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2. APPLICATION DE LA REGLEMENTATION SUR LE MAILLAGE

L'application de toute réglementation repose sur le contrôle de chaque pécheur. Pour le maillage, cela signifie une inspection régulière des filets à bord des bateaux de pèche. La forme que devraient prendre de telles inspections est esquissée au paragraphe 1 du texte du sous-comité COPACE, cité précédemment. On y expose le nombre de mailles qu'on devra mesurer et dans quelle partie du filet il faudra le faire, afin de vérifier la dimension moyenne du maillage (il existe toujours en effet des écarts considérables d'une maille à l'autre). On y indique également la jauge à pression normalisée qu'il convient d'utiliser étant donné que les mesures obtenues peuvent varier en fonction du type de jauge employé et de la manière dont on s'en sert, selon la force avec laquelle on insère la jauge dans la maille pour étirer celle-ci. Du fait de cette variation, l'emploi de la jauge triangulaire la plus simple est en lui-même peu digne de foi; si les inspecteurs impriment une pression considérable à la jauge pour la pousser a travers les mailles, il peut en résulter que des filets dont les mailles sont en fait considérablement plus petites que la dimension réglementaire, soient acceptés. Toutefois, lorsque les inspecteurs ont la possibilité de vérifier une simple jauge triangulaire en la comparant à la jauge normalisée du CIEM (dont l'emploi sur une grande échelle est coûteux), afin de déterminer ce qu'il faut entendre par un "passage facile à travers la maille" (pour reprendre les termes utilisés par la législation dans certains pays européens), l'inspection avec une jauge simple peut, tous autres facteurs étant favorables, faire appliquer le maillage souhaité.

Un facteur peut cependant avoir un effet défavorable: la différence existant entre le filet tel qu'il est présente pour l'inspection au port, et l'état dans lequel il est véritablement utilisé à la mer. Il arrive en effet que des filets dont les mailles sont de dimension inférieure au maillage réglementaire soient entreposés soigneusement et secrètement dans les profondeurs de la cale au retour d'une sortie de pêche, tandis que le filet dont le maillage est réglementaire est laissé sur le pont où les inspecteurs pourront le voir. De plus, une fois a la mer, l'on peut fixer sur un filet dont le maillage est réglementaire des toiles, des tabliers ou tous autres dispositifs de protection qui, en barrant le passage aux poissons de petite taille, ramènent la sélectivité réelle du filet au niveau d'un engin dont les mailles seraient très inférieures au maillage réglementaire. L'inspection dans les ports ne suffit pas toujours pour faire respecter les règlements, a moins qu'elle ne s'accompagne d'une inspection des filets en cours d'utilisation.

Comme on l'a vu dans les paragraphes précédents, l'inspection peut être simplement un problème national, soit que les agents des pouvoirs publics inspectent les ressortissants du pays dans ses ports de pêche, soit qu'ils procèdent à cette opération dans les eaux relevant de la juridiction nationale. Si l'habitat du stock de poisson intéressé est totalement circonscrit dans ces eaux et si ce stock n'est exploité par aucun pêcheur d'une autre nationalité, il n'est pas nécessaire d'examiner la question lors d'une réunion internationale, si ce n'est dans la mesure où des gouvernements peuvent trouver utile de mettre en commun leur expérience touchant les techniques d'inspection ou divers problèmes apparentés. Par exemple, il sera plus facile de faire appliquer les règlements si les pécheurs comprennent l'objet visé par la réglementation relative au maillage et la nécessité d'accepter, pendant une certaine période, certaines pertes en poissons de petite taille en vue d'améliorer les prises à l'avenir. On peut recourir a diverses méthodes: exposés oraux, affiches, films fixes, etc. pour diffuser cette compréhension et faire en sorte que l'adoption d'un maillage plus grand se fasse avec la coopération des pêcheurs plutôt qu'elle ne leur soit imposée.

Cependant, il n'est guère de stocks de merlus ou de sparidés qui n'intéressent qu'un seul pays. Il arrive, et c'est le cas le plus simple après le précédent, qu'un stock relève d'une seule juridiction, mais soit également exploité par des navires étrangers. Théoriquement, l'Etat côtier pourrait, dans le cadre des conditions auxquelles les navires étrangers sont autorisés à pêcher, imposer tout système d'inspection qui lui paraît souhaitable sur les terrains de pêche. Toutefois, l'inspection à la mer, qui nécessite des navires patrouilleur est coûteuse et elle ne couvrira vraisemblablement qu'une petite partie de l'ensemble des navires de pêche. L'inspection au port peut avoir une portée beaucoup plus considérable, atteignant jusqu'à 100 pour cent des unités dans certains cas. Elle suppose généralement la coopération des gouvernements dont relèvent les flottilles de pèche étrangères et l'on pourrait utilement examiner les modalités d'une telle inspection. Au mieux, elle pourrait sans doute être effectuée dans le cadre d'un accord général visant les opérations des navires étrangers dans les eaux de l'Etat côtier. On notera qu'il sera vraisemblablement plus facile d'obtenir la coopération des pêcheurs étrangers et de leurs gouvernements touchant le respect de la réglementation sur le maillage et leur soumission à l'inspection s'ils ont quelque assurance que les pêcheurs de l'Etat côtier eux-mêmes se conforment aux règlements appropriés, et sont soumis régulièrement à une inspection et à des procédures d'application efficaces. Dans certaines conditions, la meilleure façon d'atteindre ce résultat serait de recourir à une inspection mutuelle, comme indique ci-après.

L'inspection mutuelle, au sens de l'inspection (et non du contrôle) de l'une des pêcheries nationales par des inspecteurs d'un autre pays, est importante pour tout stock vivant dans plus d'une aire de juridiction ou qui est exploité en haute mer. Pour ces stocks, parmi lesquels figurent probablement plusieurs espèces de merlus et de sparidés (par exemple M. senegalensis ou M. cadenati), les ressources qui se trouvent dans la zone relevant de la juridiction d'un pays ne concernent pas uniquement ce pays, mais intéressent directement tous les autres pays dont les eaux abritent le même stock et dont les pêcheries se ressentiront directement du respect dans lequel les pêcheurs du premier pays tiennent les règlements. Cela signifie que le gouvernement du second pays devrait avoir quelque possibilité d'observer les mesures prises par le premier pays pour faire respecter les règlements dans sa zone de juridiction. Cette observation peut avoir lieu sans porter préjudice à la souveraineté nationale et ne met en jeu aucun principe nouveau. Par exemple, aux termes des dispositions prises pour l'inspection internationale des opérations de pêche a la baleine, il arrive que, des inspecteurs d'un pays se trouvent dans les stations a terre d'autres pays, où ils ont été autorisés a inspecter les baleines prises. Dans le cas où les inspecteurs observent une infraction aux règlements ayant trait aux espèces ou aux dimensions des baleines dont la capture est autorisée, cette infraction est signalée aux autorités nationales de la station pour qu'elles prennent les mesures appropriées. On pourrait effectuer de même des observations mutuelles concernant l'application de la réglementation relative au maillage, par exemple en permettant à des inspecteurs agrées d'un Etat côtier de visiter les ports de pêche d'un autre Etat côtier intéressé par le même stock, ou de faire des inspections à bord des navires de cet Etat.

Les participants voudront peut-être envisager si la conclusion d'arrangements prévoyant une observation mutuelle pourrait servir à convaincre les intéressés que tous les pays se conforment à la réglementation sur le maillage et, dans l'affirmative, quels pays cela devrait-il concerner et quelle forme devraient prendre ces arrangements.


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