Forum global sur la sécurité alimentaire et la nutrition (Forum FSN)

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    • Dans ce document, le genre masculin est utilisé comme générique, dans le seul but de ne pas alourdir le texte.

      L’Union des producteurs agricoles

      L'Union des producteurs agricoles (UPA) représente 42 000 agriculteurs québécois qui exploitent 29 000 entreprises agricoles, ainsi que 30 000 producteurs forestiers. Regroupant 12 fédérations régionales et 25 groupes spécialisés, l’UPA a pour mission principale de promouvoir, de défendre et de développer les intérêts professionnels, économiques, sociaux et moraux des producteurs agricoles et forestiers du Québec.

      Introduction

      Offrir aux producteurs agricoles l'opportunité de partager leur expertise revêt une importance capitale dans tout processus décisionnel lié à l'agriculture et à la zone agricole. En l'absence d'implication des producteurs, des lacunes significatives dans les solutions envisagées peuvent survenir.

      En premier lieu, l’UPA souhaite rappeler qu’à l’échelle mondiale, les producteurs agricoles devront répondre adéquatement aux besoins de presque neuf milliards d’humains, tout en valorisant et en conservant la nature. Ceci constitue un défi complexe que nous avons à relever et qui demandera que nous développions des approches et des outils nouveaux, notamment par une collaboration des producteurs et des chercheurs.

      Importance de préservation de la zone agricole du Québec

      Au Québec, la zone agricole cultivée ou en pâturage ne représente que 2 % du territoire total de la province, soit à peine 0,24 hectare par habitant. Cette proportion est six fois inférieure à celle de la moyenne canadienne, cinq fois moins élevée qu’aux États-Unis et deux fois moindre qu’en France.

      Dans un contexte de croissance démographique tant au Québec qu'à l'échelle mondiale, associé à des défis économiques tels que l'inflation, des enjeux sociopolitiques comme les conflits internationaux, et une fragilité accrue dans la capacité de produire notre alimentation en raison des changements climatiques, il devient impératif de protéger et de garantir la capacité de production agricole, à la fois à l'échelle régionale, nationale et internationale.

      Dans cette optique, il est crucial de préserver tant la zone agricole québécoise que mondiale, de toute conversion en zones urbaines (artificialisation) et de tout autre usage non productif afin de maintenir son usage pour la production d’aliments. L’UPA demande donc de respecter le principe de zéro perte nette pour la zone agricole et demande également le maintien et le développement des activités agricoles.

      Contribution de la biodiversité agricole à la biodiversité du Québec

      Les différents habitats de la zone agricole fournissent des ressources essentielles et diversifiées, comme la nourriture, l'eau et des sites de reproduction, à de nombreuses espèces. Par exemple, les champs cultivés peuvent être des aires d’alimentation pour les oiseaux granivores et insectivores, comme l’hirondelle rustique, tandis que les prairies sont favorables aux papillons et aux insectes pollinisateurs, comme les syrphes. Pour leur part, les coulées agricoles, les bandes riveraines, les fossés et les haies brise-vent jouent un rôle crucial, car ce sont des habitats pérennes aux espèces végétales plus diversifiées. Le sol héberge également de nombreuses espèces vivantes.

      Notons qu’en cultivant les champs agricoles et en aménageant la forêt, les producteurs agricoles et forestiers ont agi comme des remparts contre l'artificialisation, démontrant ainsi leur contribution essentielle à la préservation de la biodiversité. Ils ont par ailleurs joué un rôle crucial dans la gestion des espèces exotiques envahissantes.

      Implication des producteurs agricoles pour une meilleure cohabitation de leurs activités avec la biodiversité

      Gestion durable des superficies consacrées à l’agriculture

      Au Québec, des gestes concrets, comme les programmes gouvernementaux et les projets en agroenvironnement menés par des producteurs, sont posés depuis plus de 30 ans. L’engouement suscité par la récente Initiative ministérielle de rétribution des pratiques agroenvironnementales témoigne de l'engagement des producteurs agricoles envers la préservation de la biodiversité et de l'environnement. Cette Initiative, dirigée par le ministère de l'Agriculture, vise à reconnaître financièrement l'adoption par les agriculteurs de pratiques agroenvironnementales dépassant les exigences réglementaires et entraînant d'importants bénéfices environnementaux.

      Depuis 1994, l’UPA et ses partenaires ont mis en œuvre diverses stratégies qui ont permis aux producteurs de se donner des outils collectifs et structurants qui sont, encore aujourd’hui, des piliers de l’action agroenvironnementale au Québec (ex. : développement d’un réseau de clubs-conseils en agroenvironnement, création de l’Institut de recherche et de développement en agroenvironnement). De plus, l'UPA s'engage activement, par sept projets provinciaux, aux côtés des producteurs agricoles pour promouvoir des pratiques bénéfiques pour l’environnement et la biodiversité. 

      Réduction du risque des pesticides

      Afin de réduire l’usage des pesticides en agriculture, des efforts sont investis en sensibilisation, en formation, en accompagnement et en recherche. Ainsi, les connaissances scientifiques et techniques s’approfondissent, que ce soit à propos de la réduction des risques liés à l’usage des pesticides ou de l’adoption de solutions de rechange.

      Il faut savoir que le Québec utilise un indicateur de risque des pesticides, associant à chaque pesticide des indices de risque pour la santé et l'environnement. Les producteurs agricoles peuvent ainsi choisir leurs pesticides en fonction de ces risques. Cet outil a été développé par le ministère de l’Agriculture, le ministère de l'Environnement et l’Institut national de santé publique.

      Par ailleurs, un bilan des ventes de pesticides est publié chaque année au Québec. Le bilan 2021 révèle une augmentation de 12 % de l’indicateur de risque pour l’environnement à l’hectare, par rapport à la période de référence de 2006 à 2008. Bien que le risque par hectare ait augmenté, la croissance du volume d'aliments produits sur cette surface a dépassé cette augmentation, ce qui a, en réalité, entraîné une diminution du risque par unité de volume. À titre d’exemple, la production de maïs a augmenté de 38 %, celle de pommes de 64 % et celle de petits fruits de 92 %.

      De plus, on constate une augmentation des ventes de biopesticides et de pesticides à moindre risque au Québec, ce qui signifie que l’utilisation de ces produits est privilégiée par les producteurs agricoles par rapport à d’autres produits plus à risque.

      Le dernier bilan des ventes indique aussi que, lorsque des solutions de rechange existent, les ventes de pesticides plus à risque diminuent rapidement (ex. : baisse de l’usage du chlorpyrifos grâce au développement de la méthode de lâchers de mouches stériles de l’oignon). 

      Réduction de l’excès de nutriments perdus

      Chaque année, les exploitations agricoles du Québec doivent démontrer qu’elles sont en mesure de gérer adéquatement les matières fertilisantes qu’elles produisent et utilisent. En effet, l’épandage de matières fertilisantes n’est permis que pour fertiliser le sol d’une parcelle en culture et doit être effectué en conformité avec un plan agroenvironnemental de fertilisation (PAEF) signé par un agronome. Le PAEF est un outil de gestion de la fertilisation dans l’entreprise réalisé annuellement qui vise à optimiser l’utilisation des fertilisants tout en réduisant les effets sur l’environnement. Il comprend une analyse des besoins en nutriments des cultures, l’évaluation des pratiques existantes et des recommandations personnalisées. 

      Gestion durable des superficies consacrées à l’agriculture, une recette gagnante

      Il incombe aux gouvernements d’affirmer leur rôle et d’assumer pleinement la responsabilité d’aller plus loin. Ils ont le devoir de soutenir et de pérenniser les efforts déployés en privilégiant une approche agroenvironnementale concertée, incitative et simplifiée sur le plan administratif, tout en assurant un financement adéquat et durable pour les prochaines décennies. Les investissements additionnels nécessaires doivent assurer, d’une part, la priorisation des actions les plus judicieuses sans compromettre la rentabilité de nos fermes et, d’autre part, le développement et le transfert de connaissances scientifiques permettant de faire des choix informés. Ces investissements doivent provenir en partie d’un financement du gouvernement du Québec, mais également de sources externes. En ce sens, nous demandons que les conditions et paramètres soient mis sur pied par le gouvernement pour faciliter des investissements justes et durables en agroenvironnement.

      Nous recommandons également :

      • que l’implication et les bons coups des producteurs agricoles, depuis plusieurs années, soient reconnus et valorisés par les gouvernements et la société;
      • que les producteurs agricoles soient reconnus comme des acteurs incontournables et qu’ils participent à l’élaboration, à la mise en œuvre et à l’évaluation de tous les plans stratégiques à tous les paliers touchant la biodiversité;
      • que leur opinion soit prise en compte de manière prépondérante lorsque des mesures prennent effet sur leurs terres ou qu’elles puissent perturber leurs activités.

      Afin d’améliorer la cohabitation entre les activités agricoles et la biodiversité, de nouveaux investissements issus d’une concertation avec le milieu agricole sont nécessaires pour :

      • conduire des recherches pour développer des solutions novatrices, augmentant la productivité agricole en contexte de changements climatiques tout en améliorant les habitats pour la biodiversité agricole. Une approche collaborative, inclusive et concertée telle que celle des laboratoires vivants pourrait être utilisée;
      • accroître les ressources dédiées aux programmes de reconnaissance des bonnes pratiques et de financement des pratiques agroenvironnementales pour couvrir la mise en place, l'entretien et les pertes financières éventuelles;
      • consolider le financement des ressources professionnelles pour l’accompagnement technique des producteurs agricoles tout au long de leur démarche d’adoption de bonnes pratiques pour la biodiversité;
      • sensibiliser et former les producteurs et les conseillers agricoles afin qu’ils connaissent mieux les pratiques favorables à la biodiversité.