Previous Page Table Of Contents Next Page


Peut-on gérer les forêts de façon durable pour des produits forestiers non ligneux?

P. Vantomme

Paul Vantomme est forestier (Produits forestiers non ligneux) auprès de la Division de l’économie et des produits forestiers, FAO, Département des forêts, Rome.

Pendant les 25 dernières années, les produits forestiers non ligneux (PFNL) ont fait l’objet d’une attention croissante pour leur capacité d’améliorer les revenus des populations tributaires de la forêt. Depuis la Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement (CNUED) en 1992, ils sont aussi désormais appréciés pour l’important rôle qu’ils jouent dans la conservation de la biodiversité des forêts. La Convention sur la diversité biologique (CDB), dans son Programme élargi de travail sur la diversité biologique des forêts, a recommandé que soit adoptée une approche équilibrée entre la conservation et l’utilisation des forêts, et a promu un troisième objectif, à savoir le partage équitable des avantages. Peut-on réellement gérer les forêts pour les produits forestiers non ligneux de manière à harmoniser toutes ces attentes?

Parmi d’autres thèmes clés relatifs au développement durable des PFNL, cette question a été abordée pendant le XIIe Congrès forestier mondial lors d’une réunion collatérale: «Renforcer les partenariats mondiaux pour promouvoir le développement durable des produits forestiers non ligneux» tenue au Québec (Canada), le 20 septembre 2003. Cette réunion d’une journée était organisée par l’Union internationale des instituts de recherches forestières (IUFRO), le Centre pour la recherche forestière internationale (CIFOR) et la FAO.

Les témoignages présentés à la réunion ont montré que, dans certains cas, la gestion des forêts pour les PFNL avait en effet amélioré sensiblement les moyens de subsistance des producteurs de ces produits, et que dans certains autres cas l’utilisation des PFNL avait sauvegardé la diversité spécifique dans les forêts. Cependant, il y a eu des cas où les PFNL n’avaient joué qu’un rôle négligeable dans la création de revenus à long terme ou dans la conservation de la biodiversité.

Le cas du bambou qui pousse dans le Comté d’Anhui en Chine était probablement le meilleur exemple de la façon dont une seule culture a, en 10 ans, considérablement amélioré le revenu rural de nombreuses personnes vivant dans une vaste zone. La végétation forestière (fortement dégradée) des montagnes a été progressivement remplacée par le bambou, mais les bambouseraies qui ont fini par dominer le paysage avaient un niveau de diversité comparable à celui d’un champ de maïs. Reste aussi la question de savoir, naturellement, si le bambou cultivé sous culture intensive par les exploitants peut encore être considéré comme un produit forestier non ligneux.

Par ailleurs, des cas provenant de l’Amazonie ont montré que les PFNL ont réellement été exploités grâce à des pratiques qui ont sauvegardé la diversité spécifique. Les exemples incluaient le caoutchouc (de Hevea brasiliensis) et les noix du Brésil (de Bertholletia excelsa, dont la coupe est interdite par la loi). Cependant, d’une manière générale, la récolte des PFNL pourrait n’avoir pas contribué de manière sensible et durable à améliorer le revenu rural en Amazonie. Les volumes de production de la plupart des PFNL de l’Amazonie brésilienne ont fléchi par rapport aux hauts rendements du début des années 70, tombant aujourd’hui à des niveaux insignifiants, de nombreux produits devenant obsolètes ou ayant été remplacés par des produits cultivés.

Entre ces cas extrêmes de PFNL gérés pour la création de revenus ou la conservation de la biodiversité, il existe une série de situations intermédiaires et, dans la plupart des cas, il est difficile d’évaluer la possibilité de gérer les forêts pour les PFNL de manière durable. Beaucoup de progrès ont été réalisés dans l’étude des aspects socioéconomiques de la gestion des PFNL mais on ne connaît guère l’écologie des espèces productrices de PFNL, notamment dans les pays tropicaux, ou la biodiversité dans les forêts gérées. Les méthodes d’évaluation de l’impact des techniques de gestion et de récolte des PFNL, et en particulier de la durabilité de la ressource dans le temps et l’espace ont encore besoin d’être améliorées.

Les questions concernant la gestion des forêts pour la récolte de PFNL touchent à beaucoup de secteurs et non seulement à la foresterie. Il est espéré que le processus de renforcement des partenariats, mis en route grâce à la réunion collatérale au Congrès forestier mondial, se poursuivra, et qu’une meilleure collaboration facilitera l’élaboration d’un jeu harmonisé et mondialement compris de termes, outils et méthodes fiables pour l’identification et le suivi des paramètres clés nécessaires pour évaluer la durabilité de la gestion des forêts pour les PFNL.

Toute la documentation relative à la réunion collatérale du XIIe Congrès forestier mondial concernant les PFNL est disponible sur Internet: www.sfp.forprod.vt.edu


Previous Page Top Of Page Next Page