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3. OBSERVATIONS ET DISCUSSIONS

Le tableau 1 contient des informations sur des types d'aquaculture que la Mission a visités. Le fait le plus significatif de ce tableau est qu'il y a une vaste gamme de cultures et techniques qui intéressent un grand nombre de personnes. Malgré cela, il n'y a pas encore d'exploitations d'aquaculture commerciale qui ont fait leurs preuves et qui sont auto-suffisantes.

Tableau 1

Types d'aquaculture pratiqués en Côte d'Ivoire (février-mars 1980)

Types d'entrepreneursLagunesEaux continentales
Type de système d'élevageNature de l'activitéEspècesType de système d'élevageNature de l'activitéEspèces
Compagnie multinationaleAnnexe 6 Cages flottantesEntreprise piloteT. nilotica
T. heudelotii
   
Planteurs ruraux   Etangs de barrage Annexe 3Non commercialeTilapia
Poisson-chat
Entrepreneurs urbainsEnclos1

Enclos

Annexe 5
Elevage pilote

Commerciale
T. nilotica
T. heudelotii
Tilapia
sp.
Chrysichthys walkeri
Etangs en dérivation


Annexe 3
CommercialeT. nilotica
T. zillii
Petits  fermiers2   Etangs en dérivation
Annexe 3
CommercialeTilapia sp.
Ecoles primaires2 en zones rurales   Etangs en dérivationAutoconsommation et ventesTilapia sp.
Missionaires   Etangs en dérivation AutoconsommationT. nilotica + porcs
Projet PNUD/FAO   Cages flottantes
Annexe 4
Expérimentale T. nilotica
Ministère des Eaux et Forêts   Etangs
Annexe 1
Ferme commercialeT. nilotica

1 Elevage associé expérimental de porcs et de poissons

2 Pas encore opérationnel

3.1 Pisciculture en lagunes

Depuis quelques années, le Gouvernement ivoirien a tenté de développer des élevages en cages et en enclos. Récemment des intérêts privés ont investi, l'un dans l'élevage en cages, l'autre dans l'élevage en enclos. Ces privés ont bénéficié de la proximité du marché d'Abidjan où il y a une forte demande pour les produits de l'aquaculture.

La Mission a visité l'élevage en cages de B.P. dans la lagune d'Ebrié, un élevage en enclos près de Bingerville (également dans la lagune Ebrié) ainsi qu'un élevage rural en enclos près de Grand Bassam. Les données relatives à ces exploitations se trouvent en annexes 5 et 6.

La station pour l'élevage en cage de B.P. était pratiquement prête pour se lancer dans la production commerciale. En utilisant les installations disponibles, le gérant avait l'espoir de pouvoir produire 150 tonnes de tilapia par an, en dépit des fortes mortalités des alevins. Le gérant est de l'avis que l'activité sera commercialement viable, car le prix du tilapia sur les marchés d'Abidjan est très intéressant et atteint parfois l'équivalent de US$ 5 le kg.

Etant donné les prix très élevés pour les machoirons (Chrysichthys walkeri) sur les marchés d'Abidjan, leur élevage en enclos pourrait devenir très rentable. Comme cet élevage dépend de la fourniture d'alevins capturés dans les lagunes, l'élevage en enclos pourrait aussi procurer un revenu aux pêcheurs de la lagune qui pêchent ces alevins pour les fournir aux éleveurs.

L'aquaculture lagunaire actuelle utilise beaucoup de capitaux, se pratique à relativement grande échelle et met en oeuvre des systèmes semi-intensifs (enclos) ou intensifs (cages). Il est évident qu'il ne sera pas possible de vulgariser auprès des pêcheurs et autres membres des communautés vivant aux alentours des lagunes, les techniques d'élevage et l'équipement très moderne et coûteux utilisés par B.P.. Il sera sans doute possible de vulgariser plus facilement le système d'élevage en enclos du machoiron. Cela devrait devenir une activité pour des pêcheurs lagunaires.

3.2 Pisciculture commerciale en eaux douces

La pisciculture commerciale en eaux douces se pratique sous deux formes en Côte d'Ivoire:

  1. dans une ferme commerciale de 5 ha à Korhogo, et
  2. par de petits entrepreneurs ruraux, souvent comme une activité accessoire.

L'élevage du Tilapia nilotica à la ferme commerciale de Natio-Kobadara n'est pas encore rentable à long terme. Au début de 1980, le tilapia se vendait, à Korhogo, à 350 Fr. CFA le kg, alors que les frais de production, selon le gérant de l'exploitation, étaient de 440 Fr.CFA le kg. Neanmoins, comme on peut le constater en annexe 1, une grande partie de ces frais sont des frais financiers imputés (intérêt, dépréciation, etc.) ce qui fait que l'exploitation, sous sa forme actuelle pourrait, en fait, avoir un solde de caisse positif.

Des techniques nouvelles, expérimentées à la station du CTFT (Centre Technique Forestier Tropical) à Bouaké n'ont pas encore été appliquées à Natio-Kobadara. La ferme piscicole de Natio-Kobadara pourrait, assez rapidement, devenir commercialement valable.

L'activité des petits entrepreneurs ruraux est très intéressante, mais néanmoins, et pour diverses raisons, plus difficile à apprécier en termes économiques exacts. Ce type de pisciculture sera discuté plus en détail à la section 3.3 ci-après.

3.3 Pisciculture familiale en étangs en milieu rural

3.3.1 Observations

Pendant son séjour en Côte-d'Ivoire, la Mission a pu visiter une douzaine de sites de pisciculture rurale: des barrages, des étangs en exploitation et en construction, surtout aux alentours de Bouaké, d'Adzope et de Daloa.

Les informations sont présentées sommairement aux tableaux 2 et 3. Ces informations, obtenues pour la plupart des cas lors de discussions avec les personnes intéressées, ne sont évidemment pas complètes et probablement en partie erronées, du fait, soit des mémoires défaillantes des pisciculteurs, soit des réticenses des éleveurs qui ne veulent pas divulguer leur situation économique. Les données obtenues devraient surtout servir de base pour des investigations plus approfondies. Ce problème sera évoqué plus loin.

Tableau 2

Quelques données caractéristiques de la pisciculture en milieu rural début 1980

 Pisciculteurs à:
KregbéAdzopéAdzopéAdzopéDaloaDaloaDaloa
Date de démarrage197819731Déc. 197919631974Déc. 781979
Nombre d'étangsUn barrage 4 1 2 11
Superficie (ares)150–200 392,81482,311
Espèces élevéesT. niloticaTilapia sp.Tilapia sp. T. nilotica
T. zillii
Clarias
sp.
Hetero-branchus
 T. nilotica
TerrainSans utilisationRizièreRizière RizièreRizièreRizière
Investissement en millions de Fr. CFA122,00,61,00,170,080,35
Nourri-ture 234 55
Investissement en milliers de Fr. CFA/are605221470413431

1 Ce pisciculteur avait déjà construit un premier étang en 1955

2 Son de riz, vieux pain, feuilles de manioc et de patate douce

3 Sons de riz et de maïs, déchêts de laitues et vieux pain

4 Déchêts d'aliments

5 Son de riz uniquement

Tableau 3

Aspects économiques de la pisciculture en milieu rural début 1980 1

 Pisciculteurs à:
AdzopéAdzopéAdzopéDaloaDaloa
Frais de fonctionnement
(en milliers de Fr. CFA)
     
 - salaires   360150   250 1503
 - nourriture   140  12  13521
 Total   500162   250 28524
Rendements     
 - kg/an1 9401961 400 200120
 - kg/are/an     54  70     40   5052
Prix (Fr. CFA/kg)   250250   670 500500
Recettes/exploitation
(en milliers de Fr. CFA)
   460  49   286 10060
Recettes moins frais de fonctionnement
    (40) (113)      36 (185) 34
Réponse à la question “êtes-vous satisfait du résultat de votre pisciculture?”oui-ouinonoui

1 Les données de base de ce tableau, renseignements fournis par les pisciculteurs, ont permis à la Mission d'estimer les frais de fonctionnement, recettes d'exploitation, etc.

Les barrages sont construits et empoissonnés par des propriétaires terriens, souvent de gros planteurs et il semble que cette activité est plutôt un symbole d'un certain standing, plutôt qu'un moyen de se nourrir ou d'augmenter le revenu familial. Cela était évident, notamment dans la région d'Adzopé, où l'une des raisons pour avoir un étang de barrage et de faire de la pisciculture était de pouvoir participer au Concours National et d'avoir ainsi plus de chances d'être identifié comme le fermier le plus progressif.

Le développement des étangs semble surtout être l'oeuvre de gens à revenus plus modestes. Les étangs se construisent en premier lieu dans des bas-fonds souvent en transformant de vieilles rizières. La plupart des éleveurs interviewés par la Mission étaient satisfaits de leurs étangs et étaient en train d'en construire d'autres.

En aucun cas, la Mission n'a pu obtenir la confirmation qu'un pisciculteur avait tenté d'établir par écrit un bilan économique avant de se lancer dans l'affaire. Même les grands planteurs n'ont pas d'idées claires et précises concernant la rentabilité de leurs activités piscicoles.

3.3.2 Analyse

Les données rassemblées sur le terrain ont été combinées avec les informations qui proviennent des expériences de pisciculture rurale déjà réalisées afin de dégager les caractéristiques essentielles de quelques exploitations typiques, qui ont fait leurs preuves. Ces exploitations se divisent en deux catégories: (a) la pisciculture familiale simple avec utilisation de compost et alimentation des poissons, basée sur l'expérience déjà acquise en Afrique; (b) la pisciculture plutôt “commerciale”, basée sur des élevages monosexe du type Natio-Kobadara.

Les caractéristiques économiques projetées des activités analysées sont reprises au tableau 4. Etant donné la situation difficile dans laquelle se trouvent les éleveurs de porcs et l'étroitesse du marché du porc, la Mission considère que cela ne vaut pas la peine d'envisager l'élevage associé porcs-poissons comme une alternative économiquement viable.

Dans la pisciculture familiale simple la mission envisage l'utilisation de un à quatre étangs de 4 à 8 ares par famille (voir les colonnes sous la rubrique “technologie simple” du tableau 4). Cette échelle d'activité est relativement grande. Ces étangs sont de 4 ares et plus. En République Centrafricaine et au Gabon, par exemple, la plupart des étangs familiaux ont une superficie inférieure à 2 ares (200 m2).

Les étangs seront mis en charge avec des alevins d'environ 5 g de T. nilotica. On vulgarisera parmi les paysans l'utilisation de compost et l'alimentation des poissons à base de sous-produits agricoles (son de riz, son de maïs, drêche de brasserie, déchêts de ménage, etc.). En République Centrafricaine, ce type de pisciculture a donné des productions allant de 8 à 55 kg de poisson par are/an (Miller, 1978). Les différences de rendement résultent du fait que les pisciculteurs fertilisent plus ou moins bien leurs étangs et nourrissent plus ou moins régulièrement leurs poissons. Comme hypothèses de travail, nous avons utilisé deux niveaux de rendement: 20 kg/are/an (niveau I dans le tableau 4) et 40 kg/are/an (niveau II).

L'analyse a également porté sur des exploitations commerciales familiales, le type d'élevage préconisé étant celui qui se pratique à Natio-Kobadara. Deux cas sont considérés: celui d'une unité de 5 étangs totalisant 28 ares, et celui d'une unité de 54 ares. Les données techniques sont les mêmes que celles décrites en annexe 1 et le rendement prévu est de 84,5 kg par are par an (en ne tenant compte que des seuls étangs de production: 24 et 48 ares).

Tableau 4

Projections des frais de fonctionnement et des recettes pour des exploitations piscicoles typiques en milieu rural (en milliers de Fr. CFA)

 Type d'exploitation piscicole
Technologie simple
Propriétaire = cultivateur
Technologie monosexe
Propriétaire # cultivateur
Type 1Type 2Type 3Type 4Type 5
Nombre d'étangs    1    1  4  5  9
Superficie de chaque étang (en ares)    4    8  82 × 23 × 2
3 × 86 × 8
Superficie sous eau (en ares)    4    8322854
Investissements 1     
- étangs 21543081 2321 0782 079
- outillages 3  10  15 40 40 80
- hangar/case       800   800
Total1643231 2721 9182 959
Frais de fonctionnement par an     
- salaires 4         192 9        204 9
- nourriture 5  10  21    85      98    196
- entretien 6    1    1      4        6      12
- alevins 7             82 10         164 10
- divers    1    3    10      38      57
Total   Niveau I 11    2    4    14  
 Niveau II  12  25    99    416    633
Recettes annuelles I  22  44  176  
275 Fr. CFA/kg II  44  88  352  
    5601 120
Bénéfices annuels avant frais financiers I  20  40  162  
II  32  63  253  
    144  487
Intérêt 8    5    9    36  62    95
Dépréciation    3    6    25  38    59
Bénéfices annuels après frais financiers I  12  25  101  
II  24  48  192  
      44  333

Notes et commentaires concernant les données du tableau 4

1 Le propriétaire ne doit pas payer pour le terrain. Il paie seulement les frais de construction des étangs.

2 38 500 Fr. CFA par are. L'expérience de Centrafrique démontre qu'un homme peut creuser un étang de 100 m2 (1 are) en 22 jours. Il doit donc être possible pour un villageois de construire son propre étang de 4 ares en 90 jours. En appliquant un salaire journalier de 1 000 Fr. CFA, la dépense (imputée) serait de 90 000 Fr. CFA. Le montant des frais de construction qui a été retenu est donc prudent.

3 Filets (éperviers et sennes), seaux et balances.

4 Dans les trois cas typiques “Technologie simple” il n'a pas été prévu de salaires car il est supposé que ces propriétaires doivent se rembourser eux-mêmes sur le revenu de leur pisciculture. Dans les complexes piscicoles (où on pratique le système d'élevage de Natio-Kobadara), les poissons doivent être nourris. Pour éviter les vols de poissons (braconnage), il est prévu d'employer un gardien mais qui effectuera également tous les travaux d'entretien. Salaire: 15 000 Fr. CFA par mois.

5 La nourriture est composée de 75% de son de riz à 4 Fr. CFA/kg + 25% de tourteau de coton à 40 Fr. CFA/kg. Le coût de la ration est de 13 Fr. CFA/kg. Le Qn a été estimé à 4,5.

6 Estimé à 1 000 Fr. CFA/étang/an

7 Des alevins d'environ 5 g seront achetés à une station d'alevinage au prix de 5 Fr. CFA l'alevin. Les étangs dans lesquels on pratique le système d'élevage de Natio-Kobadara seront stockés à une densité de 2,2 alevins/m2. Dans les cas de “technologie simple” les tilapias seront pêchés de façon intermittente. Les alevins seront déversés dans les étangs pour grandir. Donc une fois ce système de culture établi, il n'y aura aucun besoin d'acheter des alevins. La reproduction se fera de manière naturelle dans les étangs.

8 L'analyse présentée au tableau 4 est une analyse de rentabilité commerciale. Une des conditions pour qu'une activité puisse devenir rentable est qu'elle soit susceptible de rapporter un intérêt sur le capital investi dans l'affaire. Un intérêt de 5 pour cent a été utilisé ici. Cela peut paraître bas mais c'est en effet un taux relativement élevé, étant donné que l'on ne tient pas compte de l'inflation. L'investissement total est composé de l'investissement: 2 + les frais de fonctionnement × 0,5.

9 Les coûts de la main d'oeuvre qui vient aider au moment des vidanges et du sexage manuel sont compris dans les salaires.

10 Besoins en alevins: 24 ares × 1,4 cycle/an × 220 fingerlings/are = 7 392 arrondi à 8 200 fingerlings pour compenser les mortalités. Pour assurer le nombre de mâles nécessaires, il faut acheter le double d'alevins, à 5 Fr. CFA pièce (2 × 8 200 alevins × 5 Fr. CFA = 82 000 Fr. CFA).

11 Les chiffres romains se réfèrent à des hypothèses de rendement par are par an. Un rendement de 20 kg/are/an (c'est-à-dire alternative I) est obtenu en République Centrafricaine par des pisciculteurs qui ne fertilisent pas leurs étangs et qui ne nourrissent qu'irrégulièrement leurs poissons. Les frais de ces pisciculteurs ne sont donc pas les mêmes que ceux qui utilisent du compost et nourrissent régulièrement leurs poissons. Nous avons donc déduit, du coût total, les frais de nourriture.

Tableau 5

Couverture des revenus réels annuels minimals par des bénéfices réalisables dans des exploitations piscicoles typiques

 Technologie simple
Propriétaire = Cultivateur
Type 1Type 2Type 3
Superficie sous eau (en ares)    4       8      32
Nombre d'hommes/jours/an nécessaires pour une unité qui produit 40 kg/are/an  27     37      97
Bénéfices nets par an (milliers de Fr. CFA)
- à 40 kg/are/an
  24     48    192
Salaires qui peuvent être payés en utilisant tous les bénéfices nets (Fr. CFA par jour)
- à 40 kg/are/an
8881 2971 979
Nombre maximum d'hommes/jours qui peuvent être remboursés à 500 Fr. CFA/jour, sur le bénéfice net
- à 40 kg/are/an
  48     96    384
Nombre maximum d'hommes/jours qui peuvent être remboursés, à 2 000 Fr. CFA/jour, sur le bénéfice net
- à 40 kg/are/an
  12     24      96

3.3.3 Discussions

Comme on peut voir d'après le tableau 4, les calculs économiques fondés sur ces hypothèses de travail donnent des résultats positifs. Des bénéfices nets (avant remboursement ou paiement au propriétaire-cultivateur) sont obtenus dans les trois cas analysés.

Néanmoins, dans les frais de l'exploitation l'analyse ne tient pas compte des remboursements pour l'effort déployé par le cultivateur. La question suivante s'impose donc: les bénéfices seront-ils suffisamment grands pour compenser l'effort fait par le cultivateur? La réponse, naturellement, dépend en grande partie de la magnitude de l'effort et de la compensation monétaire (ou naturelle) minimum sollicités par le propriétaire-cultivateur. Le tableau 5 contient des chiffres relatifs à cette question.

Une fois l'étang creusé, les activités qui demanderont le plus grand effort, mesuré en temps, seront la distribution de la nourriture et la protection contre les vols et les prédateurs. La distribution de la nourriture, qui, dans la plupart des cas doit se faire sur une base journalière, ne nécessite pas de connaissances particulières et peut être faite par n'importe quel membre de la famille. Etant donné que notre analyse reste sur l'utilisation d'un aliment que le cultivateur achète sur le marché 1, l'activité de distribution de nourriture aux poissons ne prendre que peu de temps et pourra être évaluée sur la base d'un salaire normal pour le travail manuel aux champs: 500 Fr. CFA par jour.

L'effort nécessaire pour protéger les poissons contre les vols et les prédateurs dépendra de l'environnement et de la situation de l'habitation du propriétaire par rapport à l'emplacement de l'étang. Dans les endroits que la mission a visités, soit l'étang se trouve près de la maison, soit il se trouve au milieu d'autres champs. La Mission en déduit que c'est une activité qui peut être menée par des membres de la famille du propriétaire, qui ne prendra que peu de temps en plus de la surveillance normale qu'aurait développée la famille en toutes circonstances, et que la valeur de 500 Fr. CFA par jour peut aussi être imputée à cette activité.

Si l'on compare les lignes 2 et 5 du tableau 5, on voit que pour les trois types d'exploitations analysés, le bénéfice serait suffisant pour payer l'effort du cultivateur si celui-ci est évalué à 500 Fr. CFA par jour.

Du même tableau il ressort une autre constatation importante: des exploitations piscicoles familiales ne donneront pas de travail à toute la famille pendant toute l'année, sauf dans des cas tout à fait exceptionnels. Au maximum, une exploitation d'une trentaine d'hectares fournira un bénéfice net suffisamment grand pour payer un travailleur pendant un an.

L'effort principal du développement et de l'exploitation de la pisciculture familiale réside dans la construction des étangs. Un examen du tableau 4 montre que l'investissement est de 3 à 4 fois plus grand que les recettes annuelles prévues. Indubitablement, quand des pisciculteurs potentiels feront cette constatation, cela freinera leur enthousiasme.

Comme on peut constater d'après les explications données au tableau 4, l'analyse économique faite dans ce tableau est basée sur la dépréciation de l'investissement sur une période de 50 ans, donc sur un point de vue national. Il n'est pas certain que l'exploitant accepte de récupérer son investissement (qui, pour le paysan très souvent consiste en travail manuel) au rythme consenti par l'exploitation. Le tableau 4 indique que ce rythme sera d'environ 9 ans pour l'exploitation du type 1, de 7 ans pour l'exploitation du type 2 et de 6 ans pour l'exploitation du type 3.

Si en fait l'importance de l'effort initial freine l'expansion de la pisciculture rurale, il sera logique que le Gouvernement accorde des subventions pour la construction des étangs.

1 Le résultat de l'analyse sera plus avantageux si on se base sur l'utilisation du compost et autres sous-produits agricoles comme proposé dans la section 3.3.2. L'analyse basée sur l'utilisation d'un aliment composé est donc de nature conservatoire

Les perspectives économiques d'une petite entreprise familiale piscicole basée sur la technologie monosexe (gestion du type Natio-Kobadara) sont aussi montrées au tableau 4. Le tableau contient des chiffres relatifs à deux types: un de 28 ares et un de 54 ares. Le plus grand n'occupe alors plus qu'un hectare, tout espace considéré.

Les deux types produisent des bénéfices nets pour le propriétaire. L'unité de 52 ares donne un revenu au propriétaire, après déduction des frais financiers, qui est considérablement plus élevé que celui obtenu en riziculture irriguée. Le type 5, qui est deux fois plus grand (superficie sous eau) que le type 4, présente un bénéfice net qui est 8 fois plus grand. La raison principale est le fait que tous les deux auront besoin d'un homme toute l'année. La taille optimum (du point de vue bénéfice pour le propriétaire) doit donc être relative à la superficie maximum qui peut tenir un homme occupé, ou une famille (sans que cela réduise considérablement les revenus générés par les autres activités de la famille).

Il est évident que la technologie monosexe (gestion du type Natio-Kobadara) donne des résultats économiques très favorables. Mais il est également clair que cette gestion est encore trop compliquée pour un pisciculteur inexpérimenté.


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