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4. RESEAU DE PRODUCTEURS PRIVES D'ALEVINS

4.1. Un réseau en extension croissante

Le projet PNUD/FAO-MAG/82/014 “Vulgarisation de la pisciculture et développement de la pêche continentale” a vulgarisé la pisciculture et la rizipisciculture dans la région d'Antsirabe durant trois années (1985/1988), par l'intermédiaire de 30 vulgarisateurs piscicoles. Il a ainsi pu identifier et encadrer plus de 7 000 paysans (rizi)pisciculteurs qui produisaient pendant la campagne 1987–1988 un peu plus de 100 t de poissons sur une superficie de 500 ha d'étangs et rizières.

Ce projet-là a préparé le terrain pour son successeur, l'actuel projet PNUD/FAO-MAG/88/005 “Promotion de l'aquaculture et privatisation de la production d'alevins”. Ce dernier peut ainsi s'atteler à la résolution du problème fondamental, celui du manque d'alevins de bonne souche en milieu paysan, par l'installation d'un réseau autonome et indépendant de producteurs d'alevins.

Ces producteurs privés doivent, à terme, assurer l'approvisionnement en alevins des (rizi)pisciculteurs de leur secteur respectif, défaisant ainsi les stations gouvernementales de cette charge trop lourde pour elles1 ; ils doivent également vulgariser les techniques piscicoles dans leur secteur, dans l'intérêt de vendre facilement leur production et d'augmenter la demande de leur secteur, soulageant par la même occasion la CIRPA/projet de cette tâche.

Dans cette optique, où la vulgarisation de la (rizi)pisciculture a cédé la priorité à la mise en place des producteurs privés d'alevins, la CIRPA/projet actuelle n'a plus besoin des 30 vulgarisateurs de la CIRPA/projet précédente ; on a donc rompu leur contrat à la fin de l'année 1989. La CIRPA/projet actuelle fonctionne avec 6 agents de terrain permanents appelés responsables de zone (choisis parmi les 30 vulgarisateurs), qui assurent a priori l'identification, l'installation, l'encadrement et le suivi des producteurs d'alevins de la vaste région du Vakinankaratra (on a en principe un responsable de zone par Fivondronana). Ce faisant, le projet actuel constitue un projet pilote qui teste un nouveau système de promotion rurale. Ce système consiste à n'avoir que quelques agents de terrain permanents qui doivent, à leur tour, encadrer un certain nombre de paysans pilotes produisant à titre privé les semences dont a besoin le monde rural. Ce nouveau procédé diminue l'engagement de l'Etat au profit du secteur privé, ce qui assurera à moyen terme une continuation.

Dès la première campagne (1989/90), la CIRPA/projet a pu identifier, rendre opérationnels et encadrer 9 paysans producteurs de la région du Vakinankaratra, qui ont produit lors de cette première campagne près de 100 000 alevins. Six d'entre eux étaient des anciens vulgarisateurs de la CIRPA/projet.

Lors de la campagne 1990/91, le réseau comptait 22 producteurs privés opérationnels, encore limités à la région du Vakinankaratra. Ils ont produit près de 200 000 alevins sur une superficie totale de 205 ares. Sept d'entre eux sont des anciens vulgarisateurs.

1 Jusqu'à ce que les producteurs privés puissent prendre la relève, l'approvisionnement en alevins des paysans (rizi)pisciculteurs est assuré par la CIRPA/projet, qui organise chaque année une campagne de cession d'alevins produits dans des stations étatiques (Ambatofotsy/Ambatolampy, et Ampamaherana/Fianarantsoa).

Pour la prochaine campagne 1991/92, la zone du Vakinankaratra comptera 35 producteurs d'alevins, qui exploiteront une superficie de 420 ares d'étangs. Le réseau commence aussi à se mettre en place dans la zone de Fianarantsoa, où l'on aura 7 exploitations opérationnelles pour cette campagne.

Il existe donc une évolution positive de l'action du projet, démontrée par l'augmentation régulière du nombre des unités de production aquacoles, de la production d'alevins et de superficie exploitée en étangs.

Un effet secondaire positif est le fait que les producteurs d'alevins empoissonnent d'abord toutes leurs rizières qui n'ont pas de problèmes d'eau, avant de vendre les surplus de production. Ils sont ainsi en train de devenir également des rizipisciculteurs modèles, ce qui facilite leur tâche de promoteurs piscicoles.

4.2. Des producteurs étroitement encadrés par la CIRPA/projet

En tant que spéculateur du secteur privé, le producteur d'alevins doit fournir tous les investissements nécessaires à l'activité : terrain, main-d'oeuvre, petit matériel et intrants. Tous les profits de l'activité lui appartiennent également.

Néanmoins, il est étroitement encadré et soutenu par la CIRPA/projet tout au long de la filière de production. L'encadrement est plus intensif pour les producteurs privés dits “artisanaux” (ceux qui sont plus réceptifs et qui ont un potentiel de production important : au moins 100.000 alevins par campagne de production) que pour les “familiaux” (ceux qui sont peu réceptifs et qui ont souvent une capacité de production limitée, donc qui en général progressent lentement). Ce choix s'explique par le fait que, à cause de leur capacité de production limitée, ces derniers ne seront pas en mesure d'accomplir pleinement le rôle dévolu aux producteurs privés, à savoir de prendre la relève de l'Etat dans l'approvisionnement en alevins du milieu rural. Leur production sert en grande partie à l'empoissonnement des rizières familiales.

Dès l'identification, les techniciens de la CIRPA/projet interviennent en acceptant parmi les candidats ceux qui sont aptes à devenir des producteurs d'alevins, en fonction de critères essentiellement techniques dont :

Sitôt après son admission, le futur producteur d'alevins commence à bénéficier des services mis à sa disposition par la CIRPA/projet, dont les principaux sont :

1 A présent, ce taux est inférieur à celui de l'inflation.

4.3 Des encadrés satisfaits de la collaboration

Les producteurs privés eux-mêmes se déclarent tous satisfaits des services mis à leur disposition par la CIRPA/projet, même si, en insistant un peu, nous avons pu recueillir quelques remarques dont les principales sont les suivantes :

Il est possible que la plupart de ces reproches reposent sur des malentendus ou des manques d'information. Il vaut donc mieux oeuvrer en ce sens, en profitant des séances de formation par exemple.

Quoi qu'il en soit, les producteurs privés enquêtés restent unanimes sur le caractère satisfaisant des services fournis par la CIRPA/projet. Ils sont même conscients de l'importance de ces services pour le bon fonctionnement de leur exploitation, et ne veulent pas en être démunis.

Effectivement, quand nous avons sollicité des suggestions de leur part, en vue d'une éventuelle amélioration de la collaboration entre eux et l'organisme encadreur, tous ont mentionné leur souhait de continuer à travailler avec la CIRPA/projet ; la plupart n'ont d'ailleurs que ce seul souhait. Ils tiennent énormément aux appuis divers procurés par la CIRPA/projet, et craignent de les voir cesser, auquel cas ils seraient désorientés. Par ailleurs, la visite en elle-même est déjà bénéfique pour eux, puisqu'elle fait la promotion de leur production, notamment dans les zones où sévit la concurrence des producteurs non-encadrés1.

Le cas d'un certain producteur privé est significatif : il n'a pas besoin de crédit, mais a tout de même décidé d'en contracter pour quelques matériels, “par crainte de voir le suivi diminuer” (il s'est déjà plaint d'être moins visité).

Cette appréhension des producteurs encadrés n'est pas totalement injustifiée car, au stade actuel du moins, l'existence même de ces exploitations est liée à celle de la CIRPA/projet, qui fournit les services nécessaires à leur bon fonctionnement.

1 En effet, les rizipisciculteurs ont tendance à croire que les alevins du producteur privé encadré sont de meilleure souche, étant produits en collaboration avec des spécialistes (nationaux et étrangers), ce qui est d'ailleurs en partie vrai.

Une dépendance envers l'organisme d'encadrement peut nuire à la pérennité du réseau. Par exemple, la plupart des enquêtés ne sont pas intéressés par une association aquacole, puisque les avantages qu'ils peuvent en tirer sont déjà fournis par la CIRPA/projet. Néanmoins, les techniciens estiment qu'il faut deux à quatre campagnes d'encadrement avant qu'un producteur privé devienne indépendant. Ainsi, durant même ces campagnes, l'apprentissage d'une autonomie progressive est souhaitable pour les unités de production, en commençant par les plus anciennes. Il est toutefois nécessaire de compenser la diminution de la fourniture de services aux producteurs par l'intensification des formations à leur intention. D'ailleurs, ces paysans ont soif de connaissances techniques, et ont tendance à vouloir maîtriser la production d'alevins, par fierté : devenir des techniciens et non plus de simples exécutants.


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