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9. CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS

L'approvisionnement en poisson de la Municipalité d'Hanoi ne dépend pas seulement de l'Entreprise de Pêche d'Hanoi, mais également de la Compagnie d'Achat des Vivres, des coopératives, des Fermes d'Etat, des pisciculteurs privés et des arrivages de poisson de mer congelé d'Haiphong. Les besoins en poisson d'Hanoi en 1979 sont estimés à 10 400 t/an, ou 29 t/jour, à raison de 4 kg de poisson frais par habitant/an. La production des eaux douces étant de 5 655 t/an (1978), le déficit atteint 4 745 t/an, sans tenir compte des apports de poisson de mer. Il importe donc de savoir quels sont les apports de poisson congélé provenant d'Haiphong, afin d'ajuster les programmes de production des eaux douces. Augmenter la production actuelle des eaux douces implique:

  1. une augmentation de la production d'alevins permettant l'alevinage régulier des lacs naturels et artificiels existants ainsi que la mise en charge convenable de tous les plans d'eau dépendants des coopératives, Fermes d'Etat et des paysans;

  2. une amélioration de l'exploitation et des techniques de pêche dans les lacs et autres plans d'eau gérés par l'Entreprise de Pêche d'Hanoi, les coopératives et les Fermes d'Etat;

  3. une amélioration des pratiques d'aquaculture en étangs et en rizières par l'utilisation plus régulière et rationnelle d'engrais organiques, de compost et d'aliments pour poissons, ainsi qu'une plus grande intégration des élévages de poissons aux cultures et à l'élévage d'animaux de ferme;

  4. la mise en exploitation rationnelle, par l'Entreprise de Pêche d'Hanoi, les coopératives, les Fermes d'Etat et les paysans de nouvelles superficies déjà sous eau (canaux, carrières d'argile à briques abandonnées, déblais ou chambres d'emprunts crées pour l'extraction de matériaux pour la construction de routes ou digues, etc.) ou de surfaces inondables, aisément exploitables (marais, rizières, etc.);

  5. la construction de nouveaux étangs de production;

  6. la mise en oeuvre d'élévages en cages et enclos.

La planification d'une augmentation de la production des eaux douces, nécessite une coordination étroite entre tous les organismes concernés. Cette concertation et coordination devrait se faire aux niveaux de la conception, de la programmation, du financement et de l'éxécution.

Avant tout, il est indispensable de faire un inventaire complèt et détaillé de tous les plans d'eau, naturels et artificiels. Cet inventaire devrait comprendre: la localisation du plan d'eau, sa superficie (maximum, minimum et superficie moyenne), les conditions climatiques (surtout températures et pluviométrie), la profondeur (maximum, minimum et profondeur moyenne), les conditions physico-chimiques de l'eau, les conditions biologiques, l'inventaire de la faune ichtyologique qui peuple le lac (espèces, composition numérale et pondérale des captures), le tonnage capturé annuellement et composition, l'inventaire des embarcations, le recensement des pêcheurs et des différents engins de pêche, des données sur le transport et la commercialisation du poisson et les problèmes particuliers de chaque plan d'eau.

Cet inventaire servira de document de base pour l'élaboration d'un plan de développement des pêches et de l'aquaculture dans ces plans d'eau, comprenant le montant des investissements nécessaires, les sources de financement et les phases de son éxécution.

Un inventaire similaire devrait être fait en ce qui concerne tous les étangs de pisciculture existants (étangs d'alevinage, de grossissement et de production) et des rizières où l'on pratique déjà la rizipisciculture et également celles où la rizipisciculture est possible. Cet inventaire servira ensuite de base pour l'élaboration d'un plan de développement de l'aquaculture, y compris l'extension des élevages associés et l'intégration de l'aquaculture dans les programmes agricoles et d'élevage. La troisième phase de cette programmation devrait porter sur l'inventaire détaillé de tous les sites convenant à l'implantation de nouvelles unités de production (fermes d'aquaculture) et des sites déjà sous eau, aisément exploitables, mais non encore mis en valeur (canaux, anciennes carrières, marais, etc.). L'on établira ensuite un programme de mise en valeur de ces sites, comprenant les coûts et les sources de financement.

De cette manière, le Comité Populaire d'Hanoi disposera d'un plan concret de développement de la pêche et de l'aquaculture et pourra décider des modalités de sa mise en oeuvre, en fonction des priorités accordées à certains secteurs de production, de la rentabilité et des possibilités de financement.

Dans la situation actuelle, la production piscicole est freinée par le manque d'alevins. C'est le principal goulot d'étranglement. Les besoins annuels pour empoissonner les 8 087 ha de plans d'eau existants sont de l'ordre de 746 millions d'alevins de 5 à 10 cm. Les cinq stations d'alevinage de l'Etat ont produit environ 10,3 millions d'alevins de 5 à 12 cm, en 1978. Les coopératives ont également produit des alevins et sans doute aussi certaines Fermes d'Etat, mais il n'a pas été possible d'obtenir le nombre d'alevins produit par ces organismes. Pour planifier correctement les besoins annuels, il est indispensable d'obtenir des données précises sur la production d'alevins des Fermes d'Etat et des coopératives. Pour augmenter la production de poisson de consommation il est donc indispensable de produire d'importantes quantités d'alevins de qualité et d'espèces choisies, en fonction des possibilités de nourrir ces poissons et de fertiliser les étangs.

Les possibilités d'augmenter substantiellement le nombre d'alevins sont actuellement réduites et dépendent essentiellement du nombre de reproducteurs des différentes espèces disponible dans les stations d'alevinage, du nombre de bassins de ponte et de bassins d'incubation, de la surface totale des étangs de stockage pour reproducteurs et de la superficie totale des étangs de grossissement disponible actuellement. Si l'on décide l'alevinage intensif et régulier de toutes les superficies actuellement sous eau, les stations d'alevinage existantes ne peuvent pas produire les 746 millions d'alevins nécessaires et il faudra alors aménager de nouvelles installations d'alevinage, en fonction des besoins. Cela doit être pris en considération et prévu dans le plan de développement de l'aquaculture.

Il est cependant possible d'améliorer les résultats actuels, sans devoir agrandir les installations, en donnant plus de soins aux reproducteurs et en améliorant les soins aux larves et alevins. Pour améliorer le rendement des géniteurs, les étangs de stockage devraient être fertilisés plus régulièrement et les reproducteurs devraient recevoir une alimentation plus équilibrée et plus régulière, surtout durant la période de maturation. Les rations seront composées en fonction de la disponibilité de sous-produits locaux tels que son de riz, tourteaux et déchêts de minoteries.

Les techniciens vietnamiens ont développé une technique de reproduction induite (hypophysation) des carpes chinoises qui est très efficace. Ils ont également maîtrisé les techniques de premier grossissement des alevins de ces espèces, partant de larves de trois jours jusqu'à produire des alevins de 3 cm et plus, en 21 jours d'élevage. Les techniques du second alevinage sont aussi au point. Leurs efforts sont cependant limités du fait que durant les deux phases de grossissement des alevins, ils ne disposent presque jamais, ni des aliments artificiels requis, ni des fertilisants indispensables. Même en obtenant couramment d'importantes quantités de larves de trois jours, le nombre d'alevins qu'ils obtiennent à la fin du premier grossissement est faible du fait qu'ils n'ont pas de quoi nourrirles alevins et qu'ils ne disposent pas des engrais nécessaires à fertiliser normalement les étangs de grossissement.

Les taux de fécondation moyens des oeufs est actuellement de l'ordre de 60 à 70 pour cent. et pourrait sans doute être amélioré par un meilleur choix des mâles. Durant le premier grossissement, partant de larves de trois jours, le taux moyen de survie, après 21 jours de grossissement, n'atteint que 50 pour cent. Il est certain qu'une fertilisation plus adéquate et plus régulière des étangs de grossissement ainsi qu'une alimentation artificielle convenable et régulière augmenterait nettement ce taux de survie qui devrait atteindre 70 à 80 pour cent. Les manipulations des larves à la sortie des bassins d'incubation est sans doute également en cause. Les larves sont actuellement prélevées au moyen d'épuisettes à fines mailles. Il est probable que le siphonnage des larves serait moins traumatisant.

Les mortalités au cours du second grossissement (20 à 30 pour cent) devraient également être réduites par une meilleur fertilisation des étangs et une alimentation artificielle améliorée. Il y a d'assez grosses difficultés à obtenir, dans de bonnes conditions, des alevins d'au moins 6 cm en un laps de temps de 60 jours. Cela résulte notamment des facteurs suivants:

  1. mises en charge des étangs de grossissement à de trop fortes densités, du fait d'un manque d'étangs de grossissement. Ce problème peut être résolu en agrandissant certaines stations, comme prévu;

  2. la pénurie d'aliments pour poissons et d'engrais. Ces pénuries ont été discutées à plusieurs reprises et des solutions de rechange ont été proposées, notamment l'utilisation plus fréquente de compost, l'utilisation d'insectes sèchés et broyés (source d'azote), l'emploi de vers à soie, de cocons, de sang frais ou sèché, de contenus stomacaux, de drêche de brasserie. A chaque fois, les experts vietnamiens ont répondu que les ingrédients proposés ne suffisaient déjà pas, pour l'alimentation du bétail. Il est clair qu'un très grand effort doit être fait dans le domaine de l'approvisionnement régulier des stations d'alevinage en aliments pour poissons. Les stations et fermes piscicoles devraient recevoir des allocations de farineux, d'engrais et de drêche de brasserie comme cela se fait déjà pour les entreprises d'élevage.

Les besoins des stations d'alevinage et des Fermes d'Etat en matériel, équipement, aliments pour poissons et bétail et en engrais sont chiffrés et transmis au Comité Populaire d'Hanoi que les soumet au Gouvernement. Comme il y a pénurie dans certains domaines, le Gouvernement ne peut pas satisfaire toutes ces demandes et fait une répartition des produits disponibles. Il semble que jusqu'à présent l'on donne toujours priorité aux élevages (bovins, porcins et canards) au détriment du poisson. Une telle situation est préjudiciable au développement de l'aquaculture et ne se justifie absolument pas, car à l'unité de rendement et de coût en protéines animales, c'est l'aquaculture qui est largement en tête, avant toutes les autres production animales.

Chaque station d'alevinage et toutes les exploitations piscicoles devraient avoir obligatoirement une superficie adéquate de cultures fourragères. Le choix des plantes fourragères à cultiver pour l'alimentation des poissons, des porcs, des bovins et des volailles est très important. Il doit évidemment être fait en fonction des conditions climatiques locales, mais surtout en tenant compte de la fertilité naturelle des sols (résultats de travaux pédologiques), des pentes (dangers d'érosion) et des possibilités de fertilisation et d'irrigation. L'on pourrait cultiver non seulement des graminées, telles que Pennisetum purpureum, Cynodon dactylon, Brachiaria brizantha, B. distachya, mais aussi des legumineuses: Desmodium intortum, Leucena glauca, Stylosanthes humilis et des plantes à tubercules, telles que Canna edulis, Colocasia esculenta, Ipomoea batatas (patate douce) et le manioc. Certaines de ces plantes peuvent être cultivées sur les digues des étangs.

Les bas-fonds marécageux devraient être aménagés, chaque fois que c'est possible, pour y installer des pépinières et cultures d'Azolla pinnata (fougère aquatique) comme engrais vert et aliment pour le bétail.

Un effort particulier doit être fait pour produire de grandes quantités d'engrais vert, de compost et de fumier artificiel en utilisant au maximum tous les végétaux disponibles.

Le choix des espèces pour les élevages et l'alevinage des plans d'eau est très important. Il doit se faire en fonction des conditions biologiques des eaux (notamment conditions physico-chimiques), des végétaux aquatiques disponibles et consommables par les poissons, des possibilités d'alimentation artificielle et de la fertilisation et aussi en fonction des problèmes de reproduction des espèces. Il est préférable, chaque fois que c'est possible, de choisir des espèces qui se reproduisent naturellement afin d'éviter les problèmes de la reproduction induite ou artificielle en stations et les coûts de transports d'alevins lors des alevinages annuels.

Il est possible d'améliorer l'exploitation des lacs naturels et artificiels mais cela nécessite des études qui devraient se poursuivre plusieurs années. Il manque des données essentielles pour élaborer des programmes d'exploitation adéquats, notamment en ce qui concerne les conditions physico-chimiques des eaux, les facteurs biologiques (composition et volume du phytoplancton, du zooplancton et du benthos), la composition de la faune ichtyologique, et l'importance des pollutions éventuelles.

Ces travaux d'études et de recherches devraient être confiés à une Brigade de Pêche, dirigée par un ingénieur des pêches, et qui disposerait du personnel et de l'équipement nécessaire pour exécuter les travaux suivants:

  1. des essais de pêche en utilisant, de jour et de nuit, différents engins de pêche (sennes, filets maillants, éperviers, etc.) afin d'établir l'éfficacité des filets, la rentabilité et le prix de revient du poisson capturé par chaque engin et pouvoir ainsi décider lequel est à préconiser pour l'exploitation de chaque plan d'eau. Faire des essais de pêche avec différentes grandeurs de mailles et différentes épaisseurs de fil;

  2. des pêches systématiques afin d'etablir la composition numérique et pondérale des captures et vérifier aussi l'efficacité des déversements annuels d'alevins;

  3. des prélèvements systématiques d'échantillons d'eau, de vase, de plancton et de benthos pour analyses et étude;

  4. ces travaux devraient aller de pair avec des prélèvements réguliers de contenus stomacaux des espèces capturées. L'analyse de ces contenus stomacaux permettra de connaître les composantes de chaînes alimentaires qui sont réellement consommées par les poissons. Par déduction on saura également quels sont les ‘aliments’ disponibles (tels que vers, larves d'insectes, algues, etc.) mais que les poissons, existants dans les lacs, ne consomment pas. Connaissant les régimes alimentaires des diverses espèces l'on pourra mieux décider quelles sont les espèces qu'il y a intérêt à y déverser ou à y introduire pour mieux équilibrer l'exploitation.

Cette Brigade de Pêche pourrait également faire des essais d'élevages en cages et recommencer des élevages expérimentaux en enclos dans des diverticules de certains lacs, notamment dans le Hô Tây. Utiliser différents matériaux (lattis en bambou, filets, grillage métallique) pour construire les parois des enclos et des cages, en donnant priorité aux matériaux locaux. Etablir le prix de revient des installations (prix des matériaux et coût de la main-d'oeuvre pour l'installation) et la rentabilité de l'élevage en cages et en enclos. Le choix des espèces à déverser dans les enclos et cages est très important et priorité devrait être donnée aux espèces herbivores qui peuvent se nourrir à moindres frais.

Le lac Hô Tây subit des pollutions qui, à plus ou moins brève échéance, risquent de réduire la productivité piscicole de ce lac qui est déjà dans une phase d'eutrophisation très avancée. L'on ne dispose pas de données concernant les autres lacs naturels enrichis par des eaux résiduelles, mais l'on peut penser qu'ils sont également le siège de pollutions plus ou moins graves. Le perennité des productions piscicoles relativement élevées de ces plans d'eau ne peut être garantie que si l'on contrôle efficacement les pollutions menaçantes. Il est urgent d'étudier la nature et l'étendue de ces pollutions.

Tous ces travaux d'etudes et de recherches devraient être inscrits dans le plan de développement de l'aquaculture et de la pêche.


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