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3. Conclusions et recommendations


3.1 La nécessité de poursuivre la libéralisation du secteur commercial
3.2 La nécessité d’une meilleure organisation des commerçants
3.3 La nécessité d’une bonne formation du secteur commercial
3.4 La nécessité d’un financement adéquat du secteur privé
3.5 La nécessité de favoriser l’émergence et l’organisation d’associations de consommateurs
3.6 La nécessité de veiller à la sécurité des routes et des frontières
3.7 La nécessité de poursuivre l’intégration économique régionale

3.1 La nécessité de poursuivre la libéralisation du secteur commercial

Entre les pays où l’Etat reste encore fortement impliqué dans l’importation des denrées et ceux où des groupes privés ont déjà constitué des oligopoles pour contrôler toutes les opérations, se trouvent ceux où une grande partie du secteur privé reste timide et désorganisé. Il faut donc poursuivre la libéralisation du commerce en supprimant, non seulement les monopoles d’Etat, mais aussi ceux des groupes privés qui se sont substitués à l’Etat. En effet, pour ces monopoles privés, la privatisation n’est pas synonyme de libéralisation. La constitution de ces oligopoles devient un frein à la libéralisation et est plus nuisible que le monopole d’Etat car ils ne tiennent pas compte des critères sociaux qui sont la base de la politique économique des Etats.

Dans cette optique, il convient d’encourager une concurrence saine entre les opérateurs par la suppression des contrôles de prix et l’encouragement au développement de npouveaux commerçants. Pour ce faire, il convient de renforcer les services de la concurrence qui existent dans tous les pays africains et qui sont rattachés, soit au Ministère du commerce, soit au Ministère des finances. Il faut restructurer ces services et les doter des moyens d’enquête leur permettant de faire leur travail dans les bonnes conditions; il faut aussi favoriser la concertation entre ces services et leurs homologues européens qui sont généralement assez efficaces.

La réglementation commerciale est assez libéralisée dans les pays africains mais, dans la pratique, les rigidités administratives demeurent. Il convient donc de mettre la pratique en adéquation avec l’esprit libéral des textes pour permettre aux opérateurs d’obtenir les documents administratifs dans les délais optimaux sans tracasseries inutiles.

3.2 La nécessité d’une meilleure organisation des commerçants

Les Chambres de commerce gagneraient à s’ouvrir davantage aux opérateurs qui exercent dans le commerce des denrées alimentaires. Les représentants des grossistes et des collecteurs, qui sont une partie vive du secteur commercial national et qui détiennent des informations de première importance sur les circuits, les prix et les quantités des produits locaux, peuvent jouer un rôle important à l’intérieur de la Chambre de commerce. Ils peuvent être aussi des éléments-clés dans la définition des politiques gouvernementales de sécurité alimentaire. Il convient donc, sous l’égide d’une Chambre de commerce décentralisée, de regrouper les grossistes et les collecteurs en associations professionnelles bien distinctes et de les incorporer à la structure de la Chambre au même titre que les importateurs ou les industriels.

La Chambre de commerce doit aussi veiller à l’autonomie des commerçants (importateurs des denrées alimentaires entre autres) pour les soustraire à l’influence des autorités d’Etat. Avec le pouvoir économique qu’ils détiennent déjà, une meilleure concertation entre ces commerçants et une meilleure organisation de leur activité leur permettra de résister aux tentations du pouvoir politique et de garder leur autonomie par rapport à ce pouvoir.

3.3 La nécessité d’une bonne formation du secteur commercial


3.3.1 Au niveau des commerçants
3.3.2 Au niveau des cadres de l’Administration

Le besoin de formation se situe à tous les niveaux:

3.3.1 Au niveau des commerçants

Les commerçants tiennent rarement une comptabilité cohérente. Ils ont besoin d’être sensibilisés sur ce point. Une fois cette condition requise, il faudrait organiser des sessions de formation à leur intention (ou à l’intention de leur mandatés) dans le cadre de la Chambre de commerce afin qu’ils accèdent aux données de la comptabilité et de la gestion des entreprises.

Par ailleurs, les commerçants ont également des besoins de formation pour tout ce qui concerne l’ouverture des dossiers de crédit bancaire, la souscription aux appels d’offre, la recherche des licences d’importation. Pour toutes ces opérations, ils ont souvent recours à des tiers (parents, amis, employés rétribués ou bénévoles) qui n’ont pas toujours une bonne moralité à leur égard.

3.3.2 Au niveau des cadres de l’Administration

Il est indispensable d’assurer la formation des cadres de l’Administration pour accroître leurs performances et réduire la corruption, car l’expérience montre que, plus ils sont incompétents, plus les cadres sont corrompus.

3.4 La nécessité d’un financement adéquat du secteur privé


3.4.1 Le crédit aux infrastructures et aux équipements
3.4.2 Le crédit aux importations
3.4.3 Le crédit à la commercialisation pour les petits opérateurs

Les besoins de crédit pour financer les opérations commerciales se situent principalement à trois niveaux:

3.4.1 Le crédit aux infrastructures et aux équipements

La construction ou l’entretien des magasins de stockage, l’achat des camions et des installations frigorifiques, la construction ou l’acquisition des unités ou du matériel de transformation nécessitent des investissements relativement importants qui sont supérieurs aux moyens propres des commerçants. Il convient donc de faire bénéficier ces opérateurs de lignes de crédit adaptées pour faire face au financement de ces investissements.

Les banques commerciales demandent des garanties que les commerçants ne peuvent produire. Pour cela, il faut inciter les banques à prêter en mettant en place des fonds de garantie qui pourraient être issus des fonds de contrepartie de l’aide alimentaire.

3.4.2 Le crédit aux importations

Le problème ici, ce sont les conditions restrictives d’octroi du crédit (plafonnement, caution en monnaie nationale) et le taux du crédit exorbitant pouvant atteindre plus de 40 pour cent dans certains pays. Ces conditions restrictives sont justifiées, pour les banques, par le risque élevé des opérations faites avec des commerçants en raison de l’insuffisance des garanties qu’ils présentent.

Une solution à ce problème peut consister en une révision de la nature des garanties demandées; en Afrique, l’immobilier, le troupeau ou la plantation peuvent être autant de garanties si les réglementations de nantissement sont clairement définies.

3.4.3 Le crédit à la commercialisation pour les petits opérateurs

Les détaillants, les collecteurs et les grossistes régionaux n’offrent pas le profil pour prétendre à des prêts bancaires. Cependant, certains pays ont expérimenté avec succès une approche basée sur le crédit mutualiste avec la caution solidaire. Ainsi, un groupe d’opérateurs ayant des relations personnelles accède au crédit qui est attribué aux individus tout en engageant la responsabilité du groupe. La caution morale qui s’établit au cours de l’opération permet des taux de remboursement que les banques classiques n’obtiennent généralement pas. Il importerait de généraliser ce genre de crédit, de le perfectionner et de l’étendre au maximum d’opérateurs.

3.5 La nécessité de favoriser l’émergence et l’organisation d’associations de consommateurs

Il est particulièrement important que les consommateurs se mobilisent en nombre pour exiger, en premier lieu, une amélioration sanitaire des produits vendus sur les marchés et, d’autre part, une amélioration qualitative des produits (mise en valeur, meilleure présentation, gamme de choix des produits, respect du prix par rapport à la qualité proposée, affichage des prix, etc.). C’est au travers d’associations de consommateurs que peut se faire le regroupement de toutes ces voix isolées et que les droits des consommateurs peuvent être reconnus.

Il faut donc que la mise en place de ces associations soit favorisée et facilitée au niveau administratif et qu’elles fassent partie des réunions de concertation et de réflexion sur tout ce qui touche à la gestion des filières de produits alimentaires. Il faut aussi que, lorsqu’une plainte de leur part est déposée, des vérifications de l’Administration soient faites et des poursuites soient engagées contre le contrevenant, s’il le faut.

3.6 La nécessité de veiller à la sécurité des routes et des frontières

Il s’agit de moraliser les forces de l’ordre chargées des contrôles sur les routes et aux frontières des pays. Des mesures disciplinaires rigoureuses sont indispensables pour faire cesser les pratiques scandaleuses de la Police, de la Gendarmerie, de la Douane et des militaires à l’égard des commerçants et des transporteurs. Il convient notamment de confier ce travail de contrôle à des agents assermentés qui seront radiés ou qui subiront des peines de prison en cas de malversations de leur part sur les opérateurs économiques.

A ce niveau aussi, il faut renforcer les moyens des forces chargées de la lutte contre les «coupeurs de routes». Ces équipes doivent être permanentes et sillonner les routes pour débusquer les bandits et les neutraliser. Une campagne d’envergure menée dans ce sens pendant quelques mois dissuaderait les bandits et instaurerait la sécurité sur les routes.

3.7 La nécessité de poursuivre l’intégration économique régionale

Aussi bien au niveau de la CEDEAO en Afrique de l’Ouest, de l’UDEAC en Afrique centrale que des autres organisations régionales dans d’autres parties du continent, il convient d’accélérer et de renforcer l’intégration économique des Etats.

L’uniformisation des tarifs douaniers, la libre circulation des biens et des personnes, la fluidité des mouvements des capitaux apparaissent comme des éléments déterminants de l’essor du commerce en général, et des denrées alimentaires en particulier. Ceci est d’autant plus vrai que les pays africains, qu’il s’agisse des produits agricoles, de l’élevage ou de la pêche, présentent une grande complémentarité.

Un autre avantage, et non des moindres, de l’intégration régionale et de l’élargissement des marchés (qui sont trop étroits dans le cadre des Etats), c’est l’élargissement des marchés qui permettra la création de débouchés importants pour les produits du cru, une maximisation des quantités collectées et une économie d’échelle au niveau des prix et des coûts de transport. Tout cela contribuerait à centrer, dans l’économie formelle, une grande partie du commerce traditionnel qui est le cadre, à l’intérieur des Etats et entre les pays, d’une bonne partie des transactions portant sur les denrées alimentaires.


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