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P A R T I E  I

OBJECTIFS ET STRATEGIES DE DEVELOPPEMENT DE LA PECHE ET DE L'AQUACULTURE

1. Principales orientations gouvernementales

Face à la crise économique qui frappe le pays depuis 1980, le Gouvernement malgache a entrepris des programmes d'assainissement des finances publiques et d'ajustement structurel. De nombreuses mesures d'accompagnement ont été prises pour relancer l'économie. Parmi les plus importantes, on peut citer la libéralisation de presque tous les marchés, le désengagement progressif de l'Etat dans les activités de production mieux assurées par le privé et une forte dévaluation de la monnaie malgache. Cette politique commençait à donner les premiers résultats avant la crise politique qui sévit dans le pays depuis le mois de mai 1991 et c'est surtout au niveau des équilibres généraux que les efforts positifs ont été les plus marquants. Cependant, au niveau social et au niveau de l'augmentation des productions, essentiellement pour le secteur agricole, les résultats n'ont pas été satisfaisants.

Cette politique d'ajustement structurel a été modulée pour être axée sur l'accroissement de la production et la diversification des exportations, tant des produits agricoles que ceux d'autres secteurs et ce, sans abandonner les mesures de stabilisation et de restructuration.

Pour le prochain plan de développement économique et social les principales orientations pourraient être les suivantes :

Pour atteindre ces objectifs globaux, les réformes structurelles entreprises seront probablement poursuivies et approfondies dans le sens notamment de la redéfinition des rôles respectifs de l'Etat et du secteur privé (promotion du secteur privé et dynamisation de la politique de privatisation des entreprises publiques).

Le secteur agricole, au sens large (culture, élevage et pêche), est celui qui contribue le plus significativement à l'économie nationale : il produit 40% du PIB, emploie 80% de la population active et assure au moins 80% des recettes totales d'exportation. Malgré son importance, la croissance du secteur agricole (0,6% par an au cours des années 70 et -0,1% par an pour la période 1980–1983) est restée inférieure à la croissance démographique (3%). Les résultats médiocres du secteur ont accéléré la crise économique du début des années 80.

Face à cette tendance négative, le Gouvernement malgache avec l'assistance de la Banque Mondiale et du Fonds Monétaire International a adopté plusieurs mesures macroéconomiques visant à stabiliser l'économie. En 1983, le Gouvernement a commencé à libéralisėr le commerce intérieur du riz. En 1984, d'autres mesures avaient pour but d'accroître l'efficacité économique et de relancer la demande des produits destinés à l'exportation. C'est seulement en 1988, que le Gouvernement malgache a procédé à une complète libéralisation de son commerce intérieur et extérieur (sauf celui de la vanille), ce qui a donc permis d'éliminer les monopoles d'Etat sur les collectes et les exportations agricoles et laisser libre la négociation des prix entre les producteurs et les acheteurs ainsi qu'entre les exportateurs et les importateurs. Quant à la dévaluation de la monnaie malgache, elle a été importante à partir de 1987.

Depuis 1984, le secteur agricole a enregistré une augmentation moyenne de 2,8% par an. Cette croissance est proche de la croissance démographique. Cependant, ce chiffre masque une disparité importante des résultats entre les différents sous secteurs. Cette croissance est expliquée, selon la Banque Mondiale (1990), en grande partie par le sous secteur des pêches (et dans une moindre mesure de l'élevage) qui a enregistré une croissance moyenne trois fois plus élevée que celui des cultures. Le sous secteur des cultures a atteint en moyenne une croissance de 1,5% au cours des cinq dernières années. Ce n'est qu'en 1989 que ce secteur a enregistré un taux de croissance (6,3%) positif par habitant (grâce, pour une large part, à une augmentation de 10,7% de la production de paddy), pour retomber à 2,4% en 1990.

Trois principales contraintes au développement du secteur agricole sont généralement avancées. Premièrement, en dépit de l'amélioration considérable des facteurs d'incitation par les prix, il subsiste des distorsions qui entravent le développement des filières agricoles au potentiel pourtant prometteur. Deuxièmement, la faiblesse de la demande solvable, intérieure comme extérieure, freine considérablement la croissance agricole. Troisièmement, les changements au niveau des facteurs du marché (par exemple prix plus incitatifs), atteignent peu ou mal les agriculteurs en raison du disfonctionnement généralisé des marchés agricoles.

Face à ces contraintes, les pouvoirs publics devraient élaborer une nouvelle politique agricole se traduisant, d'après la Banque Mondiele, par les grands axes suivants :

2. Potentiel en pêche et aquaculture et niveau de leur exploitation

2.1. Potentiel

Sur la base des connaissances actuelles, le potentiel en pêche et en aquaculture est évalué à environ 450.000 tonnes (tableau 1.). La quantité exploitable commercialement est estimée à 300.000 tonnes, étant donné que seule la moitié des stocks en petits poissons pélagiques et en poissons démersaux peut taire l'objet d'une exploitation rentable. Toutefois, ce chiffre est à considérer avec précaution en attendant des évaluations plus approfondies.

2.2. Niveau d'exploitation

L'analyse de l'évolution de la production entre 1960 et 1990 à Madagascar permet de constater :

Il est à signaler que les captures des flotilles étrangères dans la zone économique exclusive malgache ne constituent actuellement que moins de 10% de la production totale.

Ainsi, la production totale de 1990 ne représente que le tiers du stock de 300.000 tonnes et ce sont les ressources marines et estuarines qui sont nettement sous-exploitées. Par ailleurs les possibilités intéressantes de l'aquaculture, tant marine que continentale, restent encore à mettre en valeur.

Tableau 1 : Potentialités des eaux malgaches

RessourcesPotentiel
(tonnes)
Niveau
exploitable
Observations
I. Ressources marines et estuarines320.400  
- Crevettes Pénéides du plateau continental
(pêche industrielle)
8.000Exploitation optimaleCaptures en 1987 supérieures à 9.000 tonnes
- Crevettes Pénéides du plateau continental
(pêche traditionnelle)
1.700?Estimation des captures en 1989/90
- Crevettes profondes1.000non-exploitéesPotentiel mal connu peut être à partager avec le Mozambique
- Crabes de palétuvier (Scylla serrata)7.500sous-exploitéesEstimation basée sur une productivité de 25 Kg/ha/an pour 300.000 ha de mangroves
- Langoustes rouges du plateau continental340mal exploitéesCaptures réalisées en 1988
- Langoustes vertes du plateau continental1.000sous-exploitéesPotentiel mal connu
- Petits poissons pélagiques160.000non-exploitésEvaluation accoustique constituée en grande partie d'espèces non commerciales et/ou en poissons de très petite taille
- Poissons démersaux45.000sous-exploitésEvaluation accoustique et pêches d'essais, poissons de fonds meubles seulement, moins de 50% du potentiel sont de valeur commerciale
- Thons51.600sous-exploitésEvaluation basée sur les captures réalisées auparavant et sur le stock localisé dans le triangle Madagascar - Comores - Seychelles
- Algues rouges3.600sous-exploitéesRamassage en 1973
- Trépangs670surexploitésRamassage en 1990
- Poissons des eaux estuarines40.000sous-exploitésEstimation basée sur la surface des eaux des lagunes et des mangroves localisées sur la facade maritime
II. Ressources des eaux continentales40.000Exploitation proche maximaleEstimation sur la surface des eaux douces propices à la pêche
III. Aquaculture88.000  
- Pisciculture30.000sous-exploitéeEstimation basée sur la surface de rizières irriguées qui pourraient être aménagées pour la rizipisciculture (150.000 ha)
- Mariculture58.000non-exploitéeEstimation basée sur l'existence, à l'ouest de Madagascar, de 55.000. ha environ de sites propices (élevage semi-intensif)
IV. TOTAL448.400  

Sources : Pêches et aquaculture - Bilan diagnostic, Antananarivo, 1992.

3. Objectifs de développement de la pêche et de l'aquaculture

3.1. Objectifs globaux

La politique du secteur de la pêche et de l'aquaculture à Madagascar, a pour principaux objectifs à moyen et long terme :

  1. - la participation, pour une large part, à la satisfaction des besoins locaux en protéines d'origine animale, par une augmentation de la disponibilité en poissons sur le marché intérieur ;

  2. - la contribution à l'accroissement des rentrées de devises pour le pays ;

  3. - l'élévation du niveau de vie des pêcheurs et des aquaculteurs ;

  4. - la création d'emplois (pêcheurs, armateurs, dockers, mareyeurs, main d'oeuvre pour la transformation et la conservation des produits, transporteurs, etc.).

La structure du secteur malgache de la pêche et de l'aquaculture est caractérisée par une distinction très nette, d'une part, entre la pêche industrielle ainsi que la pêche artisanale (à vocation essentiellement exportatrice) et la pêche traditionnelle (orientée principalement vers le marché local) et, d'autre part, entre l'aquaculture marine (visant le marché extérieur) et l'aquaculture dulçaquicole (ravitaillant les consommateurs locaux). Cette structure permet de réaliser simultanément et sans contradiction les objectifs retenus.

3.2. Objectifs quantifiés

Compte tenu du manque de statistiques de nature socio-économiques, les projections se limitent aux données concernant la production aussi bien pour la consommation locale que pour l'exportation. Par ailleurs, si pour le moyen terme, on peut encore prévoir le nombre d'emplois à créer, pour le long terme il serait hasardeux d'effectuer le même calcul.

3.2.1. Objectifs quantifiés à moyen terme (5 ans)

3.2.1.1. Production halieutique destinée à la consommation locale

La quantification de la production pour le marché interne à moyen terme peut être effectuée sur la base de l'estimation de la population malgache et sur la base de la fixation du taux de consommation des produits halieutiques par habitant et par an pour l'horizon 1996. En 1996, cette population sera de 13,1 millions d'habitants et augmentera, en comparaison avec 1990, de 1,9 million 1.

1 Rabetsitonta, Perspectives démographiques - Madagascar 1984-2024, 1989, Document et Etude No15, BIT, FNUAP, Projet MAG/87/P02

Pour déterminer un objectif réaliste de la consommation des produits halieutiques et aquacoles par habitant en 1996, trois scénarios ont été analysés :

Les besoins en produits halieutiques et aquacoles pour 1996 et pour chacun de ces trois scénarios seront respectivement, de 97.000 tonnes, 105.000 tonnes et 125.000 tonnes environ.

Si on compare les besoins ci-dessus à la consommation totale en 1990 (82.000 tonnes), on constate que :

Compte-tenu des tendances de développement observées ces dernières années2, on prévoit que :

L'augmentation de l'offre de poissons de mer pour la consommation locale peut être réalisée, à court et moyen terme, (en grande partie) par le développement de la pêche traditionnelle dont la production devra être complétée par un débarquement plus important des poissons d'accompagnement de la pêche industrielle crevettière et thonière.

1 Annuaires statistiques FAO, ROME 1990
2 Pêches et aquaculture à Madagascar - Bilan diagnostic, Antananarivo 1992.

L'estimation de la production de la pêche traditionnelle en 1996 est basée sur une croissance moyenne de 2.500 tonnes par an. L'analyse de la croissance enregistrée entre 1970 et 1990 (2.000 tonnes par an en moyenne) et celle enregistrée entre 1980 et 1990 (3.500 tonnes) conduit à retenir le chiffre de 2.500 tonnes par an. Ce choix est justifié par les raisons suivantes :

Si l'on retient la croissance de 2.500 tonnes par an, l'augmentation de la production de la pêche traditionnelle devra être de 15.000 tonnes d'ici 1996, ce qui permet de ne réaliser que les besoins exprimés dans le premier scénario.

Toutefois, si les opérateurs de la pêche industrielle crevettière, qui fournissent au marché local environ 2.300 tonnes de poissons (1990) et qui rejettent en mer annuellement entre 18.000 et 24.000 tonnes de poissons d'accompagnement, en débarquaient le tiers, (c'est à dire 7.000 tonnes par an) on obtiendrait 4.700 tonnes de poissons en plus.

En conséquence, on peut obtenir à moyen terme une augmentation de la production pour le marché local de 20.000 tonnes réparties comme suit :

Pour réaliser les besoins exprimés dans le deuxième scénario (23.000 tonnes), il faut encore augmenter la production de 3.000 tonnes. Ce complément devrait être fourni, même si cela reste difficile, par les pêche artisanale et industrielle aux poissons ainsi que par la pisciculture.

La consommation de 9,5 kg par habitant et par an, ne semble pas être réalisable dans les cinq prochaines années et doit être considérée comme un objectif à long terme.

3.2.1.2. Production nationale orientée vers l'exportation

En ce qui concerne les captures des espèces destinées en majorité à l'exportation, l'augmentation de leur production est limitée, dans le cas des crevettes par leur potentiel disponible et, pour les crabes, par une forte concurrence au niveau de la commercialisation sur le marché international. Pour les langoustes du plateau continental, les captures pourraient augmenter, mais en dehors de la zone Sud-Est intensivement exploitée actuellement. Sur la base du taux de croissance des captures des espèces exportées pendant les cinq dernières années, les estimations de production pour 1996 sont de 15.300 tonnes, dont 11.300 tonnes de crustacés (crevettes, crabes, langoustes) et à peu près 4.000 tonnes d'algues, de trépangs, de chevaquines, de coquillages et de différentes espèces de poissons autres que le thon.

En ce qui concerne les thonidés océaniques, il est possible, bien que difficile, de développer une activité nationale. Les études de faisabilité et les pêches expérimentales menées jusqu'à présent permettent d'estimer la production thonière sous pavillon malgache à près de 5.000 tonnes en 1996 et cela sans effecter les captures des flottilles étrangères qui exploitent actuellement cette ressource.

Pour la crevetticulture, les résultats du projet pilote à Nosy-Be sont tellement encourageants que déjà en 1990, quatre opérateurs ont présenté des demandes d'installations de fermes aquacoles de crevettes. Les prévisions pour 1996 se situent entre 3.000 et 4.000 tonnes.

D'autres possibilités d'aquaculture destinée à l'exportation ont été identifiées, à savoir la culture d'algues, l'élevage de crustacés d'eaux douces et de certains poissons. Mais étant donné que leur faisabilité et leur rentabilité restent encore à démontrer, il n'est pas indiqué d'estimer leur production pour le moyen terme, mais de les prévoir à plus long terme.

3.2.1.3. Pêche étrangère

Compte tenu de l'existence de la conserverie de thon intallée à Antsiranana, avec une capacité de traitement de 40.000 à 50.000 tonnes par an, il est probable que la production des thoniers étrangers dans la ZEE malgache augmente jusqu'à 15.000 tonnes par an. Cet objectif pourrait être atteint si des mesures incitatives sont prises au niveau des services d'avitaillement et d'entretien des bateaux pour attirer la flottille étrangère à venir plus souvent à Madagascar, donc à passer et à mieux prospecter les thons dans les eaux malgaches.

3.2.1.4. Création d'emplois

La majorité des nouveaux emplois proviendra du sous secteur traditionnel maritime, environ 12.000 emplois directs supplémentaires d'ici 1996. Ce chiffre a été déduit, d'une part, de la production qui doit augmenter de 15.000 tonnes et, d'autre part, de la productivité moyenne annuelle de 1.25 tonne par pêcheur. Cette productivité moyenne reste la même que celle réalisée par les pêcheurs en 1989–1990. En effet :

En ce qui concerne la pêche artisanale dont le développement sera relativement lent, le nombre des emplois qui seront créés jusqu'en 1996 est estimé à 150. Pour la pêche industrielle, on peut prévoir environ 350 nouveaux postes à bord des bateaux. Ces deux pêcheries créeront également 70–80 postes pour les cadres techniques ou agents de maîtrise.

L'aquaculture, dont essentiellement l'élevage de crevettes, pourrait créer pendant les cinq prochaines années 700 à 800 emplois dont 125 cadres et agents de maîtrise. Pour la production artisanale d'alevins, les nouveaux emplois seront plutôt limités car, dans la majorité des cas, elle ne constitue qu'une activité complémentaire pour les agriculteurs.

En résumé, on peut prévoir plus de 13.000 nouveaux postes pour lés pêcheurs et éleveurs d'ici 1996. Par ailleurs, d'autres activités (transformation, stockage, commercialisation, construction des embarcations et engins de pêche), liées à la pêche et à l'aquaculture, permettront la création d'environ 1.250 emplois (10% de l'effectif des pêcheurs).

3.2.1.5. Récapitulation

Les objectifs de production tant nationale qu'étrangère pour 1996 sont résumés dans le tableau 2.

Ces objectifs seront atteints à condition que (i) toutes les activités prévues pour le secteur soient réalisées, (ii) la situation du pays soit stabilisée et que le processus de libéralisation de l'économie nationale soit poursuivi au rythme prévu.

Les données du tableau 2 montrent que la production totale devrait passer de 103.700 tonnes environ en 1990 à 144.000 tonnes en 1996, soit une augmentation de 38,5%. Celle destinée au marché local augmentera de 28%, ce qui permettra d'accroître la consommation moyenne de poissons par habitant de 7,4 kg en 1990 à 8,0 kg en 1996. La production nationale pour l'exportation devrait doubler et sa valeur, calculée sur la base des prix de 1990, s'accroître de 100% pour atteindre 130 milliards de FMG (87 millions US$). Pendant la même période, la pêche étrangère effectuée dans la zone économique exclusive malgache devrait augmenter de 50%, jusqu'à 15.000 tonnes en 1996.

Tableau 2 : Production en 1990 et projection pour 1996

SpécificationProduction nationalePêche étrangèreTOTAL
Destinée à la consommation intérieureDestinée à l'exportation
Production en 1990 (tonnes)82.00011.50010.000103.700
Objectifs de production en 1996 (tonnes)105.00024.00015.000144.000
Accroissement (tonnes)23.00012.5005.00040.300
Taux de croissance annuelle (%)4,618,18,36,7

En conclusion, le développement du secteur pour la période 1992–1996 sera caractérisé par (i) la contribution dominante de la pêche maritime dans l'augmentation de la production, (ii) le maintien de la prépondérance de la pêche nationale sur la pêche étrangère, (iii) une croissance plus rapide de la production nationale destinée à l'exportation par rapport à la production orientée vers le marché intérieur, grâce essentiellement au développement de nouveaux produits (thons et crevettes d'élevage).

L'accroissement du taux d'emplois dans le secteur des pêches devrait se situer à environ 18% d'ici 1996.

3.2.2. Objectifs quantifiés à long terme (10 ans)

Il existe trop de variables inconnues (par exemple : statistiques, politiques, prix, marché national et international) pour faire des projections précises pour le long terme. La quantification des objectifs à long terme doit être interpretée avec beaucoup de prudence et les chiffres présentés doivent être considérés comme de simples indications et non comme des buts précis.

Pour ce qui est de la production orientée vers la consommation locale, l'augmentation de 100g par habitant et par an est à maintenir pour la période 1997–2001. A la fin de cette période, on devrait avoir en conséquence comme consommation annuelle 8,5 kg par habitant.

En 2001, la population malgache sera de 15,3 millions d'habitants1. Par conséquent, les besoins locaux en produits halieutiques en 2001 sont estimés à quelques 130.000 tonnes. Si l'on compte ces besoins à la consommation locale prévue pour 1996 (105.000 tonnes), on constate que la production devrait augmenter de 25.000 tonnes en 5 ans, soit une moyenne de 5.000 tonnes par an. La pêche maritime restera toujours la branche qui pourra couvrir une partie appréciable de l'augmentation de la demande locale, notamment la pêche traditionnelle qui devrait accroître sa production de 10.000 tonnes au minimum. Pour obtenir les 15.000 tonnes supplémentaires il faut envisager, non seulement, la participation plus importante de la pêche artisanale et industrielle dans le ravitaillement du marché local, mais aussi le développement rapide de la pisciculture.

La production nationale destinée à l'exportation augmentera, d'après les prévisions actuelles, de 10.000 à 15.000 tonnes, ce qui donnera en 2001 une production totale pour l'exportation de 35.000 à 40.000 tonnes environ. Cette augmentation se fera essentiellement grâce au développement de l'aquaculture des crevettes en mer et de la pêche au thon, mais aussi par la croissance de la production d'autres produits, par exemple la culture d'algues.

Enfin, pour la pêche étrangère, on prévoit la même augmentation de la production que celle prévue pour la période 1992–1996, c'est à dire 5.000 tonnes. Les espèces cibles resteront principalement les thons et les crustacés d'eau profonde.

En définitive, on peut estimer la production totale dans les eaux malgaches pour l'horizon 2001 à quelques 185.000–190.000 tonnes. La croissance de la production pour chacune des deux périodes quinquennales oscillera autour de 40.000 tonnes. Ainsi, le taux de croissance annuel pour les années 1997–2001 sera plus lent (5,7%) que celui de la période précédente (6,7%). Cette baisse du taux de croissance annuelle est liée à la croissance plus lente de la production, aussi bien pour le marché local que pour l'exportation.

4. Stratégie

Les stratégies se réfèrent toujours à la façon de réaliser les divers objectifs. On peut atteindre un seul objectif par plus d'une stratégie. Il est aussi vrai qu'une seule stratégie peut s'appliquer à plus d'un objectif. Après avoir analysé ces objectifs, certaines stratégies s'avèrent prioritaires alors que d'autres peuvent être considérées comme secondaires.

1 Rabetsitonta, Perspectives démographiques - Madagascar 1984–2024, 1989, Document et Etude No15, BIT/FNUAP, Projet MAG/87/P02

L'approche utilisée consiste, premièrement, à identifier les stratégies possibles pour atteindre chaque objectif et, ensuite, à choisir les stratégies principales pour le plan directeur. Les stratégies retenues comme principales sont :

4.1. Stratégies pour la réalisation de chaque objectif

4.1.1. Augmentation de la consommation locale en poisson

Pour augmenter les disponibilités en poissons sur le marché local, deux options sont envisageables : recourir à l'importation ou accroître la production. Compte tenu du potentiel exploitable, du dynamisme du secteur, de la carence en devises, la première option ne peut être retenue.

Il faudrait en conséquence dégager un surplus de production en augmentant les captures, en améliorant la collecte des mises à terre de la pêche traditionnelle ainsi que des captures accessoires rejetées par la pêche industrielle et enfin, en diminuant les pertes après capture par l'ouverture d'un débouché régulier, l'organisation de la commercialisation et un meilleur traitement des produits.

La production de la pêche continentale risque de diminuer encore si des mesures d'aménagement appropriées ne sont pas prises rapidement. Par ailleurs, le développement de la pêche artisanale uniquement orientée vers le ravitaillement du marché intérieur demeurera très lent et difficile à promouvoir à court terme. Il est probable que cette pêcherie puisse jouer un rôle plus important à long terme dans les zones où les stocks proches des grands centres de consommation seront surexploités. La pêche industrielle, elle, vise surtout et continuera à axer ses activités à court et moyen terme sur les produits lucratifs à l'exportation à cause du coût d'investissement trop élevé et le prix assez bas des poissons sur le marché local. Dès lors, c'est la pêche traditionnelle maritime qui, en priorité, contribuera, pour une très large part, à l'augmentation globale de la production halieutique destinée à la consommation locale. Toutefois, cette pêcherie ne peut se développer sans l'assurance d'un débouché sûr pour sa production, sans une amélioration de l'organisation de la collecte et de la distribution des captures.

Malgré son dynamisme, la production de la pêche traditionnelle restera insuffisante pour couvrir les besoins de la population en produits halieutiques. Il faudra donc essayer de récupérer au maximum les poissons d'accompagnement du chalutage crevettier ainsi que les poissons de rebut de l'exploitation thonière et mieux en organiser la commercialisation. La réalisation des objectifs à long terme nécessite également le développement plus significatif de la pêche artisanale.

L'aquaculture, quant à elle, ne pourra que très modestement, pour sa branche continentale, contribuer, à court et moyen terme, à l'apport de poisson sur le marché intérieur. Néanmoins, sa participation au ravitaillement en poisson sur le marché local devrait être plus importante à long terme. L'élevage de poissons en milieu marin ne peut être considéré que secondairement et comme une solution à très long terme, compte tenu de l'existence de plusieurs ressources encore peu ou pas exploitées.

Ainsi, pour augmenter les disponibilités en poisson pour le marché local deux stratégies sont à adopter : comme stratégie prioritaire, l'augmentation de la capture et de la collecte de la production de la pêche traditionnelle maritime. Comme stratégie secondaire, on retiendra la réduction des pertes tant au niveau de la production (dont les poissons d'accompagnement) qu'au niveau de la commercialisation.

4.1.2. Augmentation des recettes en devises

Les recettes en devises du secteur proviennent, pour une très large part, de l'exportation d'une partie de la production halieutique nationale et, pour une autre part, des redevances des accords de pêche passés avec des partenaires étrangers.

L'augmentation de l'exportation de la production nationale pourrait apparaître contradictoire avec la stratégie principale à retenir pour l'accroissement des disponibilités en produits sur le marché intérieur. Pour réaliser simultanément les deux principaux objectifs fixés, on est obligé de choisir principalement les poissons pour la satisfaction des besoins locaux, dont l'exploitation peut fournir une quantité suffisamment importante et dont l'exportation est moins rentable à cause de la concurrence internationale. Les produits prisés sur le marché extérieur, les crustacés et les thonidés principalement, sont à destiner en majorité à l'exportation à cause de leur prix trop élevé pour le pouvoir d'achat de la population locale.

Pour accroître les recettes en devises par l'exportation de la production nationale, on peut agir aussi bien sur la quantité que sur le prix. Pour les produits traditionnellement exportés, les possibilités d'augmentation de la quantité restent relativement limitées. En effet, la pêche industrielle crevettière, principale source de devises dans le domaine halieutique, semble avoir déjà atteint la production proche de celle quantifiée comme maximale équilibrée. Par ailleurs, l'exploitation des crabes de palétuviers, très fortement concurrencée sur le marché extérieur et pourtant disponibles en quantité importante, est très difficile à rentabiliser si on les destine à l'exportation. Les autres espèces destinées à l'exportation sont les langoustes côtières dont l'exploitation par la pêche traditionnelle est à étendre à d'autres zones, ainsi que d'autres produits de valeur relativement plus faible (algues, requins) ou en quantité disponible moindre (céphalopodes, trépangs, bichiques, coquillages, etc.).

Pour aboutir à un accroissement notable de la quantité exportée, il faut s'orienter vers de nouveaux produits, principalement les thonidés et les crustacés d'eaux profondes, ou de nouvelles activités, notamment l'élevage de crevettes péneides côtières ou d'autres produits lucratifs à l'exportation (crevettes d'eau douce, mollusques, etc.).

Compte tenu des potentialités offertes par l'aquaculture de crevettes côtières, c'est la promotion de cette activité qui doit être la principale stratégie à mettre en oeuvre pour augmenter significativement le volume et la valeur des produits destinés au marché extérieur.

L'augmentation du volume exporté ne peut pas forcément se traduire par une augmentation des recettes en devises si on n'arrive pas à maintenir les prix de vente à l'extérieur. D'un autre côté, l'amélioration de la qualité des produits, leur traitement plus large sur place ainsi qu'une meilleure connaissance des marchés extérieurs influent positivement sur la valeur des produits à l'exportation.

Quant à la pêche étrangère, la vente de licences permet une rentrée de devises nette et attire des partenaires potentiels pour la constitution de sociétés mixtes. Par ailleurs, les recettes en devises ainsi que les autres impacts économiques résultant de la fourniture de différents services aux bateaux étrangers travaillant dans la zone, sont très intéressants (avitaillement, chantier naval, infrastructures portuaires, transport aérien, etc.). En conséquence, il faut essayer de dégager le maximum de profits que l'on peut tirer des différents accords de pêche passés avec les partenaires étrangers, essentiellement sur le thon.

Pour atteindre donc l'objectif d'une contribution plus importante de la pêche et de l'aquaculture à l'apport de devises pour l'économie nationale, il faut adopter comme stratégie prioritaire, la diversification des produits marins d'exportation dont notamment la promotion de l'aquaculture des crevettes côtières, et comme stratégie complémentaire la maximisation des apports de la pêche étrangère (essentiellement la pêche thonière).

L'application de ces stratégies nécessite au préalable une bonne connaissance des ressources et la mise en place d'un plan d'aménagement bien conçu pour l'exploitation des ressources soumises à un effort de pêche intensif dû à l'attrait des bénéfices offerts par l'exportation. Pour ce faire, le rôle de l'administration chargée de la gestion du secteur doit être renforcé et amélioré.

4.1.3. Amélioration du niveau de vie des pêcheurs

Le groupe de personnes cibles pour cet objectif est l'ensemble des pêcheurs traditionnels. En effet, ce groupe constitue plus de 97% de l'effectif global des pêcheurs professionnels malgaches et réalise plus de 81% de la production halieutique totale tout en vivant souvent dans des conditions précaires.

Il est à noter que la pisciculture constitue déjà une amélioration de l'alimentation et du revenu du paysan rizipisciculteur qui, de ce fait, n'est pas particulièrement visé par cet objectif.

L'amélioration du niveau de vie des pêcheurs doit se traduire non seulement par l'augmentation de leur revenu mais aussi par la création d'un environnement social décent dans leur village. L'augmentation du revenu peut être obtenue par l'accroissement des captures réalisées par chaque pêcheur ou par une amélioration des prix de vente de celles-ci.

Les mesures prises jusqu'ici dans ce domaine sont restées dérisoires et n'ont pas, dans bien des cas, suffisament impliqué les intéressés eux-mêmes dans les actions menées. C'est pourquoi les impacts ont été passagers. L'approche préconisée est le développement communautaire intégré qui doit chercher, d'une part, à faire participer au maximum les pêcheurs à la conception et à l'exécution des actions visant à améliorer leurs conditions de vie, et, d'autre part, à mieux articuler les différentes interventions et à mieux utiliser les infrastructures, les équipements, les assistances techniques et financières apportées par l'Etat et par les différents donateurs.

La stratégie prioritaire à retenir pour l'amélioration du niveau de vie des pêcheurs traditionnels est le développement de la production traditionnelle maritime. L'assistance à l'auto-développement des communautés villageoises des pêcheurs constitue la stratégie secondaire qui complète la première

4.1.4. Augmentation du nombre d'emplois

a) Secteur primaire

Le nombre d'emplois directs pouvant être créés dans le domaine de la pêche dépend des possibilités de son développement. Pour cette pêcherie qui a déjà atteint la production maximale équilibrée, vouloir encore introduire de nouveaux pêcheurs conduit inévitablement à la surexploitation, ce qui se traduit, dans un premier temps, par une baisse de la production, et dans un deuxième temps, par la destruction des ressources, donc de la source d'emplois.

Les stratégies visant à accroître la production permettent aussi d'obtenir le maximum d'emplois, à condition toutefois que l'exploitation reste rentable en deçà de l'effort à déployer pour l'obtention de cette production et qu'il n'y ait pas de changements notables au niveau des techniques de pêche à utiliser (mécanisation, introduction d'engins plus performants). Ce constat est valable pour la pêche traditionnelle maritime qui peut encore accroître sa production. Il ne s'applique pas à la pêche continentale qui est déjà à la limite de la surexploitation. La pêche artisanale sl elle se développe, pourra constituer à long terme une source d'emplois non négligeable. La pêche industrielle nationale ne peut pas fournir davantage d'emplois. Il lui faut diversifier ses activités en ciblant de nouveaux produits (ex : le thon), mais même dans ce cas le nombre d'emplois directs qu'elle peut créer restera assez modeste. La pisciculture apporte un complément de revenu aux paysans concernés mais ne crée pas, de manière substantielle, de nouveaux emplois. La crevetticulture, activité nouvelle, génèrera plus emplois que la pêche artisanale et industrielle.

b) Secteur secondaire

Au niveau des emplois indirects, on attend une augmentation significative du nombre des emplois découlant du développement de la pêche et de l'aquaculture. Ainsi, l'augmentation de la production de la pêche traditionnelle maritime génèrera de nouveaux emplois au niveau de la collecte, du transport et de la commercialisation des produits. De même, le développement de la pêche industrielle et de l'aquaculture aura un effet d'entraînement important sur la multiplication des industries connexes aussi bien en amont (chantier naval, usine d'aliment, fabrique de matériel de pêche, structures d'avitaillement, etc.) qu'en aval (structures de gestion des infrastructures portuaires de débarquement, de transbordement, de stockage, de conserverie et de réparation navale, etc.).

Dès lors, la stratégie prioritaire pour la création d'emplois est celle du développement en général de la pêche maritime traditionnelle. Il est patent, que pour éviter la réduction d'emplois dans le domaine de la pêche, il s'avère primordial de définir et d'appliquer des plans d'aménagement appropriés pour les ressources soumises à une exploitation intensive, principalement celles destinées au marché extérieur et celles des grands plans d'eau continentaux. La stratégie secondaire concerne :

4.2. Stratégies principales pour l'ensemble du plan directeur

Les grands axes stratégiques pour la mise en oeuvre du plan directeur sont les suivants :

  1. - l'accroissement de la production essentiellement de la pêche maritime, destinée au marché local. En effet, cela permet principalement d'augmenter les disponibilités en poisson pour la consommation locale, d'améliorer le niveau de vie des pêcheurs et de créer de nouveaux emplois ;

  2. - la diversification et le développement des produits marins d'exportation. Cet axe stratégique permet d'augmenter significativement les apports en devises du secteur de la pêche et de l'aquaculture pour l'économie nationale ; mais la mise en oeuvre de cet axe aura aussi des impacts appréciables sur la création d'emplois et l'amélioration du niveau de vie des pêcheurs et des aquaculteurs ;

  3. - l'amélioration et le renforcement de la gestion du secteur ; cet axe permet de rendre plus efficace la gestion du secteur par des mesures visant à rendre plus efficiente l'intervention de l'administration, à formuler et à mettre en oeuvre des plans d'aménagement pour les différentes pêcheries, à assurer la conservation des stocks et à dynamiser les activités des institutions concernées par la pêche et l'aquaculture.

Ainsi, les programmes prioritaires de développement à retenir à moyen et long terme pour la réalisation des trois grands axes stratégiques sont les suivants :

(i) - Accroissement de la production destinée au marché local

  1. Promotion de la pêche traditionnelle maritime, amélioration des moyens de travail et du niveau de vie des pêcheurs ;

  2. Participation plus importante de la pêche artisanale et industrielle (essentiellement par les poissons d'accompagnement) dans le ravitaillement du marché intérieur ;

  3. Développement de la pisciculture ;

  4. Promotion de la commercialisation locale et mise en place des infrastructures nécessaires.

(ii) - Diversification et développement des produits marins d'exportation

  1. Augmentation des captures de crustacés et autres produits marins ;

  2. Meilleure intégration de l'exploitation thonière dans l'économie nationale ;

  3. Promotion de l'aquaculture de crevettes marines.

(iii) - Renforcement et amélioration de la gestion du secteur

  1. Aménagement des pêcheries et conservation des stocks ;

  2. Amélioration de l'intervention de l'administration ;

  3. Support aux institutions concernées par le développement des pêches.

Les programmes sont soutenus par plusieurs actions qui peuvent se présenter sous forme de projets de démonstration, de conseils directs aux opérateurs, de plans d'aménagement des pêcheries prioritaires, de recherches et de formation, d'études avec la présentation de nouveaux règlements économiques, juridiques et fiscaux, de réorganisation et d'amélioration du fonctionnement de l'administration.


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