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PARTIE I REVUE SECTORIELLE (Contd.)

3. DEMANDE INTERIEURE ET EXPORTATION DE POISSON

3.1 Consommation et demande intérieure

3.1.1 Consommation nationale et régionale

La consommation annuelle par personne varie entre 11 kg et 19 kg, la FAO estimant celle-ci à 16,2 kg/an par habitant, mais cette moyenne varie considérablement d'une région à l'autre. Soixante-dix pour-cent du poisson congelé débarqué à Douala, est vendu à l'intérieur du pays et sur le littoral, compte tenu du bon état du réseau routier et la présence d'une chaîne de froid adéquate. Dans les provinces du nord, la consommation en poisson est plus localisée en fonction de la présence ou non de centres de production tels que Lagdo au nord, Maga Extrême nord, Mbakaoua Adamaoua, Mapé Ouest.

3.1.2 Demande potentielle

Au Cameroun, le poisson constitue actuellement la source de protéines animales la plus importante, avec environ 44 % des apports totaux.

Avec un taux de croissance démographique annuel de 2,2 %, la population du Cameroun pourrait atteindre environ 15 millions d'habitants en l'an 2000. En se basant sur une consommation hypothétique de 16,2 kg/habitant/an en l'an 2000, correspondant à la consommation actuelle selon la FAO, la demande intérieure totale s'élèvera à 243 000 t de poisson. Pour satisfaire cette demande, la disponibilité en poisson devra augmenter de 3 500 à 12 300 t/an.

En tenant compte de l'état des ressources exploitables soit marines soit continentales, il n'y a aucune ressource sous-exploitée dans le pays qui pourrait supporter cette augmentation croissante de production. Ainsi, pour parvenir à satisfaire cette demande potentielle, le pays devra opter pour un ensemble de mesures comprenant une augmentation continuelle des importations, un aménagement du système actuel de commercialisation, qui prive le pays d'environ 50 000 t de poisson par an exportées vers les pays limitrophes, un effort en matière d'aménagement des ressources pour maintenir le niveau d'exploitation actuel, un programme rigoureux pour réduire les pertes après récolte, et enfin un programme strict et efficace de développement de l'aquaculture.

3.1.3 Les prix

L'importance stratégique du secteur des pêches en termes d'apport alimentaire pour les groupes de la population les moins favorisés a conduit le gouvernement à exercer depuis 1983 un contrôle sur les prix du poisson importé et du poisson débarqué par la flottille industrielle. En conséquence, ces produits sont actuellement environ deux fois moins chers que ceux débarqués par la pêche artisanale maritime.

Pour les produits frais de la pêche artisanale, le gouvernement pratique également une politique de fixation de prix (la mercuriale), visant à procurer un profit à chaque niveau de la chaîne de distribution, du producteur au consommateur, avec des variations dans les villes les plus importantes pour compenser le coût du transport. Toutefois, le secteur artisanal et les petits commerçants échappent largement à ce système de prix, en raison de l'impossibilité virtuelle du contrôle étatique à tous les niveaux.

Par exemple, le prix du bar frais (Sciaenidés) qui est contrôlé jusqu'au niveau des poissonneries agréées, est resté stable à Yaoundé, à 390 FCFA/kg de 1985 à 1989 et a augmenté seulement en 1990, pour atteindre 556 FCFA/kg quand la mercuriale a été ajustée. Au contraire, le poisson de transformation artisanale Bifaka (Ethmalose fumé; non contrôlé) a subi une fluctuation considérable dans son prix pendant les dix dernières années, passant de 100 FCFA/kg en 1980 à 160 FCFA/kg en 1985.

Il y a donc deux systèmes de prix en vigueur dans le pays: celui fixé par le gouvernement qui peut être contrôlé au niveau de la chaîne de distribution officielle jusqu'aux poissonneries agréées, et le système parallèle de prix opérant dans tout le secteur artisanal et au niveau des petits commerçants.

En général, le poisson congelé est le produit le moins cher même en absence de contrôle des prix. Sur les marchés intérieurs on le préfère au poisson frais d'eau douce, celui-ci étant souvent plus cher que la viande. Par exemple à Ebolowa (sud) la viande désossée se vend à 1 100 FCFA/kg alors que le prix du poisson frais local varie entre 450 et 1 300 FCFA/kg et celui du poisson fumé local entre 1 000 et 2 000 FCFA/kg (voir Annexes 3 et 4).

3.2 Importations et exportations

Les importations ont atteint 68 538 t en 1986/87 pour redescendre à 53 481 t en 1989/90. La plus grande partie des importations concerne le maquereau chinchard (environ 68 % de la totalité des importations). Les principaux fournisseurs sont le Sénégal et la Mauritanie avec environ 70 % des importations de produits halieutiques. Parmi ces importations, une quantité importante est débarquée par des bateaux étrangers pêchant au large des côtes camerounaises. Le tableau en annexe No 6 décrit les importations par produits ainsi que leurs provenances pour l'année 1988/89.

Les exportations de produits halieutiques s'effectuent à travers plusieurs circuits dont un seul est officiel; il s'agit de celui de la crevette congelée.

Les deux sociétés exportatrices prédominantes (COPEMAR et CAMCRUS) ont exporté au total pendant l'exercice 1987/1988, 853 t de crevettes congelées représentant une valeur commerciale d'environ 6,6 millions de dollars. Les pays de la CEE absorbent plus de 90 % des exportations camerounaises qui représentent une source de devises non négligeable.

Les exportations informelles, bien que ne procurant pas de devises à l'Etat, représentent en quantité et en valeur une ressource importante, pouvant être estimée à 50 000 t/an, soit environ 40 millions de dollars. Cependant, ces protéines animales sont absentes sur les marchés locaux et doivent être compensées par des importations massives de poisson congelé.

3.3 Transformation du poisson

3.3.1 Méthodes traditionnelles

En raison de l'insuffisance des moyens de commercialisation et du manque d'infrastructures de commerce du poisson frais, le traitement du poisson pour la préservation, qui concerne aussi les poissons congelés importés, est répandu dans tout le pays. La mission estime que le traitement artisanal concerne entre 75 et 80 % du poisson consommé.

Compte tenu des quantités importantes produites, la transformation du poisson donne lieu à une industrie importante au niveau artisanal et fournit du travail à un nombre élevé de personnes.

Le fumage et le séchage sont les techniques les plus répandues. Sur le littoral et dans les zones forestières, le fumage est prédominant, tandis qu'au nord, à cause des conditions climatiques favorables, le séchage reste la principale méthode de traitement du poisson.

Les systèmes de transformation restent rudimentaires dans presque tout le pays. Le procédé le plus courant est le fumage de l'ethmalose pour produire du “Bonga”, qui consiste en réalité en une cuisson du poisson sur un feu de bois ouvert sous une claie à environ un mètre du sol. Le système entraîne une forte utilisation de bois qui favorise le déboisement, une forte dispersion de la fumée, d'où des conditions de travail difficiles, et empêche le contrôle de la chaleur. Le produit est souvent cuit plutôt que fumé. Les fours améliorés comme par exemple le four Chorkor sont rarement utilisés du fait de leur inadaptation aux conditions environnementales: habitudes alimentaires du consommateur vis à vis du Bonga, et insuffisance des quantités disponibles de poisson à fumer. Par contre, des possibilités d'amélioration des fumoirs de Bonga existent en vue de réduire la consommation de bois et d'améliorer les conditions de travail (fermeture du four, possibilités de construire des cloisons pour avoir des foyers séparés, etc.).

Dans certains campements des pêcheurs nigérians installés à l'embouchure de la Sanaga, il existe une industrie de fumage avec les bandas complètement enfermés dans les hangars. Ce système est une amélioration du système traditionnel. Cependant, les problèmes de forte consommation en bois, de manque de moyens de contrôle de la chaleur et de la distribution de la fumée demeurent.

Dans certains endroits de la zone centrale, surtout où l'accès aux grandes villes est facile, le poisson frais local est souvent congelé dans les congélateurs domestiques et ensuite évacué dans les centres. Ceci se fait depuis Mbakaou et aussi depuis Monatélé et Naga-Eboko sur la Sanaga. La congélation, quoique lente (2-3 jours), est faite dans des conditions satisfaisantes. Les poissons les plus frais sont choisis, nettoyés, lavés et mis verticalement dans le congélateur, qui n'est pas rempli à plus de 60–70 % de sa capacité. Néanmoins, avec de la glace et des conteneurs isothermes, on aurait un produit bien meilleur.

Le poisson frais, congelé, fumé, et séché, est emballé dans des sacs, du papier, du carton, des paniers ou des feuilles, selon le matériel d'emballage disponible, pour des durées de transport et de stockage variables n'excédant toutefois pas quelques jours. Compte tenu du caractére périssable des produits, et de la nécessité de réduire les délais de transport et de distribution, il serait souhaitable d'envisager le développement d'emballages adéquats, visant à faciliter la manutention, protéger le produit et réduire l'infestation par les insectes.

3.3.2 Pertes après capture

La durée du fumage dépend des espèces, mais en général, elle est de 2–3 jours. A cause du système très rudimentaire du traitement, la durée de conservation ne dépasse guère 3–5 jours en saison de pluies et 1–2 semaines en saison sèche. Au Ghana où les fours Chorkor sont bien enracinés, le système de fumage avec le premier traitement et le refumage subséquent, le poisson peut être conservé pendant plusieurs mois. Le fait que les commerçants essayent de vendre frais d'abord, surtout là où il y a un marché de poisson frais et de ne fumer qu'en fin de journée les poissons invendus, n'améliore pas la qualité et l'infestation par les insectes (asticots de mouche, dermestes) est immédiate.

En ce qui concerne le frais et le congelé, on déplore le manque d'hygiène dans la manutention, le transport et le stockage des produits. Les poissons importés congelés sont bien conditionnés jusqu' à l'arrivée chez le détaillant du marché, après cela, il sont soumis aux aléas des intempéries. Dans les petites entreprises, le poisson est bien traité (gardé au congélateur, avec le poisson frais local) mais on l'expose trop sur l'étal avec le résultat que les invendus (décongelés, au moins partiellement) sont recongelés (lentement) pendant la nuit et le lendemain, il sont ré-exposés en présentant une qualité douteuse. Dans de telles conditions, les pertes physiques après capture peuvent être évaluées à 15 %.

Par ailleurs, au nord où est l'on pratique le séchage, l'utilisation habituelle des insecticides, surtout le Dieldrine, pose de graves problèmes pour la santé des consommateurs.

Tant qu'il n'existera pas un contrôle de qualité rigoureux de la part des services sanitaires de l'Etat, on doute fort que les traiteurs, les distributeurs/vendeurs s'efforcent d'améliorer la qualité des produits, les clients n'y apportant pas de surcroît une attention particulière. Les produits manifestement avariés sont vendus mais à moindre prix.

Par ailleurs, il convient de noter les activités de la Station de Recherche de Limbé en matière de recherche sur les technologies après capture. Ce centre de recherches manque à l'heure actuelle de moyens de fonctionnement, ce qui est à regretter car il pourrait jouer un rôle de catalyseur au niveau national.

3.4 Commercialisation et distribution

La commercialisation du poisson au Cameroun repose entièrement sur l'initiative privée, soit au niveau industriel/importateur soit sur le secteur artisanal. L'administration n'intervient que pour garantir la qualité du produit aux consommateurs ainsi que le prix (mercuriales).

3.4.1 Circuit intérieur

Dans le Sub-Ouest du pays où se concentrent environ 70 % de la population, la distribution du poisson s'effectue de manière satisfaisante. Pour le poisson frais, la disponibilité de glace, de chambres froides et de moyens de transport privés assurent une bonne commercialisation. Dans cette région, malgré la disponibilité de chaînes du froid, une part importante des captures est également fumée. Ceci indique que la segmentation du marché s'effectue également en fonction des habitudes alimentaires.

Presque toutes les provinces sont approvisionnées en produits congelés même si on observe une présence moindre de ces produits sur les marchés du nord. Les deux Provinces du centre et du littoral absorbent environ 70 % du poisson congelé importé. La Province du centre absorbe par ailleurs une grande partie de la production des produits de la pêche industrielle (poisson frais) et de la pêche artisanale (frais et fumé).

Le tableau en annexe 5 décrit la répartition des produits congelées par province. Les archives des services d'inspection sanitaire vétérinaire de Douala indiquent qu'en 1987/88, sur 16 sociétés importatrices de produits halieutiques engagées dans ce commerce, deux d'entre elles ont assuré presque 90 % de la distribution. D'une manière générale, les circuits d'importation souffrent du manque d'antennes commerciales dans les pays fournisseurs ce qui ne permet pas aux importateurs de négocier les prix dans de bonnes conditions.

La distribution de poisson dans le secteur industriel est bien organisée. Le poisson est emballé correctement dans des cartons, et transporté par camion isotherme tout le long de la chaîne du froid. La qualité est donc assurée à tous les niveaux.

Pour le secteur artisanal le système de distribution du frais est très complexe avec beaucoup d'intermédiaires entre le pêcheur et la consommateur, dont le nombre peut atteindre cinq voire plus. Les moyens de transport sont divers: pirogue, bicyclette, camionnette, camion, taxi-brousse, train.

En ce qui concerne le poisson transformé, on estime que ce sous-secteur assure le revenu financier de milliers de femmes. Il assure également, parce qu'il permet une distribution et une commercialisation à petite échelle, et sans moyens structurels importants, l'activité d'une myriade de petits commerçants.

Pour les produits de la pêche continentale, l'autoconsommation est considérable, soit environ 25 à 35 % des volumes capturés. Ceci tient au manque de produits carnés, et aussi parce que le poisson est fort apprécié. Toutefois, en région forestière, une partie de cette autoconsommation passe au niveau du village, à d'autres familles, vendue, troquée ou partagée. Par ailleurs, il semblerait qu'une partie importante des produits de la pêche dans cette région est exportée vers le Gabon, le Congo ou la Guinée équatoriale.

3.4.2 Circuit extérieur

Les exportations informelles sont estimées à 50 000 t/an, et sont essentiellement dirigées vers le Nigéria. Plusieurs facteurs expliquent cette situation: une forte demande en protéines animales dans ce pays d'où des prix plus élevés, une présence considérable de pêcheurs nigérians dans les zones limitrophes, un manque d'intégration de ces communautés au sein de la population camerounaise, des facilités de crédit plus avantageuses dans leurs pays d'origine, et des infrastructures routières en meilleur état qu'à l'intérieur du Cameroun. En outre, en ce qui concerne ce dernier point, on note l'existence d'un flux commercial très important par voie maritime à partir des zones enclavées du littoral. Enfin, les pêcheurs qui exportent vers le Nigéria peuvent importer en contrebande divers biens de consommation acquis à un prix intéressant.

Ce commerce informel, très important et bien enraciné dans le secteur artisanal, est difficile à réorienter à cause des raisons susmentionnées. Cependant, si les réseaux de communication entre le nord et le sud étaient plus développés, le secteur privé serait sûrement plus enclin à investir dans la collecte et la distribution du poisson vers le sud.

Dans l'immédiat, un approvisionnement plus régulier en matériel et équipement de pêche, à un prix intéressant sur un marché concurrentiel, pourrait ralentir les exportations.

4. CADRE INSTITUTIONNEL

4.1 Direction des pêches (niveau central)

4.1.1 Organisation

La Direction des pêches (DP) dépend du Ministère de l'élevage, des pêches et des industries animales (MINEPIA), dont le siège est à Yaoundé. Le Secrétariat général du ministère, doté d'une cellule juridique et des services généraux de coordination, est composé de cinq directions dont celle des pêches (Cf tableau 3). Le Secrétariat général du MINEPIA exerce également son autorité sur les Délégations provinciales de l'élevage, des pêches et des industries animales ainsi que sur un certain nombre d'organismes (stations d'élevage, centres de formation, etc.) et d'institutions spécialisées (MIDEPECAM, CDPM).

Au sein du MINEPIA, la DP est responsable de l'application et de l'animation des politiques gouvernementales en matiére de pêche et d'aquaculture dans les zones maritimes et continentales du pays. L'équipe de direction est composée d'un Directeur, assisté d'un Adjoint et d'un Chargé d'étude.

La DP, dont les locaux sont assez éloignés du Ministére de tutelle, comprend quatre service placés chacun sous l'autorité d'un Chef de service exerçant leur compétence dans les domaines suivants:

Chaque service exerce une autorité théorique sur deux bureaux qui, compte tenu des rigueurs budgétaires, ne sont pas tous dotés en effectifs. L'organigramme de la DP est donné dans le tableau No 4,

Au niveau de l'organisation de la DP, on constate que le circuit hiérarchique est établi de telle maniére que les relations “Direction des pêches - délégations provinciales” ne peuvent normalement s'exercer que par l'intermédiaire du Secrétariat général du ministére. Il s'ensuit des délais de transmission des instructions et des rapports extrêmement longs et complexes.

4.1.2 Budget

L'annuité budgétaire couvre la période du ler juillet au 30 juin.

L'analyse du budget (voir Annexe No 7) de la DP fait apparaître une chute dramatique et constante de ses crédits au cours des exercices 87/88, 88/89, 89/90, et 90/91. L'exercice 91/92 enregistre une remontée spectaculaire des crédits alloués à cette direction dont le budget a pratiquement doublé par rapport à l'année précédente.

Toutefois, et compte tenu de l'érosion monétaire, on peut estimer que le nouveau budget 91/92 a diminué de moitié depuis 1987. En outre, ces chiffres ne reflétent pas la réalité dans son ensemble, à savoir les coupes sévères opérées dans le budget pendant les années précédentes.

La Direction de l'Administration générale du MINEPIA procéde à des restrictions budgétaires “d'office” sans réelle concertation avec la Direction concernée: nouvelles affectations budgétaires, reports de crédits ou simplement annulations.

Les crédits sont débloqués par tranches tardives (4 en général) au cours de l'année. Cette pratique, associée à une bureaucratie pesante, empêche toute liberté de fonctionnement, de déplacement, et d'initiative à l'administration.

L'analyse du budget indique les évolutions suivantes. Passé le choc de l'année 1987 qui a vu le budget quasiment réduit de moitié d'une année sur l'autre, chaque ligne budgétaire est restée relativement stable. Le fonctionnement bureau est réduit au minimum, la Direction ne disposant même pas du téléphone. La ligne “véhicule” n'autorise qu'une autonomie de déplacement inférieure à 5 000 km/an. Les enquêtes et stage pratiques, bien que financièrement affectés, bénéficient toujours de lignes budgétaires équivalentes, le recrutement de nouveau personnel étant de plus en plus difficile. Enfin, on peut noter que la ligne “Fonctionnement divers” a augmenté de façon spectaculaire, passant de 5 700 FCFA à un peu moins de 2 000 000 de FCFA.

Enfin, on observe que la DP, les délégations provinciales, ainsi que les institutions spécialisées (MIDEPECAM, CDPM) ont des budgets séparés dont il est difficile de connaître les montants; il n'existe en fait aucune coordination budgétaire entre tous les acteurs du développement de la pêche concernés.

4.1.3 Personnel

Au 22 Août 1991, le personnel de la Direction des pêches, au niveau central, comprenait 17 personnes ainsi réparties:

On peut constater que le nombre de techniciens et d'agents de bureau est insuffisant en regard du nombre de cadres (voir Annexe No 8).

Les trois services opérationnels (pêche industrielle, pêche artisanale et aquaculture) travaillent de manière concertée pour le traitement des dossiers.

Les mutations de service peuvent intervenir sans que les responsables n'en soient informés. Ainsi, le Service de la documentation et de la recherche appliquée vient de perdre son adjoint, alors que le bureau des statistiques, bien que figurant sur l'organigramme, est encore dépourvu de personnel.

La DP n'exerce pratiquement aucun contrôle sur les activités des agents de pêche affectés sur le terrain, ainsi que sur la planification et l'exécution des programmes de terrain. L'organisation administrative rend extrêmement difficile toute supervision centrale. De plus, le niveau du personnel est de loin inférieur à celui normalement requis pour un développement et une gestion appropriés des pêches dans le pays.

Le programme de relance économique actuellement en cours empêche tout recrutement dans la fonction publique et les réductions des salaires opérées récemment démotivent sérieusement le personnel.

Aussi, la DP est dépourvue de capacités en matière de planification du développement et de l'aménagement des pêches en raison du manque de compétences techniques dans les domaines de la recherche et de l'analyse économique, et de l'absence de statistiques sur la pêche. De même, les capacités de la DP en matière de contrôle et de suivi des programmes et des projets sont insuffisantes. En conséquence, le plan des pêches du Cameroun comprend un ensemble de projets, présentant parfois des objectifs contradictoires entre eux.

4.1.4 Equipement et moyens de fonctionnement

D'une manière générale, la DP ne dispose pas du matériel de base dont elle aurait besoin pour remplir ses missions, et en particulier de moyens de transport. Tous les véhicules administratifs ont été récemment vendu dans le cadre du programme de relance économique du pays, en vue de limiter les dépenses publiques.

L'équipement des bureaux est succinct, le mobilier est ancien et peu adapté aux besoins de ce service, notamment au plan du rangement et des archives. Les machines à écrire sont obsolètes et l'informatique est totalement absente dans un service où la rédaction de rapports et l'établissement de tableaux statistiques nécessiterait la présence d'au moins un ordinateur pour traitement de texte et d'un tableur. Il n'y a pas non plus de photocopieuse.

Compte tenu de ce qui a été décrit précédemment, la Direction des pêches a du mal à fonctionner normalement. En particulier, les contacts entre l'administration centrale et le terrain sont très rares. Par exemple, les services de la pêche n'ont pas effectué de sortie sur le terrain depuis plus de deux ans. Ceci ne permet pas à la DP de gérer convenablement ses agents provinciaux. De même, les centres de pêches sont quasiment livrés à eux mêmes, d'où un absentéisme fréquent.

4.2 Délégations provinciales du MINEPIA (niveau décentralisé)

4.2.1 Organisation

Chacune des dix provinces du pays est administrée par une Délégation provinciale qui reproduit à son niveau les structures observées au niveau central.

Chaque Délégation s'appuie au niveau départemental (49 départements) sur des secteurs. La pêche dépend du Secteur de l'élevage, des pêches et des industries animales, et en partie du secteur vétérinaire pour le contrôle sanitaire des produits. Ces secteurs comprennent, entre autres, au niveau de l'Arrondissement, des Sous-Secteurs qui animent les Centres et les Postes de contrôle de pêches, le contrôle sanitaire, les stations aquacoles, et les centres d'alevinage.

Les centres de pêche ont une fonction théorique importante; organisés par arrêté No 017/MINEPIA, “ils abritent des services techniques et un ensemble de modules technologiques pour aider les pêcheurs à mieux exploiter, transporter, distribuer et commercialiser les produits”. Chaque centre comprend cinq sections:

4.2.2 Budget, personnel, équipement, et fonctionnement

Les délégations provinciales gèrent leur propre budget. Les budgets, tout comme au niveau central, ont été revus à la baisse depuis ces cinq dernières années.

Le personnel directement impliqué dans le secteur des pêches (voir Annexe 8) n'est constitué que de 179 personnes (pour les dix provinces) dont seulement 9 ont un niveau universitaire. La majorité est constituée d'agents et de moniteurs de pêche qui n'ont que le niveau du Certificat de fin d'études primaires élémentaires.

Pour la pêche artisanale maritime ou continentale, les agents de pêche relèvent du Sous-Secteur vétérinaire, ce qui fait que les liaisons et la coopération avec la DP sont faibles. Il en résulte donc une quasi absence de structures et d'actions d'encadrement pour la pêche, ainsi qu'un manque chronique de suivi des statistiques de la pêche artisanale.

Dans le cas de la pisciculture, les directeurs et les chefs des centres d'alevinage travaillent directement avec les moniteurs piscicoles. Toutefois, leurs relations administratives se font indirectement par le biais des chefs des Sous-Secteurs vétérinaire. Celui-ci est un vétérinaire ou un infirmier vétérinaire pour qui la pisciculture n'est pas une priorité. Il s'ensuit de nombreux blocages entre les moniteurs et les directeurs de stations qui ne peuvent pas effectuer un contrôle sur la vulgarisation mais qui sont pourtant les plus qualifiés dans la hiérarchie pour le faire.

En ce qui concerne les équipements des Centres de pêche, la situation est particulièrement inquiétante, car les agents de pêche ne disposent pratiquement d'aucun moyen de transport et de matériel de base nécessaires à leurs activités. Ainsi, il n'y a que peu ou pas de moyens de communication (Téléphone, voiture, mobylette, vélo).

4.3 Autres services du MINEPIA avec compétence en matière de pêche

4.3.1 Caisse de développement de la pêche maritime (CDPM)

Créée en 1974, la CDPM est un établissement public, sous tutelle du MINEPIA, mais dotée d'une autonomie financière. Son siège est à Douala.

La CDPM “contribue à l'exécution des programmes d'action du Gouvernement en matière de formation et d'encadrement des pêcheurs, à la promotion de la recherche halieutique et à l'amélioration des circuits de distribution du poisson de la pêche artisanale”.

Dès sa création, la CDPM s'est attelée à apporter son assistance technique et matérielle aux pêcheurs artisanaux camerounais dans le but d'améliorer leurs conditions de travail et de vie. A l'origine, son champ d'action était limité aux cinq Départements côtiers.

Après l'avènement de la MIDEPECAM (cf., 4.3.2), la CDPM a surtout concentré ses interventions dans les domaines de la pisciculture et de la pêche continentale, principalement pour financer des investissements en matière d'infrastructures, d'équipements et de vulgarisation.

La CDPM exécute chaque année un programme d'actions techniques conçu par la Direction des pêches. L'analyse des programmes de la CDPM pour les exercices 89/90 et 90/91 indique notamment que ses ressources financières sont essentiellement désignées à la construction ou réfection des infrastructures. Dans le domaine de la pêche maritime, elle se limite à l'organisation de séminaires et stages de formation des agents techniques et des jeunes pêcheurs.

Les ressources de la CDPM sont constituées par les prélèvements suivants: 75 % du produit des amendes, transactions, saisies ou confiscations prononcées en application de la loi portant code des pêches, 75 % du produit de la taxe d'inspection sanitaire des produits de la pêche maritime, et de 75 % du produit de la taxe d'exploitation des bateaux de pêches à moteur. De plus, l'Etat lui accorde une subvention annuelle variable qui lui permet de disposer globalement d'un budget assez important.

Il faut également signaler que la CDPM gère depuis 1988 le matériel de pêche du don japonais au Gouvernement camerounais.

Bien que perfectible, le mode de fonctionnement de la CDPM est conforme en grande partie aux missions qui lui ont été assignées.

4.3.2 La Mission de développement de la pêche artisanale maritime (MIDEPECAM)

Créée en 1977, la MIDEPECAM est un établissement public à caractère industriel et commercial, sous tutelle du MINEPIA, mais disposant d'une autonomie financiére. Son siège est à Douala.

La MIDEPECAM est chargée du support technique et logistique des artisans pêcheurs et notamment:

La gestion financiére de la Mission est soumise aux régles de la comptabilité commerciale; ses ressources sont notamment constituées par les contributions de l'Etat, les subventions et le revenu des services rendus et la vente des produits.

En 1990/91, le personnel de la MIDEPECAM était formé de 60 personnes, dont 6 étaient payées par l'Etat. Dans la même année, son budget était de 467 millions FCFA, dont 64 millions pour le personnel, 76 millions pour le fonctionnement et 327 millions pour les investissements.

Le plan d'action initial, mis au point en 1977 avec l'assistance de l'Agence canadienne de développement international (ACDI), avait retenu que les objectifs assignés à la MIDEPECAM seraient atteints au bout de cinq ans. Deux phases étaient prévues: (i) construction des infrastructures et fourniture du matériel de pêche; (ii) commercialisation des produits de la pêche.

A l'heure actuelle, seuls deux volets ont été accomplis. Le premier volet concerne la construction des infrastructures; la MIDEPECAM a créé cinq agences dans les Départements du Ndian, du Fako, du Wouri, de la Sanaga Maritime et de l'Océan. Il s'agit de bureaux, de magasins de stockage du matériel et d'ateliers de réparation des moteurs hors-bord. Le deuxième volet, qui concerne la fourniture et l'entretien du matériel de pêche (filets, accessoires, moteurs hors-bord et pièces de rechange), a été amorcé depuis 1984. Etant soumis au régime d'exonération des droits de douane, ce matériel est cédé comptant aux pêcheurs.

L'activité de la MIDEPECAM interfère largement avec celle de la CDPM. En outre, cet organisme est en concurrence avec le secteur privé qui ne bénéficie pas des mêmes avantages fiscaux.

4.4 Les coopératives de pêcheurs

Dans le passé, l'administration des pêches à effectué maintes tentatives pour organiser les pêcheries artisanales camerounaises en coopératives ou en groupements. Les résultats ont été assez modestes: les pêcheurs sont resté associés pendant le temps nécessaire pour recevoir les avantages promis par l'administration pour leur organisation. Lorsque ils recevaient “le cadeau” (matériel, crédit, etc.), ils se dissociaient aussitôt.

Les raisons de l'échec des coopératives sont nombreuses, mais la principale réside dans la mentalité fortement individualiste des pêcheurs camerounais. En outre, les coopératives ne fournissaient pas la moindre prestation à leurs adhérents: pas d'approvisionnement en matériel de pêche, pas d'organisation de la collecte, du traitement et du stockage des produits, et aucun effort pour l'amélioration des conditions de commercialisation.

Le nombre de groupement est quasiment nul à l'exception de quelques zones de pêches. Au total, la mission a rencontré seulement trois groupements; à Njangason, à Youpwe et à Ebodje. Les deux premiers groupes s'occupent de la collecte et de la commercialisation du poisson, alors que celle d'Ebodje, de la transformation et de la commercialisation.

4.5 Services gouvernementaux d'encadrement du secteur

4.5.1 Statistiques des pêches

La fonction statistique se retrouve, d'une part, au niveau de la Direction des pêches, au sein du Service pêche industrielle, et, d'autre part, au niveau départemental, au sein des Bureaux des statistiques rencontrés dans chaque Délégation provinciale.

Les Bureaux collectent les données fournies en principe mensuellement par les Centres de pêches, les postes de contrôle, et les services vétérinaires. Les données statistiques sont ensuite communiquées au MINEPIA qui les transmet à la Direction des Pêches après visa. Un tel circuit accroît les délais de transmission et de traitement des données.

De manière générale, les agents, peu qualifiés, ne disposent pas de formulaires simples leur permettant de faire des relevés de qualité. Ceci tient en partie au fait que les services compétents de la Direction des pêches ne participent pas à l'élaboration des documents ou de la méthode statistique employée, en raison de l'absence d'économistes ou de statisticiens.

Alors que les activités de la flottille industrielle sont assez bien suivies, avec des données sur les efforts de pêche, les espéces et les quantités débarquées, il n'existe pratiquement pas de statistiques fiables sur la pêche artisanale, maritime ou continentale.

La collecte des données sur les opérations artisanales se base sur les quantités déclarées lors du versement de la taxe d'inspection sanitaire. Cette méthode est évidemment sujette à des abus, et incite à la sous-évaluation de la déclaration des quantités. En outre, dans certains cas, le même poisson peut être taxé à différents niveaux de la chaîne de distribution de telle sorte que les mêmes données peuvent être relevées plusieurs fois.

En raison des faiblesses du systéme actuel de collecte des données sur les débarquements de la pêche artisanale, le gouvernement n'a recueilli que peu d'informations sur les conditions techniques et économiques dans le secteur. Seules deux enquêtes cadres ont été menées jusqu' à présent (1986 par NJOCK et en 1987 par la MIDEPECAM), portant sur toutes les communautés des pêcheurs de la côte. Il existe peu d'informations sur les eaux intérieures, à l'exception des zones où des projets de développement sont en cours, comme c'est le cas pour Lagdo.

4.5.2 Formation

Jusqu'à récemment, la formation dans le domaine halieutique concernait seulement les agents de l'Etat, à travers l'Ecole supérieure des eaux et forêts de Mbalmayo et les institutions universitaires étrangères pour les cadres supérieurs et intermédiaires, et le centre piscicole de Foumban pour les moniteurs piscicoles recrutés sur la base du Certificat de fin d'études primaires élémentaires (CEPE).

La Direction des pêches a organisé des cours de formation pour les jeunes pêcheurs, soit maritimes soit continentaux, pour améliorer la compétitivité des jeunes pêcheurs camerounais. Ces programmes ont été financés par la CDPM. Le premier cours a eu lieu à Mouanko en juin 1991 et 24 pêcheurs apprentis de plusieurs régions y ont participé. La formation a compris un volet théorique d'un mois à Mouanko comme introduction, suivi par deux mois de pratique à Kribi. Divers sujets ont été traités comme la réglementation des pêches, le montage et l'utilisation des engins de pêches, la conservation et la commercialisation des captures. Ces cours devraient maintenant être dispensés de manière régulière.

Avant la restructuration du MINEPIA, en 1986, toutes les activités de formation de la pisciculture étaient financées par un Fonds forestier et piscicole. Depuis, le MINEPIA assure non seulement la formation en un an des moniteurs piscicoles en matière de pêches maritime et continentale, mais aussi en matière de pisciculture.

Les formations de niveau universitaire en aquaculture n'existent pas au Cameroun. Les cadres formés à l'ENSA désireux de se spécialiser en aquaculture, doivent partir à l'étranger, en dépit de la présence dans le pays de cadres enseignants qualifiés et sous-employés, et de matériel didactique. Cette situation résulte de la crise financière actuelle combinée aux programmes d'ajustement structurel.

Dans le cadre d'un programme de coopération entre le Royaume de Belgique et la République du Cameroun dans le cadre d'un projet d'appui pédagogique, la formation professionnelle en pisciculture concerne maintenant également le secteur privé. La participation aux cours est réservée aux candidats ayant leur baccalauréat qui doivent se soumettre á un examen pour déterminer leurs capacités à suivre les cours d'une durée de 2 ans. Par ailleurs, la formation n'est plus gratuite mais s'éléve à 50 000 FCFA par an pour les étudiants privés et jusqu'à 300 000 FCFA par an pour un étudiant doté d'une bourse d'un organisme international. Jusqu'à présent aucun candidat ne s'est présenté.

4.5.3 Stations d'élevage

Plusieurs stations d'élevage, souvent considérées comme des stations expérimentales, ont été mises en place dans le but d'améliorer les capacités de reproduction des espèces piscicoles et d'augmenter la production de juvéniles. Le nombre de ces stations, dépendantes du MINEPIA, n'est pas connu avec précision par la DP.

Le gouvernement souhaiterait privatiser un certain nombre de ces centres, en particulier ceux dont la fonction principale est à caractère commercial (production de juvéniles). Les autres orientés vers la vulgarisation ne devraient pas être concernés.

4.5.4 Recherche halieutique et piscicole

L'institut le plus important en matière de recherche halieutique au Cameroun est l'Institut de Recherches zootechniques (IRZ) avec sa Station de recherches halieutiques de Limbé (SRHL), créée en 1980. L'IRZ est aussi responsable pour la station de recherches piscicoles de Foumban créée en 1985/86. L'IRZ fait partie du Ministère de l'enseignement supérieur, de l'informatique et de la recherche scientifique (MESIRES).

Les activités de la SRHL portent sur la pêche maritime, l'aquaculture et la pêche continentale. Son siège se trouve à Limbé mais une antenne existe à Kribi. Ses principaux objectifs sont:

La station à Foumban est chargée de l'exécution du sous-programme “Aquaculture” prévu dans le programme “pêche” de l'IRZ. Ses programmes futurs porteront sur la recherche de données fiables sur les divers aspects de l'élevage du poisson en étang d'eau douce de manière à pouvoir élaborer un plan de développement cohérent. Les étangs de cette station doivent être construits prochainement. En attendant, les chercheurs, qui disposent déjà d'un laboratoire, travaillent à la Station de pêches de Koupa Matapit.

Au niveau international, les stations de recherche entretiennent des contacts réguliers et ont de bonnes relations avec l'Université belge de Louvain, le Comité des Pêches pour l'Atlantique Centre-EST (COPACE), le Centre International pour l'Exploitation des Océans (CIEO), le Centre de Recherches Océanographiques de Dakar-Thiaroye (Sénégal), l'Institut français de recherche scientifique pour le développement en Coopération (ORSTOM), et l'Unesco sur le projet COMARAF sur les mangroves et les zones côtières africaines.

Les programmes de recherche des stations ne comprennent pas de recherche fondamentale en raison du manque de budget de fonctionnement. A Limbé, le budget pour l'année 1989/90 accordé pour la recherche était de 4,4 millions FCFA.

5. INSTRUMENTS DE POLITIQUE

5.1 Législation des pêches

La législation des pêches fait l'objet de la loi No 81-13 du 27 Novembre 1981 qui définit le cadre juridique pour les opérations et le contrôle de toutes les activités de l'industrie de la pêche. Par ailleurs, des décrets additionnels réglementent les activités de pêche en matière de politique des prix et de droits financiers à l'exportation et à l'importation. Enfin, d'autres textes définissent les statuts des institutions de pêche comme la MIDEPECAM et la CDPM.

La législation prévoit également des dispositions relatives à la protection des zones de pêche comme par exemple l'interdiction de chalutage en deçà de deux milles marins, et le contrôle de la pollution des eaux. De plus, toutes les pirogues doivent posséder un permis de pêche, alors que les bateaux industriels, en plus du permis, doivent disposer d'une licence dont le montant dépend du tonnage et du type de pêche pratiquée.

Ainsi présenté, le cadre juridique semble être suffisamment complet pour que l'administration des pêches puisse mener une politique d'aménagement active appuyée par une réglementation ad hoc (type d'engins de pêche, taille des mailles, zones de pêche). Cependant, les décrets d'application font souvent défaut, notamment en ce qui concerne la taille minimale des prises et des mailles des filets.

D'autre part, les réglementations qui existent ne sont pas souvent appliquées, comme c'est le cas par exemple pour l'introduction de chalutage en deçà de deux milles nautiques, à cause du manque à gagner que cela représenterait pour le gouvernement. Ainsi, bien que la loi spécifie une limite maximale de capacité autorisé de 250 TJB pour n'importe quel navire de pêche opérant dans les eaux territoriales camerounaises, des navires excédant cette taille ont récemment été autorisés.

5.2 Contrôle et surveillance

Le contrôle et la surveillance des pêcheries maritimes est sous la responsabilité de la Marine nationale et de la Gendarmerie maritime. Néanmoins, aucun de ces organismes n'a les ressources nécessaires financières ou matérielles pour patrouiller effectivement les eaux nationales même dans la zone relativement limitée des deux milles où le chalutage est interdit. En 1988 et 1989, neuf navires étrangers pêchant illégalement dans les eaux camerounaises ont été arraisonnés. Toutefois, ce type d'exercice n'a pas été répété et la pêche par les navires étrangers a depuis lors continué, en raison notamment du manque de moyens d'intervention.

Dans la mesure où les ressources halieutiques sont relativement limitées, le déploiement de moyens de contrôle traditionnels à l'aide de patrouilles ne se justifie pas au point de vue économique, les coûts d'opération devant largement excéder la valeur des ressources à protéger.

Dans cette situation le plus approprié serait que les autorités appliquent les mesures de régulation dans le cadre de campagnes maritimes occasionnelles, renforcées par un système de pénalités aux contrevenants. Ces amendes pourraient être utilisées par la suite pour financer des activités de surveillance.

5.3 Mesures d'aménagement et coopération sous-régionale

En pêche maritime, compte tenu de la nature migratoire et de l'interdépendance géographique et biologique des stocks marins du golfe de Guinée, il est souhaitable que les programmes de gestion et de développement des pêcheries soient établis à l'avenir sur une base régionale. Le mécanisme d'une telle approche fait l'objet de discussions depuis 1983, suite à une initiative de la CEE qui a promu la création du Comité Régional des Pêches du golfe de Guinée (COREP). La Convention signée en juin 1984 à Libreville (Gabon) et établissant le COREP est ouverte à l'accession pour le Cameroun ainsi que pour l'Angola. La Convention, qui prévoit à terme l'élaboration de politiques concertées, favorise aussi la coopération en matière d'accès aux zones de pêches entre les Etats Membres.

Il a déjà été noté que le Cameroun participe activement au Comité des Pêches de l'Atlantique Centre-Est (COPACE) dont il assure d'ailleurs actuellement la Présidence. Il est important que les mesures d'aménagement pertinentes recommandées par le Comité soient effectivement prises en considération dans les normes juridiques internes du Cameroun.

Le besoin pressant d'une coopération interrégionale en matière de rationalisation de la planification du développement et de gestion concertée a été également débattu à la “Conférence ministérielle sur la coopération halieutique entre les Etats africains riverains de l'océan Atlantique” à Dakar en juillet 1991.

Dans le domaine de la pêche continentale, il est quasiment impossible de réglementer la taille et le type de filets utilisés en raison de la diversité des espèces capturées, qui servent pour la “friture”. Tout au plus pourrait-on fixer des saisons pour restreindre la pêche des juvéniles, en accord avec les pêcheurs qui possèdent de bonnes connaissances en matière de saisonnalité de la pêche.

Par ailleurs, rares sont les pêcheurs en eaux intérieures qui utilisent des pièges, ou des palangres de type sahélien, engin fort destructif. Quant à l'utilisation des poisons, seul le Tephrosia et le Lindane (pesticide) sont utilisés dans les marigots et mares par les femmes et enfants.

Sur le plan de la gestion et du développement interrégional, le Cameroun fait partie de la Commission du bassin du lac Tchad (CBLT), dont le rôle principal est de catalyser la coopération régionale en matière d'aménagement des pêches. Mais cette organisation est restée peu active en raison des troubles politiques survenus au Tchad au courant de la dernière décennie, et du manque de moyens de fonctionnement. En tant qu'action complémentaire du Séminaire régional sur la planification et l'aménagement des pêches dans le bassin conventionnel du lac Tchad, organisé en janvier 1990 par la CBLT avec l'appui de la FAO et de la CEA, il serait important de suivre et mettre en oeuvre la stratégie adoptée en particulier pour l'aménagement des pêches du lac Tchad, du Chari et du Logone.

5.4 Système de taxation

a) Licence de pêche industrielle

Les navires industriels et les bateaux semi-industriels peuvent exercer la pêche à condition de disposer d'un agrément et d'une licence. L'agrément est une autorisation administrative ne donnant pas lieu à perception de droits et qui est accordée sans limitation de temps. La licence est valable un an et donne lieu à la perception d'une taxe annuelle.

Le montant de cette taxe est définie par la formule:

T = R × J × P

pour laquelle:

R =5 000 FCFA
J =tonnage de jauge brute du navire
P =est un coefficient variable selon la nature de la pêche:


chalutage ordinaire:P = 1
pêche des crustacés:P = 2
pêches de clupéidés:P = 1/2

b) Permis de pêche (artisanale)

Les pêcheurs artisans doivent acquitter une taxe de 3 000 FCFA par an pour obtenir leur permis de pêche, et de 5 000 FCFA par an pour la pêche aux crevettes.

c) Taxe d'inspection sanitaire

Cette taxe est de 2 FCFA/kg pour le poisson et de 4 FCFA/kg pour les crevettes.

d) Détaxes sur le gas-oil.

En 1984, le gouvernement a accordé une décote de 100 FCFA par litre de gas-oil afin de permettre aux exportateurs de crevettes d'être plus compétitifs sur le marché mondial. Pour mémoire, cette facilité ne concerne pas les pêcheurs artisans.

Cependant, depuis le ler juillet 1991, le Gouvernement camerounais aurait décidé dans le cadre de sa nouvelle politique, d'instaurer la vérité des prix à la pompe. Cela signifie que c'est le prix du cours international du carburant qui fera désormais référence; la conséquence en sera une baisse ou une hausse du prix fluctuant selon les cours internationaux.

e) Détaxe sur l'importation des équipements de pêche

Les armements industriels bénéficient de l'exonération des taxes à l'importation d'équipement. Par ailleurs, le nouveau code d'investissement instaure en ce qui concerne les nouvelles sociétés, une réduction importante des taxes à l'importation, qui seraient ramenées à 15 % pour une période de 6 mois suivant l'implantation. Cette dernière mesure est de nature à inciter des sociétés spécialisées à investir dans le conditionnement, la transformation ou le transports des produits halieutiques au Cameroun.

5.5 Crédit

Tous les organismes bancaires sont susceptibles d'intervenir dans le domaine de la pêche, mais leurs interventions sont rares dans ce secteur, étant limitées à quelques cas de crédit en faveur des armateurs des pêcheries industrielle ou semi-industrielle.

Depuis 1975, le crédit aux pêcheurs artisanaux est octroyé par des organismes publics. De 1976 à 1982, la Caisse de Développement des Pêches (CDPM) a effectué des crédits en faveur des groupements de pêcheurs artisanaux pour une valeur de 50 millions FCFA environ, dont 15 millions seulement ont été remboursés.

En 1982–1983, la MIDEPECAM a octroyé des crédits à 20 équipes de pêcheurs dont 5 seulement ont remboursé leurs dettes.

Après ces expériences malheureuses, force est de constater qu'il n'existe plus de système spécifique de crédit en faveur des pêcheurs, sauf les systèmes traditionnels existants. Le crédit institutionnel semblerait se heurter à un milieu dispersé, individualiste, n'ayant pas de garantie réelle à offrir, et n'ayant une connaissance qu'approximative de la notion de crédit officiel et des obligations qu'il impose.

L'instauration d'un crédit institutionnel pour la pêche artisanale nécessitera des actions de sensibilisation et d'encadrement de longue durée. Il faudra avant toute chose que les pêcheurs s'associent dans des organisations stables: seule la garantie solidaire d'un groupe bien intégré pourra réduire le risque de non remboursement du crédit.

Dans le cas de la pisciculture, aucun organisme de crédit n'accepte de prêter de l'argent à un petit paysan qui ne peut présenter une caution. Qui plus est, aussi bien pour la pisciculture rurale que commerciale, les données économiques sont trop imprécises pour un organisme financier. Le développement de la pisciculture artisanale dépendra en partie de la possibilité que pourront avoir les pisciculteurs d'accéder à des crédits dont les taux d'intérêt seront compatibles avec le rendement financier de l'activité considérée. Cela dépendra en grande partie du degré de priorité donné par le gouvernement au développement de la pisciculture.


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