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CHAPITRE 9
STRATÉGIES DE DÉVELOPPEMENT AGRICOLE:
PROCESSUS ET STRUCTURE (Cont.)

9.5.1 Projets de développement rural

Au cours des décennies antérieures, le financement du développement rural a souvent été consacré à des projets de développement rural intégré apportant une infrastructure de services de base à la collectivité, ainsi qu'à des investissements productifs dans des zones géographiques définies. Après plusieurs années d'application de cette approche, les résultats ont été en général jugés insatisfaisants. Le rendement économique, par exemple, s'est souvent avéré très faible à cause de l'élément d'infrastructure sociale des projets d'investissement. L'absence de participation des collectivités à la conception des ensembles d'investissement et son corollaire, la coordination souvent faible entre les organismes du gouvernement central chargés de la mise en œuvre des différents types d'investissements dans une collectivité donnée, ont également posé problème.

Binswanger (1998) a résumé comme suit ces résultats décevants et leurs principales raisons:

De nombreux projets de développement rural intégré (DRI) des années soixante-dix et quatre-vingts ont échoué parce ce qu'ils se sont heurtés aux problèmes suivants (Banque mondiale, 198772):

Environnement de politique défavorable. Il est rapidement apparu que de nombreux projets DRI, lorsqu'ils étaient menés dans un environnement de politique défavorable à l'agriculture en général ou aux petits exploitants en particulier, n'avaient aucune chance de réussir…

Manque d'engagement des pouvoirs publics. De nombreux gouvernements n'ont pas fourni le financement requis pour la mise en œuvre des programmes…

Absence de technologie adaptée. Ceci s'est avéré un problème majeur dans les régions d'agriculture pluviale, surtout en Afrique, où n'existait quasiment aucun antécédent de recherche agricole, et encore là où les efforts de recherche coloniaux s'étaient décomposés. Certains projets de développement rural intégré comprenaient des composants de recherche, mais la plupart ne sont pasparvenus à développer de technologies améliorées. Également, nombre de ces composants de recherche affaiblissaient les systèmes de recherche agricole nationaux en les privant de chercheurs de talent.

Négligence du développement institutionnel. De nombreux projets DRI ont mis en place des unités de coordination de projet, dont les membres étaient parfois des expatriés. Cependant, cette approche a retardé le développement d'une capacité institutionnelle de planification, d'exécution et de contrôle des programmes de développement rural aux niveaux local et du district.

Manque de participation des bénéficiaires. Les programmes étaient souvent conçus de manière hiérarchique et les bénéficiaires n'avaient pas autorité pour prendre des décisions ou exécuter le programme….

Problème de complexité ou de coordination. Il est ironique que la complexité soit devenue le talon d'Achille du développement rural. Après tout, la construction d'un réseau routier rural, la mise en place d'infrastructures à petite échelle et la fourniture de vulgarisation agricole sont des tâches beaucoup plus simples que la construction d'une infrastructure d'irrigation à grande échelle ou de ports… Le problème de coordination a été la conséquence de la délégation de l'exécution de sous-programmes à des bureaucraties gouvernementales ou parastatales, qui étaient en général extrêmement centralisées et avaient leurs objectifs propres. Nombre d'entre elles n'entretenaient aucun contact avec les bénéficiaires, qui auraient pu coordonner beaucoup plus facilement les tâches relativement simples au niveau local… De fait, on pourrait considérer le développement rural intégré comme le dernier bastion de la planification centralisée, lui aussi balayé par la réalité comme tous les autres programmes de cette nature73.

9.5.2 Décentralisation du développement rural

Ces problèmes ont incité les organismes internationaux à se tourner vers des approches décentralisées et participatives du développement rural, dont les programmes d'investissement «régis par la demande». On demande de plus en plus aux collectivités de prendre en main la définition ou la sélection des programmes auxquels elles participeront, et le rôle du gouvernement local acquiert davantage de relief. La spécificité des investissements répondant à la demande, c'est que les collectivités les proposent ou les choisissent. Le Chili, par exemple, a créé un fonds de développement de l'irrigation consacré au financement de projets proposés par les collectivités ou les groupes d'agriculteurs (voir chapitre 6). A Paraiba (nord-est du Brésil), une plus grande participation des communautés et une meilleure coordination des efforts des agences centrales ont suscité des projets de développement rural fructueux, financés par la Banque mondiale 74. Au Nicaragua et au Honduras, la Banque interaméricaine de développement a financé des projets de développement rural entièrement composés de petits projets, proposés par les collectivités et filtrés au niveau des gouvernements de comtés (municipalités rurales). Si, dans la plupart des cas, il est impossible d'estimer un rendement susceptible de servir de critère de sélection pour des projets de cette nature, on suppose que les collectivités locales auront une perception relativement exacte des goulets d'étranglement de leur développement et donc des investissements requis pour les éliminer.

Cependant, d'autres types de critères ou de filtres peuvent servir à sélectionner les petits projets, tels que des consignes de coût (coût maximum au kilomètre d'une voie de desserte construite ou rénovée, par exemple), une définition restrictive des catégories d'investissements financés par le programme, l'exigence d'une contribution minimum de la collectivité sous forme d'un pourcentage spécifié du coût de chaque projet sélectionné75, et l'obligation de contacts suivis dans le temps avec la collectivité dans le cas de projets de formation. A Paraiba, la formule retenue donnait aux collectivités le droit de proposer des projets et d'élire la moitié des membres d'un comité de sélection finale sur un groupe de projets, laissant le choix des projets d'un second groupe aux autorités municipales (comté) et encore aux dirigeants de l'État (provincial) le choix sur un dernier groupe de projets76.

Cette approche constitue une catégorie particulière de décentralisation budgétaire. Tout en responsabilisant les collectivités locales (villages), elle renforce aussi le rôle des municipalités et, dans certains cas, des ONG. (Il faut prendre garde cependant de s'assurer que les ONG n'en viennent pas à dominer le système local de décision). Le puissant attrait de la décentralisation budgétaire ne se limite pas à sa capacité de soutenir plus efficacement le développement rural, mais, dans le même temps, elle soulève des problèmes complexes qu'il faut savoir résoudre pour qu'elle réussisse. De nombreux pays ont légiféré qu'une part donnée des revenus du gouvernement central serait transférée aux gouvernements locaux, mais la capacité de ces derniers à bien gérer les fonds et les effets de ces transferts sur le solde budgétaire du gouvernement central ont causé bien des préoccupations. Ces transferts risquent aussi de démobiliser l'effort des autorités locales à collecter les taxes dont elles sont responsables. Néanmoins, le consensus semble aller dans le sens d'une décentralisation accrue, pourvu qu'elle soit convenablement menée. Un plus grand effort de formation des fonctionnaires locaux constitue une condition préalable primordiale77.

En Colombie, c'est avec succès que les dépenses de recherche et formation ont été prises en mains par les agriculteurs à travers un mécanisme de «fonds parafiscaux» pour certaines cultures. Les producteurs paient des contributions qui alimentent un fonds, et décident de son emploi. Ce modèle pourrait s'étendre à d'autres classes de dépenses de développement au niveau local, avec participation des producteurs ainsi que du gouvernement local dans la prise de décisions. Il faut noter que le modèle parafiscal a bien fonctionné en Colombie pour les produits assez homogènes et dont les producteurs sont bien organisés, comme dans le cas du café, de l'huile de palme et du riz, mais pas si bien pour les produits ou les producteurs hétérogènes, comme ce fut le cas pour les fonds parafiscaux des fruits et légumes ou le fonds du sucre artisanal (panela).

Le point fondamental ici est que les projets de développement rural doivent être conçus et menés de manière décentralisée78, mais qu'il n'existe pas d'approche unique universellement applicable. L'approche la mieux adaptée dépendra de la situation politique et institutionnelle du pays concerné. Il faut faire attention à éviter la prise de pouvoir par les leaders ou les élites locaux 79. Lawrence Smith a désigné la responsabilisation comme justification de base de la décentralisation:

La décentralisation de l'administration publique devrait améliorer le système des incitations, auquel sont confrontés les fournisseurs de biens et de services quand leur activité n'est pas entièrement dictée par les forces du marché. Plus l'administration du service est proche des clients, plus il est probable que les décisions relatives aux services à fournir, en quelle quantité, où et à qui, répondront davantage à la demande des utilisateurs. En principe, la qualité du service s'améliorera, mais aussi l'efficacité du prestataire du fait de sa proximité des clients auxquels il doit rendre compte80.

Les expériences d'investissement rural régi par la demande illustrent quelquesunes des questions à se poser lors de la conception de projets de développement rural décentralisés. L'une d'entre elles était de savoir s'il fallait utiliser les fonds publics (d'un prêt international) pour subventionner les investissements sur l'exploitation. On décide en général de limiter les investissements éligibles à ceux qui concernent l'ensemble de la collectivité (par exemple, réseau routier, formation et programmes, installations de commerce rural, et occasionnellement petits projets d'irrigation intéressant un nombre suffisant de bénéficiaires), ainsi qu'à des projets orientés vers les coopératives (par exemple, fourniture du capital initial d'une coopérative de commercialisation dirigée par des femmes, ou d'une coopérative de femmes pour l'élevage et la vente des iguanes). Cette définition de la portée du programme a éliminé les investissements sur l'exploitation et quelques infrastructures de base (électrification, réseaux de communication). Cette remarque n'a pas pour but de nier l'intérêt des types d'investissements financés par le programme, mais plutôt de souligner que les investissements choisis par les processus de décision des collectivités locales peuvent être intrinsèquement limités dans leur couverture, et donc devoir être complétés par d'autres types d'actions.

S'il est important de décentraliser davantage le pouvoir de décision, il faut impérativement soutenir le développement rural à tous les niveaux de décision de la politique, y compris par des politiques sectorielles et macro-économiques convenables qui incitent à la croissance. Une approche d'ensemble, holistique, s'impose. Il faut également des politiques sectorielles appropriées pour que les approches décentralisées soient efficaces, ce qui comprend des fondements juridiques pour la gestion par les collectivités:

Des politiques sectorielles saines permettent un développement efficace impulsé par les communautés… Pour le soutenir, les politiques sectorielles doivent inclure des politiques financières (y compris sur les contributions de la communauté), des normes sectorielles, des options/normes technologiques et des lois appuyant la gestion par la collectivité et l'acquisition contractuelle de biens et de services par les collectivités elles-mêmes81.

L'adoption d'une approche holistique soulève à son tour un problème fondamental d'une autre nature:

L'approche holistique signifie s'attaquer avec davantage de résolution à un thème considéré historiquement, par de nombreux organismes internationaux, comme tabou dans le processus de développement: la politique politicienne et ses relations avec la politique économique. Il est devenu clair que la réussite est liée à la qualité de la gouvernance et du processus politique. Une bonne gestion politique des aspects techniques et une bonne gestion technique des aspects politiques fondent souvent le succès et l'efficacité des projets. Les approches régies par la demande constituent également un moyen d'impliquer davantage les intéressés et donc de responsabiliser davantage la société dans l'implémentation des projets82.

Il arrive que les programmes d'investissements régis par la demande acquièrent des tonalités politiques fortement partisanes, lorsque l'équipe au pouvoir tente de détourner les investissements vers des collectivités où ses tenants sont majoritaires. Des garde-fous sont nécessaires contre de telles tendances, afin de protéger l'intégrité des programmes et d'en accroître l'efficacité.

Si salutaire que soit la décentralisation de la prise de décision, elle complique aussi le processus de coordination entre les institutions et peut rendre beaucoup plus difficile l'atteinte d'un consensus sur les priorités des dépenses de développement rural. Pour citer Lawrence Smith:

Le gouvernement central, le gouvernement local et les OSC [organisations de la société civile] peuvent s'accorder sur les objectifs, mais diverger sur les priorités et les stratégies. En principe, cela ne doit pas poser problème quand la fourniture [des services] est déconcentrée ou déléguée parce que, en théorie, le gouvernement central tient fermement les rênes. Le problème se pose avec la dévolution et les partenariats. Comment les administrations du gouvernement central doivent-elles gérer les ordres de priorité différents des gouvernements locaux et des OSC se réclamant d'un soutien du public à leurs initiatives? Que se passe-t-il si les priorités locales diffèrent des priorités du gouvernement central établies dans le cadre d'un plan de développement? …

Les gouvernements centraux peuvent traiter ces problèmes de plusieurs manières en:

  1. introduisant progressivement la dévolution, faisant entrer dans les assemblées élues du gouvernement local des fonctionnaires d'unités déconcentrées de l'administration publique, à même d'influer sur les décisions;
  2. transférant à des OSC, hors du champ des administrations, les fonctions prioritaires appropriées;
  3. conservant sous contrôle central la gestion des programmes prioritaires tout en déconcentrant ou en délégant les fonctions de production ou de livraison;
  4. soumettant à des conditionnalités les transferts budgétaires intergouvernementaux…83

Dans les faits, la solution trouvée par le programme de développement rural de la Banque interaméricaine de développement pour le Nicaragua et le Honduras a été de réduire le champ de la prise de décision par les gouvernements locaux en faisant définir par le gouvernement central les domaines ayant droit au financement, et d'imposer des critères techniques à l'éligibilité. Les priorités étaient définies localement dans le cadre de ces restrictions.

9.5.3 Transferts économiques visant à soutenir le développement rural

La portée des investissements ruraux peut être élargie par des programmes complémentaires de transferts budgétaires aux ménages ruraux pauvres. Le Mexique a exécuté plus énergiquement que bien d'autres pays en développement des programmes de transferts budgétaires aux agriculteurs, en premier lieu en adaptant le Plan McSharry de l'Union européenne (programme PROCAMPO, qui mandatait des paiements de 100 dollars par hectare à des catégories spécifiées d'exploitations en exercice), puis en appliquant un programme, évoqué plus haut, de transferts directs aux ménages ruraux sur la base de l'assiduité scolaire des enfants (programme PROGRESA). L'Estonie aussi a adopté une variante du plan McSharry pour faciliter la transition de son agriculture à l'économie de marché.

Un programme de transferts aux ménages ruraux pauvres constitue une catégorie de subventions justifiée au nom de la lutte contre la pauvreté (chapitre 2). Bien conçu, il peut contribuer à mettre les agriculteurs sur la voie du développement autonome. Par exemple, on pourrait envisager des paiements visant à défrayer les coûts d'attribution de titres de propriété (après achèvement du processus d'émission de titres) et la remise de bons aux agriculteurs pauvres à échanger contre l'achat d'intrants agricoles ou de services de vulgarisation ou la participation à des programmes de formation spécialisés84.

Les transferts de cette nature peuvent être considérés comme des instruments de la politique agricole plutôt que comme des programmes de développement rural per se, mais dans tous les cas, ils sont complémentaires d'autres types d'investissements dans les zones rurales. Il existe dans le monde entier une longue histoire de transferts aux agriculteurs pauvres par la fourniture en nature de certaines catégories d'intrants agricoles, en particulier les semences, les jeunes plants d'arbre, les outils et les produits agrochimiques. Cependant, en général, l'étape suivante, c'est-à-dire donner aux ménages agricoles pauvres les moyens de choisir eux-mêmes leurs intrants et de se les procurer par les filières commerciales établies, n'a pas été franchie. Les transferts directs, particulièrement aux petits exploitants, prennent davantage d'importance au vu de la tendance mondiale à fermer les banques de développement étatiques, et de la contraction du crédit agricole qui s'ensuit. Dans la mesure où les programmes de crédit étaient, en fait, des subventions déguisées du fait de leur faible taux de recouvrement des prêts, il serait plus sain de les remplacer par des transferts monétaires directs.

Les programmes de transfert de cette nature facilitent la capitalisation des petites exploitations, et représentent des interventions publiques neutres du point de vue du choix des cultures. Par conséquent, dans le cas fréquent où les incitations de la politique favorisent les produits de substitution aux importations et défavorisent les produits exportables, la mise en œuvre de transferts directs réduirait ce travers, compensant en fait l'absence de programmes d'incitation à l'exportation. De plus, lorsque les incitations fiscales sont biaisées en faveur des grandes exploitations - autre cas fréquent - l'usage de transferts directs, avec un plafond sur le nombre d'hectares éligibles par exploitation, réduirait cet autre travers.

Si maintenant étaient mis en œuvre à la fois une taxe foncière basée sur la superficie, comme cela a été examiné au chapitre 5, et un programme de transferts directs, l'effet combiné en serait une taxation progressive, puisque la taxe épargnerait les quelques premiers hectares tandis que le transfert serait assujetti à un plafond de surface cultivée dans les exploitations éligibles à cet avantage. Ces effets sont illustrés schématiquement sur le graphique 9.1, où le point (a) sur l'axe horizontal indique la surface exempte de taxe foncière, le point (b) représente le plafond d'éligibilité au transfert direct, et le point (c) signale le seuil à partir duquel les exploitations sont soumises à une taxe nette positive. Les exploitations de taille inférieure à (c) sont bénéficiaires nets.

Les avantages d'une taxe sur la superficie ont déjà été discutés au chapitre 5. Ils tiennent à la simplicité administrative, à l'élimination du problème des estimations cadastrales toujours à réévaluer, et à l'absence d'incitations contraires aux investissements sur l'exploitation. Cette taxe pourrait être déductible des impôts sur le revenu, et pour la plupart des paysans elle remplacerait de fait l'impôt sur le revenu, qui n'est guère recouvré dans les régions rurales des pays en développement.

Cette combinaison de taxe à la superficie et de transferts directs permettrait au secteur de contribuer comme il se doit au revenu budgétaire, tout en fournissant incitations à la production et soutien au revenu pour les petits et moyens exploitants. De plus, on a déjà signalé que les transferts directs, à la différence de la plupart des interventions de soutien au développement agricole, sont neutres quant au choix des cultures pratiquées.

Figure 9.1 - Représentation schématique des effets de transferts directs et d'une taxe sur la superficie (voir le texte pour plus de détails)

Figure 9.1

La gestion des transferts directs soulève plusieurs problèmes pratiques dont le principal est peut-être la nécessité de décentraliser la mise en œuvre des politiques agricoles. Il serait impossible de gérer un programme de transferts à des dizaines de milliers de petits exploitants ou plus depuis un ministère centralisé. Pour ce type de programmes, il faut accorder une plus grande autonomie aux bureaux régionaux des ministères de l'Agriculture, et y faire participer les organes du gouvernement local.

Le rôle des bureaux régionaux ou locaux d'un ministère de l'Agriculture peut se visualiser comme celui d'intermédiaire ou de courtier. Le représentant local du ministère est chargé d'une mission de base: i) apprendre à connaître ses clients, c'est-à-dire les familles d'exploitants de sa région, ainsi que leurs besoins et leur potentiel; ii) transmettre aux services centraux les principaux problèmes et questions agricoles de la région; iii) connaître la gamme de programmes de politiques susceptible d'être mise en œuvre localement, les critères de qualification des participants et les mécanismes d'exécution; iv) informer la population rurale des programmes auxquels elle peut participer et, de cette manière, faciliter la mise en correspondance des clients et des programmes; v) suivre la mise en œuvre des actions et faire remonter au centre les éventuels défauts de conception à corriger, ainsi que d'éventuelles variantes des programmes existants ou des suggestions de nouveaux programmes à développer.

Pour que des agents locaux jouent ce rôle, les institutions centrales doivent définir soigneusement et clairement les options existantes et indiquer en détail comment il convient de les mettre en œuvre et de les suivre. Fondamentalement, le rôle du centre est de définir clairement les options de la politique et de publier des guides opérationnels, sous forme d'une brochure par programme ou module de politique et par type d'investissement susceptible d'être mis en œuvre si les agriculteurs se montrent intéressés et répondent aux critères de qualification. La panoplie de ces programmes pourrait couvrir: assistance financière et technique; mise en place de programmes d'irrigation à petite échelle; assistance aux programmes de gestion du bassin versant par les collectivités; cours de formation spécialisés (élevage du petit bétail, culture de variétés non traditionnelles, transformation agricole à petite échelle, commercialisation, comptabilité des coûts, rudiments de soins vétérinaires, etc.); mécanismes d'émission de titres fonciers, de bons couvrant leurs coûts d'enregistrement; achats de terres financés par une banque foncière, bons d'achat d'intrants, bons d'achat de services de vulgarisation privatisés; transferts monétaires conditionnés à l'assiduité scolaire; participation à des programmes d'investissement dans l'infrastructure locale, etc. Il est important de souligner le rôle des femmes parmi les bénéficiaires de ce type de transferts et de rechercher également les occasions de lier les transferts financiers à des pratiques agricoles saines du point de vue de l'environnement.

Chaque programme devrait être assorti d'une brochure descriptive et d'un manuel opérationnel. Ceux-ci doivent être produits par le centre en coordination avec des agents locaux, susceptibles de prêter leur soutien à des tests pilotes de l'utilité de ces documents. Lorsque l'on envisage de cette manière le problème de mise en œuvre, il devient évident qu'il faut décentraliser la plupart des activités du ministère de l'agriculture à des bureaux locaux et renforcer la coordination entre le centre et les agents locaux. Pourtant, ces sujets reçoivent rarement la priorité dans les programmes de renforcement institutionnel de l'agriculture, même ceux ciblant d'abord les ministères de l'Agriculture85.

Un exemple exceptionnel de cette approche du développement rural est fourni par l'expérience de la province espagnole d'Andalousie. Un ensemble complet de brochures a été publié, couvrant non seulement des questions agricoles, mais aussi le tourisme rural, l'environnement rural, la gestion des forêts et d'autres thèmes86. Bien sûr, dans le cas de l'Andalousie le rôle des intermédiaires est facilité par le fait que plusieurs des programmes proposés sont financés par l'Union européenne, en plus de ceux du gouvernement espagnol. Néanmoins, il s'agit d'un exemple utile, non seulement de décentralisation administrative, mais aussi d'élaboration d'un éventail d'actions visant à stimuler les activités dans les secteurs ruraux non agricoles. L'objectif central de ce programme est le développement des capacités des membres des familles agricoles eux-mêmes, en partie par la capitalisation des activités agricoles et non agricoles, mais davantage encore par l'offre d'une gamme de programmes soigneusement conçus de formation aux activités économiques, agricoles et autres, présentant un potentiel dans cette région.

Les programmes de formation spécialisés destinés aux familles de petits exploitants ne doivent pas oublier les possibilités de liaison avec l'industrie agro-alimentaire. Divers types de liens entre les petites exploitations et les industries de transformation sont possibles, allant de la location de terres cultivables aux sociétés industrielles et à la mise à leur disposition de main d'œuvre, jusqu'à des contrats d'achats d'intrants (en général assortis de supervision) et de vente des produits, en passant par la simple signature de contrats d'approvisionnement des produits 87. Le principal obstacle à la réussite de ce type de contrats peut être un contrôle de qualité insuffisant de ces produits. C'est dans ce domaine que la formation peut obtenir ses résultats les plus utiles.

9.5.4 Priorités d'investissement

L'approche régie par la demande, ou décentralisée, du développement rural a élargi l'éventail des investissements possibles dans les régions rurales. On peut arguer cependant qu'il faudrait la compléter par un sens clair des priorités de l'investissement rural. On peut avancer qu'une part importante du soutien des pouvoirs publics devrait être dirigée vers quelques types essentiels d'infrastructure, au lieu de se disperser dans de nombreux domaines, et que ces investissements permettraient aux familles rurales de faire d'autres choix qui hausseraient leur niveau de vie. L'expérience internationale semble confirmer que ces domaines prioritaires sont au nombre de quatre: éducation, transport, électricité et communications. Si les conditions agro-économiques sont favorables à l'irrigation, il faudrait l'ajouter à la liste en cinquième priorité, du fait de son vaste potentiel d'augmentation de la productivité agricole.

Les possibilités et les difficultés de la création de liens entre petits exploitants et industrie agro-alimentaire sont bien illustrées par les expériences très différentes de la tomate au Chili et au Pérou:
L'industrie du concentré de tomates chilienne expédie une grande partie de sa production sur le marché intérieur. De ce fait, la qualité des matières premières utilisées constitue une préoccupation majeure … puisque la qualité du produit final en dépend. Comme [il s'agit d'un] produit qui demande beaucoup de soins, nécessite beaucoup de main d'œuvre et ne permet pas les économies d'échelle … les industries passent contrat pour s'approvisionner avec des petits producteurs dont le grand avantage est de disposer d'une main d'œuvre familiale abondante pour assurer la récolte. Ces producteurs reçoivent une assistance technique et une formation de la part des transformateurs…
… dans la Valle d'Ica [au Pérou], on s'est aperçu que l'usine de coulis de tomate avait commencé en s'appuyant sur les petits producteurs pour une partie de son approvisionnement, mais que les difficultés et les coûts de la supervision requise pour vérifier que les agriculteurs adoptaient les consignes techniques de l'entreprise ont poussé celle-ci à abandonner cette pratique au profit de la location de terre et la production sous son contrôle et sa supervision directs (A. Schejtman, 1996, pages 19 et 25).

Une stratégie de développement rural élaborée selon ces axes inclurait un ensemble échelonné d'investissements dans les infrastructures, région par région ou district par district, les dotant d'écoles et de routes adéquates, d'électricité, de systèmes de télécommunications et, le cas échéant, de réseaux d'irrigation. Cet ensemble d'investissements s'accompagnerait de programmes d'incitations spéciales à l'intention des enseignants ruraux afin d'attirer les personnes les plus qualifiées dans des écoles de villages isolés, ainsi que d'allocations aux familles rurales sur la base de la fréquentation régulière de l'école par leurs enfants. Cela n'exclurait pas d'autres activités de développement rural, surtout celles apportant des formations spécialisées aux familles des campagnes, encore que l'on pourrait avancer que les investissements signalés plus haut méritent la priorité dans les choix de financement du gouvernement.

Les investissements dans les infrastructures engendrent de multiples bénéfices. Dominique van de Walle a avancé que «pour une grande part, les bénéfices que les pauvres tirent d'un réseau routier rural ne peuvent pas se mesurer en termes monétaires» et proposé une méthodologie de sélection des régions auxquelles attribuer des investissements routiers en fonction de trois critères: réseau routier existant, pauvreté, et potentiel de développement88.

Les investissements de base dans les infrastructures et le développement rural, conçus et mis en œuvre de manière décentralisée, peuvent représenter une partie importante de la stratégie de développement agricole ou rural. La mise en place de programmes de transferts aux ménages ruraux à bas revenus peut renforcer la priorité accordée à l'objectif de lutte contre la pauvreté. La poursuite de cet objectif peut être rendue encore plus efficace par le renforcement des institutions de microfinance, la clarification du statut foncier des ménages pauvres, l'aide aux projets d'irrigation à petite échelle gérés de manière décentralisée, et le développement de mécanismes améliorant l'accès des agriculteurs pauvres à une technologie plus évoluée. Il est indispensable de recourir à ces méthodes, et d'autres, favorables aux ruraux pauvres parce que, comme l'a démontré le cas du Honduras, nombre des politiques et des programmes agricoles traditionnels, non ciblés, favorisaient en fait les couches à hauts revenus des régions rurales.

Dans la mesure du possible, la planification des investissements doit faire partie intégrante de l'élaboration de la stratégie. Les investissements rattachés à des priorités et à des politiques sectorielles sont en général les plus efficaces. Le processus participatif dont découlent les recommandations en matière de réforme de la politique permet également d'identifier les besoins en investissements. Cependant, la planification des investissements requiert un savoir-faire propre, et il peut s'avérer nécessaire de faire appel à des spécialistes. A moins de consacrer un effort particulier à l'étude des investissements, on n'obtiendra souvent, au mieux, qu'une liste générale des projets prioritaires, avec une indication de leur nature et de leur portée respectives. La quantification des investissements requis dans chaque cas constitue, en général, un exercice parallèle et distinct.

Néanmoins, une fois présentées les priorités d'une stratégie, il est possible de calculer plutôt rapidement le montant estimé des investissements requis en commençant par identifier les types de projets prioritaires et leur portée, par exemple: nombre d'hectares irrigués à réhabiliter, nombre d'hectares des nouveaux réseaux d'irrigation, kilométrage de voies d'accès, kilométrage de lignes électriques, nombre d'hectares à terrasser pour protéger le sol, etc., puis en y appliquant les coûts unitaires moyens tirés d'expériences antérieures. Dans le cas d'investissements à petite échelle régis par la demande, le montant du financement disponible détermine la taille du portefeuille.

C'est pourquoi il convient d'inciter les coordinateurs d'une stratégie à consentir le petit effort supplémentaire requis pour l'exercice parallèle de planification des investissements. Si cette étape était franchie, la stratégie constituerait alors un cadre global cohérent pour un programme d'investissement. Cela représenterait une amélioration substantielle par rapport au processus habituel de planification des investissements, qui consiste à compiler une liste des projets envisagés sans logique unificatrice, ni lien avec les réformes de la politique sectorielle. De toute évidence, il faudrait évaluer avec davantage d'attention toutes les suggestions de projets suscitées par la stratégie pendant le processus de mise en œuvre, y compris par le biais d'études de préfaisabilité et de faisabilité.

Par dessus tout, il faut se souvenir qu'un environnement de politique favorable et cohérent constitue le facteur le plus important pour attirer les investisseurs extérieurs au secteur, et inciter les agriculteurs eux-mêmes à investir davantage dans leur activité.

9.5.5 Cadres de politique pour le développement rural

La discussion ci-dessus a évoqué les principaux thèmes qui caractérisent un programme de développement rural réussi. En principe, les programmes de ce type ont une dimension territoriale au sens où ils comprennent des activités à mener dans des zones géographiques spécifiées. Il est cependant possible de mettre en œuvre un programme de développement dans de nombreuses régions d'un pays. Plus important encore, les programmes de développement rural efficaces se concentrent sur le renforcement de la capacité des familles rurales à améliorer leur statut économique par leurs propres efforts. Les programmes de développement rural sont plus productifs s'ils visent à réduire les causes de la pauvreté plutôt qu'à simplement en traiter les symptômes. Parfois, en cas de sous-alimentation, par exemple, les symptômes sont si aigus qu'il faut les soulager en priorité. Cependant, pour prévenir leur réapparition, les programmes de développement doivent augmenter la capacité des familles rurales à produire davantage et à pratiquer des activités plus productives. Cette approche signifie mettre en œuvre à la fois des programmes ciblant directement les individus et les familles, et d'autres visant à améliorer l'environnement économique et institutionnel dans lequel ils vivent et travaillent.

Les obstacles qui s'opposent aux efforts des familles rurales pour améliorer leur sort peuvent se regrouper en cinq classes principales, et sur cette base, il faut concevoir cinq catégories de politiques et de programmes de développement rural, les priorités entre elles étant définies par ailleurs dans le cadre propre à chaque communauté. Ces classes de contraintes ou obstacles correspondent à des insuffisances dans les domaines ci-après89:

  1. Capital humain: Faibles niveaux d'éducation et formation insuffisante dans certains domaines professionnels. «Pour savoir gérer, ainsi qu'acquérir et traiter des informations, il faut de plus en plus se former pendant toute sa vie»90.
  2. Capital social: Faibles niveaux d'organisation des collectivités, des producteurs, etc., se traduisant par l'incapacité d'entreprendre des efforts productifs en coopération ou en association.
  3. Infrastructure physique: Inadéquation du réseau routier, des installations de communication, de la fourniture d'énergie et de l'eau d'irrigation.
  4. Infrastructure institutionnelle: Faiblesse de la recherche et de la vulgarisation agricoles, sous-développement des systèmes financiers ruraux, inadéquation des règles et des institutions définissant les droits de propriété et résolvant les conflits liés à ces droits, faiblesse de l'exécution des contrats, etc.
  5. Capital physique privé: Insuffisance des terres et de l'infrastructure d'irrigation sur les exploitations, inadéquation des niveaux d'investissement dans le bétail, les cultures arboricoles et autre capital productif. Il s'agit de la contrainte du manque de capital des pauvres au niveau des exploitations.

Cette vision du problème du développement rural est similaire au cadre de développement agricole proposé plus haut dans ce chapitre. La principale différence est que les efforts de développement rural se concentrent sur la famille rurale et sur le renforcement de son aptitude à maîtriser son univers et à améliorer son niveau de vie, grâce à l'agriculture ou à d'autres métiers. De toute évidence, le développement agricole tire lui aussi partie de cette approche, mais les stratégies agricoles sont davantage orientées vers la production agricole per se.

Le capital humain et le capital physique privé sont des formes de capital appartenant aux familles rurales elles-mêmes. Le capital social correspond à la capacité des collectivités et d'autres groupes locaux à travailler ensemble. Le renforcement du capital social est facilité par un capital humain de meilleure qualité et par des politiques adéquates. L'infrastructure physique et l'infrastructure institutionnelle sont des formes de capital relevant de l'environnement plus large des communautés rurales. En principe, il faut l'assistance d'efforts nationaux ou régionaux, par opposition à des efforts purement locaux, pour en augmenter la disponibilité.

Un programme de développement rural ne peut pas fournir toutes ces formes de capital, mais il peut être lié à une stratégie rurale ou agricole nationale qui fasse apparaître les besoins en matière d'infrastructure institutionnelle et élabore des politiques pour y répondre. Les programmes de développement rural permettent surtout de renforcer les trois premières formes de capital: capital humain, capital social et infrastructure physique. En outre, bien que les organismes internationaux soient souvent peu enclins à consentir des prêts ou à accorder des subventions pour le capital physique privé des ruraux pauvres, cette forme de capital peut constituer un instrument puissant de lutte contre la pauvreté dans le contexte d'un programme de développement rural. De fait, on finance le capital physique privé quand on apporte un soutien financier à la réforme foncière assistée par le marché, qui comporte normalement un volet subvention; il est aussi possible d'élargir cette approche à d'autres types d'investissements sur l'exploitation, pourvu que les bénéficiaires en soient convenablement sélectionnés.

Il faut envisager les dotations en eau en fonction des besoins humains élémentaires de subsistance, et pas seulement de l'irrigation:

Les pauvres reçoivent une part encore plus faible de l'eau agricole que des terres cultivées, et souffrent de graves déficits en eau potable91.

On peut se servir de ce cadre des investissements ruraux pour élaborer des recommandations concrètes par village ou zone rurale. Dans un premier temps, on diagnostique le degré d'adéquation de chaque type de capital, puis, dans un second temps, on définit les besoins prioritaires à traiter. Par exemple, si la plupart des adultes d'un village s'avère illettrée, les besoins en capital humain figureront parmi les priorités et l'on pourra mettre en place des programmes d'alphabétisation pour y remédier.

Chacune des cinq formes de capital constitue l'une des voies qu'une collectivité rurale doit emprunter pour parvenir à un développement économique autonome. Le développement rural - au sens du renforcement de la capacité d'auto-développement des familles et des communautés - n'aura lieu que si des avancées se manifestent sur ces cinq voies. Il faut renforcer ces cinq types de capital et d'infrastructures, en quantité et qualité adéquates. En matière d'infrastructure physique, par exemple, les trois premières priorités seraient probablement le transport, les communications et l'énergie, dans cet ordre. Pour les habitants d'un village ne pouvant accéder au reste du monde qu'à pied et pendant une partie de l'année seulement, il est clair qu'une route constituerait un investissement hautement prioritaire. En matière de capital humain, l'ordre des priorités serait l'alphabétisation fonctionnelle, la fréquentation du cycle primaire complet et l'acquisition de compétences spécialisées par le biais de formations, portant, par exemple, sur la gestion d'exploitation, la prise de conscience de la discrimination sexuelle, la commercialisation et la gestion de l'irrigation. Sans connaissance élémentaire de la lecture, de l'écriture et du calcul, il ne servirait pas à grand chose de proposer une formation en gestion d'exploitation. En revanche, de nombreuses options de poursuite du développement du capital humain s'ouvriraient aux personnes parvenues en fin de cycle primaire.

On peut ainsi définir des priorités pour chacune des cinq voies et évaluer les besoins de chaque région rurale par comparaison avec ces priorités, puis élaborer des politiques et des programmes en conséquence. L'éducation pourrait devenir une priorité dans certains villages, tandis que l'organisation de groupes de femmes pour la commercialisation et la gestion du crédit (capital social) serait une priorité dans un autre, en fonction du chemin déjà parcouru par le village sur chacune des voies. La mise en place de communication par Internet alimentée par l'énergie solaire pourrait devenir une priorité dans d'autres villages, comme cela a été le cas dans certaines parties de l'Inde.

La figure 9–2 illustre trois des cinq voies, ou axes, du développement rural et montre les principales étapes de la progression sur chacune d'entre elle. Ce type de cadre peut également servir à la conception d'enquêtes de suivi des progrès du développement rural dans des districts ou des régions donnés.

Figure 9.2 - Dimensions de base du développement rural - Étapes de l'évolution d'une capacité de développement par la propre initiative

Figure 9.2

Progrès essentiels dans chaque communauté rurale vers lesquels il faut orienter la politique avant de planifier d'autres types d'interventions Stratégies de développement agricole: processus et structure

Si les familles rurales et les collectivités elles-mêmes doivent jouer un rôle dans l'expansion de leurs dotations dans les cinq catégories de capital, il n'est pas exclu que des institutions extérieures participent également au processus. Concernant le développement du capital humain, le gouvernement central, le gouvernement local et les ONG ont tous des rôles à jouer. Dans certains pays, les ONG ont été la force la plus novatrice de l'éducation rurale. Pour renforcer le capital social, les gouvernements locaux, les ONG et les associations locales apportent les contributions les plus essentielles, bien que les gouvernements nationaux puissent affecter une partie de leur soutien à des programmes en ce domaine.

En matière d'infrastructure physique, les rôles principaux reviennent aux pouvoirs publics et aux autorités locales, mais les collectivités interviennent également, souvent avec l'assistance des ONG. Le développement d'une infrastructure institutionnelle dépend de manière cruciale de politiques nationales appropriées, mais les ONG jouent parfois un rôle majeur, comme dans le cas des institutions financièresrurales. À eux quatre, ces types de capital contribuent de manière vitale à l'expansion des dotations de capital physique privé, mais dans ce domaine les efforts des familles, des communautés et des ONG sont également essentiels.

En ce qui concerne le capital social, il est clair que la priorité est la suppression des disparités entre genres, pour des raisons à la fois d'équité et d'efficacité. Ce problème peut être traité au niveau de la collectivité, par le biais de programmes d'éducation et de prise de conscience, de la responsabilisation économique des femmes, et de politiques sectorielles comme indiqué dans les chapitres précédents. On peut également s'y attaquer à l'aide de politiques et de lois nationales sur le droit de l'héritage, le droit aux terres dans la réforme agraire, la violence domestique, la santé des femmes et autres sujets apparentés.

Ce type de politiques et de programmes peut avoir des résultats tangibles, comme l'indique une récente étude des programmes consacrés aux femmes en Chine, un pays qui possède une longue tradition de politiques nationales éclairées en matière de genres:

Des preuves empiriques récentes provenant de nombreux pays ont montré de manière répétée qu'une politique publique de réduction de l'inégalité entre genres engendre des externalités sociales substantielles, y compris l'amélioration du bien-être des enfants (par exemple, santé, nutrition et éducation), ainsi que la réduction des disparités de genres et des taux de fertilité.

… combinée aux effets identifiés sur les revenus … notre analyse apporte une preuve empirique à l'appui de l'assertion que les programmes de lutte contre les inégalités de genres, mettant l'accent sur la participation des femmes aux activités économiques et sociales de la communauté, peuvent engendrer des bénéfices significatifs….

Nous voyons corroborée l'opinion que … les programmes [de responsabilisation des femmes rurales chinoises] peuvent substantiellement augmenter les revenus familiaux des participantes, mais en partie au détriment d'externalités de revenus négatives pour les non participantes. Nos résultats suggèrent également que le programme réussit parfaitement à augmenter les taux de participation dans les villages et que ses impacts sur le revenu dépendent sensiblement de son aptitude à engendrer cette augmentation. Plus le programme réussit à hausser les taux de participation, plus l'impact est positif sur les revenus des participantes et plus il est négatif sur les revenus des non participantes, l'impact positif étant beaucoup plus fort que l'impact négatif. En ce sens, les gains de la participation au programme proviennent du fait que les participantes se protègent contre ces effets négatifs et bénéficient des gains de revenus substantiels liés à l'augmentation des taux de participation.

En conclusion, donc, nos résultats soutiennent le point de vue que des politiques publiques visant une participation économique et sociale accrue des femmes peuvent se traduire par des bénéfices économiques et sociaux substantiels…. Nos résultats tendent également à appuyer l'opinion que l'éventail des politiques publiques en matière de genres, mises en œuvre au cours de ces dernières décennies, fournit un contexte complémentaire qui contribue au succès d'une exécution effective des programmes centrés sur les questions de genre92.

Le FIDA a résumé en termes convaincants les arguments favorables à la priorité de l'éducation des femmes:

Il existe d'énormes abîmes entre l'accès à l'éducation et le niveau d'alphabétisation des hommes et des femmes. Ces écarts sont encore plus importants dans les régions rurales et davantage encore chez les ruraux pauvres. L'absence d'équité engendre l'inefficacité: l'éducation des femmes fait beaucoup plus à la marge pour le revenu, la réduction de la pauvreté, la santé et la nutrition des enfants qu'un complément d'éducation des hommes. Le fait que les femmes adoptent plus rarement les innovations agricoles est entièrement dû à leur moindre niveau d'éducation; à niveau d'éducation égale, les femmes les adoptent aussi rapidement que les hommes. Un complément d'éducation augmente davantage le revenu des ménages si ce sont les femmesqui en bénéficient. Dans les États indiens entre 1957 et 1991, la réactivité de la pauvreté à l'alphabétisation initiale des femmes était plus grande qu'à toute autre condition initiale. De nombreuses études indiquent que l'éducation des mères est également associée à une amélioration de la santé des enfants, et ceci souvent à revenu égal93.

La concrétisation d'un cadre basé sur les cinq voies - les cinq types de capital requis pour le développement - s'exprimerait par des mesures différentes dans chaque contexte, mesures beaucoup plus détaillées que ce qui a été décrit ici. Quelle que soit sa forme, ce cadre apporte un soutien logique aux propositions d'une stratégie de développement rural et permet d'en intégrer les actions disparates, afin qu'elles se renforcent mutuellement. Il constitue également un guide pour la définition des priorités d'investissement, en fonction du chemin parcouru par chaque collectivité sur chacune des cinq voies.

Pour placer cette approche dans un contexte plus large, Gustavo Gordillo de Anda a fortement souligné l'importance de la transparence politique et d'un cadre institutionnel solide pour réduire l'incertitude à laquelle sont soumises les transactions économiques dans les régions rurales. L'incertitude - doutes sur le versement d'un paiement convenu, sur le respect d'un délai de livraison, etc. – est une caractéristique qui définit presque le sous-développement, et qui coûte très cher à surmonter. Gordillo a écrit:

Ce qui est important, c'est de comprendre que le développement rural n'est pas seulement un ensemble de politiques économiques, mais qu'il doit également prendre en compte les conditions politiques et sociales qu'ont créées la modernisation économique et la démocratisation de nos sociétés.

… la nouvelle approche pour les régions rurales nécessite trois ingrédients principaux:

9.6 MISE EN ŒUVRE D'UNE STRATÉGIE

Les efforts investis dans l'élaboration d'une stratégie seront de peu de valeur si au moins certaines de ses orientations majeures ne sont pas mises en œuvre. D'un autre côté, il est en général irréaliste de s'attendre à ce que l'intégralité des recommandations du document soit appliquée. Le processus de formulation d'une stratégie devrait comprendre la préparation de la phase de mise en œuvre et, dans ce but, il est utile de connaître dès la conception des propositions de politique les moyens dont on disposera pour les appliquer.

Pour reprendre ce qui a été dit à la fin du chapitre 2, une stratégie se met en œuvre par cinq voies différentes:

On peut ajouter à ces réflexions que, une fois la stratégie formellement avalisée par le pouvoir exécutif ou législatif, et de préférence par les deux, les principaux éléments du processus de mise en œuvre incluent, outre ceux traités au chapitre 2:

Les plans de mise en œuvre doivent identifier clairement les actions requises dans ces cinq voies. Le calendrier des plans de mise en œuvre doit être coordonné à celui du cycle budgétaire. Chaque plan de mise en œuvre doit comprendre un plan d'action législatif, un plan pour des décrets de l'exécutif et les mesures administratives relevant de l'exécutif sans implications budgétaires, une déclaration des besoins à satisfaire par le budget en cours, un plan d'investissement, et un plan de mise en œuvre dans le secteur non gouvernemental, élaboré avec les représentants du secteur privé ou de la société civile pour les mesures convenues. Bien sûr, ce dernier ne peut pas être un document contraignant, mais il peut aider à renforcer la cohérence de l'effort global de mise en œuvre.

Les plans à moyen terme, par exemple trois ans, peuvent également s'intégrer aux exercices de programmation des organismes internationaux qui soutiennent le développement du pays. Adapter leur soutien aux priorités et aux réformes mentionnées dans une stratégie nationale nécessiterait de la part des organismes internationaux de développement une flexibilité dont ils n'ont pas fait montre à ce jour, mais donnerait un contenu concret à la rhétorique de la participation. Pour pousser ce type de coopération un peu plus loin, les organismes qui préfèrent conditionner leurs financements à certaines réformes pourraient les lier à des étapes spécifiques et majeures de la mise en œuvre de la stratégie nationale du pays. Même avec les meilleures intentions, un processus de mise en œuvre rencontre toujours des obstacles et ce type de conditions sensibiliserait à l'urgence de les surmonter. Il serait plus tolérable pour le gouvernement et la société hôtes, et plus efficace à long terme, de dire clairement que la conditionnalité est basée sur les plans propres du pays, plutôt que sur des plans élaborés ailleurs.

On se préoccupe de plus en plus de l'apparente inefficacité de la traditionnelle clause de conditionnalité. Jan Willem Gunning a exprimé ces doutes et proposé un autre type de solution:

Il existe maintenant des preuves écrasantes de l'incapacité de l'aide à faire aboutir les réformes de politique. J'ai avancé qu'au lieu de modifier la conception du contrat d'aide pour améliorer l'efficacité de la conditionnalité ex ante, les donateurs devraient passer à une conditionnalité ex post (sélectivité). Avec la sélectivité, l'attribution de l'aide est liée à la réussite95.

La solution ne consiste pas à abandonner la conditionnalité ex ante, mais à faire en sorte que les conditions du prêt et de la subvention soient conçues, de fait, par le pays hôte. Lier le versement à l'application par le pays de sa propre stratégie contribue à faire avancer son processus de mise en œuvre. Dans le même temps, une telle conditionnalité est susceptible d'être mieux reçue dans les pays en développement.

L'une des clés de la mise en œuvre en temps voulu est un système de suivi soigneusement structuré, exigeant un compte rendu fréquent et rapide au secrétariat d'exécution des progrès et problèmes observés dans chaque domaine. De même, le secrétariat doit être doté de pouvoirs lui permettant de prendre des mesures spéciales pour accélérer le processus de mise en œuvre dans les domaines où il stagne - ou pour recommander de telles mesures au Cabinet. Il peut être utile de faire participer au processus de suivi de la mise en œuvre des personnes ayant pris part à l'élaboration des politiques de la stratégie, qu'elles appartiennent ou non au gouvernement. Il s'agit souvent d'experts des domaines concernés et, à ce titre, de personnes à même de recommander des modifications des politiques en fonction des besoins, sur la base du retour d'information reçu du processus de mise en œuvre.

Pour progresser dans la voie législative, on réunit en général des équipes ou des groupes de travail de juristes et d'autres experts techniques chargés de rédiger la législation dans les domaines où les recommandations de la stratégie le conseillent. Il est important que juristes et non juristes collaborent étroitement à ce processus. En leur qualité d'experts en technique législative, les juristes peuvent indiquer comment parvenir à des buts spécifiés, mais, en général, ce sont les autres experts techniques qui définissent ces buts. Laisser aux juristes les rênes du processus de rédaction de la législation aboutit parfois à un résultat non conforme à l'ensemble des buts de la politique. Le secrétariat d'exécution constitue l'organisme adéquat pour superviser les travaux du groupe de travail législatif et, quand le sujet le justifie, pour soumettre le projet de loi à l'examen de l'ensemble du groupe participatif auteur de la stratégie.

9.7 CONCLUSION

L'utilité d'une stratégie dépend de nombreux facteurs, dont, en tout ou partie: la qualité du travail accompli, la mesure dans laquelle son élaboration a été participative, le moment de la publication du document par rapport au cycle électoral, la situation politique du gouvernement du moment et le soutien qu'il reçoit de la communauté internationale. Il est toujours illusoire de croire qu'un document a la capacité de changer la vie des gens et les sceptiques ne manqueront jamais pour rejeter ce travail à l'avance en en dénonçant l'absence inhérente de pertinence. Mais si un document stratégique reflète un consensus et la détermination de ceux qui ont participé à créer ce consensus, il peut avoir des conséquences tangibles. L'histoire ne manque pas d'exemples.

Travailler sur une stratégie n'est en aucune manière un exercice d'analyse de routine ou de programmation bureaucratique. Il faut se dégager des limites des modes traditionnels d'élaboration des documents de planification des grandes institutions. Il faut une communication approfondie entre des personnes venant d'horizons différents. Cela nécessite d'abandonner pour l'occasion tout scepticisme. Pour tous ceux qui y participent, conseillers compris, c'est toujours l'occasion d'apprendre. Pour qu'une stratégie réussisse, il faut que ses auteurs soient convaincus de ses mérites. C'est le résultat d'une fusion particulière entre réalisme, analyse et espoirs.

Par dessus tout, cela requiert de la persévérance et un engagement à long terme de la part de ceux qui y participent. Il ne s'agit pas seulement d'un processus économique technique, mais aussi d'un travail de construction du capital social d'une nation. Plus le processus est élargi, plus il a de chances de réussir.

POINTS IMPORTANTS DU CHAPITRE 9

  1. Une stratégie de développement agricole est un cadre de cohérence qui réunit des éléments de politique dans une architecture logique d'ensemble, avec une vision à moyen ou long terme des perspectives du secteur. Sa caractéristique est de présenter une approche intégrante des problèmes de développement, au lieu de les traiter chacun isolément des autres.

  2. Une stratégie doit avoir un solide fondement technique, mais pour être efficace elle doit aussi recueillir un large soutien, particulièrement de la part des agriculteurs, du gouvernement et des agences internationales de développement.

  3. En matière de politiques de réforme, surmonter les oppositions d'intérêts particuliers à certaines d'entre elles peut être facilité si la stratégie propose en même temps différents types de réformes dont chacun bénéficie à des groupes sociaux différents, plutôt que si les réformes étaient proposées une à une. L'un des rôles d'une stratégie est d'éliminer les privilèges particuliers et d'instaurer pour tous les acteurs les mêmes règles du jeu économique.

  4. Une stratégie sert aussi à élever le niveau du débat national sur les politiques. Elle constitue un processus éducatif pour tous ses participants, y compris les conseillers techniques. Le travail d'élaboration d'une stratégie peut représenter, pour ceux et celles qui y participent, un mécanisme d'instruction par l'action, dans lequel on apprend à définir les problèmes de politique eux-mêmes d'une façon constructive, et à rechercher les solutions dans des directions parfois inhabituelles.

  5. Ces dernières années, de grands efforts ont été faits pour renforcer le caractère participatif du développement des politiques et programmes, mais la participation des citoyens à la formulation de stratégies de développement national ou sectoriel n'est pas encore devenue chose courante.

  6. Outre le respect des principes de base de la démocratie, l'élaboration participative des stratégies mérite d'être encouragée pour les raisons qui suivent:

    1. Cela accroît les chances d'atteindre un consensus national sur les politiques de réforme.
    2. Cela renforce les moyens du débat national et donne aux citoyens davantage d'autorité pour prendre part à la résolution des problèmes politiques du futur.
    3. Cela aide à élaborer de meilleures politiques. L'expérience nous enseigne que les représentants du secteur privé et des ONG peuvent, non seulement aider à former un consensus sur les politiques, mais aussi contribuer de façon décisive à la qualité des réformes, jusqu'au niveau de la rédaction des propositions de loi.
    4. Cela aide à renforcer la responsabilisation et la transparence du processus de prise de décision.
    5. Cela renforce la position du pays dans le débat international, si bien que les priorités véritablement nationales peuvent servir de guide aux programmes d'assistance internationale, au lieu que les politiques nationales soient définies implicitement par l'addition des conditionnalités attachées aux prêts et dons internationaux.

  7. Il est important d'assurer que les participants au processus soient représentatifs d'un éventail suffisamment large de la société. Ceci vise en particulier les femmes, les pauvres et autres groupes traditionnellement défavorisés. Les participants n'ont pas forcément à être les représentants formels d'associations ou autres entités enregistrées, mais ils doivent être reconnus dans leur communauté ou leur groupe comme des personnes à l'avis réfléchi sur les questions de politique.

  8. Il y a un risque réel de ne pouvoir obtenir, au sein des membres de la société civile, un consensus sur les questions de stratégie. Néanmoins, s'il y a dans la société des désaccords sérieux sur des questions fondamentales de politique, le travail sur la stratégie est un forum utile pour contribuer à les résoudre.

  9. Un des objectifs principaux d'une démarche participative de formulation de stratégie est de créer un sentiment d'appropriation du résultat de la part des participants. Dans une large mesure, cet objectif dépend de la façon dont le processus est conduit. Un autre objectif est que la stratégie soit appropriée par la nation elle-même. Cet objectif trouve toute sa valeur dans les pays où bien des politiques ont, de fait, été imposées par les agences internationales de développement à travers les conditionnalités liées à leur assistance financière.

  10. Ce problème de l'appropriation, par le pays et par la société civile, suggère qu'il y a des limites au parrainage direct, par des organisations financières internationales et par le gouvernement, du processus participatif d'élaboration de la stratégie. Idéalement, ces instances devraient contribuer au processus par une expertise technique, et aider à la mise en œuvre des recommandations de la stratégie, mais la société civile peut être réticente à s'engager à travailler sous une telle égide.

  11. Le mode de sélection des participants peut aussi jouer son rôle dans le sentiment d'appropriation. Cette question mérite d'être discutée à fond avec les participants eux-mêmes avant que la liste en soit arrêtée.

  12. Si la stratégie est rédigée par des conseillers techniques et ensuite présentée à la société civile pour discussion, il y a peu de chances que le sentiment d'appropriation se fasse jour chez les personnes consultées. La clé en la matière est que les nationaux concernés, et les membres de la société civile tout spécialement, aient un rôle directeur dans la rédaction du document de stratégie.

  13. Le contrôle de la qualité technique est un aspect important dans les stratégies, surtout lorsque la société civile y joue un rôle directeur. La meilleure façon de l'assurer est par une démarche de développement de capacité, ce qui, en retour, exige une collaboration prolongée entre participants et conseillers techniques, dans une sorte de démarche d'apprentissage par l'action. D'un autre côté, il y a souvent, dans un pays en développement, un réservoir latent de talents jusqu'alors inexploités pour des travaux en matière de politiques.

  14. La capacité de la société civile à analyser les questions de politiques devrait être institutionnalisée pour pouvoir servir à plus long terme. C'est une affaire qui mérite l'attention et le soutien des agences internationales de développement. En effet, fondamentalement, l'un des rôles les plus fructueux de l'assistance officielle au développement consiste à générer une capacité nationale à analyser et formuler les politiques.

  15. Le travail d'élaboration d'une stratégie s'organise autour de groupes de travail qui conduisent l'analyse et rédigent les projets de documents. Cette entreprise doit être pilotée par un comité de coordination, et il y a parfois deux niveaux de coordination, l'un pour la logistique quotidienne et l'autre, plus large, pour l'examen des questions de fond et la cohérence entre les éléments constitutifs de la stratégie.

  16. Les groupes de travail peuvent attirer dans le processus une expertise de la société civile qui, sans cela, n'aurait pas contribué à la réflexion sur les politiques.

  17. Les principaux défis inhérents au lancement d'un effort participatif pour l'élaboration d'une stratégie agricole sont les suivants:

    1. Motiver suffisamment de cultivateurs et d'éleveurs écoutés par leurs pairs à s'engager personnellement au processus et à y consacrer le temps nécessaire pour le mener à bien. Comme les exploitants agricoles et les paysans ont beaucoup à faire, ceci n'est pas chose facile.
    2. Ne pas mobiliser seulement des personnes vivant dans la capitale, et atteindre une certaine représentation géographique au sein des participants. La logistique nécessaire peut être un problème dans les pays vastes ou sans bon réseau de transports et communications.
    3. Surmonter les fractures qui peuvent se manifester entre les participants, du fait des appartenances politiques ou des conditions socio-économiques, afin de pouvoir réunir un consensus sur une position qui ait le support implicite de tous, ou presque, les principaux groupes de la société rurale.
    4. Créer une ambiance dans laquelle les représentants de la société civile se mettent à militer ensemble pour de bonnes politiques économiques bénéficiant à l'ensemble du secteur, plutôt que de promouvoir en ordre dispersé des intérêts personnels ou d'étroite chapelle.
    5. Eviter de mettre en place un dispositif parallèle de discussion, qui pourrait affaiblir, au lieu de les renforcer, les canaux de communication et les processus sociaux existant.
    6. Eviter une publicité prématurée sur le processus participatif, avant qu'il ait franchi le stade des ‘brouillons’. Une certaine publicité peut être utile, pour aider le public à être informé du processus, mais une publicité prématurée sur le contenu de la stratégie risque de servir de détonateur à des critiques acerbes, parfois partisanes, des formulations de politique en cours d'élaboration, parfois jusque dans la presse nationale. Le danger est que ce genre de critiques, survenant trop tôt, puisse briser le consensus en voie de formation au sein des participants, et même faire dérailler toute l'entreprise.
    7. Obtenir l'accord du gouvernement du moment, voire du prochain si des élections doivent avoir lieu sous peu, sur les principales recommandations de la stratégie.

  18. Une vision de l'avenir créative et réaliste est un élément essentiel d'une stratégie, mais les moyens d'inscrire cette vision dans les faits doivent être spécifiés de façon assez détaillée et rigoureuse pour pouvoir constituer un programme de mise en œuvre.

  19. Pour passer de l'expression d'une vision à la formulation d'un programme de propositions de politiques, une étape utile consiste à identifier les principaux obstacles à l'accomplissement de la vision. Une autre étape valable est que les groupes de travail décrivent le cadre de politiques préexistant, ce qui peut s'avérer délicat pour ceux dont l'essentiel de la carrière s'est déroulé justement dans ce cadre: avoir travaillé toujours dans un même contexte ne prépare pas à prendre du recul et imaginer des alternatives.

  20. Dans une stratégie, les relations logiques entre diagnostic et solutions doivent apparaître clairement. Une manière de structurer le document de stratégie est d'assurer, pour chaque secteur, sous-secteur ou thème, la présence des éléments suivants:

    1. Les caractéristiques de base du sujet examiné (secteur, sous-secteur ou thème)
    2. Le rappel des politiques passées et présentes concernant ce sujet.
    3. Les principaux problèmes et contraintes dont il faut s'occuper.
    4. Les objectifs (secondaires) spécifiques au sujet concerné.
    5. Les recommandations de politique et leur justification technique (en toute logique, les politiques doivent être conçues comme les moyens de surmonter les contraintes et d'atteindre les objectifs).
    6. En appendice: des recommandations en termes de réformes législatives et de programme d'investissement (ce dernier n'étant pas forcément requis pour tous les sujets traités).

  21. Le capital humain est le facteur stratégique le plus décisif du développement agricole, d'autant plus que de nouvelles technologies surgissent, que les marchés demandent des produits de meilleure qualité et plus salubres, tandis que les exigences des consommateurs en termes de qualité des produits et de calendrier de leur fourniture évoluent. Il devient de plus en plus important, pour tous les agriculteurs du monde, d'apprendre à obtenir et assimiler sans cesse l'information nécessaire. Du coup, les institutions et les politiques qui facilitent l'accès à l'information ont un rôle critique à jouer, mais souvent les ministères de l'agriculture sont lents à prendre au sérieux le problème de la qualité.

  22. Le développement institutionnel est l'une des clés de la croissance agricole. Des institutions fortes ouvrent aux agriculteurs les portes des connaissances nouvelles et leur permettent de conclure des contrats fiables pour la fourniture à une date ultérieure de leurs intrants, la livraison de leurs produits, et les paiements à terme. Lorsque toutes les transactions et paiements doivent se faire sur base instantanée, il y a peu de place pour le développement. Dans la plupart des économies en développement, les institutions desservant le monde rural laissent fort à désirer en ce qui concerne leur sens des responsabilités et leur efficacité.

  23. Les recommandations de politique d'une stratégie doivent respecter la cohérence intra-et intersectorielle. Pour mettre en œuvre une politique, il peut être nécessaire d'en modifier une autre, complémentaire. L'agriculture est tout particulièrement sous la dépendance du contexte macro-économique, qui détermine fortement le système des incitations pour les producteurs. Si les options de politique macro-économique n'ont pas été suffisamment explorées, il peut revenir à la stratégie agricole de suggérer certaines alternatives au niveau macro-économique.

  24. L'objectif le plus fondamental d'une stratégie agricole est d'améliorer le revenu des familles rurales. Un moyen important d'y parvenir est d'accroître la production et la productivité, et les politiques qui orientent les prix relatifs en faveur de l'agriculture contribuent aussi à atteindre cet objectif.

  25. En tout pays, le but d'une stratégie agricole est de générer une croissance durable et largement partagée, mais l'élaboration d'une stratégie fructueuse requiert de l'ingéniosité pour trouver aux problèmes rencontrés des solutions concrètes, détaillées, et qui soient viables dans le contexte où elles s'appliquent.

  26. L'expérience historique comme les modèles théoriques du développement agricole à long terme ont montré qu'il faut minimiser les interventions étatiques sur les marchés de produits, mais par contre donner la priorité à l'amélioration des marchés de facteurs, spécialement dans le domaine de l'éducation et de la formation (capital humain) et ceux de la terre, de l'eau, du crédit et de la technologie - cette dernière rejoignant le capital humain.

  27. Le ‘modèle historique’ de Vernon Ruttan et Yujiro Hayami est l'un des plus riches de sa catégorie pour ses implications en matière de politiques. Ce modèle met en avant le rôle fondamental de l'innovation technologique dans le développement agricole et montre aussi que la nature de cette innovation est fortement influencée par les prix relatifs des facteurs, ainsi que par le prix réel des produits agricoles.

  28. La production agricole n'est qu'un maillon d'une chaîne d'activités liées, allant de l'offre d'intrants et du développement des technologies, en passant par la production, jusqu'à la gestion après récolte, la mise en marché et la transformation des produits. En conséquence, l'agriculture ne peut prospérer sans établir des liens solides avec les marchés, intérieurs aussi bien qu'internationaux, lesquels à leur tour sont toujours plus exigeants envers la qualité du produit et les conditions de livraison. Le rôle primordial des marchés est tout aussi vrai pour les petits paysans que pour les grands exploitants.

  29. Au sens le plus large, les facteurs les plus décisifs pour la croissance agricole sont des marchés fonctionnels, les conditions de prix et un capital productif suffisant. Dans cette dernière catégorie, le capital humain, on l'a déjà noté, est le plus essentiel pour améliorer les perspectives de développement.

  30. Quant au contenu, les orientations-clés des stratégies de développement agricole peuvent se résumer comme suit:

    1. Développement des marchés et politiques de prix:

      • Les politiques de développement des marchés comprennent les négociations commerciales internationales (bi-et multilatérales) pour l'agriculture, les politiques de conformité aux normes sanitaires et phytosanitaires des aliments, les barèmes de qualité (spécialement pour les céréales), les mesures de promotion des exportations, l'information de marché et les opérations-test commerciales, le financement de la commercialisation et du stockage, la formation des vulgarisateurs sur les questions de qualité et de production bio, et autres actions connexes.
      • Les politiques de prix, qui se situent surtout au niveau macro-économique, doivent éviter le déclin des prix réels agricoles et rattraper au moins en partie les fortes baisses qui peuvent s'être produites. La politique de prix devrait aussi viser des taux de protection effective relativement uniformes des produits, au sein du secteur et entre secteurs.
      • Un régime d'ouverture commerciale, mais sans transmettre à l'économie intérieure les distorsions évidentes des marchés mondiaux.

    2. Politiques envers le capital humain:

      • Améliorer l'éducation rurale, et changer s'il le faut le mode de gestion des écoles en question.
      • Les programmes de vulgarisation et formation en milieu rural devraient comporter des éléments sur l'organisation des communautés et des producteurs, particulièrement en ce qui concerne les femmes. L'aptitude à travailler ensemble en coopération est nécessaire au succès de nombreux efforts de développement, notamment pour la pénétration de nouveaux marchés. Le facteur dont il s'agit ici est le capital social.
      • Les capacités de recherche et vulgarisation agricoles demandent à être très considérablement renforcées dans la plupart des pays en développement, avec un accent particulier sur la qualité de leur personnel et sur les approches participatives.
      • Le capital humain se manifeste aussi dans les institutions dont le renforcement est vital pour le progrès agricole. En termes les plus généraux, ceci signifie inculquer le respect des lois et du droit de propriété sous toutes ses formes. La bonne gouvernance est indispensable à tous les aspects du développement agricole. Plus spécifiquement, renforcer les institutions exige qu'elles soient davantage responsabilisées et efficaces, ce qui, pour l'agriculture en développement, demande généralement plus de décentralisation des institutions qu'actuellement.

    3. Politiques envers le capital physique pour la croissance agricole:

      • Clarifier et étayer les droits de propriété, y compris les droits des baux et locations, et améliorer l'accès à la terre sans mettre en danger la sécurité des droits de propriété.
      • Investir dans les infrastructures physiques du milieu rural, spécialement pour l'irrigation, les transports, l'électrification et les communications.

  31. Les modalités selon lesquelles les politiques agricoles sont conçues, formulées et exécutées ont un impact déterminant sur leur résultat. L'expérience enseigne que cinq démarches-clés aident à garantir la bonne fin des politiques de réforme:

  32. Pour accélérer sa mise en œuvre, une stratégie devrait être accompagnée de recommandations de réforme législative, en tant que de besoin.

  33. L'approche de ‘développement rural intégré’, adoptée dans de nombreux pays, a généralement connu l'échec. Les causes en étaient un climat politique défavorable, un engagement insuffisant des gouvernements, l'absence de technologies convenables, l'ignorance du besoin de développement institutionnel et de participation des bénéficiaires, et la médiocre coordination entre organismes concernés.

  34. Face à ces difficultés, les agences internationales de développement ont fait porter l'accent, en matière de développement rural, sur les démarches décentralisées et participatives, au rang desquelles les programmes d'investissement rural ‘régi par la demande’. De façon croissante, les communautés sont invitées à choisir les programmes auxquels elles participent, ou à en diriger la définition, et le rôle des autorités locales gagne en importance.

  35. Le succès du développement rural demande aussi une décentralisation institutionnelle, des politiques d'appui dans les autres secteurs et une bonne gouvernance.

  36. Les investissements ruraux peuvent être rendus plus efficaces si des programmes complémentaires de transferts budgétaires vers les ménages pauvres sont mis en place. De tels transferts sont compatibles avec les règles de l'OMC en matière de politique agricole et sont un moyen de fournir des incitations aux petits exploitants et aux producteurs pour l'exportation, qu'il est difficile autrement de cibler dans un programme d'incitations.

  37. Ces transferts directs sont par ailleurs neutres au regard du choix des cultures, ce qui n'est pas le cas de la plupart des autres formes de soutien budgétaire à l'agriculture. Combinés avec une taxe foncière assise sur la surface cultivée, l'effet net en serait progressif par rapport à la taille de l'exploitation.

  38. Administrer des mesures de transfert direct requiert un fort degré de décentralisation des opérations d'un ministère de l'agriculture.

  39. On peut soutenir qu'une bonne part des investissements ruraux devrait être canalisée vers un petit nombre de types essentiels d'infrastructures, et non pas saupoudrée dans de nombreuses directions, et que ces investissements permettront aux familles rurales d'exercer d'autres choix qui élèveront leur niveau de vie. L'expérience internationale semble confirmer que ces types prioritaires sont au nombre de quatre: éducation, transports, électricité, et communications. Si les conditions agronomiques se prêtent à l'irrigation, celle-ci s'ajouterait comme cinquième priorité, étant donné le fort potentiel de gains de productivité agricole qu'elle possède.

  40. Dans la mesure du possible, des estimations approximatives des besoins en investissement dans les domaines prioritaires devraient être incluses dans une stratégie de développement agricole.

  41. Les cinq catégories de contraintes qui freinent les efforts des familles rurales pour améliorer leur sort sont les suivantes:

    Face à ces contraintes, cinq classes de politiques et programmes de développement rural peuvent être élaborées, les priorités entre elles étant définies de façon distincte pour chaque communauté. Le degré d'avancement de chaque communauté le long de ces cinq axes de progrès peut être évalué pour déterminer les prochaines priorités à retenir pour ses programmes de développement rural.

  42. En ce qui concerne le capital social, il y a peu de doutes que la priorité doit être la suppression des inégalités entre genres, pour des raisons à la fois d'équité et d'efficacité. Le problème peut être abordé au niveau de la communauté, à travers des programmes d'éducation et de prise de conscience et en donnant un pouvoir égal aux femmes, ainsi qu'au niveau des politiques sectorielles, comme cela a été montré dans les chapitres précédents. Cette question relève aussi des lois et politiques nationales concernant les droits d'héritage, les droits à la terre dans le cadre des réformes agraires, la violence domestique, la santé féminine et autres sujets rattachés.

  43. Une stratégie ne vaut que si elle est au moins en partie réalisée. Aussi, dans le travail d'élaboration de la stratégie, il vaut la peine de prendre en compte la façon dont les réformes de politiques vont être conduites. Les politiques sont mises en œuvre selon cinq voies:

  44. Une stratégie doit être suivie d'un plan d'exécution, et un secrétariat d'exécution doit être mis en place pour superviser les étapes de sa mise en œuvre. Les participants à l'élaboration de la stratégie auront acquis l'expertise requise pour effectuer le suivi de son exécution et trouver des solutions aux problèmes qui peuvent surgir en cours de route.

  45. Il ne peut y avoir de meilleure conditionnalité à l'assistance internationale que de demander à un pays de réaliser ses propres plans, surtout si ceux-ci ont été développés sur le mode participatif. Avec les meilleures intentions du monde, des obstacles peuvent toujours se dresser sur la voie de la mise en oeuvre, et il peut donc être judicieux pour les agences internationales de désigner l'exécution de la stratégie élaborée nationalement, ou d'éléments clés de celle-ci, comme la condition au décaissement de l'assistance internationale.

72 Banque mondiale, World Bank Experience with Rural Development: 1965–1987, Operations Evaluation Study 6883, Banque mondiale, Washington, D. C., 1987.

73 H. Binswanger, 1998, pages 292–293.

74 Un résumé de cette expérience et des raisons de son succès est donné par Maximiliano Cox, Mejores prácticas en políticas y programas de desarrollo rural: implicancias para el caso chileno, CEPAL, Naciones Unidas, Serie Desarrollo Productivo № 86, Santiago, Chili, mars 2001.

75 «Les projets régis par les collectivités qui ont réussi sont ceux dont les fonds permettant de couvrir les coûts opérationnels permanents générés localement». Extrait de: Operations Evaluation Department, Lessons on Community-Driven Development, Lessons and Practices, № 12, Banque mondiale, Washington, D. C., août 2000, p. 2.

76 M. Cox, 2001, p. 40.

77 Deux bonnes études des problèmes posés par la décentralisation, l'une traitant principalement des questions économiques et l'autre des problèmes politiques et institutionnels, ont été publiées par Michael Bruno et Boris Pleskovic, éd., Annual World Bank Conference on Development Economics 1995, Banque mondiale, Washington, D. C., 1996. La première est l'œuvre de Vito Tanzi, Fiscal Federalism and Decentralization: A Review of Some Efficiency and Macroeconomic Aspects (pages 295–316) et la seconde celle de Rudolf Hommes, Conflicts and Dilemmas of Decentralization (pages 331–349). Lawrence D. Smith fournit une discussion très utile de nombreux problèmes liés à la décentralisation, dont la définition de ses différents degrés et types, dans son ouvrage intitulé Réforme et décentralisation des services agricoles: Un cadre méthodologique, FAO Agricultural Policy and Economic Development Series, № 7, Division de l'assistance aux politiques, FAO, Rome, 2001.

78 Binswanger (1998, p. 294) mentionne des projets de développement rural récents au Mexique, en Colombie et au Brésil qui ont cédé le pouvoir de décision aux municipalités.

79 M. Cox, 2001, pages 37–38.

80 L. D. Smith, 2001, p. 44.

81 Philippe Dongier, Community Driven Development Principles, projet, Banque mondiale, Washington, D.C., 7 janvier 2000, p. 3 [souligné dans l'original].

82 World Bank Action Strategy, Consultation on Rural Development for Latin America and the Caribbean, Summary Report of Conclusions and Proceedings, CIDER (IICA), The City of Knowledge, Panama, avril 2001, pages 10–11.

83 Lawrence D. Smith, 2001, pages 21–22 [souligné dans l'original].

84 Le concept de transferts directs aux petits exploitants pour augmenter leur capacité de production est relativement nouveau. Un rapport de 1992 de la Banque interaméricaine de développement énumérait quatre types de subventions aux familles rurales, qui n'incluaient pas les transferts à la production. Les types de subventions mentionnés étaient des programmes d'emploi rural, des programmes de cantine scolaire, des subventions en espèces pour assurer la subsistance de groupes vulnérables (vieillards, jeunes enfants, femmes enceintes et allaitantes) et la distribution de denrées alimentaires à des groupes de la population victimes de déficits nutritionnels (Gladys Aristizábal, Jorge Echenique, Ruy de Villalabos et Wolfram Fischer, Combatiendo la Pobreza Rural en América Latina y el Caribe: Una Nueva Estrategia de Desarrollo Rural, Banque interaméricaine de développement, Washington, D. C., décembre 1992, p. 58).

85 Le rapport de 1992 évoqué plus haut de la Banque interaméricaine de développement, consacré à la pauvreté et au développement ruraux, commentait: «L'un des défis organisationnels à relever par un système de programmation, d'établissement de budget et de gestion du développement rural sera de parvenir à une combinaison optimale entre les niveaux d'action décentralisés des projets et programmes de développement rural, et la formulation des politiques au niveau national» (G. Aristizábal, J. Echenique, R. de Villalabos et W. Fischer, 1992, p. 41).

86 Ces manuels ont été publiés en 1996 sous le titre général de Guía de Desarrollo Rural, par le Consejería de Agricultura y Pesca, Junta de Andalucía, Séville, Espagne.

87 Alexander Schejtman, Agroindustria y pequeña agricultura: Alcances conceptuales para una política de estímulo a su articulación, CEPAL, document № LC/R. 1660, 29 juillet 1996, Santiago, Chili, p. 22.

88 Dominique van de Walle, Choosing Rural Road Investments to Help Reduce Poverty, document de travail № 2458, Banque mondiale, Washington, D. C., octobre 2000.

89 Des suggestions préliminaires de cette nature ont été émises pour le ministère de l'Agriculture et de la forêt du Nicaragua avec le soutien de la Banque interaméricaine de développement.

90 FIDA, Rural Poverty Report 2001: The Challenge of Ending Rural Poverty, Oxford University Press, Oxford, 2001, p. 105.

91 FIDA, 2001, p. 112.

92 David Coady, Xinyi Dai et Limin Wang, Community Programs and Women's Participation: The Chinese Experience, document de travail № 2622, Banque mondiale, Washington, D. C., juin 2001, pages 22, 24–25.

93 FIDA, 2001, p. 110.

94 Gustavo Gordillo de Anda, Un nuevo trato para el campo, intervention à la International Conference on Access to Land: Innovative Agrarian Reforms for Sustainability and Poverty Reduction, Bonn, Allemagne, 19–23 mai 2001, p. 36.

95 Jan Willem Gunning, Rethinking Aid, dans: Boris Pleskovic et Nicholas Stern, éd., Annual World Bank Conference on Development Economics, 2000, Banque mondiale, Washington, D. C., 2001, p. 141.


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