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ADMINISTRATION DU REGIME FISCAL FORESTIER

En matière de fiscalité forestière, on fait souvent la confusion entre taxes et redevances forestières dans la mesure où les deux termes sont invariablement utilisés l’un pour l’autre alors qu’il existe bien une différence entre les deux expressions. En effet, la redevance juridiquement entendue, obéit au principe de l’équivalence financière, c’est à dire qu’il doit exister une certaine proportionnalité entre le montant de la redevance et le coût réel des services rendus aux usagers.

La redevance n’est due que par les usagers utilisant effectivement les services mis à leur disposition. Par contre, le principe de l’équivalence financière ne s’applique pas nécessairement à la taxe qui a un caractère obligatoire et doit être créée par la loi. Dans notre cas, la dénomination «redevance» convient mieux mais pour des raisons pédagogiques, le terme «taxe» sera toujours utilisé.

Processus de fixation des taxes forestières

Le mode de détermination des taxes forestières obéit aux propositions faites par le service technique à partir de l’état de la ressource (dégradation). La fixation des taux des taxes tient compte dans une large mesure des revenus des exploitants ruraux et des consommateurs.

Il est important de rappeler que le bois rentre pour 90% dans la satisfaction des besoins énergétiques des ménages. Des taux de taxe trop élevés pourraient engendrer des troubles sociaux comme cela est intervenu en juin 2000 avec l’application du décret 98-402. Les propositions sont soumises à l’approbation du département de tutelle. Une réunion interministérielle examine en dernier ressort les propositions du département technique. Il faut noter qu’à cette réunion interministérielle participe la chambre d’Agriculture qui représente les intérêts des paysans. Le conseil des Ministres adopte par décret le document final qui devient applicable immédiatement.

Un projet de décret déterminant les modalités et conditions d’exercice des droits conférés par les titres d’exploitation des ressources forestières est en cours d’adoption. Ce projet prévoit l’appel à la concurrence. En effet la section 4 (de la vente sur coupe) dispose en ses articles 19, 20, 21 et 22 ce qui suit :

• « Les coupes mises en vente sont délimitées sur le terrain par le Service de la Conservation de la Nature qui évalue les essences exploitables en nombre et en volume et dresse le plan ».

• « Les règles d’exploitation et les conditions à remplir par les adjudicataires sont consignées dans un cahier de charge des ressources forestières ».

• « Les ventes de coupe se font par voie d’appel d’offre sous pli fermé et cacheté ».

• « La date et le lieu d’adjudication sont annoncés au moins un mois à l’avance ».

Ce même projet de décret a également fixé la composition de la commission chargée du dépouillement des appels d’offres ainsi que le secrétariat. Ce nouveau texte qui sera adopté en conseil de Ministres dans les prochains jours se caractérise par un souci de transparence dans l’exploitation des ressources forestières.

L’adoption du décret déterminant les modalités et les conditions d’exercice des droits conférés par les titres d’exploitation des ressources forestières sera suivie de l’élaboration d’un projet de décret fixant les taux des taxes perçues à l’occasion de l’exploitation des ressources forestières.

Il a été envisagé de réviser à la hausse les taux des taxes, d’assurer une répartition équilibrée des recettes de manière à réinvestir dans la régénération des forêts. Une des innovations importantes du texte réglementaire en question est la taxation des produits forestiers non ligneux (gomme, feuilles, écorces, racines, résines et les herbes). De même, un accent particulier sera mis sur la professionnalisation des exploitants forestiers qui devront à l’avenir détenir un agrément pour accéder à la ressource. La taxation des produits non ligneux à l’avantage d’organiser un secteur resté longtemps informel.

De nos jours nous assistons à un prélèvement excessif et anarchique des feuilles et des herbes autour de tous les centres urbains. En effet, la pratique illicite de l’élevage autour des grandes villes est à l’origine de l’exploitation des produits non ligneux (feuilles, herbes) qui prend de plus en plus une allure inquiétante. Les zones de prélèvement des produits non ligneux connaissent un niveau de dégradation assez poussé parce que tributaire de la pluviométrie. Le prélèvement exagéré des feuilles occasionne dans bien des cas un dépérissement des formations végétales voir même leur disparition à la longue suite à un déficit pluviométrique.

Les taxes sont mises à jour chaque fois que la nécessité l’impose. De l’indépendance du Mali (1960) à nos jours, les textes qui réglementent les taxes sur l’exploitation forestière ont été relus respectivement en 1968, 1977, 1981, 1986, 1995, 1998 et 2001. La révision des taux des taxes forestières repose toujours sur le principe de la valorisation des ressources forestières et l’augmentation des revenus des populations rurales.

Les taxes fixées par les textes législatifs et réglementaires de 1995, 1998 et 2001 tiennent compte des besoins de réinvestissement dans l’aménagement des massifs forestiers et aussi et surtout de la participation de tous les acteurs dans la protection et la restauration des forêts. Les principaux textes législatifs et réglementaires fixant les taux des taxes intervenus sont les suivants :

• L’ordonnance No 77-22-CMLN du 25 février 1977 ;

• Loi No 81-04/AN-RM du 3 mars 1981 ;

• Décret 98-422/P-RM du 06 décembre 1995 ; et

• Décret 98-402/P-RM du 17 décembre 1998.

Les informations sur les taxes forestières sont claires et mises à la disposition du public par voie de presse écrite et les masses media. A l’instar de tous les textes législatifs et réglementaires du Mali, les informations sur les taxes forestières sont d’abord publiées au journal officiel.

Elles font également l’objet de diffusion à la radio nationale et au niveau des radios de proximité de toutes les localités qui en disposent et dans les langues du milieu. Des missions d’information et de sensibilisation sont organisées en direction des populations rurales par les activités administratives et politiques.

Le service technique en charge du domaine organise des réunions d’information et d’animation des communautés villageoises. Des consultations sont effectivement prévues pour la détermination des taxes forestières. Les textes en cours d’adaptation ont fait l’objet de consultation avec les autres départements techniques concernés par la question.

Il s’agit notamment des départements des Finances, de l’Economie, de l’Energie, du Développement social, du Développement rural et de la Chambre Consulaire d’Agriculture qui défend les intérêts des ruraux. C’est dire que la fixation des taux des taxes forestières obéit à un processus ouvert et transparent. Les taxes sont fixées en dernier ressort par décret pris en conseil de Ministres.

Il n’existe pas de formule basée sur des études économiques pour calculer les taxes. Cependant, des critères comme la valorisation des ressources forestières et l’augmentation des revenus des populations rurales, leur pouvoir d’achat et les prix du marché président à la détermination des taxes. La demande de plus en plus croissante en bois, la dégradation des massifs forestiers et la diminution du potentiel de production des forêts justifient l’augmentation des taxes forestières d’une période à une autre.  

Perception des taxes et surveillance

L’évaluation des taxes est fonction de la nature du produit. Ainsi, le bois de chauffe est évalué en stère (1 stère = 1m3 d’encombrement). Il existe effectivement des moyens de contrôle qui vont de la visite de la zone d’exploitation pour le bois de service et le bois d’œuvre et un système d’homologation pour le bois de chauffe. Selon le moyen de transport utilisé ( vélo, charrette, pirogue, bâchée, camion, wagon), on est à mesure d'estimer les quantités de bois de chauffe transportées. Le contrôle du charbon pose par contre quelque difficulté à cause des dimensions variables des emballages utilisés.

Le système de taxations peut conduire dans le cas du bois de service et du bois d’œuvre à un enregistrement inexact de la production dans la mesure où il est basé sur les unités et non sur le volume. Il est en effet extrêmement difficile de pouvoir faire l’équivalence entre le nombre de pieds de bois de service et/ou de bois d’œuvre exploité et le volume que cela représente.

Le recouvrement des taxes forestières se fait au niveau local au moment de la délivrance du titre d’exploitation à l’exploitant. Il se fait en espèce par les agents forestiers régisseurs des recettes au profit du trésor public. Les communautés locales interviennent dans le recouvrement des droits et le contrôle des niveaux de production à travers les structures rurales de gestion de bois qui sont des organisations villageoises agrées dans la gestion des marchés ruraux de bois.

Les structures rurales de gestion sont composées des représentants des communautés locales. Elles collaborent étroitement avec le service forestier chargé du recouvrement des droits.

La gestion de la zone d’exploitation est confiée à la structure rurale de gestion sur la base de contrat et cette dernière a la latitude de délivrer des titres d’exploitation aux exploitants individuels et de reverser les taxes perçues au service forestier.

Il existe un système de suivi, de vérification des comptes pour le paiement de la taxe dans toutes les régions administratives. Le suivi et la vérification sont basés sur un système de contrôle périodique qui s’exerce à tous les échelons de la hiérarchie du service forestier.

Les antennes qui sont les démembrements à la base font des versements au niveau des Services de la Conservation de la Nature du Cercle. Les chefs des Services de la Conservation de la Nature se chargent du reversement au niveau des perceptions (Trésor Public).

La Direction Régionale réalise des contrôles semestriels de tous les Services de la Conservation pour vérifier si les taxes ont été effectivement versées au Trésor. La Direction Nationale opère un contrôle annuel pour réaliser les mêmes vérifications. Les rapports d’activités et les pièces statistiques mensuelles établies par les Services de la Conservation de la Nature permettent de suivre les versements.

Les opérations administratives qui interviennent dans la collecte des revenus permettent la génération des statistiques primaires sur les productions et utilisations forestières. Inversement, les statistiques primaires de productions et d’utilisations forestières permettent une meilleure orientation et un meilleur ciblage des opérations administratives.

C’est dire qu’il existe une corrélation très forte entre les opérations administratives et la génération des statistiques primaires de productions et d’utilisations forestières.

Intervention des différents niveaux de gouvernement dans l’administration fiscale forestière

L’intervention des différents niveaux du gouvernement dans l’administration fiscale forestière se manifeste à travers les réunions de concertation de tous les départements ministériels concernés par la question. Dans le cadre de la décentralisation, les collectivités territoriales décentralisées disposent désormais d’une certaine liberté à fixer les taxes et redevances forestières dans leur domaine forestier.

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