning and Development Commission, 2002). L’évolution des indicateurs permet la formulation à long terme des politiques et l’amélioration constante de la gestion forestière (figure 2).

L’établissement de liens entre les critères et indicateurs de gestion durable des forêts et les systèmes de gestion de l’environnement au niveau de l’unité de gestion forestière (Principe 2) est un autre pas vers la gestion durable des forêts, non seulement pour ce qui est des valeurs environnementales, mais aussi pour les objectifs sociaux et économiques (Rumba et al., 2001). Cette approche jette les bases d’une gestion souple, à savoir l’évolution de la gestion sur la base des expériences et des résultats de la recherche (CDB, 2001), et la formulation de plans de certification forestière. Ces plans fournissent de nouvelles incitations, liées aux marchés, à améliorer en permanence la gestion durable des forêts en permettant aux gestionnaires de démontrer leur crédibilité en matière d’environnement, afin que les détaillants et les consommateurs prononcent à leur égard un jugement objectif et indépendant et donnent la priorité à leurs produits.

La complémentarité des normes fondées sur l’efficacité et le processus est reconnue de façon croissante. Les premières fournissent une base objective permettant aux gestionnaires de contrôler et d’améliorer l’efficacité de la gestion. Les deuxièmes donnent aux gestionnaires la possibilité de surveiller de façon systématique les aspects environnementaux et l’impact de la gestion au sein d’un processus d’amélioration permanente, comme celui des systèmes de gestion de l’environnement. Les deux catégories de normes fournissent un cadre pour l’évaluation et la démonstration des progrès vers la gestion durable des forêts (Kanowski et al., 2000).

La norme forestière australienne (voir www.forestrystandard.org.au ) est une norme volontaire pour la certification indépendante par des tiers, qui intègre les deux types de normes. Les besoins d’efficacité se fondent sur les critères et indicateurs du Processus de Montréal considérés comme importants pour la société (Montreal Process Implementation Group, Australia 1998). Les besoins de processus se fondent sur une approche des systèmes de gestion de l’environnement conforme à l’ISO 14001 (Standards Australia/Standards New Zealand, 1996). La norme a été élaborée par un groupe de parties prenantes à large base dont les travaux visaient une interprétation convenue des mesures d’efficacité. C’est le prolongement logique des avances réalisées vers la gestion durable des forêts en Australie au titre des accords forestiers régionaux. La norme sera un outil précieux pour assurer la rigueur technique et pour promouvoir une gestion durable des forêts axée sur les «bonnes pratiques».

Source: Adapted from Rumba et al. , 2001. 

2
Les résultats de la gestion forestière durable, dans un cycle d’amélioration permanente de la forêt et de pratiques, processus et systèmes de gestion de l’environnement, suivant l’approche de l’Australie

CONCLUSIONS

Les principes et directives opérationnelles de l’approche fondée sur l’écosystème de la gestion forestière durable ont été mis en oeuvre avec succès en Australie, grâce à une évaluation régionale détaillée et aux processus d’accords forestiers régionaux dans les régions forestières commerciales d’Australie. En effet, la gestion écologiquement durable des forêts est considérée en Australie comme l’équivalent de l’approche fondée sur l’écosystème, laquelle fournit des directives à l’appui de la conservation et de l’utilisation durable des ressources naturelles d’une façon équitable pour toutes les générations humaines.

L’application de l’approche fondée sur l’écosystème à l’élaboration des politiques forestières, au titre des accords forestiers régionaux, fournit désormais une référence pour la répartition et l’utilisation durable des ressources forestières, sur la base d’évaluations scientifiques détaillées et communautaires des valeurs forestières utiles pour la communauté, y compris des consultations avec les parties prenantes et le public. La déclaration de politique forestière nationale, les critères d’évaluation et de détermination des réserves forestières, les accords forestiers régionaux, les indicateurs de durabilité et la norme forestière australienne de certification volontaire sont des éléments clés de la vision australienne des pratiques de gestion durable des forêts, et assurent que l’approche fondée sur l’écosystème sera appliquée dans le cadre d’accords institutionnels sûrs.

Dans le contexte de la gestion adaptative, qui favorise l’amélioration permanente, ces éléments peuvent fournir une méthode à long terme pour assurer la durabilité des forêts dans des conditions environnementales, sociales et économiques en mutation constante. Si cette méthode est appliquée correctement, les impacts environnementaux nocifs de la foresterie devraient s’amoindrir. La certification volontaire et l’étiquetage des produits devraient renforcer la reconnaissance par les marchés et le public de la viabilité de la gestion forestière. Elle devrait stimuler la confiance des communautés et des marchés dans la gestion durable des forêts, et faciliter l’accès aux marchés et la protection et le maintien de toute la gamme des valeurs forestières pour les générations présentes et futures. L’approche de l’Australie peut servir de modèle à d’autres pays.

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Le titre intégral des Principes forestiers de la CNUED est le suivant: «Déclaration de principes, non juridiquement contraignante mais faisant autorité, pour un consensus mondial sur la gestion, la conservation et l’exploitation écologiquement viable de tous les types de forêts.»


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