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V. CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS

Actuellement, les effectifs, le champ de compétences, les budgets et les moyens logistiques de la recherche halieutique malgache ne permettent pas d'entreprendre l'ensemble des recherches prioritaires. Néanmoins, un potentiel humain, des équipements et des infrastructures existent. De bonnes compétences dans les méthodes de base sont disponibles, principalement dans le domaine des sciences naturelles. Une expérience professionnelle sur les pêcheries et les aquacultures nationales a été accumulée. C'est sur ce potentiel qu'il faut construire. Les restrictions actuellement imposées au secteur public rendent encore plus prioritaire la valorisation des ressources humaines. Une meilleure efficacité est possible, à un coût modéré, par une meilleure organisation. Les différences entre instituts en attestent. Sans une meilleure organisation, les moyens supplémentaires qui seraient investis n'auraient qu'un impact modéré.

La réorganisation de la recherche halieutique nationale apparaît comme un préalable à la réalisation du Plan Directeur de la Recherche. Avec une organisation fonctionnelle, la recherche nationale sera en mesure de programmer par elle-même une partie croissante de ses activités. La réorganisation devrait porter en priorité sur :

Le renforcement des centres de recherche doit viser trois objectifs :

Le FOFIFA est actuellement engagé dans une réforme de ce genre. Il existe donc à Madagascar une prise de conscience et des compétences potentiellement utilisables pour la réorganisation des centres plus petits et de création plus récente. Cela devrait faciliter sa diffusion.

Les investigations en appui à l'encadrement public du secteur (conservation des environnements aquatiques, aménagement des stocks et des usages halieutiques, promotion des sociétés de producteurs traditionnels, contribution à l'élaboration de politiques d'intervention) sont prioritaires pour les centres de recherche nationaux. Ces recherches ne peuvent en effect, ni être conduites par les opérateurs économiques, ni être importées. Par contre, la panoplie de technologies susceptibles de contribuer à la croissance économique des systèmes halieutiques nationaux est disponible et accessible. Les entreprises industrielles malgaches ont démontré leur intérêt et leur capacité opérationnelle et financière à importer, adapter aux conditions locales, et intégrer dans leurs propres systèmes de production des innovations techniques d'origine exogène. Pour autant, même s'ils en reconnaissent la nécessité pour l'avenir de leurs propres entreprises, les opérateurs industriels ne peuvent s'intéresser aux recherches sur les processus et les systèmes de régulation des activitiés économiques que leurs échelles mettent hors de leur portée.

Les sociétés marchandes et industrielles, d'une part, et les sociétés paysannes, d'autre part, n'ont vis-à-vis du développement économique, ni les mêmes attitudes, ni les mêmes aptitudes. Les institutions des sociétés marchandes ont évolué dans un sens qui privilégie la maximisation des plus-values. Pour les entreprises commerciales, la recherche du profit est la finalité du développement. Mais si, pour elles, l'innovation technique est un moyen de créer des richesses, elle n'en est pas le moteur. De son côté, l'organisation économique et sociale des sociétés rurales n'accorde pas à la recherche du profit et, par voie de conséquence, au progrès technique, la même signification. Dans ces conditions, appliquer aux sociétés paysannes des politiques de développement économique directement transposées du monde commercial et industriel revient à admettre que l'organisation nécessaire à l'assimilation techniques est déjà en place, ou que l'introduction de techniques allogènes suffirait à provoquer le changement d'organisation qui conditionne leur assimilation. Les échecs répétés des politiques passées de promotion des petites productions animales et végétales vérifient que le développement économique et social des sociétés paysannes ne peut se concevoir dans le cadre étroit de l'élaboration externe et de la transposition de procédés techniques allogènes, pas plus que de l'aide à l'investissement. Pour que les politiques d'intervention comme de recherche d'appui aient un minimum d'impact positif, la compréhension de la structure et de la dynamique des sociétés rurales - et notamment de leur évolution au contact des sociétés urbaines - est un préalable.

Dans ces conditions, le progrès dans le développement des communautés rurales, comme dans l'aménagement des usages et la conservation des ressources et de l'environnement aquatiques, dépend d'abord de l'adjustement des institutions aux nouvelles conditions. Les problèmes les plus critiques à la fois par leur urgence et leur complexité concernent la transformation, et non simplement l'optimisation ou plus prosaïquement l'amélioration, des systèmes productifs. Parce qu'elle permet d'aborder l'étude de leur dynamique par le démontage de leur structure, l'analyse de ces systèmes apparaît comme la meilleure voie pour améliorer la pertinence et la cohérence des programmes de recherche et, indirectement, l'efficacité des politiques d'intervention. Cette tâche incombe aux instituts de recherche pour la partie analytique, aux administrations techniques pour la partie opérationnelle.

Il ressort de ces considérations que la recherche halieutique malgache doit étendre rapidement l'éventail de ses compétences et de ses programmes à l'économie et à la sociologie halieutiques. Actuellement, la recherche halieutique malgache ne dispose pas de compétences dans ce domaine. C'est pourquoi la création, au sein du CNRO, d'un Département d'économie et de sociologie halieutique est une priorité immédiate. Si, à cause des restrictions budgétaires actuelles, ce besoin ne pouvait être satisfait rapidement, le transfert d'économistes et de sociologues ruraux en activité dans d'autres établissements de recherche ou d'enseignement doit être envisagé très sérieusement. L'efficacité de la recherche halieutique malgache et la réussite d'un Plan Directeur en dépendent.

Le besoin en moyens nouveaux ne se limite pas à ces compétences. Globalement, les moyens disponibles ne sont pas à la hauteur de l'appui que la recherche peut apporter au développement économique et social du secteur. Mais l'évaluation et la planification de ces besoins ne pourront être effectuées qu'une fois les programmes nationaux rédigés.

Ces remarques ne minorent pas le rôle de la technologie dans le progrès économique, pas plus que la stratégie proposée n'implique que les centres de recherche malgaches se désintéressent de la recherche technique. Mais, pour que des programmes nouveaux ou un renforcement des programmes existants aient une efficacité et un impact, les centres doivent s'assurer au préalable :

Les programmes de R & D qui seront retenus à partir de ces examens devront être lancés avec la participation active (financement pour le secteur industriel, prestations de services pour le secteur traditionnel) de leurs destinataires industriels ou traditionnels.

Le rapport préconise la mise en place d'un ensemble de structures destinées à réduire les carences de la dispersion institutionnelle actuelle, à intégrer les efforts et l'usage des moyens des centres, à dynamiser la concertation entre la recherche halieutique et ses utilisateurs publics et privés, et à améliorer la planification des financements (fig.1). Ce réseau de structures et de procédures peut être mis en place immédiatement. Il n'implique pas de moyens supplémentaires. Les nouvelles relations ainsi créées dans le domaine de la recherche halieutique et aquacole donneront aux protagonistes l'occasion de réaliser directement l'intérêt et les modalités d'un rapprochement formel entre instituts de recherche travaillant sur les productions animales et végétales et la conservation de l'environnement et des ressources renouvelables. Ce rapprochement devrait constituer l'objectif final du renforcement de la recherche malgache dans ce domaine.

Figure 1. : Articulation schématique des structures nationales de programmation de la recherche halieutique

Figure 1

Les recommandations présentées dans ce rapport sont rappelées dans le tableau III. Leur liste est ventilée entre mesures acquises, immédiates, et différables ou optionnelles. L'essentiel des mesures nouvelles peut être financé par les recettes procurées par l'aménagement des pêcheries et des aquacultures industrielles. Le prélèvement de toute ou partie de la rente foncière peut assurer une régulation effective des systèmes industriels de production, tout en fournissant à la puissance publique les recettes dont elle a besoin pour couvrir les dépenses inhérentes à ses responsabilités.

L'aide étrangère devrait être mobilisée en priorité pour le renforcement des capacités de recherche, à savoir :

L'adoption des mesures préconisées devrait fournir à la coopération internationale les gages nécessaires pour une utilisation de son appui. La mobilisation des appuis extérieurs indispensables devrait s'en trouver renforcée.

Tableau III - Rappel des recommandations présentées dans le rapport.

DomainesMesures acquisesDécisions immédiatesMesures différables ou optionnelles
Organisation interne des centres (CNRO, CNRE) - autonomie de gestion financière et scientifique;
- dispositions similaires en cours d'application au FOFIFA ;
- structuration verticale de la recherche (thématique, recherche - action, transfert) et horizontale (recherche thématique) ;  
Gestion des ressources humaines - dispositions similaires en cours d'application au FOFIFA ;- Comité scientifique ;
- plans pluriannuels de recrutement ;
- plans pluriannuels de formation continue ;
- procédures d'évaluation des personnels scientifiques ;
- procédures d'avancement ;
- prime de recherche, formation continue, participation aux activités scientifiques internationales modulées sur les performances individuelles ;
 
Programmation des recherches - dispositions similaires en cours d'application au FOFIFA ;- programmation scientifique basée sur l'analyse des systèmes halieu - tiques et aquacoles ;
- programmes pluriannuels nationaux ;
- programmes pluriannuels et annuels des centres précisant les activités et les moyens ; 
- rapports annuels ;
- évaluation des programmes de recherche scien-tifique et de recherche-action ;
 
Effectifs - évaluation des besoins à partir des programmes nationaux ;
- création d'un départment d'économie et sociologie halieutiques au CNRO par recrutement ou transfert ; 
- création d'un département de zootechnie et de technologie aquacole au CNRO, ou département commun avec le FOFIFA ; 
Infrastructures - plan de développement et d'utilisation en commun des stations secondaires (FOFIFA, CNRE, CNRO, IHSM, ESSA) ;   
Coopération inter-centres Collège des directeurs (FOFIFA, CNRE, CNRO, ESSA, IHSM) ;- Programmes de recherche nationaux ; 
- groupes de travail nationaux pour la préparation et le pilotage de programmes de recherche nationaux ; 
- rapprochement institutionnel du FOFIFA, du CNRE et du C N R O , la préparation et la réalisation de programmes nationaux constituant à cet égard une étape; 
C o o p é r a t i o n recherche-utilisateurs - Collège des directeurs ;
- Comité de financementde la recherche agricole(FOFIFA) ;
- Comité de la recherche (DRH et administrations techniques , représentants des associations d'opérateurs économiques, Collège de directeurs) ; 
- programmes de recherche nationaux ; 
- mécanismes de concertation recherche-opérateurs privés par opération de recherche-action ; 
- Comité national de financement de la recherche halieutique ; 
- structures décentralisées de concertation (provinces, domaines technologiques, groupes cibles ou systèmes de production ; 
Harmonisation des aides extérieures - Comité de financement de la recherche agricole (FOFIFA) ;- programmes nationaux de recherche ;
- programmes pluriannuels et annuels des centres ;
- priorité au renforcement des capacités nationales (organisation scientifique des centres, programmation scientifique, gestion des ressources humaines, forma-tion) ;
- Comité national de financement de la recherche halieutique ; 
Coopération régionale - groups de travail d'initiative national sur des problèmes de recherche d'intérêt commun ; - rapprochement des organismes régionaux de recherche halieutique, aquacole et environnementale (milieux aquatiques).

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