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COMMUNICATIONS


Épidémiosurveillance de la FVR au Sénégal (Dr Sall - DIREL)

Introduction

Au Sénégal, un programme de surveillance de l'activité du virus de la fièvre de la vallée du Rift (FVR) comportant un suivi clinique et un suivi sérologique des animaux vivant dans les zones à risque (vallées du fleuve et du Ferlo) a été mis en œuvre dès la fin de l'épizootie de 1987 par la Direction de l'élevage et l'Institut sénégalais de recherches agricoles (ISRA).

Deux programme sont venus récemment renforcer les activités de ce réseau, à savoir:

Rappelons que la surveillance de la FVR s'inscrit dans le cadre plus global du Système national de surveillance épidémiologique des maladies animales au Sénégal (SNSE) appuyé par le Projet panafricain de lutte contre les épizooties (PACE).

Objectifs

L'objectif est de disposer d'un système d'alerte précoce et de réaction rapide vis-à-vis de la FVR.

Méthodologie

La méthodologie utilisée repose essentiellement sur le suivi clinique (recherche de signes cliniques majeurs: avortements et mortalité de jeunes) et sérologique (recherches d'anticorps spécifiques de la FVR) d'animaux vivant dans les zones à risque grâce à un réseau de troupeaux sentinelles.

Des études complémentaires, dont les résultats ne seront pas présentés ici, ont été réalisées sur les moustiques vecteurs et les rongeurs réservoirs potentiels du virus par les chercheurs de l'Institut Pasteur de Dakar et l'Institut de recherche pour le développement.

Dès 1988, dix troupeaux constitués de bovins et de petits ruminants, répartis entre les départements de Dagana, Podor et Matam, ont fait l'objet d'un suivi clinique et sérologique. Les animaux identifiés par des boucles auriculaires sont saignés une fois par an. Ces animaux vivent à proximité des périmètres irrigués ou des marigots, gîtes possibles de moustiques.

A partir de 1992, quatre troupeaux de petits ruminants de la zone de Barkédji ont fait l'objet de suivi clinique et sérologique tous les deux mois. Quarante femelles identifiées par des boucles ont été choisies par troupeau. Il s'agissait d'animaux vivant près des mares temporaires, points de pullulation des moustiques.

A partir de 2000, avec le démarrage du PCT de la FAO, un réseau de 12 troupeaux sentinelles de petits ruminants a été mis en place, dans le delta et la vallée du fleuve, la vallée du Ferlo, le Ferlo et le sud du pays. Six passages ont été effectués de mai à novembre 2000. En dehors du suivi clinique, des prélèvements mensuels de sang sont faits sur 30 sujets par troupeau pour le suivi sérologique.

La plupart des sites (huit troupeaux sentinelles) sont concentrés au niveau du delta et de la vallée du fleuve en raison de l'épidémiologie de la maladie (fleuve, périmètres irrigués, zones inondables, localisation des premiers foyers dans la sous-région).

Deux troupeaux sentinelles ont été choisis au niveau de la vallée du Ferlo et dans le Ferlo, compte tenu des changements écologiques intervenus dans la zone (mise en eau des vallées fossiles) et de la localisation du dernier foyer recensé au Sénégal (Ranérou, novembre 1999).

Les aménagements hydrologiques (barrage de Niandouba, extension des zones de cultures irriguées) réalisés récemment dans le bassin de l'Anambé, et les foyers d'avortement notés à Kounkané entre août et octobre 1999, ont motivé le choix de deux sites de troupeaux sentinelles dans la région de Kolda.

Le projet EMERCASE est venu récemment (2001) renforcer les capacités de ce réseau par la fourniture de matériel électronique (PC et Palm pilot, et serveur) et d'un logiciel permettant de mettre en réseau la Direction de l'élevage, les inspections régionales de Saint-Louis, Louga et Tambacounada, les inspections départementales de Dagana, Podor, Matam, Louga, Linguère et Bakel et les postes vétérinaires de Mpal, Ross-Béthio, Thillé Boubacar, Ndioum, Barkédji, Ranérou, Diawara et Kidira. Ce dispositif devrait assurer à terme une circulation plus fluide de l'information zoosanitaire.

Résultats obtenus

Existence d'une période de silence post-épizootique de 1988 à 1992.

De 1988 à 1992, le suivi a permis de montrer une baisse progressive de la séropositivité générale en anticorps neutralisants. En effet, cette dernière va de 24.4% (N= 303) en 1988 à 4% (N=274) en 1992. Cette diminution de l'immunité naturelle vis-à-vis du virus de la FVR est associée à une absence de cas cliniques (avortements en masse, forte mortalité des jeunes animaux) de FVR chez les animaux domestiques de la vallée du fleuve Sénégal, rive gauche. Il faut souligner que la première épizootie de 1987 avait provoqué une séropositivité importante (supérieure à 80%) en anticorps IgG et IgM antivirus de la FVR chez les petits ruminants domestiques vivant dans la vallée du fleuve Sénégal.

Ré-emergence de l'activité du virus de la FVR par la mise en évidence de foyers localisés dans la vallée du fleuve en 1994 et dans le Ferlo en 1999.

En octobre-décembre 1994, un foyer de FVR a été mis en évidence dans le delta du fleuve Sénégal autour de Ross-Béthio. Les caractéristiques de ce foyer sont un pourcentage de séroconversions (animal séronégatif devenant séropositif) de 32.5%, avec une séropositivité de 12.4% en anticorps IgM antivirus de la FVR et un taux d'avortement des femelles gravides de 50%.

En octobre-novembre 1999, un autre foyer est mis en évidence à Ranérou, dans le Ferlo. Les analyses faites sur un foyer d'avortement en masse des femelles gravides (80%) ont révélé une séropositivité en IgM de 60% (N=40, X=28).

Mise en évidence d'une zone de circulation enzootique du virus de la FVR autour des mares temporaires dans le Ferlo en 1993 et dans la vallée du fleuve en 1998.

En octobre 1993, le suivi sérologique (test SN, Elisa IgG/IgM) de 160 brebis appartenant à quatre troupeaux sédentaires et des captures de moustiques autour des mares temporaires dans la zone de Barkédji a abouti à l'isolement de 14 souches virales à partir de sérums de petits ruminants (une souche) et de pools de moustiques (13 souches).

Chez les petits ruminants, les isolements avaient été précédés par trois séroconversions sur 40 sérums analysés, soit 7,5% de séroconversions. Par ailleurs, les 13 souches virales ont été isolées à partir de deux espèces: Aedes vexans (10 souches) et Aedes ochraceus (trois souches). C'étaient les premières espèces de moustiques vecteurs du virus de la FVR identifiées au Sénégal.

En novembre 1998, une circulation du virus de la FVR a été détectée à Diawara par la mise en évidence d'anticorps IgM, témoins d'infection virale récente, chez les petits ruminants sentinelles (6,5 % en IgM, N= 61, X= 4) et l'isolement du virus chez les moustiques de l'espèce Culex poicilipes, capturés autour d'une mare située à la périphérie du village

Premier isolement d'une souche de virus de la FVR chez un animal en 1993 au Sénégal.

Une enquête sérologique réalisée en octobre 1993 dans le cheptel bovin du Centre de recherches zootechniques (CRZ) de Kolda, zone subguinéenne humide (1 000 mm de pluies par an) a permis:

Résultats de la campagne de surveillance TCP

Rappelons tout d'abord les acquis du Programme de la FAO:

Les analyses des sérums récoltés lors des six missions de terrain n'ont pas révélé la présence d'IgM témoins d'une activité récente du virus. Des IgG avaient été trouvés à Mpal, Ross-Béthio, Ourossogui, Diawara et Kidira lors du premier passage.

Bien menée, la campagne de sensibilisation a abouti à:

La vigilance ainsi déclenchée tant au niveau des techniciens que des éleveurs a donné lieu à la déclaration de plusieurs foyers de suspicion de la FVR (avortements et mortinatalité). Des enquêtes de terrain et 196 prélèvements de sérums ont donc été réalisés sur huit sites de suspicion. Les résultats obtenus au laboratoire n'ont cependant pas confirmé la maladie.

Projet EMERCASE

Les résultats de l'appui du projet EMERCASE ne sont pas encore mesurables. La formation des agents du réseau à la manipulation du matériel livré vient de s'achever. La phase test vient donc à peine de démarrer

Conclusion

Depuis 198, le système de surveillance épidémiologique de la FVR n'a cessé d'être amélioré. Le programme de la FAO a permis de mettre en place un réseau de troupeaux sentinelles plus fonctionnel et un meilleur système d'information.

Désormais l'objectif "alerte précoce" semble être à portée de main, mais il reste à définir un plan d'urgence pour pouvoir atteindre l'objectif "réaction rapide".

Les travaux de cet atelier permettront de combler ce vide et de parfaire le système. Mais d'ores et déjà il faut penser au maintien et au renforcement d'une part de la collaboration nationale entre la Direction de l'élevage, l'ISRA, lIPD, l'IRD, les services de santé et l'université et, d'autre part, de la collaboration sous-régionale avec l'option pour une stratégie sous-régionale de lutte contre la FVR. Dans ce cadre, la base de données régionale qui permet une vision plus globale de la situation devrait continuer d'être alimentée. Enfin, on attend avec un vif intérêt les résultats de l'essai vaccinal actuellement en cours qui, si les tests sont concluants, permettront de disposer d'un vaccin efficace et sûr utilisable dans les zones et les périodes à risque.

Epidémiosurveillance de la FVR au Mali (Dr Soumana Diallo, DNAMR)

Introduction

Pour le Mali, trois périodes importantes doivent être considérées dans l'historique de la fièvre de la vallée du Rift:

Méthodologie

Résultats obtenus

Anticorps IgM: 6/1094 soit 0,5 % de séropositivité des anticorps.

Anticorps IgG: 23/1094 soit 2,1 % de séropositivité des anticorps.

Suite à la détection d'IgM témoins d'une infection récente, une enquête épidémiologique a été menée conjointement avec le Ministère de la santé sur lesdits sites et aucun symptôme clinique de la maladie n'a été constaté au cours de la période d'observation (juin à novembre 2000) ni chez les animaux ni chez l'homme. Des prélèvements de sérums ont été faits chez l'homme mais le test n'a pu être mené faute d'un kit humain.

Une équipe pluridisciplinaire (Ministère du développement rural-Ministère de la santé, Ministère des mines, de l'énergie et de l'eau et Ministère chargé de l'environnement) a été mise en place pour attirer à tout moment l'attention des autorités, en cas d'éclosion d'épizootie-épidémie.

Les radios de proximité ont été mises à profit pour diffuser des informations sur la maladie aux populations.

En conclusion, il n'y a pas d'épizootie de FVR chez les animaux au Mali, et encore moins d'épidémie chez les humains. La suspension des importations de bétail en provenance du Mali par l'Algérie, du fait de la présence de la maladie, apparaît inopportune.

En réalité, il n'existe aucun protocole d'accord formel concernant le commerce de bétail entre l'Algérie et notre pays. Les échanges qui se font entre opérateurs économiques des deux pays au niveau des frontières consistent en trocs (marchandises contre bétail).

Le Mali ne présente aucun problème vis-à-vis de ses principaux clients, à savoir la République de Côte d'Ivoire, le Sénégal, la Guinée et la Mauritanie.

Je voudrais donc profiter de cette occasion pour assurer les uns et les autres qu'il n'existe pas de foyer de FVR au Mali.

Acquis du PCT

Conclusion

Epidémiosurveillance de la FVR en Mauritanie (Dr Lemrabott, DEA - Dr Diarra, Laboratoire vétérinaire CNERV)

La fièvre de la vallée du Rift a fait parler d'elle en Mauritanie depuis l'épidémie survenue au Trarza en 1987. Elle fait partie des maladies prioritaires surveillées dans le cadre du réseau mauritanien d'épidémiosurveillance des maladies animales (REMEMA).

Principes du système d'épidémiosurveillance

L'épidémiosurveillance de la FVR fait intervenir deux types d'actions:

1. La surveillance passive: Elle est assurée par les agents de terrain du REMEMA chargés de la collecte puis de la vérification de toute information concernant la FVR ainsi que de prélèvements et d'enquêtes en cas de suspicion.

2. La surveillance active: Elle se fait par le biais de:

Troupeaux sentinelles:

Onze sites répartis dans les différents biotopes existant en Mauritanie ont été retenus au titre de l'opération des troupeaux sentinelles 2000 qui intervient de juin à novembre. Au niveau de chaque site, 35 petits ruminants ont été identifiés par leur boucle auriculaire et font l'objet d'un suivi clinique et de prise de sang à un rythme mensuel.

Surveillance du marché à bétail de Nouakchott:

Un suivi quotidien des bovins et des camélidés arrivant par camion au marché à bétail de Nouakchott a été assuré d'octobre à décembre 2000 par un technicien salarié de la Fédération mauritanienne pour la promotion de la vente du bétail. L'objectif de ce suivi est la détection d'une circulation virale à l'intérieur du pays par le biais des animaux arrivant à ce marché.

Résultats obtenus

Résultats obtenus dans le cadre de la surveillance régionale: Système régional de surveillance de la FVR au Mali, en Mauritanie et au Sénégal (Dr V. Martin, FAO, Rome)

Afin d'améliorer le dépistage précoce de la fièvre de la vallée du Rift en Afrique de l'Ouest, et de mieux contrôler les épizooties dans le futur, un système de surveillance régional a été mis en place au Mali, en Mauritanie et au Sénégal grâce à un projet de coopération technique de la FAO (TCP/RAF/8931). Le projet, lancé en avril 2000 avant le début de la saison des pluies, a les objectifs suivants:

Le système de surveillance

Dans le cadre des systèmes d'épidémiosurveillance nationaux, un réseau de troupeaux sentinelles constitué de petits ruminants a été établi dans les trois pays en début de projet. Les troupeaux ont été choisis dans des régions potentiellement à risque élevé, sur la base de considérations écologiques et de la présence de conditions favorables à la circulation du virus (proximité d'une rivière, de barrages, de marécages, etc.). Dans chaque troupeau, une trentaine d'animaux ont été prélevés et chacun d'entre eux a été soumis à un examen clinique par les agents de terrain responsables du suivi des troupeaux. Les sérums collectés ont été analysés par les laboratoires vétérinaires nationaux (le CNERV-Mauritanie, le LCV-Mali et le LNERV- Sénégal, respectivement). Une recherche d'anticorps IgM et IgG dirigés contre le virus de la FVR a été effectuée afin de révéler une infection récente (IgM) ou plus ancienne (IgG). Au total, 31 troupeaux ont fait l'objet de visites régulières (cinq durant la période considérée) et environ 5 000 prélèvements ont été analysés.

Le protocole de suivi des troupeaux sentinelles prévoyait l'élimination des animaux présentant une sérologie positive aux anticorps IgG afin de ne garder que les animaux dépourvus d'anticorps et capables de révéler une infection récente. Une base de données a été mise en place au niveau de l'unité régionale de coordination à Dakar pour saisir et analyser les données produites par le projet (enquêtes de surveillance sérologiques, suspicions et notifications de foyers de FVR). Des données antérieures et les résultats d'enquêtes sérologiques commencées il y a dix ans au Sénégal feront l'objet d'une saisie informatique avant la fin du projet, afin de mettre en évidence l'évolution de la maladie sur le long terme.

Le retour de l'information aux partenaires du projet, et plus particulièrement aux décideurs, s'est effectué grâce à un bulletin d'information distribué une fois les premiers résultats obtenus. Les trois bulletins (un quatrième est en préparation) ont constitué des éléments clés dans l'échange d'information au niveau régional et dans la gestion du risque. Les résultats des enquêtes sérologiques ont fait l'objet d'une représentation cartographique dans chacun de ces bulletins afin de mieux mettre en évidence les zones de circulation virale.

Des supports de communication et de formation (un livret technique, une vidéo et une affiche) ont été produits pour informer les populations des conséquences de la FVR sur le bétail et la santé humaine, ainsi que pour former les agents de terrain à la reconnaissance de la maladie.

Des résultats intéressants...

Les épizooties de FVR apparaissent en présence d'un ensemble de facteurs de risque tels que des phénomènes climatiques extrêmes (comme le phénomène El Niño), des aménagements hydrauliques (barrages, changement dans les schémas d'irrigation, etc.), des pluies abondantes supérieures à la moyenne, une faible immunité générale de la population animale associée à un mauvais état général des animaux (notamment suite à des périodes de sécheresse). La maladie est souvent détectée à la fin du processus épizootique, quand elle se manifeste chez l'homme et ne peut être reliée à aucune autre pathologie. A ce stade avancé d'une flambée épizootique, les mesures de lutte mises en place sont bien souvent inutiles et la maladie s'éteint d'elle-même. Des études rétrospectives sont souvent effectuées mais il est très difficile d'évaluer l'impact réel de la maladie sur l'élevage, notamment dans un contexte favorable au développement de nombreuses autres pathologies.

Le système de surveillance régional de la FVR actuellement mis en place par la FAO a pour objectifs de renforcer, de manière coordonnée, les capacités des services vétérinaires nationaux de détecter les signes précurseurs de la maladie et d'adopter les mesures de lutte adéquates. Le processus de décision se nourrit d'une information objective générée par le projet (résultats de laboratoire et notifications de suspicions) et de la perception du risque dérivée d'indicateurs environnementaux tels que la pluviométrie, les prévisions météorologiques et des indices de végétation.

Circulation virale en 2000

La situation en 2000 a été particulièrement calme, notamment en Mauritanie et au Sénégal, où le virus ne semble pas avoir circulé durant la période d'hivernage. Après deux ans d'activité virale, notamment en Mauritanie, aucun anticorps IgM n'a été décelé dans les troupeaux sentinelles des deux pays, de juin à octobre. Le cycle épizootique en Mauritanie a commencé en 1998, et s'est poursuivi en 1999 du fait de la persistance de conditions climatiques favorables. Cette période d'activité s'est achevée en 2000 avec un retour à la normale des conditions climatiques et l'apparition d'une bonne couverture immunitaire dans la population animale. Une circulation virale, à bas bruit, a toutefois été observée au Mali, bien que la maladie (avortements, mortinatalité) n'ait pu être mise en évidence. En juillet, quatre animaux sur 30 se sont révélés positifs aux anticorps IgM, et cette séropositivité a été confirmée après que les animaux ont été prélevés à nouveau et testés positifs.

Séropositivité en anticorps IgM

Des anticorps IgG ont été détectés à des niveaux différents dans les trois pays. Une séropositivité modérée à élevée a été rencontrée en Mauritanie, où 57 pour cent des animaux d'un troupeau (20 animaux sur 35) ont été trouvés positifs aux anticorps IgG (région du Hodh El Chargui).

Séropositivité en anticorps IgM (%)

La détection d'anticorps IgG durant la saison d'hivernage 2000 est probablement due aux pluies supérieures à la moyenne durant les saisons précédentes (1998 et 1999 notamment), avec un retour des conditions normales en 2000. L'estimation de la pluviométrie générée par le Centre de prédiction climatique, pour la région du Hodh El Gharbi en Mauritanie, montre un pic de pluviométrie en 1999 (voir le graphique ci-dessous).

Estimation de la pluviométrie (Hodh EL Gharbi) - Données Météosat (1995-2000)

Des estimations de précipitations peuvent être aussi dérivées des images satellites dites de nuages à sommets froids, utilisant une technique mise au point par le groupe TAMSAT de l'Université de Reading au Royaume-Uni. Ces estimations sont basées sur une régression linéaire entre la durée de persistance des nuages à sommets froids et des données antérieures sur la pluviométrie, à l'opposé des extrapolations en "temps réel" générées par le Centre de prédiction climatique NOOA aux Etats-Unis. Ces données peuvent être présentées sous forme de cartes. Avec des images disponibles depuis 1988, des estimations pluviométriques moyennes ont pu être calculées sur la période 1988-2000. A l'aide du logiciel Windisp produit par la FAO, une carte a été réalisée exprimant la différence entre le mois d'août 1999 (troisième décade) et la moyenne obtenue sur les 12 dernières années (voir carte ci-dessous). Ce modèle montre que des pluies supérieures à la moyenne étaient attendues (> 27 mm au-dessus de la moyenne) dans la partie est de la Mauritanie en août 1999.

Pluviométrie estimée (données météosat) représentant la différence entre les valeurs observées au mois d'août 1999 - 3ème décade et la moyenne obtenue sur les douze dernières années.

Bien qu'à un niveau inférieur à la Mauritanie, des anticorps IgG ont aussi été détectés au Mali dans la plupart des troupeaux sentinelles. Un troupeau seulement ne présentait pas d'anticorps FVR.

Vers une meilleure connaissance de la maladie et une amélioration de la gestion des situations d'urgence

Les mesures prises dans le cadre des systèmes d'épidémiosurveillance nationaux ont été renforcées par les activités du projet. Ces dernières ont permis une amélioration significative de la sensibilisation des populations et du personnel technique à l'égard de la maladie. Grâce à la surveillance passive des maladies animales, plusieurs suspicions de foyers de FVR chez l'homme ont été signalées en Mauritanie (Trarza et région du Hodh El Gharbi) ainsi que des suspicions chez l'animal au Sénégal. Toutes les suspicions enquêtées se sont révélées négatives.

La gestion des situations d'urgence s'est par ailleurs trouvée améliorée et des décisions ont été prises sur la base des résultats de laboratoire obtenus dans le cadre du suivi des troupeaux sentinelles. Après la détection d'une circulation virale au Mali (anticorps IgM détectés en juillet), une mission conjointe réunissant les services vétérinaires et le Ministère de la santé publique s'est rendue sur le terrain pour enquêter sur cette suspicion de foyer.

Aucun signe clinique de la maladie n'a été trouvé pendant la mission d'enquête et un suivi régulier du troupeau a été effectué par les agents de terrain pendant toute la durée de la saison des pluies. Des conseils appropriés ont été dispensés à l'éleveur afin qu'il signale tout événement anormal, tels que des mortinatalités et des avortements et qu'il évite tout contact avec du matériel infectieux. Des activités de suivi ont montré, plusieurs mois plus tard, que l'infection dans le troupeau n'avait pas évolué et que la situation était maîtrisée.

La réaction rapide des services vétérinaires a mis en évidence l'un impact positif sur le processus de décision, grâce à une meilleure évaluation du risque associé à la circulation virale. Comme il a été observé pendant la mission d'enquête du mois de juillet et la période de surveillance couvrant le reste de la saison des pluies, il est important de souligner que la circulation virale n'est pas toujours associée à l'expression clinique de la maladie. Ceci montre que l'apparition de la maladie est le résultat complexe d'une association de facteurs de risque présents au même moment. En conséquence, une approche multifactorielle doit être adoptée pour comprendre l'épidémiologie de la maladie et pour mettre en place un système de surveillance de la fièvre de la vallée du Rift.

Répartition géographique de la fièvre de la vallée du Rift

La maladie a été observée au Sénégal et en Mauritanie dans le passé et des enquêtes sérologiques montrent qu'il existe une circulation virale au sein des trois pays.

Depuis 1987, la forme la plus sévère de la maladie a été observée en Mauritanie, causant de nombreuses victimes parmi la population en 1987 et en 1998. La plupart des foyers ont été observés dans la zone sèche de savane sahélienne à Acacia, jusque dans la région du Tagant au nord. Bien que le foyer de 1987 ait été relié à la mise en eau du barrage de Diama sur le fleuve Sénégal, on ne connaît toujours pas avec précision les facteurs déterminants de l'émergence des épizooties de fièvre de la vallée du Rift dans la région. Les foyers plus récents montrent que des pluies supérieures à la moyenne pourraient contribuer aussi à l'expression de la maladie dans cette partie de l'Afrique.

Les conditions climatiques étant redevenues normales, il est essentiel de surveiller avec attention l'évolution des aménagements hydrauliques en prévision et des facteurs climatiques pendant les deux ou trois prochaines années afin de repérer tout événement susceptible de favoriser le développement d'une nouvelle épizootie. La surveillance des maladies transmises par des vecteurs et des paramètres environnementaux est particulièrement cruciale en cette période de réchauffement de la planète et face à son impact sur l'apparition d'événements climatiques extrêmes.

Avantages et contraintes du système

S'il est vrai que les avantages apportés par un tel système sont apparus évidents, à la lumière des résultats présentés précédemment, il n'en demeure pas moins qu'un système d'alerte basé sur le suivi des troupeaux sentinelles comporte un certain nombre de contraintes qu'il ne faut pas sous-estimer. En effet, le coût du système et de son maintien, la mobilité des agents, l'acheminement des prélèvements sont autant de facteurs limitants à prendre en compte dans la pérennisation de la surveillance de la fièvre de la vallée du Rift. Des solutions de rechange visant à alléger ce système peuvent être recherchées pour en assurer la continuité sur le long terme (technique des papiers buvards pour le prélèvement mensuel des animaux, réduction du nombre de prélèvements, etc.). La sensibilité du système et sa capacité de détecter des épizooties majeures doivent aussi être prises en compte. Un maillage trop lâche des troupeaux sentinelles pourrait induire une sous-estimation de la circulation virale. A ce titre, il est important de souligner qu'un système d'alerte de la FVR basé sur un réseau de troupeaux sentinelles ne peut se concevoir qu'en appui à un système d'épidémiosurveillance national fonctionnel, capable de révéler des suspicions de foyers de la maladie.

Perspectives

Le projet de coopération technique (TCP/RAF/8931) mis en place par la FAO se terminera en septembre 2001.

Les activités entreprises dans le cadre de ce projet devraient recevoir, au niveau régional, le soutien du programme PACE (Contrôle panafricain des épizooties) financé par l'Union européenne. Au niveau national et plus particulièrement au Sénégal, le projet EMERCASE de télémédecine devrait contribuer à la poursuite du système et à l'élaboration d'un modèle de prédiction d'apparition et de diffusion de la maladie.

Ré-émergence du virus de la fièvre de la vallée du Rift au Sénégal et en Mauritanie en 1998-1999: Résultats entomologiques

Diallo M., Ba K., Mohameden O. Abdalahi, Nabeth P., Lochouarn L., Sall A A., Ba Y., Marrama L., Girault L., Mondo M. et Mathiot C.

Institut Pasteur de Dakar, Institut de la recherche pour le développement, Ministère de la santé et de l'action sociale (Mauritanie), Centre national d'hygiène (Mauritanie).

Une surveillance entomologique a été conduite pendant deux ans en Mauritanie et au Sénégal suite à la ré-émergence du virus de la fièvre de la vallée du Rift dans la zone d'Ayoun El Atrouss (Mauritanie) en 1998. Cette surveillance avait comme principal objectif de mesurer l'étendue de la circulation du virus. Elle a permis de faire l'inventaire de la faune culicidienne de ces localités, de mettre en évidence un foyer épizootique du virus de la FVR au Sénégal et d'identifier un nouveau vecteur du virus. Trente-six souches, isolées pour la première fois dans la nature à partir de Culex poicilipes, ont été capturées à Diawara (Sénégal) avec des taux d'infection de 0,36±0,06%. De même, 27 souches de ce virus ont été isolées du même vecteur en Mauritanie. Ces isolements constituent une grande première dans l'histoire naturelle du virus de la FVR qui n'avait jamais été isolé à partir de moustiques en Mauritanie, lieu des principales épidémies et épizooties d'Afrique de l'Ouest. En plus du virus de la FVR spécifiquement recherché, les résultats obtenus ont apporté des informa-tions supplémentaires sur la circulation d'autres arbovirus: le virus Wesselsbron (qui présente, chez le bétail, les mêmes propriétés abortives et de mortinatalité que le virus de la FVR), et les virus Sanar et Bagaza.

Transmission par un vecteur domestique de la fièvre de la vallée du Rift à Diawara (Sénégal) en 1998

Laurence MARRAMA1, André SPIEGEL1, Kader NDIAYE1, Amadou A. SALL2, Eugénia GOMEZ3, Mawlouth DIALLO4, Yaya THIONGANE5, Adama TALL1, Christian MATHIOT2

1. Unité d'épidémiologie - Institut Pasteur - Dakar

2. Département de virologie - Institut Pasteur - Dakar

3. Service national des grandes endémies - Dakar

4. Laboratoire de zoologie médicale de l'Institut de recherche pour le développement - Institut Pasteur - Dakar

5. Institut sénégalais de recherches agricoles - Dakar-Hann

En novembre 1998, une circulation du virus de la fièvre de la vallée du Rift (FVR) a été détectée à Diawara par la mise en évidence d'immunoglobulines M chez des moutons et l'isolement du virus chez des moustiques de l'espèce Culex poicilipes, capturés autour d'une mare située à la périphérie du village. Une étude de séroprévalence a alors été menée auprès de la population du village. Un échantillonnage en grappe (la grappe étant la concession) a permis l'inclusion de 1 520 personnes entre six mois et 83 ans. Pour chaque inclus, un prélèvement sur buvard au bout du doigt a été réalisé et on a réuni des informations individuelles et collectives. La prévalence globale a été estimée à 5,2% et la prévalence chez les enfants de six mois à deux ans à 8,5%. Aucune association statistique n'a été constatée entre la prévalence et les variables suivantes: âge, sexe, contact avec la mare, présence de moutons, existence d'avortements chez ces moutons, déplacements individuels ou collectifs. Cinq concessions présentant une prévalence particulièrement élevée ont été identifiées. Elles étaient regroupées autour d'un ravin situé au centre du village. Une corrélation négative a été trouvée entre la distance au ravin et la prévalence (r=-0.43, p<0.001). La valeur de la prévalence globale et la similitude des prévalences observées dans toutes les classes d'âge suggèrent que la circulation du virus a été limitée, récente et qu'elle n'est pas endémique. Les hypothèses concernant le facteur causal de la circulation virale sont à l'étude. L'hypothèse selon laquelle un vecteur de la FVR serait présent dans le village a été confortée, l'année suivante, par la capture de Culex quinquefasciatus, autour du ravin. Ce moustique, très proche de Culex pipiens, le vecteur principal de la FVR en Egypte, pourrait jouer un rôle similaire à ce dernier dans la transmission interhumaine de la FVR.

Les techniques de diagnostic utilisées (Dr Y. Thiongane, LNERV)

La surveillance repose sur un examen clinique (avortements, mortalité des jeunes, présence de vecteurs) des troupeaux sentinelles de petits ruminants et un contrôle sérologique régulier (tous les mois) portant sur un échantillon, afin de vérifier qu'il n'y ait pas de transmission virale en cours (présence d'anticorps IgM, séroconversion) pendant la saison des pluies (de juin à novembre selon les pays), considérée comme la saison à risque. Les résultats sont diffusés par courrier ou par téléphone au poste vétérinaire qui assure le suivi sur le terrain du troupeau sentinelle.

Diagnostic clinique

Chez l'animal, le diagnostic clinique (et épidémiologique) est basé sur l'association d'avortements et de mortalités néonatales d'allure épizootique chez les petits ruminants et les bovins (les ovins sont plus atteints dans une région infestée de moustiques).

Chez l'homme, la FVR évolue dans 98% des cas sous forme pseudo-grippale pouvant durer une semaine. "Si ce n'est pas la grippe, ça lui ressemble".

Cependant des formes graves peuvent être observées: forme oculaire, encéphalique et hémorragique. Cette dernière est la plus grave avec une issue, très souvent, fatale (hyperthermie, hématémèse, méléna et épitaxies, ictère, etc.). La FVR est une zoonose pouvant devenir un véritable problème de santé publique comme en Egypte en 1977 et dans la vallée du fleuve Sénégal en 1987. En Égypte, l'incidence élevée de rétinites en 1993 avait permis d'annoncer la circulation du virus FVR.

De plus, des indices extérieurs comme la pullulation de moustiques peuvent révéler la circulation du virus de la FVR.

Diagnostic de laboratoire

Le diagnostic clinique doit être confirmé au laboratoire par plusieurs tests dont certains ont été retenus pour les laboratoires nationaux vétérinaires du réseau sous-régional de surveillance de la FVR.

Prélèvements

Les prélèvements à réaliser pour le diagnostic de laboratoire sont les suivants:

Lorsque l'acheminement se fait à température ambiante, les organes peuvent être préservés dans une solution saline glycérinée 50/50(v/v). Les prélèvements peuvent être conservés à +4°c ou congelés.

Il faudra accorder une attention particulière au niveau d'infectiosité des tissus des animaux malades et au risque élevé de contamination. Des précautions toutes particulières doivent être prises lors de l'autopsie, des prélèvements et au moment de l'expédition.

Les colis contenant les prélèvements doivent être conditionnés conformément aux normes internationales afin d'éviter tout risque de contamination des personnes qui les manipulent.

Pour le traitement des prélèvements, les laboratoires doivent disposer d'une salle d'autopsie bien équipée dotée d'au moins deux lampes à lumière ultra violette stérilisante et d'une lampe attrape-insectes. Cette précaution permet de stériliser l'atmosphère de la salle d'autopsie et de détruire les moustiques vecteurs du virus présents dans l'environnement immédiat. De plus, l'équipement de cette salle doit être complété par un incinérateur servant à détruire en toute sécurité les cadavres par la chaleur.

Les laboratoires étant situés dans des zones d'habitation, la destruction des cadavres par enfouissement doit être interdite en présence de prélèvements suspects de FVR.

Techniques virologiques.

Isolement de virus.

C'est la technique la plus sûre de diagnostic de la FVR.

Elle est relativement facile et consiste à isoler et à identifier le virus sur des animaux de laboratoire (souris, hamster) ou sur cultures de cellules. Le virus de la FVR est l'un des rares qui peut tuer ces animaux de laboratoire par n'importe quelle voie d'inoculation (intracérébrale, intrapéritonéale, etc.). Mais cette technique présente des risques liés à la manipulation de matériels hautement infectieux et exige que les conditions suivantes soient remplies:

La technique d'isolement du virus de la FVR, la plus sensible, est celle qui utilise l'inoculation d'animaux comme les souriceaux nouveau-nés, les hamsters et les agneaux. L'inoculum est constitué d'une suspension à 20% de tissu hépatique ou cérébral dans du PBS additionné d'antibiotiques. La présence de virus se manifeste par la mort des souriceaux nouveau-nés trois à cinq jours après l'inoculation par voie intracérébrale. Les fragments des animaux morts ou ayant présenté des signes de maladie sont alors testés avec des sérums spécifiques connus.

La seconde technique d'isolement du virus utilise l'inoculation de cellules sensibles comme les cellules VERO et BHK. La présence de virus se manifeste en trois à cinq jours par un effet cytopathogène caractéristique. L'identification peut se faire par immunofluorescence directe.

L'inoculation du virus de la FVR à des systèmes sensibles entraîne une production massive de virus et augmente le risque de contamination pour le personnel et de diffusion du virus dans l'environnement.

Toutefois, étant donné les risques, le recours à cette technique d'isolement pour le diagnostic de la FVR est fortement déconseillé dans les Laboratoires nationaux vétérinaires et il convient de recourir à la collaboration avec les laboratoires de Dakar, notamment l'Institut Pasteur de Dakar, centre collaborateur de l'OMS pour les recherches sur les arbovirus en Afrique.

Immunofluorescence

L'immunofluorescence sur étalement de foie, rate ou de cerveau sacrifié en hyperthermie permet d'avoir un résultat rapide.

Techniques sérologiques

Le techniques les plus courantes sont l'immunofluorescence, la réduction des plages et le test immuno-enzymatique pour la recherche d'anticorps IgG et IgM.

Dans le réseau de surveillance épidémiologique, les techniques de neutralisation virale et ELISA ont été retenues.

Elle sont réalisées pour déterminer, de façon rétrospective, l'ampleur d'une épidémie. Pour la confirmation du diagnostic, il est important de pouvoir différencier une infection récente d'une infection acquise antérieurement.

La technique ELISA

C'est la technique sérologique particulièrement recommandée en raison de sa spécificité et de sa sensibilité. De plus, elle permet de traiter un grand nombre de sérums (200-300) en un laps de temps relativement court (24 heures) et de détecter différentes classes d'immunoglobulines (IgG et IgM). Cette technique consent d'identifier avec un seul sérum une infection virale récente par la présence d'IgM.

Les laboratoires disposent de la chaîne complète ELISA (lecteur, ordinateur logiciel EDI-2.3 elisa data interchange et imprimante) et de la compétence nécessaire pour réaliser le test ELISA.

Nous rappelons qu'en 1998, 3 833 sérums de bovins ont été analysés au CNERV par cette technique pour établir la situation immunitaire vis-à-vis de la peste bovine en Mauritanie. L'acquisition d'un distillateur d'eau permettra d'améliorer la quantité et la qualité de l'eau nécessaire à la réalisation de ce test.

La mise en place définitive du test ELISA a été rendue possible grâce à l'acquisition de réactifs (antigènes et immuno-ascite) et d'un kit fourni par l'AIEA. Certains sont disponibles sur le marché comme les conjugués, tampons et autres produits chimiques.

Les collaborations comme celle avec l'Institut Pasteur de Dakar et l'AEIA doivent être poursuivies et nous permettre de disposer des réactifs nécessaires (antigène et immuno-ascite) à la poursuite de la surveillance de la FVR lors de la prochaine saison des pluies 2001.

La technique de neutralisation virale.

C'est la technique de référence pour la FVR car elle est la plus spécifique, et elle est utilisable dès le troisième jour de l'infection. Les anticorps détectés par ce test persistent de six mois à un an (et même pendant plusieurs années) à des titres élevés. Toutefois, cette technique nécessite l'utilisation de virus vivant et de cellules en culture.

Elle permet d'analyser les sérums quelle que soit l'espèce animale (ovine, caprine, bovine et cameline) avec les mêmes réactifs et dans un laps de temps compris entre quatre et cinq jours. La réalisation de deux prélèvements à deux ou trois semaines d'intervalle permet de mettre en évidence une infection récente par une augmentation du titre sérique ou par l'existence d'une séroconversion (animal négatif devenant séropositif).

Elle est d'un coût plus faible que la technique ELISA car les réactifs (antigènes, virus, anticorps), une fois acquis, peuvent être produits par tout laboratoire ayant la capacité d'entretenir des cultures de cellules. Cependant, la manipulation de la souche Smithburn est dangereuse et nécessite des précautions pour limiter au maximum les risques de contamination au laboratoire.

Les réactifs, notamment la souche virale Smithburn (souche utilisée également comme vaccin pour les animaux contre la FVR), et le sérum de référence positif, sont disponibles au LNERV.

La technique d'immunofluorescence

C'est une technique d'application facile et déjà utilisée au CNERV pour le diagnostic de la rage. Très spécifique, l'immunofluorescence sur un calque de foie, de rate ou de cerveau d'animal sacrifié en hyperthermie permet d'avoir un diagnostic rapide de la FVR. Ainsi, il peut être utilisé pour identifier la présence de virus dans les prélèvements d'organes d'animaux suspects mais aussi pour déceler les anticorps antivirus de la FVR dans les sérums d'animaux.

Les laboratoires disposent de l'équipement nécessaire mais ont besoin de petit matériel (lames, lamelles) et de réactifs (conjugués marqués à la fluorescence). Les réactifs (sérum de référence de mouton antivirus de la FVR) que nous avons apportés du LNERV de Dakar-Hann nous ont permis de l'appliquer au CNERV sur des cellules VERO infectées par la souche Smithburn.

La technique histopathologique

C'est une technique pratique, rapide et très spécifique de diagnostic de la FVR. On l'applique sur des fragments de foie placés dans de l'eau physiologique formolée à 10% et elle consiste à rechercher dans les cellules hépatiques des inclusions nucléaires acidophiles, caractéristiques de la FVR.

L'équipement nécessaire pour cette technique existe au service de cytologie de l'hôpital de Nouakchott (Dr Nasserdine) et Dr Kane, titulaire d'un diplôme du troisième cycle en anatomie pathologie des Ecoles vétérinaires françaises, a les compétences voulues pour réaliser ces analyses. Le CNERV serait alors le seul laboratoire de la sous-région à appliquer cette technique et servirait de centre vétérinaire de référence pour le diagnostic histologique de la FVR.

La mise en œuvre de l'examen histologique nécessite l'acquisition de consommables de laboratoire (réactifs et petit matériel) car la collaboration avec l'hôpital de Nouakchott pour l'utilisation du matériel est déjà assurée.

Les techniques génétiques:

La détection par amplification génique (PCR) et hybridation peut être employée dans le laboratoire de référence OMS de l'Institut Pasteur de Dakar qui possède l'équipement et le personnel adéquats.

Conclusions

En définitive, ces techniques permettent d'analyser tout prélèvement (sérums, organes) suspect de FVR et de poser un diagnostic rapide et fiable de la FVR dans les laboratoires nationaux vétérinaires de Bamako, de Dakar et de Nouakchott. Il existe des laboratoires nationaux vétérinaires (CNERV de Nouakchott, LCV de Bamako et LNERV de Dakar-Hann) chargés de l'analyse sérologique (test séro-neutralisation, test ELISA IgG et IgM) des sérums récoltés par les agents des postes vétérinaires et par l'équipe mobile responsables de la surveillance des animaux sentinelles. Le laboratoire de référence, représenté par l'Institut Pasteur de Dakar, confirme le sérodiagnostic réalisé par les laboratoires nationaux, effectue l'isolement et l'identification des souches virales identifiés et peut effectuer le séquençage du génome du virus FVR qui permet d'évaluer le pourcentage de similarité entre les souches virales de diverses origines géographiques.

Mais, pour sauvegarder cet acquis, il est indispensable de doter le laboratoire de virologie d'un budget de fonctionnement permettant l'achat de réactifs et de petit matériel de laboratoire. C'est une étape importante pour la surveillance de l'activité du virus et le contrôle de la maladie dans la sous-région car la menace de la FVR est permanente en raison des échanges transfrontaliers et des mouvements traditionnels et commerciaux d'animaux.

Ainsi, le laboratoire joue un rôle primordial dans notre programme de surveillance et de contrôle de la FVR. C'est lui seul qui peut confirmer le diagnostic et fournir des indications sur la circulation des souches virales (activité récente ou ancienne). Les données obtenues permettent d'orienter la stratégie (lutte antivectorielle, vaccination, etc.). Comme le réseau de troupeaux sentinelles, les laboratoires qui participent à la surveillance de la FVR sont constitués en réseau.

Au niveau de la sous-région, le contrôle de la FVR passe par la mise en place d'un système d'alerte précoce fonctionnel basé sur la surveillance des troupeaux sentinelles, l'existence de laboratoires nationaux de diagnostic vétérinaire performants et le suivi des modifications environnementales par l'imagerie satellitaire pour détecter, en temps réel, les conditions propres à l'émergence de la FVR et/ ou poser le diagnostic de la FVR le plus rapidement possible.

Les techniques histopathologiques dans le diagnostic de la FVR (Dr Y. Kané, EISMV)

La fièvre de la vallée du Rift (FVR) est une maladie virale qui affecte les animaux et l'homme. Elle s'est révélée comme une zoonose majeure dans les dernières décennies.

Chez les animaux, elle se traduit principalement par des avortements et des mortinatalités associées à des lésions de nécrose hépatique et de congestion/ou hémorragie au niveau de certains organes (poumons, rate, encéphale, tube digestif, etc.). Le diagnostic de laboratoire de cette maladie fait appel à plusieurs techniques parmi lesquelles les techniques histopathologiques.

A l'instar d'autres affections, les techniques histologiques sont appliquées au diagnostic de la FVR et aux travaux de recherche sur la maladie.

Le diagnostic

Prélèvements

C'est après l'autopsie d'un avorton ou d'un animal mort que l'on soupçonne atteint de la FVR que les prélèvements destinés au laboratoire d'histopathologie sont recueillis. Il faut rappeler que la FVR est une zoonose et que toutes les précautions nécessaires doivent être prises afin d'éviter la contamination des personnes exposées et des objets environnants (autopsie dans un local isolé, port de gants et lunettes, destruction de la carcasse, nettoyage et désinfection).

Au cours de cette autopsie, on peut prélever le foie, les poumons, les nœuds (ganglions) lymphatiques, la rate, les reins, l'encéphale et tout organe ou tissu présentant des lésions macroscopiques.

L'intérêt de multiplier les prélèvements réside dans la possibilité offerte au pathologiste d'observer plusieurs lésions à des stades d'évolution variables dans des organes différents, ce qui facilite l'interprétation affinée des résultats histologiques.

Il faut aussi rappeler que la qualité des prélèvements à envoyer doit être satisfaisante, c'est-à-dire que ces prélèvements doivent être bien conservés (fixés rapidement dans un volume suffisant de formol à 10 %: 10 fois le volume des prélèvements). En effet, plus la fixation tarde, plus l'autolyse gagne les tissus prélevés et rend l'interprétation des lésions histologiques difficile, voire impossible.

Techniques employées

On fait appel à la technique histologique classique et à la technique immunohistochimique.

Résultats

Histologie classique

Les résultats observés lors d'une infection par la FVR naturelle ou expérimentale sont les suivants:

Immunohistochimie

Les résultats positifs révèlent les antigènes viraux par le marquage des cellules lésées. Ce marquage est intense dans le foie (cytoplasme, noyau ±) mais il est faible (marquage de rares cellules) dans les autres organes tels que la rate, le nœud lymphatique préscapulaire, les poumons et les reins.

Diagnostic différentiel

Les résultats histologiques permettent de faire un diagnostic différentiel par rapport à d'autres maladies abortives ou hépatotoxiques (cf. tableau ci-joint).

La recherche

Les techniques histopathologiques, soit classiques soit immunohistochimiques, appliquées aux prélèvements atteints de la FVR permettent de révéler les lésions induites par le virus de cette maladie. L'interprétation de ces lésions peut préciser leurs caractéristiques (organes cibles, nature des lésions, étendue, sévérité). En outre, l'immunomarquage donne un diagnostic de certitude par la révélation des antigènes du virus.

La technique histopathologique est, par conséquent, un examen complémentaire très important pour les travaux de recher-che sur la FVR.

Conclusion

Les techniques histopathologiques sont un moyen pratique de diagnostic de laboratoire de la FVR pour les pays de la sous-région où les conditions de terrain sont difficiles et peu adaptées à la conservation des prélèvements et leur acheminement aux laboratoires de diagnostic. En effet, grâce à ces techniques, les prélèvements ne nécessitent pas de précautions particulières entre leur collecte et leur envoi au laboratoire d'histopathologie car ils sont rapidement fixés par le formol. En outre, les résultats histologiques permettent de faire un diagnostic différentiel des maladies abortives.

Perspectives

La FVR est une maladie d'évolution enzootique dans plusieurs pays africains. Malgré les quelques données acquises, suite aux flambées épizootiques en Afrique de l'Ouest, des zones d'ombre subsistent, notamment concernant les éventuels réservoirs, les signes cliniques et lésionnels, les vaccins, etc. De plus, le diagnostic différentiel des affections abortives est crucial eu égard aux pertes considérables liées aux avortements et aux mortinatalités au sein des cheptels de ces pays.

Dans le cadre des activités de diagnostic et de recherche sur la FVR, les laboratoires de l'Ecole inter-Etats des sciences et de médecine vétérinaires de Dakar, notamment le laboratoire d'histopathologie, constituent un cadre adéquat pour participer à ces activités (diagnostic, enquêtes épidémiologiques, recherche sur la résistance génétique).

Diagnostic différentiel des maladies abortives et hépatotoxiques par des critères histologiques

AFFECTIONS

PRÉLÈVEMENTS

RÉSULTATS HISTOLOGIQUES

* Maladies virales:



- FVR

Foie

Nécrose hépatocytaire péricentrolobulaire et médiolobulaire, ± cholestase, révélation des antigènes viraux (immunomarquage)

- Maladie de Wesselsbron

Foie

Nécrose hépatocytaire localisée au hasard, réaction des cellules sinusoïdales, cholestase marquée

* Maladies bactériennes:



- Listériose

Encéphale, foie, poumons, myocarde, reins, rate, placenta, colon

Foyers nécrotiques, présence de bactéries (coloration de Gram)

- Brucellose

Placenta, poumons, nœuds lymphatiques, foie, rate, reins

Lésions nécrotiques granulomateuses, présence de bactéries (coloration de Gram)

- Leptospiroses

Reins, encéphale

Nécrose tubulaire, infiltrat inflammatoire, méningite non suppurée, présence de leptospires (coloration de Warthin Starry, immunofluorescence, immunomarquage)

* Mycoses

Placenta, encéphale, peau, poumons (coloration PAS, GROCOTT)

Lésions nécrotiques, vascularité, présence de champignons

* Protozooses:



- Toxoplasmose

Placenta, encéphale, foie, myocarde, poumons

Lésions nécrotiques non suppurées, présence du protozoaire (HE, immunomarquage)

- Néosporose

Placenta, encéphale

Lésions nécrotiques non suppurées, présence du protozoaire (HE, immunomarquage)

- Infection par Sarcocystis spp

Placenta, encéphale, myocarde, foie, reins, poumons

Lésions nécrotiques multifocales non suppurées, présence du parasite (HE, immunomarquage)

* Affection hépatotoxique

Foie

Foyers nécrotiques disséminés au hasard

Le virus de la fièvre de la vallée du Rift: souche atténuée R566 (Dr M. Bouloy, Institut Pasteur Paris)

Les connaissances actuelles sur le virus et sa biologie nous permettent maintenant une approche rationnelle de la conception d'un virus atténué susceptible d'être un bon candidat pour la vaccination animale, voire humaine. Faisons le tour de nos connaissances sur le virus.

Quelles sont les souches atténuées existantes?

Parmi les souches atténuées connues, aucune n'est totalement satisfaisante.

La souche atténuée Smithburn est utilisée pour vacciner le bétail contre la fièvre de la vallée du Rift (FVR) mais elle a conservé un niveau élevé de neurotropisme et elle provoque des effets secondaires (avortements et malformations).

MP12 a été obtenue par Caplen et al. en 1985 à partir d'une souche égyptienne virulente ZH548 par passages successifs dans des cellules humaines en présence d'un agent mutagène, mais elle n'est pas complètement avirulente et provoque des encéphalites chez le hamsters (Rossi et al. 1986). Plus récemment, un clone particulier, Clone 13, issu d'un isolat humain de la République centrafricaine a été isolé. Ce nouveau virus avirulent chez la souris vient d'être caractérisé de façon détaillée, mais l'atténuation n'est portée que par un seul segment du génome.

Que savons-nous du virus?

Le virus FVR (VFVR) appartient à la famille des Bunyaviridae et au genre Phlebovirus. Il s'agit d'une particule enveloppée d'une centaine de nanomètres de diamètre dont le génome est constitué de trois molécules d'ARN (L, M et S), exprimant chacune les protéines virales structurales ou non structurales.

Le génome segmenté permet au virus d'échanger son matériel génétique avec d'autres souches ou avec des virus apparentés lors d'une coinfection. Ce phénomène de réassortiment existe chez VFVR comme chez tous les virus à génome segmenté, le virus de la grippe étant un exemple bien connu.

Schéma du réassortiment

Les protéines structurales sont au nombre de quatre: deux glycoprotéines ancrées dans l'enveloppe à la surface de la particule, la nucléoprotéine et la polymérase formant toutes deux un complexe ribonucléoprotéine en s'associant à chaque molécule L, M et S d'ARN génomique.

Le génome code également des protéines non structurales qui, par définition, ne sont pas présentes dans les particules virales mais s'expriment dans les cellules infectées. La protéine non structurale NSs, appelée ainsi car elle est codée par le petit segment (S), est très caractéristique de l'infection par le VFVR. En effet, elle s'accumule dans le noyau et forme des structures filamenteuses qui sont visibles dans les cellules infectées comme dans les hépatocytes d'animaux infectés et permet de poser le diagnostic. La séquence primaire de NSs est bien conservée chez toutes les souches analysées, seul, Clone 13 fait exception car son génome possède une délétion de 70 % de la région codant pour NSs. Cette protéine défective ne forme pas de filament nucléaire mais reste dans le cytoplasme où elle est dégradée par le protéasome.

Comment étudier la pathogénie?

La souris est un excellent modèle qui reflète la clinique observée chez les agneaux et parfois l'homme. Inoculée par voie périphérique avec les souches virulentes, la souris développe une hépatite aiguë en quelques jours et meurt. Si les souches sont atténuées, l'animal survit parfaitement. La possibilité d'échanger certaines régions du génome d'une souche avec une autre (réassortiment) permet de localiser les marqueurs d'atténuation. En effet, si on produit des réassortants entre une souche atténuée et une souche virulente, les réassortants ayant un seul segment (L, M, ou S) porteurs de marqueur(s) d'atténuation seront atténués. Grâce à cette méthode, nous avons localisé le déterminant d'atténuation de Clone 13 dans le segment S. Selon toute vraisemblance, il s'agit du gène délété NSs. Les segments L et M de ce virus ne possèdent aucun déterminant d'atténuation.

Quel rôle joue NSs?

D'une façon générale, lors de l'infection par un virus, l'action antivirale de l'interféron (ou immunité innée) intervient de façon précoce et a pour effet de ralentir la propagation du virus jusqu'à ce qu'apparaissent les anticorps protecteurs et/ou les CTL. Depuis longtemps, on savait que l'interféron ou les inducteurs d'interféron permettaient de traiter efficacement la FVR mais on ne connaissait pas le mécanisme. En réalité, lors d'une infection par une souche virulente de VFVR, la souris ne produit pas d'interféron car NSs est un facteur bloquant sa production. Le traitement par l'interféron permet ainsi de pallier le manque et d'inhiber la multiplication du virus. Si, par contre, un virus tel que Clone 13, possède une NSs défective, l'interféron sera produit et le virus ne se propagera pas dans les différents organes. NSs apparaît donc comme un facteur important de virulence ou d'atténuation si elle est défective pour sa fonction de bloquer l'interféron.

Ainsi Clone 13 apparaît donc comme une souche intéressante pour deux raisons: la mutation est située dans un déterminant majeur de virulence et cette mutation est une délétion, ce qui rend la probabilité de réversion quasiment nulle.

La vaccination avec Clone 13 présente-t-elle des risques?

Comme les segments L et M ne portent pas de marqueurs d'atténuation, l'utilisation de Clone 13 comme vaccin n'est pas sans risque.

Imaginons le scénario où un animal est vacciné avec Clone 13 en période épidémique et contaminé simultanément par une souche virulente lors d'une piqûre de moustique infecté. Si les deux virus se retrouvent dans un même organe et une même cellule au même moment, des réassortants seront générés. Parmi ces derniers, seuls ceux qui portent le segment S de Clone 13 seront atténués. Lesquels de ces réassortants (virulents ou atténués) auront un avantage sélectif?

Cette question nous conduit ainsi à la conclusion suivante: le meilleur moyen de pallier ces problèmes serait d'avoir une souche vaccinale où chaque région du génome porte des marqueurs d'atténuation. Dans ce cas, tous les réassortants seront atténués. Dans cette optique, recherchons une source de segments L et M atténués et examinons la souche atténuée MP12.

Quels sont les marqueurs d'atténuation dans MP12?

MP12 a été obtenu après 12 passages de la souche ZH548 en présence d'un agent mutagène, le 5-fluoro-uracyl dans des cultures cellulaires. Ce virus porte des mutations d'atténuation dans les trois régions du génome. Notons toutefois que, par rapport à la souche virulente parentale, on n'a observé dans le segment S qu'une seule mutation ponctuelle dans la protéine NSs. Il semble que ce soit là le point faible de MP12. Le pouvoir neurotrope résiduel observé chez le hamster et les effets secondaires observés chez la brebis vaccinée avec MP12 (D Bishop, communication personnelle) pourraient être dus au faible niveau d'atténuation dans NSs ou à la réversion de cette unique mutation. Les segments L et M, par contre, présentent de bons critères d'atténuation auxquels sont associés des propriétés de thermosensibilité telles que le virus ne se multiplie pas si la température excède 40°C. La comparaison des séquences de MP12 et ZH548 a montré la présence de sept et neuf mutations par rapport à la souche virulente dans les segments L et M, respectivement. L'ensemble de ces mutations confère un niveau satisfaisant d'atténuation.

Réassortons MP12 et Clone 13 pour faire un virus atténué sans risque.

L'idée qui s'impose est donc de reconstituer un virus porteur de L et M de MP12 et S de Clone 13. Un tel virus devrait avoir les meilleurs critères de sécurité et d'innocuité. Reprenons le scénario précédent où l'animal vacciné est également contaminé par un virus virulent. Contrairement au cas précédent, tous les réassortants générés seront atténués. Afin de reconstituer un tel virus, une double infection des cellules Vero avec Clone 13 et MP12 a été réalisée. Les virus des huit génotypes attendus ont été isolés. Le réassortant R566 possédant le génotype recherché a été amplifié et, dans un premier temps, testé chez la souris. Même aux doses les plus élevées (un million d'unités infectieuses), le virus n'a induit aucun signe clinique chez la souris. De plus, il s'est avéré immunogène et nous avons montré qu'une dose de 100 unités protège la souris. Les premiers essais de vaccination chez le mouton ont été réalisés par Y. Thiongane qui établira si ce virus est un bon candidat pour la vaccination.

Essai de vaccination avec la souche R566 du virus de la fièvre de la vallée du Rift (Dr Y. Thiongane, LNERV)

La fièvre de la vallée du Rift (FVR) est une maladie virale, commune à l'homme et aux animaux, transmise par les moustiques (arbovirose). Présente essentiellement jusqu'ici sur le continent africain, elle est classée parmi par les maladies émergentes et son impact économique et social est important.

Décrite en 1912-1913, pour la première fois, la FVR est signalée comme une hépatite nécrosante qui touche particulièrement les élevages de ruminants domestiques (les ovins, les caprins et les bovins) de la vallée du Rift au Kenya. Seuls quelques cas de fièvre grippale ont été signalés dans la population humaine vivant dans la zone d'enzootie.

En 1977-1978, la FVR, sous une forme d'épizootie-épidémie très meurtrière, frappe la zone du delta du Nil, en Egypte. Elle touche de 25 à 50 % des troupeaux de ruminants domestiques. Lors de ce foyer, on a dénombré plus de 200 000 cas humains avec, au moins, 600 morts. Les modifications écologiques consécutives à la mise en service du barrage d'Assouan (extension des périmètres irrigués, multiplication des sites favorables aux moustiques, afflux d'animaux sensibles) seraient à l'origine de cette épidémie dans cette partie de l'Afrique, jusque-là indemne.

Depuis lors, la FVR est classée parmi les maladies de la liste A de l'Office international des épizooties (OIE). En conséquence, les pays doivent suivre les règles du code zoosanitaire pour sa déclaration et son contrôle. De plus, elle intéresse l'Organisation mondiale de la santé (OMS) car elle fait partie de huit fièvres hémorragiques virales humaines qui sont d'actualité dans le monde. De nombreux foyers ont été signalés ces dernières années à travers le continent: en Mauritanie-Sénégal en 1987, à Madagascar en 1991, au Kenya-Somalie en 1997-1998 et de nouveau en Mauritanie, très récemment, en 1998.

En Afrique de l'Ouest, l'épizootie-épidémie de Mauritanie-Sénégal de 1987 était la première décrite dans la basse vallée du fleuve. Elle s'est manifestée par un taux élevé (70 à 80%) d'avortements des femelles gravides (brebis, chèvres et vaches), une forte mortalité (90-100%) des jeunes animaux (agneaux, chevreaux et veaux). Pour les animaux adultes, l'infection virale a entraîné la mort (30%) ou un dépérissement (animal sans valeur économique) résultant de désordres hépatiques et de l'ictère. Les populations d'éleveurs, vivant au contact des animaux malades, ont été les plus touchées avec 1 500 cas et plus de 200 décès. Parmi les causes expliquant l'apparition de la FVR, on cite les facteurs suivants: la mise en eau du barrage anti-sel de Diama sur le fleuve Sénégal, la concentration animale et humaine dans les pâturages le long du fleuve, l'extension des périmètres irrigués et la présence d'eau douce pendant toute l'année dans les principaux marigots de la zone qui favorisent le développement des moustiques vecteurs du virus.

Depuis cet épisode, les études menées dans les trois pays riverains du fleuve Sénégal (Mali, Mauritanie et Sénégal) ont montré que la FVR s'est définitivement installée dans le bassin du fleuve Sénégal et constitue une menace permanente pour le cheptel mais aussi pour les hommes dans les zones où les conditions écologiques favorisent la pullulation des moustiques vecteurs de la maladie.

Le foyer de FVR survenu en septembre-décembre 1998 dans le sud-est de la Mauritanie corrobore ce constat. Il a concerné à la fois les animaux (avortements chez les petits ruminants, les bovins et les dromadaires) et les hommes (six décès à l'hôpital d'Aïoun) dans les régions du Hodh el Gharbi, de l'Assaba et du Brakna. Cette ré-émergence de la FVR rend urgente la prise de mesures de lutte pour contrôler la maladie en Mauritanie et éviter son extension à la faveur des mouvements d'animaux (de type commercial et traditionnel) entre les trois pays du bassin du fleuve Sénégal (Mali, Mauritanie et Sénégal).

La FAO, sollicitée, a mis en place un programme d'appui (TCP/MAU/8923 et TCP/RAF/8931) en Mauritanie, au Mali et au Sénégal avec comme objectifs, d'une part, la mise en place d'un système d'alerte et de réaction précoce vis-à-vis de la fièvre de la vallée du Rift et, d'autre part, l'établissement d'une stratégie de lutte par la vaccination du cheptel contre la maladie.

Pourquoi vacciner?

Pour la fièvre de la vallée du Rift, l'existence d'un cycle d'amplification chez l'animal semble nécessaire à l'apparition d'un foyer d'infection humaine. En dehors de ces phases épidémiques le virus est endémique chez les ruminants domestiques et la transmission à l'homme reste, bien que théoriquement possible, très rare. Lors des épidémies de FVR les ruminants domestiques jouent donc le rôle d'amplificateurs du virus.

La vaccination de ces animaux constitue alors un rempart essentiel pour la protection de l'homme, dans les zones de circulation du virus de la FVR, en supprimant un élément capital du cycle d'amplification du virus. Par ailleurs, la vaccination du bétail protège le cheptel contre les conséquences néfastes des épidémies animales, c'est-à-dire les avortements et les mortalités des jeunes.

Le bien-fondé de la vaccination doit être évalué par une étude économique du rapport coûts/bénéfices de cette intervention. Le coût de la maladie chez l'homme (infection, décès) et chez l'animal doit être mis en balance avec le coût de la vaccination (coût des campagnes de vaccination annuelles).

A titre indicatif, une étude de l'impact économique de la FVR a été réalisée dans un foyer d'avortement (11 avortements pour 26 mises-bas) en Côte d'Ivoire (Formenty et al. en préparation); cette étude montre que le coût de la maladie équivalait à 1 270 FCFA par animal entretenu dans le troupeau ou à 2 540 FCFA par femelle en âge de procréer, soit une baisse de revenu de 18% pour l'éleveur (méthode des indices, avec un prix à l'unité de vente égal à 600 FCFA/kg). Des études analogues peuvent être menées sur l'épidémie de 1998 pour évaluer le coût de la FVR au niveau des troupeaux atteints.

Qu'en est-il des vaccins contre la FVR?

La vaccination contre la FVR peut s'effectuer soit à l'aide d'un vaccin à virus vivant atténué soit en utilisant un vaccin à virus inactivé.

L'utilisation du vaccin inactivé présente de nombreuses contraintes:

Il existe plusieurs types de vaccin à virus vivant atténué.

La souche MVP12 (Mutagen Virus passage 12) avait été développée en 1989 par l'USAMRIID, le CIRAD-EMVT et l'Institut Pasteur de Dakar. D'après les résultats des rapports de l'IP Dakar, cette souche semble avoir donné d'excellents résultats d'innocuité et conféré une bonne immunité aux ruminants domestiques testés (dromadaires, bovins, ovins et caprins). Ce vaccin MVP12 a notamment été testé sur les races de brebis Peul et Touabir (Marc Guillaud, Bernard LeGuenno, Jean-Paul Gonzalez, 1989). La souche est actuellement la propriété de l'USAMRIID et sa disponibilité auprès de la FAO permettrait son utilisation en Afrique de l'Ouest. Des informations complémentaires sur cette souche MVP12 ont été obtenues grâce à des entretiens ou échanges de courrier avec Michèle Bouloy, Robert Swanepoel et Ray Arthur [voir les coordonnées ci-dessous]. La souche MVP12 a été testée à l'Onderstepoort Veterinary Intitute et semblait avoir un pouvoir abortif sur les brebis gestantes.Des réserves ont donc été émises quant à l'utilisation de la souche MVP12 pour la vaccination des ruminants domestiques.

La souche Smithburn, le vaccin à virus vivant atténué utilisant la souche Smithburn, possède un pouvoir pathogène résiduel et est abortif et tératogène. Il induit une immunité en sept à 10 jours et cette immunité dure toute la vie économique de l'animal (document WHO/CDC/VPH/93.128). Le vaccin est utilisé depuis de nombreuses années pour combattre les épidémies en Afrique de l'Est et en Egypte mais uniquement sur des femelles non gravides. Son effet sur les populations animales locales d'Afrique de l'Ouest est mal connu. Une étude succincte menée en Mauritanie et au Sénégal sur les races locales de petits ruminants avait conclu que le vaccin Smithburn déterminait des avortements chez les chèvres (Yaya Thiongane, 1988 et rapport CNERV 1988). Son pouvoir de réversion à la virulence est inconnu, bien qu'on pense qu'il soit très bas. En conséquence, il apparaît prudent de ne pas recommander son utilisation.

La souche Clone 13, a été développée par l'Institut Pasteur de Paris (Michèle Bouloy). Des premiers tests ont été conduits sur cette souche par l'Onderstepoort Biologicals en Afrique du Sud (Pamela Hunter, Bob Swanepoel). Les premiers résultats semblent tout à fait satisfaisants.

Il existe également un réassortant, la souche R566, des souches MP12 et Clone 13 (avec S de Clone 13 et L et M de MP12); les premiers essais chez la souris sont satisfaisants et il faudrait maintenant passer aux essais sur le mouton. En termes de réponse immunitaire et d'innocuité, le vaccin préparé avec la souche R566 semble avoir donné de meilleurs résultats que ses prédécesseurs. Un essai vaccinal avec la souche R566 permettrait de se doter d'un vaccin de nouvelle génération d'un emploi beaucoup plus souple que Smithburn ou MP12.

Objectifs de l'essai

Tester les compétences vaccinales de la souche R566.

Tester l'innocuité de la souche R566 chez les animaux et chez les femelles gestantes.

Tester le protection conférée par la souche R566 contre une épreuve virale.

Tester la stabilité génétique de la souche.

Résultats préliminaires

Dose minimale productrice d'anticorps chez le mouton.

Protocole:

Les animaux sont de race warale (maure x peul), race présente dans le nord et le centre du pays (zones d'enzootie de FVR), à savoir les vallées du fleuve Sénégal et du Ferlo. Cet essai a concerné 27 animaux d'un poids moyen de 21 kg et dépourvus d'anticorps antivirus de la FVR (anticorps neutralisants, IgG et IgM).

Adaptation:

Les animaux sont mis en observation pendant un mois et subissent une antibiothérapie, un déparasitage interne et externe, une vitaminothérapie et une vaccination contre la pasteurellose et la peste des petits ruminants. Pendant cette période d'adaptation, la température est relevée quotidiennement.

Vaccination:

Six doses de la souche R566 (101, 102, 103, 104, 105, 106 par ml) ont été testées sur des lots de quatre animaux. Les doses sont (1011 102 103 104 105 106) par ml et elles sont inoculées par voie sous cutanée à raison de 1 ml par animal.

Les animaux inoculés sont suivis quotidiennement sous l'angle de la température et font l'objet de prélèvements de sang (sang hépariné et sérum). Le sang est prélevé de JO à J8, à J14, J21 et J28 pour la recherche d'anticorps (Neut, IgG et IgM) et de JO à J8 pour la recherche de virus.

Les tests utilisés sont la neutralisation virale, l'ELISA IgG et IgM et le titrage viral.

Résultats:

Suivi clinique: 28 jours après l'inoculation de la souche 566, aucune élévation significative de la température et aucun signe évocateur de la FVR n'ont été notés au niveau des divers lots d'animaux. Un lot d'animaux témoin a été constitué et suivi dans les même conditions.

L'innocuité de la souche R566 est totalement satisfaisante aux doses virales testées, c'est-à-dire: 101, 102, 103, 104, 105, 106 u.f.p par ml chez les animaux locaux testés.

Suivi sérologique: 28 jours après l'inoculation de la souche 566, trois doses 104, 105, 106 u.f.p par ml ont entraîné une séroconversion de 100 % chez les animaux inoculés.

La dose de 104 u f p par animal est la dose virale minimale provoquant 100% de séroconversion au 21e jour après l'inoculation chez les animaux locaux testés avec la souche R566 du virus de la FVR.

Le seuil sérique retenu pour le test SN est le titre 10 sur culture de cellules VERO.

Cette dose minimale donnant 100% de séroconversion servira à vacciner les animaux pour les tests d'innocuité et de vaccination sur le terrain.

Age minimal de vaccination.

L'âge minimale de vaccination est fixé à six mois chez les moutons. Cette limite a été établie sur la base d'études sérologiques réalisées précédemment et par d'autres équipes qui démontrent la persistance des anticorps maternels anti-FVR chez les agneaux de 0 à 6 mois.

Test d'innocuité sur l'animal tout venant.

Aucun effet nocif n'a été décelé à la suite de l'administration d'une surdose vaccinale (100 fois la dose minimale productrice de 100% de séroconversion en anticorps neutralisant le virus de la FVR).

Test d'innocuité chez la brebis gestante.

Le test a débuté avec une période d'adaptation qui s'est révélée beaucoup plus longue que prévue. Les femelles gestantes provenant de l'élevage traditionnel extensif supportent mal la claustration.

L'alternative à cette sensibilité particulière des femelles gestantes est l'acclimatation de femelles mises en reproduction dans les locaux d'expérience. Le contrôle de l'innocuité se fera sur des femelles gestantes contrôlées (dosage de progestérone).

Le délai de l'essai sera prolongé de trois mois, c'est-à-dire jusqu'en août au lieu de mai 2001.

Détermination de la dose protectrice (nécessité d'une animalerie P3).

Epreuve des animaux vaccinés avec une souche sauvage.

Epreuve de brebis gestantes et vaccinées avec une souche sauvage.

Stabilité génétique de la souche R566 chez l'animal vacciné (nécessite un laboratoire de biologie moléculaire).

Chez l'animal vacciné, on cherche à montrer qu'il n'y a pas de réversion de la souche vaccinale vers la virulence et la stabilité génétique de la souche.

Stabilité génétique de la souche R566 chez le moustique (nécessité de disposer d'un laboratoire d'entomologie médicale).

Chez le moustique qui se nourrit du sang du mouton, on cherche à montrer qu'il n'y a pas de réversion de la souche vaccinale vers la virulence et la stabilité génétique de la souche.

Dose minimale productrice d'anticorps neutralisant le virus de la FVR chez le mouton

DOSE INOCULÉE (UFP)

POURCENTAGE DE SÉROCONVERSION

SEMAINE 1

SEMAINE 2

SEMAINE 3

SEMAINE 4

101

0

0

0

0

102

0

50

50

75

103

0

25

25

75

104

0

75

100

100

105

0

75

100

100

106

0

100

100

100


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