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Section II: GESTION DE L’INFORMATION: Discussion sur les options

L’examen des initiatives internationales d’évaluation et des acteurs en jeu révèle un énorme potentiel de collaboration. La similarité des objectifs, la complémentarité des compétences, la rareté des ressources et l’intérêt général pour la collaboration constituent un excellent point de départ pour la constitution de réseaux performants. De fait, un grand nombre des initiatives susmentionnées ont des réseaux et beaucoup d’acteurs collaborent déjà à différents niveaux. Pour analyser les possibilités d’accroître l’efficacité de cette collaboration, la présente section étudiera comment organiser l’information et évaluer l’utilité des C et I pour faciliter la collaboration, et elle estimera les limites de son harmonisation.

Modèles de gestion de l’information

L’ère de l’information où nous vivons se caractérise par la communication numérique et la pléthore d’informations. Il est généralement reconnu qu’il est nécessaire d’organiser et de structurer cette information souvent écrasante et d’optimiser son utilisation et ses avantages. Cela s’applique aussi à l’information générée par la surveillance environnementale, économique et sociale. Par voie de conséquence, de nombreuses conférences, réunions et consultations d’experts ont été tenues ces dernières années pour débattre des possibilités d’améliorer la gestion de l’information.

Les deux stratégies suivantes ont été définies à cette fin (Köhl 2000, PNUE 2002, Braatz 2002, Puustjärvi et Simula 2002):

- Harmonisation: rendre comparables et cohérents les rapports remis aux différents instruments, par l’utilisation, par exemple, de termes et définitions communs ou comparables et d’unités normalisées pour les données et les années de référence communes. La comparabilité signifie que les définitions sont établies de manière à ce que leurs écarts éventuels puissent être identifiés, et que les données fondées sur une seule définition puissent être converties pour répondre aux besoins d’une autre définition connexe. La cohérence des définitions traduit l’accord intérieur de différents éléments des définitions, ou un accord entre des systèmes de définitions. Souvent, l’harmonisation comporte un processus de normalisation réalisé en appliquant, pour un concept donné, les mêmes définitions dans différents contextes, ou les mêmes règles pour élaborer des définitions applicables localement.

- Simplification : il s’agit de la réduction du nombre de rapports ou de la quantité d’informations devant figurer dans des rapports individuels ; pour ce faire il faudra réduire la duplication des informations demandées ou réduire le nombre de sujets à examiner dans un rapport donné.

On a examiné une variété de possibilités pour mettre en oeuvre ces stratégies. L’un des essais les plus complets d’évaluation des options existantes a été l’étude de faisabilité réalisée par le Centre mondial de surveillance de la conservation (WCMC), dont le but initial était d’essayer d’harmoniser les rapports nationaux soumis aux accords internationaux, et notamment d’harmoniser la gestion de l’information entre les cinq traités mondiaux relatifs à la biodiversité3 (WCMC 2000). En bref, quatre stratégies d’harmonisation ont été examinées:

- Etablissement de rapports modulaires: le rapport modulaire se fonde sur l’idée que l’information requise pour la mise en oeuvre de conventions et pour la communication des résultats peut être définie comme une série d’ensembles discontinus de données (modules), qui répondent entre eux aux besoins d’une convention déterminée.

- Etablissement de rapports virtuels: Au lieu de soumettre des rapports, on met l’information relative à la disposition d’utilisateurs éventuels en l’introduisant dans un site web national. Grâce à ces rapports virtuels, les pays fourniraient un accès à leurs données primaires sous une forme électronique mise a jour en permanence dans un cycle et apte à satisfaire aux besoins nationaux.

- Base de données sur les obligations d’établissement de rapports: Dans ce cas il s’agit de dresser un inventaire détaillé et unifié de toutes les obligations relatives à l’établissement de rapports que doit remplir un pays. L’information serait compilée sous forme d’une liste annotée de « questions » spécifiques ou d’éléments d’information demandés (directement ou implicitement) pour chaque obligation, et les questions et obligations seraient identifiées par un mot clé pour en faciliter l’analyse. L’analyse successive de la base de données mettrait en évidence les possibilités de chevauchement ou de synergie, et permettrait d’orienter la gestion nationale de l’information et la définition des besoins de rapports.4

- Rapports unifiés: Il s’agirait de préparer un rapport «unifié» qui répondrait aux exigences d’une série de conventions internationales auxquelles adhère le pays.

Le WCMC reconnaît que l’appui financier et technique est indispensable pour renforcer les mécanismes régionaux et leur permettre d’harmoniser les rapports destinés aux traités internationaux. Un appui extérieur est nécessaire pour la mise au point de méthodologies et normes nationales, la promotion de la coopération et la constitution d’un bassin de compétences. L’élaboration d’un manuel générique, qui fournit en un seul endroit les directives et modèles de présentations relatifs à une série de conventions, devrait procurer de nombreux avantages pratiques tout en représentant un outil de promotion d’un processus d’harmonisation progressive. Le PNUE s’est accordé avec quatre pays en développement pour préparer des projets pilotes visant la mise à l’essai de différentes stratégies d’harmonisation. Un téléforum a été organisé pour faciliter les débats, et l’échange d’informations et de produits intermédiaires entre les projets pilotes. Toutefois, jusqu’à présent seul le projet pilote relatif au modèle de rapport national unifié a été achevé (PNUE 2002)5.

Néanmoins, les initiatives d’évaluation existantes appliquent déjà différentes stratégies d’harmonisation et de simplification. Parmi les initiatives figurant à l’annexe 1, les quatre cas suivants pourraient donner l’idée de la diversité des stratégies appliquées en vue d’une gestion efficace et utile de l’information.

Tous les cinq à dix ans, la FAO entreprend des évaluations régionales et mondiales des ressources forestières. L’Evaluation des ressources forestières mondiales (FRA) est réalisée sous forme de projets techniques détaillés fondés sur des définitions forestières harmonisées, la collaboration et la participation étroites des Etats membres et l’appui d’un réseau mondial d’experts et de correspondants appartenant à des organes et institutions de recherche nationaux – le réseau d’experts de FRA – qui fournit les informations sur les pays (FRA 2001). Pour FRA 2000, 160 pays ont participé activement à la collecte et l’analyse de l’information. Pour améliorer en permanence les bases de données, le Programme FRA fournit aussi un appui aux pays en développement pour les aider à réaliser leurs évaluations forestières nationales en affectant des ressources financières pour la création de capacités et de compétences. Une consultation régulière d’experts6 offre une orientation et des informations en retour à la FAO. En outre, un groupe consultatif de spécialistes se réunit plus régulièrement pour effectuer des examens et formuler des recommandations visant à renforcer les réseaux institutionnels existants, à mieux axer les futures évaluations des ressources forestières sur les besoins des utilisateurs, et à relier FRA plus étroitement avec les autres processus internationaux.

Conscients des problèmes relatifs au changement climatique potentiel, l’Organisation météorologique mondiale (OMM) et le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) ont établi en 1988 le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) pour évaluer les informations scientifiques, techniques et socioéconomiques permettant de comprendre le changement climatique, son impact potentiel et les systèmes d’adaptation et d’atténuation. Le GIEC ne mène pas de recherches et ne surveille ni les données relatives au climat ni les autres paramètres pertinents. Il fonde son évaluation principalement sur des textes scientifiques et techniques. Il appuie la Convention-cadre des Nations Unies concernant les changements climatiques (CCCC) par ses travaux sur les méthodologies servant à la préparation des inventaires nationaux de gaz à effet de serre qui devront être établis par les pays industrialisés et en transition, signataires du Protocole de Kyoto (« Parties à l’Annexe 1 ») (CCCC 2000). A l’heure actuelle, le GIEC a trois groupes de travail : l’un pour évaluer les aspects scientifiques du système climatique et de l’évolution du climat ; le deuxième pour évaluer la vulnérabilité des systèmes socioéconomiques et naturels aux changements climatiques, les conséquences favorables et défavorables de ces changements et les moyens de s’y adapter ; et un troisième pour évaluer les solutions permettant de limiter les émissions de gaz à effet de serre et d’atténuer le changement climatique. Une équipe de travail sur les inventaires nationaux de gaz à effet de serre est responsable du Programme national d’inventaire de gaz à effet de serre du GIEC. Des unités de soutien technique financées par les pays développés appuient les activités de chaque groupe. En outre, le Fonds fiduciaire du GIEC fournit un soutien financier pour aider les coprésidents des pays en développement à s’acquitter de leurs tâches, notamment pour couvrir les coûts administratifs et de voyage. Un certain nombre d’autres institutions fournissent un soutien en nature aux activités du GIEC.

En 1979, l’UICN a établi à Cambridge un bureau de surveillance des espèces menacées d’extinction. En 1988, le Centre mondial de surveillance de la conservation (WCMC), une organisation indépendante à but non lucratif, a été fondée conjointement par l’UICN, le Fonds mondial pour la nature (WWF) et le PNUE. En 2000, le PNUE a établi le WCMC comme centre d’information et d’évaluation de la biodiversité mondiale, indépendant et à but non lucratif. Le Centre fournit des services d’information sur la conservation et l’utilisation durable d’espèces et d’écosystèmes, et aide d’autres organisations à mettre au point leurs propres systèmes d’information. Le but principal du Centre est l’harmonisation des cinq conventions sur la biodiversité. Il a accès aux données provenant d’un large éventail de sources spécialisées et possède un vaste réseau de contacts et de liens de collaboration dans toute la communauté des écologistes. Le Centre ne réalise pas ses propres évaluations mais améliore l’échange et la compatibilité des sources de données existantes. Il agit en qualité de bureau central permettant aux fournisseurs et utilisateurs de données de partager des informations. Il collecte officiellement et non officiellement des informations publiées sur la biodiversité aux niveaux national et international, et fournit une liste de sites web connexes, des listes de serveurs et des liens permettant d’accéder aux données, ressources et organisations relatives à la conservation et à l’environnement, ainsi qu’aux sites web qui contiennent des rapports nationaux ou des profils touchant à la conservation ou la gestion de la biodiversité.

Le Centre gère une vaste collection de données, y compris des bases de données spatiales concernant la conservation de l’habitat. Il parraine aussi la mise en oeuvre d’un grand nombre d’accords concernant la biodiversité aux niveaux national et international par le biais de rapports d’information, afin d’aider les organismes scientifiques à accomplir leurs travaux et améliorer l’analyse des réalisations, l’identification de lacunes dans les connaissances et l’établissement des priorités, etc. Le Centre produit aussi des publications imprimées ou en version électronique couvrant les principaux aspects de la conservation de la biodiversité. De nombreuses publications sont le résultat de ce travail approfondi entrepris par les spécialistes du Centre. Des experts internationaux dans le monde entier appuient le travail du Centre. Les données spatiales sur les forêts, leur diversité et leur état de conservation ont servi de base à une importante analyse statistique de la protection des forêts dans le monde, entreprise de concert avec le CIFOR. Le Centre travaille aussi avec l’IUFRO, la FAO et d’autres organisations d’information forestière. Un Conseil consultatif scientifique de haut niveau sera établi pour guider ses travaux.

Un exemple intéressant d’un groupe bien organisé de processus d’évaluation internationaux est le Rapport sur le développement humain – HDR, qui évalue l’indice de développement humain et d’autres indices socioéconomiques. HDR est un rapport indépendant parrainé par le PNUD et le produit d’une équipe choisie de chercheurs renommés, de professionnels du développement et de membres du Bureau du Rapport sur le développement humain du PNUD (PNUD 2003). Au début de 2001, le PNUD a créé une unité pour appuyer systématiquement l’élaboration de rapports nationaux sur le développement humain (NHDR). Ces rapports sont préparés par des équipes nationales et leur appartiennent. Jusqu’à présent, plus de 470 rapports régionaux, nationaux et sous-nationaux ont été produits par 135 pays. L’Unité NHDR fournit un soutien à la préparation des rapports nationaux par le partage d’expériences comparatives et de bonnes pratiques, la création de capacités, la formation et le soutien technique et par le biais d’un réseau sur Internet appelé SURF HDR.

L’efficacité des rapports se fonde sur trois mécanismes : 1) l’établissement de normes de surveillance communes, y compris la définition des six principes de base suivants : propriété nationale, indépendance de l’équipe de rédaction, qualité de l’analyse, processus participatif et inclusif, souplesse et présentation créative et suivi soutenu ; un processus systématique de révision par les pairs , et l’élaboration d’indicateurs pour les normes minima sur la qualité et l’impact des rapports. 2) création de capacités pour les universitaires, les décideurs et le personnel du PNUD participant aux rapports, en dispensant des cours et des modules de formation ; 3) élargissement systématique de la portée des rapports nationaux et des examens thématiques. Un Bureau de la communication est responsable de la stratégie de lancement des rapports auprès des médias, et fournit un appui à des équipes individuelles pour la formulation de stratégies visant à étendre la portée et la diffusion des rapports.

Les cas présentés – comme de nombreuses autres initiatives – disposent de mécanismes de travail bien établis. Pour chercher à gérer plus efficacement l’information nécessaire, ils appliquent des stratégies similaires, telles que l’utilisation de données existantes et de sources de données, la constitution de réseaux avec des organisations intéressées, la création de capacités au niveau national et l’analyse des possibilités d’harmonisation grâce à l’emploi de termes et concepts assurant une bonne définition. Cependant, très peu de ces initiatives ont élaboré des indicateurs relatifs à des procédures d’évaluation normales précises et bien décrites.

S’il est vrai que beaucoup de progrès ont été accomplis, il n’en demeure pas moins que, pour la plupart de ces initiatives, d’importants obstacles techniques entravent la collecte, la gestion et l’analyse efficaces des données. La plupart du temps, les problèmes suivants sont mentionnés : manque de consensus sur les concepts, termes et définitions ; absence de méthodologies normalisées ; lacunes dans les données, manque de crédibilité des informations communiquées par les pays, et manque de cohérence dans les rapports nationaux. Toutefois, la majorité des informations présentées dans les complexes rapports nationaux sont surtout de nature descriptive et/ou partiellement fondée sur des données anecdotiques et des opinions d’experts (Braatz 2002). Cette situation provoque de graves problèmes de rassemblement des données aux niveaux régional et international et révèle aussi de graves difficultés dans la mise en oeuvre de ces évaluations au niveau national. Un autre problème sérieux est le manque de collaboration entre les différentes initiatives s’occupant de l’environnement, ainsi que l’absence totale de collaboration intersectorielle avec les initiatives sociales et économiques. Au niveau national, il semble que les départements des forêts nationaux responsables de la mise en oeuvre des C et I n’aient guère collaboré avec les organismes apparentés pour obtenir des données. Ces lacunes alourdissent inutilement la tâche des pays, tout en réduisant l’impact potentiel de l’information collectée. C’est pourquoi de nombreuses conférences, séminaires et consultations d’experts continuent à recommander l’amélioration de la collaboration, et l’harmonisation des initiatives d’évaluation. Ces dernières années, les C et I ont été considérés comme un outil fondamental pour accomplir des progrès à cet égard (Braatz 2001).

Utilisation des C et I

Plusieurs auteurs ont souligné que l’utilisation des C et I est un moyen prometteur d’harmoniser les processus d’évaluation, et d’en faciliter et améliorer la gestion (FNUF 2001, ECOSOC 2003, Prabhu et al. 2003, Hendricks 2003). Les C et I sont des outils conçus pour fournir des informations permettant de conceptualiser, d’évaluer et de mettre en oeuvre la durabilité (Prabhu et al. 1998). Ils consistent en une série d’éléments connexes (principes, critères, indicateurs et vérificateurs), où l’information accumulée à des niveaux hiérarchiques inférieurs et plus concrets est utilisée pour évaluer les éléments apparentés des niveaux supérieurs et plus abstraits (CIFOR 1999). Dans ce sens, les C et I représentent un type de réseau de communication qui permet aux différents acteurs oeuvrant dans le domaine de la gestion forestière d’identifier les exigences de la durabilité et de fournir des renseignements sur son état. Un critère ou indicateur individuel doit être considéré dans le contexte d’autres C et I du système. Seul le jeu complet d’indicateurs liés à la dimension sociale, économique, politique et environnementale des forêts fournit une image intégrale des tendances de la durabilité au niveau hiérarchique des principes et critères. Les C et I consentent la ventilation des questions complexes en éléments de plus petite taille et communicables, tout en permettant une interprétation intégrative. Ils consentent la communication sur des aspects donnés de la durabilité, ainsi que l’application de procédures particulières pour évaluer chaque indicateur et observer son évolution au fil du temps.

Par ailleurs, l’évaluation de la durabilité de la gestion des forêts par l’emploi de C et I comporte aussi l’examen d’une énorme quantité de détails techniques, et exige la transparence et la validité de chaque indicateur. Dans la plupart des cas, l’intégralité, la clarté et la spécificité des C et I présentent de graves lacunes, ce qui rend pratiquement impossible leur bonne évaluation et interprétation (Pokorny et Adams 2003). C’est ainsi que, comme le montre la figure 1, le niveau analytique d’un jeu de C et I doit être complété par un niveau opérationnel, qui définit exactement ce qui doit être évalué. Pour consentir l’évaluation d’un jeu de C et I, des vérificateurs et méthodes d’évaluation particuliers doivent être définis pour chaque indicateur. En outre, l’établissement de seuils est une base utile pour l’interprétation. Seuls des jeux de C et I organisés de telle manière fournissent la transparence nécessaire à la gestion de l’information et à l’évaluation collective (Pokorny et al. 2004). L’utilisation des C et I comme base de l’évaluation exige aussi la mise en oeuvre de protocoles normalisés, de termes et concepts techniques clairement définis, et de directives d’évaluation liées à des méthodes et des sources. Le manque de l’un de ces éléments compromettrait la compatibilité et la crédibilité des données saisies et structurées par les C et I.

Comme on le voit dans de nombreux processus en cours, les C et I tendent à être utilisés pour structurer des rapports et non pas pour organiser une évaluation intégrative et définie des aspects permettant d’estimer la durabilité de la gestion forestière. C’est ainsi que ces rapports sont souvent descriptifs et pourraient même donner l’impression fallacieuse que les données sont de bonne qualité. C’est l’une des raisons de la difficulté d’effectuer un rassemblement efficace. La validité des C et I en tant qu’outil repose sur la qualité de l’évaluation. Pour ce faire, il faut des mécanismes de contrôle et d’appui rigoureux capables de maintenir la qualité des données et la présence dans le pays de la capacité technique nécessaire pour réaliser l’évaluation.

Limites de l’harmonisation

L’emploi des C et I dans les initiatives d’évaluation reliant différents niveaux d’agrégation, comme l’unité de gestion forestière, le pays, la région et le monde, impose que des directives détaillées d’évaluation soient suivies rigoureusement. Comme on l’a dit plus haut, l’évaluation de la durabilité dépend de la définition d’une quantité énorme de vérificateurs et de détails techniques. Le cadre complet des détails de l’évaluation, nécessaire pour garantir la cohérence et la compatibilité des informations à tous les niveaux et unités, exige un haut niveau d’accord entre les différents partenaires en jeu et de profondes connaissances techniques concernant les détails méthodologiques. Ce type de processus dépend donc naturellement d’un leadership résolu, de mécanismes de contrôle efficaces et d’apports continus pour maintenir l’ordre d’un tel système.

Toutefois ce genre d’approches descendantes axées sur la technique est contraire à la conception des C et I comme outils de communication et d’apprentissage. En raison de différents facteurs sociaux, économiques et environnementaux, les jeux de C et I présentent des écarts. Dans des situations différentes, les divers acteurs créeront des jeux de C et I très inégaux, même si le but de l’évaluation est identique (Pokorny et Adams 2003). Parmi les principales raisons de la diversité des jeux nationaux de C et I figurent les suivants:

La diversité des C et I fait partie de l’outil. Les organisations comme le CIFOR, l’OIBT et le FSC ont reconnu ce fait et mis en place des outils visant à adapter les jeux de C et I à la situation locale et à différents acteurs. C’est pourquoi l’évaluation harmonisée d’un jeu complet de C et I n’est guère réaliste. Même pour des indicateurs quantitatifs relativement simples, comme le couvert forestier et le nombre de personnes employées directement dans le secteur forestier, il est très difficile de réaliser une évaluation harmonisée dans des contextes différents (Matthews 2001).

Un autre aspect extrêmement important dont il faut tenir compte pour juger de la viabilité de l’harmonisation de jeux de C est lié à l’intention générale de leur mise en oeuvre au niveau national. Les C et I ne sont pas appliqués pour générer des données statistiques sur les forêts. Leur but essentiel est de créer des processus d’apprentissage collectif sur la gestion durable des forêts, à l’échelle nationale principalement, et d’accroître la compréhension de la gestion des forêts du monde et de l’améliorer. Pour ces processus d’apprentissage, la propriété de l’information est une condition préalable fondamentale. L’information demeure où elle a été générée. Les C et I appuient cette génération de connaissances et cette communication. Bien que dominés par les spécialistes, les débats intenses entre différents groupes d’acteurs, qui se sont déroulés pour la définition des jeux de C et I régionaux en vue de la certification du FSC, l’élaboration de directives nationales de gestion forestière, ainsi que la mise au point des jeux internationaux de C et I, ont procuré d’importants avantages en termes de compréhension et communication, et ont aidé à clarifier pour certains groupes de la société les attentes liées à la gestion durable des forêts. De même, l’élaboration de nombreux jeux de C et I locaux, notamment dans les zones rurales des pays en développement, ont créé une sensibilité et des connaissances parmi les acteurs locaux et amélioré la compréhension de groupes extérieurs quant aux opinions locales sur la forêt. De nombreuses tentatives ont été faites pour utiliser les C et I comme directives ou cadres juridiques afin de contrôler la qualité et la légalité de la gestion forestière. Les acteurs engagés dans l’élaboration des C et I sont naturellement intéressés à mettre en oeuvre leurs propres jeux de C et I, au lieu recevoir des jeux harmonisés préparés sans leur participation.


3 Convention sur la diversité biologique, Convention sur les espèces migratrices, Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction, Convention relative aux zones humides et Convention pour la protection du patrimoine mondial culturel et naturel.

4 Le concept est mis en oeuvre par l’Agence européenne pour l’environnement. Il couvre tous les accords sur l’environnement qui intéressent les pays de l’Union européenne (64 en 2000).

5 Une autre initiative internationale concernant l’harmonisation des conventions internationales est le Groupe de gestion de l’environnement, une instance pour les institutions des Nations Unies et les secrétariats du suivi et de l’évaluation établis sous la présidence du Directeur exécutif du PNUE. La première réunion du Groupe en janvier 2001 a mené à la constitution d’un groupe de gestion des problèmes (le PNUE jouant le rôle de maître d’oeuvre) pour traiter de l’harmonisation des rapports sur l’environnement, en particulier pour les conventions s’occupant de biodiversité. Le Groupe de gestion de l’environnement a examiné un document sur l’harmonisation de la gestion de l’information et de l’établissement de rapports pour les traités portant sur la biodiversité. Il donne un vaste aperçu et un résumé des faits, justification, mandat, besoins et avantages de l’harmonisation et de la simplification de la gestion de l’information et des rapports, en mettant l’accent sur les cinq conventions concernant la biodiversité mondiale.

6 Tenu au College of Forestry and Forest Industry, Kotka, Finlande, en 1987, 1993, 1996 et 2002

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