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1. INTRODUCTION


1.1 Généralités
1.2 De l’identification à la mise en oeuvre d’un projet
1.3 Niveau des études
1.4 Planification des études d’évaluation des terres

1.1 Généralités

Si, moyennant développement de l’irrigation, les ressources en terres et en eaux étaient mieux exploitées, la production alimentaire pourrait s’accroître sensiblement dans de nombreuses parties du monde. Le processus par lequel on apprécie l’aptitude d’une terre à une utilisation donnée, comme l’agriculture irriguée, s’appelle l’évaluation des terres.

L’évaluation des terres fournit des données et recommandations qui permettent de décider du type de culture à pratiquer et où, et de répondre à d’autres questions de ce genre. Elle aboutit au choix de la terre et du système de culture qui conviennent ainsi que des options en matière d’irrigation et d’aménagement qui sont viables du triple point de vue physique, financier et économique. La classification des terres est le fruit principal des études à conduire au titre de l’évaluation. Elle indique l’aptitude de différents types de terre à différentes utilisations, qu’illustrent généralement des cartes accompagnées de rapports.

Le système d’évaluation et de classification de l’aptitude des terres décrit dans le présent bulletin se fonde sur le “Cadre pour l’évaluation des terres” (FAO 1976a). Il est schématiquement représenté au Tableau 1. Il est décrit en détail à l’Annexe 1.

Tableau 1 SYSTEME DE CLASSIFICATION DES APTITUDES

Dans les sous-classes, les lettres minuscules se réfèrent à la nature d’un besoin ou d’une limitation (exemple: t pour topographie et d pour drainage). Se reporter au Tableau 17 pour la liste des symboles des sous-classes. Il est également possible d’utiliser les unités d’aptitude des terres (subdivisions des sous-classes) pour indiquer une légère différence d’aménagement.

1.2 De l’identification à la mise en oeuvre d’un projet

Dès les premiers stades de l’examen des ressources en terres, les études d’évaluation donnent une idée de l’aptitude de ces dernières pour telles ou telles méthodes d’irrigation, ainsi que des améliorations éventuellement rentables. Des études supplémentaires, sur le terrain, permettent d’identifier des projets et d’élaborer un plan de développement de l’irrigation. Les différents projets sont ensuite classés par ordre de priorité. Les projets prioritaires font alors l’objet d’une analyse détaillée et d’un affinage progressif de leur plan. Enfin, on ajuste progressivement cultures, méthodes d’irrigation, intrants et améliorations des terres envisagés jusqu’à ce que l’on obtienne un plan satisfaisant.

On dispose de divers critères pour juger de la valeur du plan d’un projet. Un bon plan est celui qui non seulement prend en considération les objectifs sociaux et politiques, souvent d’importance primordiale dans la pratique, mais aussi améliore le sort de l’agriculteur et de la communauté et renforce l’économie nationale. En d’autres termes, il s’agit du plan qui, dans la comparaison économique entre la situation sans et avec projet, donne la plus forte augmentation possible d’avantages nets. En général, un tel plan fait le meilleur usage des ressources limitées en terre, eaux et facteurs de production. Enfin, le bon plan est celui qui est réalisable et applicable dans les conditions réelles du terrain, et non pas nécessairement celui qui, sur le papier, apparaît comme le plus attrayant du point de vue économique.

Les rapports d’évaluation des terres, les cartes et autres données ne servent pas qu’à la planification; ils sont aussi utiles pour la conception, la mise en oeuvre et la surveillance du projet. Pour le dessin détaillé des ouvrages de génie civil, on a parfois besoin de données préalablement réunies pendant l’étude d’évaluation. Lors de la mise en oeuvre puis de la gestion du projet d’irrigation, cette étude permet de suivre les modifications qui peuvent intervenir dans les conditions physiques et socio-économiques. Pour répondre à ces modifications, il peut être nécessaire de remanier les recommandations et de les mettre à jour de temps en temps.

Actuellement, la remise en état de périmètres d’irrigation existants constitue un aspect important de l’évaluation des terres. C’est dire combien il est nécessaire, lorsqu’on prépare un projet d’irrigation, de procéder dès le départ à une évaluation exhaustive des ressources en terres et eaux: mieux vaut prévenir que guérir.

1.3 Niveau des études

L’étude des ressources en terres et en eaux et la formulation de propositions en vue du développement de l’irrigation peuvent se faire à différents niveaux: pays, bassin hydrographique ou hydrogéologique, projet, village, exploitation, champ (Horning 1979). Le Tableau 2 indique le type d’études correspondant à chacun de ces niveaux.

L’identification d’un projet au niveau d’un pays ou d’un bassin impose la conduite d’études de préfaisabilité et de faisabilité, qui sont suivies d’études détaillées pour la conception des réseaux de distribution de l’eau et la disposition des champs. La prospection nécessaire à ces différentes études se fait à des échelles différentes.

Tableau 2 NIVEAU DES ETUDES

NIVEAU

TYPE D’ETUDE

TYPE DE PROSPECTION

Pays Bassin

Identification du projet

Reconnaissance

Projet

Préfaisabilité
Faisabilité

Semi-détaillée
Détaillée

Village, exploitation ou champ

Conception détaillée

Très détaillée


Au niveau du pays, les études ont pour but de dresser un Plan-cadre de mise en valeur des ressources en terres et en eaux. Ce plan comporte une évaluation des priorités accordées aux différentes régions et zones du pays. Au niveau du bassin hydrographique ou hydrogéologique, les études jettent les bases de la mise en valeur des eaux, de leur maîtrise à diverses fins et de la planification de l’utilisation des terres (exemple: protection des bassins hydrographiques, zonage des crues, zones potentiellement irrigables, mise en valeur des deltas, des marécages et des zones soumises à l’influence des marées, etc.). Au niveau du projet d’irrigation, on dresse un plan d’investissement dans l’irrigation, le drainage et la protection contre les inondations. Au niveau du village, de l’exploitation ou du champ, les études fournissent des données pour la gestion des eaux, les améliorations ou la remise en état.

Les études de reconnaissance à petite échelle (du 1/100 000 au 1/250 000) (Tableau 3) servent à faire l’inventaire général des ressources (voir Chapitre 5), à identifier les zones à bon potentiel de mise en valeur et à mener des études plus détaillées. Vu leur nature composite, les unités cartographiques ne donnent qu’une idée approximative de la mesure dans laquelle sont réunies les conditions propres aux différentes catégories d’aptitude des terres. La méthode d’étude dite du “système des terres” (concept des ensembles) (Christian et Stewart 1968) est fréquemment employée et suffit parfois pour distinguer grosso modo les terres qui sont aptes à certains types d’agriculture irriguée de celles qui y sont inaptes. A ce stade, les études économiques indiquent approximativement les niveaux de la production et des revenus.

Les études semi-détaillées de préfaisabilité ou de faisabilité se font normalement à des échelles allant du 1/25 000 au 1/50 000. Les unités cartographiques des sols se composent d’un mélange d’unités homogènes (séries pédologiques) et d’unités composites (exemple: associations de sols). Avec un degré d’échantillonnage assez poussé, ces études permettent de planifier certaines mises en valeur jusqu’au stade de la conception.

Des études détaillées distinctes peuvent être nécessaires pour les sols et pour la topographie. Les enquêtes pédologiques, dont l’échelle se situe normalement entre le 1/10 000 et le 1/25 000 et dont les unités cartographiques principales sont les séries et les phases de sols, servent à la planification et à la mise en oeuvre de projets. Elles sont également utilisées au niveau du village ou du bassin hydrographique pour étudier, par exemple, la disposition des exploitations et les réseaux d’irrigation. Si la topographie influe de façon importante sur la délimitation des terres appelées à être irriguées par gravité, il peut s’avérer nécessaire de pousser davantage les études (au 1/5 000 par exemple) en vue des opérations de nivellement des terres et d’ingénierie.

Les études très détaillées - à des échelles supérieures ou égales au 1/5 000 - sont nécessaires lorsqu’il faut représenter des courbes de niveau très rapprochées pour déterminer les classes de pente ou aligner des canaux d’irrigation et de drainage.

1.4 Planification des études d’évaluation des terres

Ces études peuvent être effectuées par un ministère ou une société privée avec ou sans aide extérieure. Les grands projets d’irrigation mettent d’ordinaire en jeu un client, un organisme de financement et une société-conseil. Le travail sur le terrain est généralement précédé de discussions servant à définir les objectifs de l’évaluation ainsi que les données et hypothèses qui doivent l’étayer. L’étendue et les limites de la zone à évaluer, le mode d’utilisation des terres ou le type de système d’irrigation peuvent être stipulés dans le cahier des charges ou inclus dans l’évaluation. Il faut décider des critères physiques et économiques qui serviront à mesurer l’aptitude des terres (voir Section 2.4), et arrêter, avant le démarrage des travaux sur le terrain, l’échelonnement des activités ainsi que le niveau de détail et l’échelle des études requises. Il faut également prévoir les incidences administratives, logistiques et financières des activités en question.

Au cours de ces discussions initiales, on décidera des cartes et rapports dont on aura besoin aux différents stades de l’étude. Toute étude bien conçue en matière de développement de l’irrigation donne lieu à la présentation périodique de rapports de situation et de cartes, éléments indispensables pour étayer les décisions majeures prises aux moments cruciaux de l’étude. Il est courant aussi de soumettre des rapports intérimaires pour faciliter les discussions et les amendements avant l’établissement des rapports et cartes définitifs.

La présente introduction a servi à montrer comment les données physiques et économiques de l’évaluation des terres pour l’agriculture irriguée se font de plus en plus détaillées et précises à mesure que le processus de l’évaluation passe de la reconnaissance et de l’identification à la planification détaillée des projets d’irrigation. Le Chapitre 2 traite des principes et de la terminologie et définit les procédures FAO d’évaluation des terres en vue de l’agriculture irriguée.

Tableau 3 NIVEAU DE L’ETUDE, ECHELLE ET TYPE DE CARTE

TYPE D’ETUDE

ECHELLE


Très haute intensité
(très détaillée)

Supérieure à
1/10 000

Cartes des sols indiquant les caractéristiques particulières ou les phases des séries pédologiques et éventuellement les complexes pédologiques; cartes topographiques avec indication de l’altitude de points précis; cartes cadastrales; cartes ressources en eau souterraine, cultures et végétation actuelles, etc.

Haute intensité
(détaillée)

De 1/10 000
à 1/25 000

Cartes des sols indiquant les phases des séries pédologiques et les complexes pédologiques; cartes topographiques détaillées, cartes des eaux souterraines, utilisation actuelle des terres, etc.

Intensité moyenne
(semi-détaillée)

De 1/25 000
à 1/100 000

Cartes de sols indiquant les séries ou les associations de séries; cartes de systèmes de terres; unités géophysiques, cartes topographiques avec courbes de niveau, cartes de l’utilisation actuelle des terres, etc.

Faible intensité
(reconnaissance)

De 1/100 000
à 1/250 000

Cartes des sols indiquant les associations et les phases des grands groupes ou des sous-groupes; cartes de systèmes de terres, cartes géophysiques ou topographiques, utilisation actuelle des terres, zones climatiques.

Exploratoire

De 1/250 000
à 1/100 000

Divers types d’unités de terre

Synthèse

Inférieure à
1/1 000 000

Cartes climatiques, cartes taxinomiques des sols, végétation et utilisation des terres, cartes géophysiques et géomorphologiques, zones agro-écologiques, etc.



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