Page précédente Table des matières Page suivante


CHAPITRE 11. UTILISATION DES NORMES ET RECOMMANDATIONS INTERNATIONALES DU CODEX ALIMENTARIUS


11.1. Introduction
11.2. Qu'est-ce que le Codex?
11.3. Comment fonctionne le Codex?
11.4. Utilisation du Codex

RÉSUMÉ: Le Codex Alimentarius est un recueil de normes alimentaires internationalement adoptées et présentées de manière uniforme. Ces normes ont pour but de protéger la santé et les intérêts économiques du consommateur, et d'assurer la loyauté des pratiques suivies dans le commerce des produits alimentaires. L'adoption des normes Codex est de nature à appuyer un service d'inspection sur des bases solides.

11.1. Introduction

On reconnaît généralement que, vu la complexité du système alimentaire mondial, aucun pays ne peut facilement remplir toutes les conditions exigées par un programme de contrôle pleinement efficace. Il est besoin d'une coopération internationale et de services consultatifs pour recenser les risques alimentaires qui inquiètent l'opinion mondiale, mettre au point les procédures de contrôle des aliments, harmoniser les prescriptions de salubrité, prendre les mesures propres à promouvoir les échanges commerciaux et, surtout, procéder à des échanges d'informations et d'expériences pour le plus grand avantage de toutes les parties concernées. Les programmes nationaux existants, y compris les services d'inspection, devant être périodiquement renforcés et remodelés pour suivre l'évolution du savoir et des techniques et s'adapter aux orientations nouvelles, les directeurs des services de contrôle des aliments doivent suivre de près l'évolution du secteur alimentaire international.

C'est pourquoi, il est utile d'étudier en détail le Programme mixte FAO/OMS sur les normes alimentaires, administré par la Commission (internationale et intergouvernementale) du Codex Alimentarius, car ce programme peut avoir un impact décisif sur les systèmes nationaux de contrôle des aliments. La FAO et l'OMS ont lancé nombre d'autres activités visant à renforcer l'infrastructure du contrôle des aliments et à fournir dans ce domaine une assistance technique aux pays en voie de développement. Pour se renseigner sur ces activités et programmes et en tirer le meilleur parti, les directeurs des services de contrôle ont intérêt à s'adresser directement aux organisations concernées.

11.2. Qu'est-ce que le Codex?

Nous ne nous attacherons pas ici à décrire en détail l'histoire ou la structure du Codex. Rappelons simplement que la Commission du Codex Alimentarius est un organe subsidiaire de la FAO et de l'OMS, créé en 1962 pour concrétiser les efforts conjoints de ces deux organisations. Son secrétariat est assuré par la Division des politiques alimentaires et de la nutrition, au siège de la FAO, à Rome. Tous les membres et membres associés de la FAO et de l'OMS peuvent en faire partie: 144 pays étaient membres du Codex en juillet 1993. Aucune obligation financière n'incombe aux pays membres, à l'exception de ceux qui hébergent un comité du Codex dont ils ont la charge; les autres membres n'assument que les frais encourus pour préparer les réunions du Codex et y participer.

Le Codex Alimentarius est une collection de normes alimentaires universellement agréées et présentées de façon uniforme. Ces normes visent à protéger, partout dans le monde, la santé des consommateurs et les intérêts économiques de l'industrie alimentaire et à favoriser les bonnes pratiques commerciales en abaissant les barrières non tarifaires portant sur l'étiquetage, les additifs alimentaires, les résidus de pesticides, les résidus de médicaments vétérinaires, la composition des aliments et autres normes de salubrité, notamment en matière de contaminants. Le Codex Alimentarius comporte également des dispositions de type consultatif: codes d'usage, directives et autres recommandations conçues pour aider les utilisateurs à réaliser ses objectifs.

Le Codex Alimentarius contient des normes applicables aux principaux aliments -traités, semi-traités ou bruts - et les fait connaître aux consommateurs. Il s'intéresse aussi (dans la mesure nécessaire à l'observation des normes Codex) aux autres denrées qui, une fois traitées, seront commercialisées comme produits alimentaires. Le Codex Alimentarius contient en outre des règles en matière d'hygiène et de qualité nutritionnelle (y compris - quand c'est nécessaire ou possible - des normes microbiologiques), ainsi que des dispositions relatives aux additifs alimentaires, aux résidus de pesticides, aux contaminants, à l'étiquetage et à la présentation des produits, ainsi qu'aux méthodes d'analyse et d'échantillonnage.

11.3. Comment fonctionne le Codex?

La Commission du Codex Alimentarius a ses propres statuts et son propre règlement intérieur; ils figurent dans le manuel de procédures de la Commission. Celle-ci agit par l'intermédiaire de ses divers comités et organes subsidiaires; on dénombre actuellement 25 organes subsidiaires, plus cinq comités régionaux. Ce sont, comme la Commission elle-même, des entités intergouvernementales. Les travaux de la Commission sont répartis entre:

· les comités du Codex sur les produits (comités "verticaux") qui s'occupent d'aliments ou de groupes d'aliments spécifiques;

· les comités du Codex sur les problèmes généraux (comités "horizontaux") qui traitent de sujets spécifiques intéressant les comités de produits, comme les additifs alimentaires, les résidus de pesticides, l'étiquetage, l'analyse et l'échantillonnage;

· les comités régionaux qui desservent certaines zones géographiques (Comités pour l'Asie, l'Afrique, l'Amérique latine et les Caraïbes, l'Europe, et l'Amérique du Nord et le Pacifique du Sud-Ouest). L'ensemble est coordonné par le Comité exécutif et la Commission elle-même. On trouvera à l'annexe 5 l'organigramme des divers organes subsidiaires.

La Commission se sert dans son travail de procédures permanentes élaborées au cours des ans sur la base de l'expérience pratique acquise. Le souci d'objectivité influe toujours sur l'adoption de procédures qui garantissent le bon déroulement des réunions tout en permettant aux opinions divergentes de se faire entendre. Lors des réunions, les interventions orales viennent compléter les observations écrites. Etant donné que la protection des intérêts des consommateurs - dans un pays et pour un aliment donnés - peut léser l'économie d'un pays ou constituer une pratique déloyale dans un autre pays, la Commission du Codex encourage les débats contradictoires francs et ouverts; étayées par des données objectives, ces discussions amènent les différents participants à revoir leurs opinions. Les réunions de la Commission permettent ainsi de concilier les points de vue sur les risques potentiels ou les avantages d'un produit; ces points de vue harmonisés donneront les normes Codex. Avant la clôture de la réunion, le projet de rapport est discuté, le cas échéant, amendé, puis adopté.

La procédure d'élaboration de normes mondiales ou régionales se présente comme suit:

Etape 1

La Commission décide d'élaborer une norme et confie cette tâche à un comité. La décision d'élaborer une norme peut être également prise par un comité.

Etape 2

Le Secrétariat établit un avant-projet de norme.

Etape 3

L'avant-projet de norme est envoyé aux gouvernements et aux organisations internationales pour observations.

Etape 4

Le Secrétariat transmet les observations au comité désigné.

Etape 5

L'avant-projet de norme est soumis par le Secrétariat à la Commission en vue de son adoption en tant que projet de norme.

Etape 6

Le projet de norme est adressé aux gouvernements et aux organisations internationales pour observations.

Etape 7

Le Secrétariat transmet les observations au comité.

Etape 8

Le projet de norme est renvoyé devant la Commission pour adoption en tant que norme Codex, laquelle sera envoyée aux gouvernements pour acceptation.

Si nécessaire, la Commission peut recourir à une procédure accélérée qui omet certaines des étapes intermédiaires.

L'étape suivante consiste à faire accepter la norme par les gouvernements, de manière qu'elle soit incluse dans le règlement national et puisse être appliquée dans le cadre du programme national de contrôle des aliments. Ce n'est qu'alors que le pays pourra tirer pleinement avantage de cette concertation internationale. La procédure

Codex prévoit que la norme doit être "acceptée" par les pays; plusieurs modalités sont prévues:

Acceptation pleine et entière;

Acceptation assortie de dérogations spécifiques; ou

Déclaration selon laquelle les produits alimentaires importés peuvent être librement distribués sur le territoire du pays importateur dans la mesure où les questions couvertes par la norme Codex sont concernées.

11.4. Utilisation du Codex

Les problèmes de qualité et de salubrité alimentaires peuvent avoir une incidence considérable sur l'économie d'un pays, ainsi que sur la santé et la nutrition de ses populations; ils doivent donc faire l'objet d'études intersectorielles et de mesures de suivi. La Commission du Codex Alimentarius traitant de ces questions à l'échelle mondiale, de nombreux pays - développés ou en voie de développement - ont jugé nécessaire de créer des "comités nationaux du Codex". Tout au long des différentes étapes de l'élaboration des normes, ces comités nationaux sont chargés d'informer et de conseiller le gouvernement lors des réunions des organes subsidiaires de la Commission. Les normes Codex adoptées doivent refléter le consensus des Etats membres; chaque pays doit donc apporter sa pierre à cet édifice pour protéger les intérêts nationaux et ceux des consommateurs. Ces efforts coordonnés ont permis aux pays dotés d'un comité national du Codex d'examiner leurs problèmes dans une perspective mondiale, de rassembler des données techniques et économiques sur leurs denrées alimentaires et d'effectuer, s'ils le souhaitent et le peuvent, leurs propres analyses coût-efficacité. Aucun gestionnaire responsable ne devrait laisser passer les possibilités offertes par ce mécanisme; il faudrait, au contraire, encourager sa création là où il n'existe pas déjà.

Les notes Codex, ainsi que les rapports, projets de codes d'usage et projets de normes Codex représentent une source importante d'informations scientifiques et techniques. Généralement présentés dans un ordre logique, ces textes sont envoyés pour examen aux membres de la Commission et aux experts. Les documents thématiques liés à des produits particuliers sont classés par ordre d'importance. Les notes se font parfois l'écho des points de vue économiques exprimés par les gouvernements. Ces textes présentent un intérêt considérable pour les instances nationales chargées du contrôle des aliments, et celles-ci ont tout intérêt à les étudier minutieusement aux fins de renforcer leurs programmes ou de revoir leurs priorités. Ces documents Codex sont aussi un excellent matériel didactique, fort utile pour la formation des fonctionnaires des offices de contrôle. Il est intéressant de se référer régulièrement à ce recueil d'information, en vue de garantir la qualité des programmes nationaux.

Outre les normes Codex adressées "pour acceptation" aux membres de la Commission aux termes de la procédure susmentionnée, les divers codes d'usage publiés par la Commission présentent, eux aussi, un intérêt certain. D'une large portée, ces codes se fondent sur les pratiques de fabrication agréées et reflètent des principes qui, dans la plupart des cas, sont universellement applicables. A certains égards, les codes d'usage hygiéniques ou techniques sont plus importants que les normes de produits pour les pays qui cherchent à renforcer leurs programmes de contrôle alimentaire. Ils sont riches d'informations sur les points de contrôle critiques applicables à chaque industrie alimentaire et à chacun des produits visés; en outre, ils explicitent les prescriptions scientifiques et techniques liées à chacune des étapes du traitement. Ces codes constituent donc une source de savoir inestimable et un outil précieux pour la mise en place d'un système de contrôle des aliments et la prestation de services consultatifs à l'industrie. Deux codes, en particulier, méritent d'être cités ici car ils sont universellement appliqués en matière de salubrité alimentaire et de commerce. Ce sont les Principes généraux d'hygiène des aliments et le Code de déontologie du commerce international des denrées alimentaires.

Les travaux du Codex attachent toujours la plus extrême importance à la salubrité des aliments. Tous, cependant, n'entendent pas ce terme dans la même acception, et tous ne sont pas d'accord sur les moyens à utiliser. Il est partout admis dans les pays développés, et plus encore dans les pays en développement, que la salubrité des produits vivriers est un problème universel. La Commission du Codex traite de ces questions par l'entremise de ses comités subsidiaires. Aux fins d'impartir au Codex Alimentarius la plus grande objectivité possible, on sollicite l'avis des comités mixtes d'experts FAO/OMS (sur les additifs alimentaires, les résidus de pesticides, l'irradiation des aliments et les résidus de médicaments vétérinaires), qui font autorité et sont indépendants. Les experts qui participent à ces comités s'expriment en leur nom personnel et non pas au nom de leur gouvernement ou d'institutions. Les rapports des comités d'experts sont envoyés aux gouvernements et à la Commission du Codex, qui tiennent compte de leurs avis dans l'élaboration des normes Codex. Les rapports de ces comités d'experts jouissent à travers le monde d'une telle notoriété que leurs recommandations sont, le plus souvent, universellement acceptées, dans les pays développés comme dans les pays en développement. Ces rapports - comme ceux des comités du Codex - sont riches d'enseignements et veillent à ce que l'on tienne dûment compte des intérêts légitimes des consommateurs et de l'industrie; les cadres des offices de contrôle y puisent largement pour élaborer leurs procédures. La plupart des pays en développement ne disposant pas des ressources qui leur permettraient de produire leurs propres données techniques et toxicologiques, notamment en ce qui concerne la salubrité des produits chimiques contenus dans les aliments, la solution idéale est de puiser à ce savoir universel.

Les consommateurs veulent être renseignés sur les denrées alimentaires qu'ils achètent; ils souhaitent notamment savoir:

ce qu'est l'aliment proposé,

comment l'utiliser et l'accommoder,

ce qu'il contient, et en quelles quantités

quels en sont les nutriments, et

sa teneur en calories (valeur énergétique).

S'ils veulent obtenir ces informations, c'est notamment pour pouvoir comparer entre elles des denrées similaires avant de faire leur choix, pour se faire une idée du rapport qualité-prix, et pour éviter les ingrédients ou les denrées qui leur déplaisent, ou qui ont produit sur leur organisme des réactions désagréables.

En outre, les services de contrôle exigent également que les lots soient identifiés et portent une date de fabrication, de manière à pouvoir retirer ou rappeler les aliments reconnus comme présentant un risque sanitaire. Cette prescription vaut également pour les entreprises dotées de leur propre système de contrôle de la qualité. D'autres renseignements sont également exigés, qui concernent, par exemple, les données nutritionnelles ou la durée de la garantie du produit. Mais il serait contre-productif de vouloir donner des renseignements par trop exhaustifs sur tous les produits: outre que la surface de l'emballage (de la boîte ou du paquet) est forcément limitée, il faut savoir qu'un excès d'information sème la confusion plutôt que la clarté.

La mise au point et la promulgation par la Commission du Codex d'une norme générale sur l'étiquetage des produits alimentaires préemballés fera date dans l'histoire des législations alimentaires fondées sur des recommandations mondiales du Codex. En effet, c'est grâce à elle qu'on a pu édicter une norme optimale donnant l'information exigée par les consommateurs, tout en satisfaisant aux prescriptions des services de contrôle des aliments. Cette norme n'empêche nullement d'ajouter volontairement sur l'étiquette des compléments d'information. On a tout intérêt à l'étudier soigneusement lors de l'élaboration des politiques et des règlements nationaux concernant aussi bien les aliments destinés à la consommation locale que le respect des normes d'exportation et d'importation.

L'un des aspects du travail de la Commission du Codex qui intéresse le plus les offices de contrôle des pays en voie de développement concerne les délibérations des comités régionaux de coordination pour l'Afrique, l'Asie, l'Amérique latine, l'Europe ainsi que l'Amérique du Nord et le Pacifique du Sud-Ouest. Ces comités, et notamment les trois premiers d'entre eux, débattent de questions d'intérêt régional et consacrent l'essentiel de leurs activités aux problèmes de contrôle qui concernent spécifiquement leur région. Parmi les principaux sujets abordés figurent la législation en matière de denrées alimentaires, la nécessité de renforcer les infrastructures de contrôle des aliments, le développement de la main-d'oeuvre, la coopération technique entre pays en développement et les priorités régionales en matière d'assistance technique. Les délibérations de ces comités guident et informent les cadres supérieurs des offices de contrôle et les organisations internationales telles que la FAO ou l'OMS. Les responsables nationaux peuvent y débattre de tout un éventail de problèmes et de politiques et solliciter l'avis du comité concerné. Bien souvent, ces discussions aident les fonctionnaires des services de contrôle à résoudre chez eux certains problèmes techniques ou de gestion et à améliorer leurs stratégies nationales, compte tenu de l'expérience des autres pays de la région. Certaines des préoccupations nationales concernant, par exemple, le développement de la main-d'oeuvre, l'assistance technique, la salubrité et l'innocuité des aliments (résidus de pesticides) débouchant sur l'adoption de priorités régionales, on les retrouvera tout naturellement dans les recommandations du comité. De ce fait, les organisations internationales telles que la FAO s'interrogent sur l'assistance qu'elles peuvent offrir sous forme de mesures de suivi. Cette possibilité d'établir des priorités régionales est des plus utiles aux autorités nationales de la région et aux organisations internationales puisqu'elle permet, à ces deux niveaux, de faire le meilleur usage possible des ressources limitées dont on dispose.

En résumé, les normes et autres dispositions de la Commission du Codex Alimentarius et les délibérations des comités du Codex - celles, en particulier, des comités régionaux de coordination - sont une source d'information inappréciable sur tout un éventail de sujets liés au contrôle des aliments. Participer aux travaux de la Commission permet d'acquérir le savoir, l'expérience et les contacts personnels indispensables aux dirigeants des services de contrôle des aliments. Mais ce sont les individus et le gouvernement qui décident comment - et dans quelle mesure - ils utiliseront les travaux du Codex dans l'intérêt national. Il ne fait cependant aucun doute que si l'on sait tirer parti des travaux de la Commission du Codex, on pourra étoffer le contenu technique du programme national de contrôle et de tout service d'inspection, et améliorer certains aspects de sa gestion.


Page précédente Début de page Page suivante