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9. ANALYSE DES DÓNNEES BIOLOGIQUES

9.1 Sardinella aurita

9.1.1 Reconstitution du cycle vital

Le groupe a tenté de reconstituer le cycle vital de la sardinelle ronde S. aurita et d'intégrer l'ensemble des données biologiques et de pêche en se basant sur les données des groupes de travail passés et les données récentes. On part de l'hypothèse d'un stock unique centré sur le Ghana, mais s'étendant à la Côte d'Ivoire.

Les données disponibles indiquent une ponte principale de juin à septembre (maximum en juillet-août) et une ponte secondaire en décembre-janvier, plus faible et plus irrégulière (cf. figure 14–2, page 23, CECAF/TECH/82/40(En)).

Les variations de captures et de rendements montrent des pics de production entre octobre et janvier (avec des coupures apparemment fréquentes en novembre, figure 16). Les sardinelles capturées mesurent 2 à 9 cm (longueur à la fourche) avec un mode à 6–8 cm. Les tailles capturées sont assez semblables toute l'année. En moyenne on doit donc admettre que 3–4 mois après la ponte principale, les recrues arrivent massivement dans la pêcherie côtière à la senne de plage (mois où on commence à les pêcher à 3 cm). La pêche à la senne de plage n'est pas dirigée vers une espèce particulière.

On peut noter que le départ hors de la zone côtière et de la pêcherie à la senne se produit juste avant (et en relation avec?) la maturation sexuelle qui commence à 10 cm.

La pêche dure toute l'année avec un maximum en juillet-aoûtseptembre où les pêcheurs recherchent spécialement la sardinelle ronde. Le reste de l'année ils recherchent d'autres espèces et en particulier l'anchois à la fin de la saison froide. Le filet Ali est surtout utilisé sur la sardinelle plate et en fin de saison froide sur la sardinelle ronde qui n'est plus concentrée en bancs mais en couches diffuses.

La pleine saison s'étend de juillet à septembre. Les captures s'étendent de 9–10 cm à 25 cm mais l'essentiel des captures est compris entre 12 cm (début de l'entrée effective dans la pêche sardinière) et 25 cm avec un mode très important entre 17 et 20 cm. La sardinelle est totalement recrutée à 16 cm. Il est intéressant de noter que la taille moyenne au recrutement LC50 est égale à la taille moyenne de maturité sexuelle (LM50):

LC50 = LM50 = 15 cm (longueur à la fourche)

Le processus de recrutement dans la pêche à la senne semble donc lié au processus de maturation et de reproduction et au phénomène d'aggrégation en bancs qu'il provoque.

L'ensemble de ces données est porté à la figure 20 et donne une image apparemment cohérente du cycle vital et des stratégies d'exploitation. Ce schéma doit être considéré comme une hypothèse de travail et amélioré au cours du temps par les groupes de travail successifs ou les laboratoires nationaux.

La succession des blocs taille/mois A, B et C correspondant à la ponte, la saison principale de pêche à la senne de plage et la saison de pêche à la senne tournante indiquerait une courbe de croissance plus rapide que celle donnée par Marchal (1974).

Présente étudeMarchal (1974)
dateâgetailleâgetaille
 (mois)(cm)  
juil.-août00--
nov.-déc.46–8611
juil.-août1217–201214,5
   1817,0
   2419,0

Ces conclusions doivent rester provisoires et demandent à être vérifiées avec de meilleures séries continues de distributions de fréquences mensuelles.

Cette différence peut s'expliquer soit par une erreur d'interprétation de Marchal (1974) ou du présent groupe de travail. Une autre hypothèse très vraisemblable serait que la croissance calculée par Marchal est correcte pour les années concernées (upwelling plus faible) et le fait que les sardinelles avaient, à cette époque, leur maturité sexuelle à 15 cm, taille à laquelle elles entraînent massivement dans la pêcherie du large, plaide en faveur d'une grande cohérence du schéma de croissance qu'il a donné à ce moment-là.

La différence pourrait refléter les nouvelles conditions observées dans la période récente (upwelling très fort) résultant en une croissance plus importante (et peut être une taille de maturité également plus élevée, hypothèse non vérifiable avec les données disponibles à la réunion) et une taille d'entrée massive dans la pêcherie plus élevée (à partir de 17 cm).

On peut noter que le temps de génération (de la date de naissance de la cohorte principale à la ponte principale de cette cohorte) est de l'ordre de 12 mois et permet de maintenir le potentiel reproducteur du stock en phase avec l'environnement.

On peut également penser qu'il existe une cohorte secondaire (une deuxième génération) née en décembre-février. La génération principale, qui semble atteindre les 12 cm environ au moment de la deuxième saison de ponte, participe vraisemblablement peu à la petite saison de ponte décembre-février. Cette cohorte pourrait contribuer aux captures des sardinelles dans la gamme de taille 12–15 cm que l'on retrouve parfois sur certains histogrammes sous forme d'un tout petit mode.

9.1.2 Analyse de l'évolution historique de l'abondance de Sardinella aurita (Ph. Cury)

L'analogie avec des fluides se répandant dans un bassin et la dynamique spatiale des clupéidés selon leur niveau d'abondance a été développée par McCall (1983). Il est intéressant de reprendre cette interprétation pour analyser l'évolution historique de l'abondance de Sardinella aurita en liaison avec sa dynamique (figure 21).

Il existe une disparité de l'upwelling due à des effets topologiques du plateau continental ou à des effets de caps. Ainsi l'upwelling est centré sur le Ghana et s'étend à l'est de la Côte d'Ivoire saisonnièrement. Dans l'ouest de celle-ci il y a une intensification de l'upwelling due à un effet de cap. La zone ghanéenne est donc la zone (niche) la plus favorable et on peut représenter cela par une vallée profonde où le liquide (la biomasse) se rétracte lorsque pour des raisons climatiques l'abondance est faible. L'ouest de la Côte d'Ivoire peut lui être représenté par une cuvette moins profonde (car biologiquement moins favorable) dans laquelle la biomasse pourrait se concentrer lorsqu'elle s'accroît dans l'ensemble de la zone, et que l'on a alors une biomasse excédentaire qui se répand dans des zones moins favorables.

Les PUE (et les statistiques de pêche) tendent à corroborer ce modèle. Sur la figure 21, trois situations qui ont été rencontrées depuis 1966 sont représentées:

9.2 Sardinella maderensis

La biologie de S. maderensis est moins bien connue que celle de S. aurita. La structure de stock elle-même n'est pas encore certaine. On peut hésiter entre l'hypothèse d'un stock continu tout le long des côtes ouest africaines, et l'hypothèse d'une série de stocks séparés ou à échanges réduits, occupant une série d'habitats discontinus (“en chapelet”).

Par ailleurs les études rattachées au Programme Climat-Pêche de l'ORSTOM suggèrent que la stratégie démographique de S. maderensis diffère notablement de celle de S. aurita. S. maderensis serait plus apte à maintenir une biomasse constante en tolérant et intégrant mieux les pertubations de l'environnement. Les populations de S. maderensis résisteraient mieux à des conditions défavorables (Cury et Fontana, 1988). Le groupe de travail n'a pas pu proposer de modèle biologique cohérent pour les S. maderensis liées à upwelling ivoiro -ghanéen faute d'éléments détaillés au sujet de S. aurita et également faute de temps.

L'examen des variations fines des PUE (au niveau du mois) pour différents engins opérant dans différentes zones a toutefois été effectué (figures 22 à 26). On observe nettement des “pics” d'abondance apparente dans les captures des sardiniers senneurs (Côte d'Ivoire et Ghana), et ce plusieurs fois par an sans qu'un cycle annuel apparaisse clairement (figures 22A, 22B, 23).

En ce qui concerne les pêches artisanales on note un pic remarquable de PUE en septembre 1986 à la fois pour les sennes de plage et les filets maillants (set net). On suppose qu'il s'agit de S. maderensis de même taille qui seraient donc de gros poissons venus à la côte (pour pondre ?) (figures 24 A et B). L'étude identique des PUE au Bénin et au Togo fait également apparaître des pics (figures 25 A, B, C et 26 A, B, C).

Il n'a pas été possible de mettre en évidence là aussi un cycle quelconque. Le consensus du groupe est qu'il y a peut-être là matière à construction d'un modèle, mais qu'il faudra des observations fines (dans le temps et l'espace) sur plusieurs autres années avant de pouvoir y parvenir.


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