La liberalisation commerciale est généralement présentée comme un facteur de développement par le gain d'efficience que represente,pour chacun des pays concernés,une meilleure allocation de leurs facteurs productifs,en fonction de leur avantage comparatif. Mais nous sommes nombreux à penser que l'agriculture n'est pas un secteur comme les autres. Pour beaucoup de pays en développement,il fait encore vivre une grande majorité de la population. Or cette agriculture est fragile:elle a souvent été négligée par les gouvernements,en meme temps qu'elle a du natamment par des subsides importants. Le choc de la conccurence risque de lui etre fatale si elle n'a pas les moyens de se protéger. En outre,les producteurs agricoles ne peuvent pas repondre aux signaux des prix-réorienter leur production en fonction de la demande-comme dans d'autres domaines:cela demande des conditions adéquates,cela demande des soutiens publics,et cela suppose que l'on détache l'activité agricole de la culture dont elle fait souvent partie intégrante pour les populations qui la pratiquent. Enfin,au sein meme du monde agricole, le crible de la conccurence internationale risque de conduire à une dualisation forte:les plus grands producteurs-les plus mécanisés, qui ont les meilleurs les meilleurs terres et le meilleur accès au crédit et aux infrastructures-survivront et peut-etre verront meme s'accroitre leur part dans la production totale,alors que les plus petits paysans pourront etre laminés.Or l'agriculture la plus "compétitive" en ce sens-c'est-à-dire la mieux capable de répondre aux impératifs de l'agriculture"low cost" qu'on nous prépare-n'est pas nécessairement la plus souhaitable.Car c'est elle qui contribue le moins au développement rural et à la création d'emplois, et qui et qui produit les couts sociaux et environnementaux les plus élevés.
C'est pourquoi, avant la conclusion d'un accord de libre-echange,il est essentiel d'étudier les impacts sur les droits de l'homme des différents groupes au sein de la population concernée:aprés,il risque d'etre trop tard. Les études d'impacts visent à attirer l'attention-celle des gouvernements,et celles surtout de la société civile et des parlements nationaux qui controlent les gouvernements, sur la situation des plus vulnérables,dont la situation peut encore s'aggraver meme si les indicateurs macro-économiques-PIB ou revenus d'exportations pour le pays dans son ensemble-progressent.
Le droit à l'alimentation peut constituer un outil d'analyse puissant des impacts de la libéralisation commerciale.Il met l'accent sur les inégalités,et non seulement sur les gains d'efficience.Il s'intéresse aux groupes les plus vulnérables,et non uniquement aux valeurs agrégées.Il conduit à interroger si les évolutions qu'amène le développement du commerce international sont durables,ou bien si elles augmentent la vulnérabilité aux chocs des pays qui misent tout sur lui.
Serigne Sarr
Sr. Serigne Sarr