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III. - EVALUATION DES RESSOURCES

3.1 - Rappels sur les modèles et leur application

3.1.1 - Modèles globaux

3.1.1.1 - Hypothèses sur les processus et traitements mathématiques

Le modèle global met en relation la capture et le rendement, avec l'effort de pêche exercé sur un stock unitaire. Malgré ses limites, qui tiennent à sa simplicité en matière de données et de traitement, il reste un outil précieux de détermination des productions équilibrées et des efforts correspondant aux objectifs des politiques d'exploitation.

Comme tous les modèles d'évaluation des stocks halieutiques, il doit être appliqué à l'échelle d'un stock, c'est-à-dire à un ensemble discret de populations (une ou plusieurs formant

Ces choix sont importants car d'eux dépendent largement les conclusions sur l'état des stocks.

Faute de temps, le Groupe de travail n'a pu réaliser des analyses comparatives complètes des différents modèles. Le modèle global généralisé a été le plus souvent utilisé. Malgré ses limites théoriques, ce modèle s'avère en effet souple et performant. Son application aux données de pêcheries simulées a souvent montré sa robustesse, c'est-à-dire sa capacité à rendre compte sans biais notables de déséquilibres résultant de modifications rapides de l'effort de pêche, et mê de fluctuations du recrutement ou de la capturabilité. On notera cependant que, si le modèle intègre implicitement les effets des fluctuations passées du recrutement ou de la capturabilité, il ne peut rendre compte des variations futures. Des biais significatifs dans les projections peuvent se produire lorsque les pêcheries subissent des changements ne figurant pas dans l'histoire passée de la pêcherie.

3.1.1.2 - Efforts de pêche nominaux et effectifs

Dans les pêcheries plurispécifiques, une difficulté sérieuse d'application du modèle réside dans l'estimation d'un effort “effectif” qui corresponde sans biais majeur à la mortalité par pêche exercée sur les différents populations composant un stock composite exploité par plusieurs flottilles. Un effort nominal global exercé sur l'ensemble des populations exploitées par une flottille ou un ensemble de flottilles peut être calculé à partir des données relatives aux navires qui la/les composent et leurs opérations de pêche: somme des temps de pêche des navires dont la puissance de pêche aura été préalablement calibrée par référence à des caractéristiques physiques appropriées. Un tel effort nominal sera commun à l'ensemble des populations, ou des espèces, simultanément exploitées par les flottilles composant la pêcherie considérée

Dans la réalité, les efforts de pêche effectivement exercés sur les différentes populations varient rarement parallèlement à l'effort nominal global, car l'intérêt des flottilles pour les différentes espèces change dans le temps en fonction de l'abondance relative des espèces, de leurs migrations, de leur disponibilité, du prix de vente des espèces, … Les pêcheurs modifient leurs stratégies de pêche (espèces cible) en conséquence. C'est le cas de beaucoup de pêcheries mauritaniennes, et notamment les plus intéressantes économiquement (céphalopodes, crevettes, …) ou les plus importantes en termes physiques (petits pélagiques).

Lorsque l'on dispose de statistiques de pêche très fines (par coups de filet par exemple, comme celles qui peuvent être recueillies par les observateurs), un effort “effectif”, proportionnel à la mortalité par pêche exercé sur chaque espèce ou population, peut être estimé mathématiquement. Les carences statistiques rendent actuellement difficile et insuffisante l'estimation d'efforts effectifs.

S'il pose des problèmes au niveau de l'analyse (mauvaise relation entre F et f au niveau de l'espèce ou de la population), le choix de l'effort nominal a également des implications importantes pour l'application des interventions: selon la mesure choisie, les flottilles disposeront d'une latitude plus ou moins grande, mais toujours appréciable, pour optimiser leurs efforts effectifs dans les limites de l'effort global nominal imposé par l'Administration. La somme des efforts effectifs des bateaux risque d'excéder graduellement les limites fixées par l'autorité chargée de l'aménagement.

3.1.2 - Modèles analytiques de production par recrue

Comme les précédents, les modèles analytiques de production par recrue doivent être appliqués au niveau d'une population ou, à défaut, d'un ensemble de populations dont les paramètres démographiques sont suffisamment proches.

Ils tirent profit, d'une part, de l'autonomie des cohortes par rapport à l'environnement après leur recrutement et, d'autre part, de leur construction qui intègre les processus démographiques dominants. Ils permettent d'analyser les effets du taux global d'exploitation sur la phase exploitée et la production des cohortes successives, mais aussi, à la différence des modèles globaux, les effets de modifications de la répartition de la mortalité globale par pêche en fonction de l'âge des cohortes (diagramme d'exploitation). Cela permet de comparer l'impact de mesures de protection des juvéniles sur la production des cohortes, ou les interactions entre des flottilles exploitant les mêmes populations selon des diagrammes d'exploitation différents. Ils ignorent par contre la dynamique des cohortes avant leur recrutement.

Leur capacité supérieure se paie par des besoins plus grands en matière de données (structure démographique des captures). Les différentes variantes du modèle (modèles de Beverton et Holt, de Ricker, analyse séquentielle de populations,…) diffèrent par les techniques de traitement des données, mais non par les processus démographiques qu'ils visent à représenter. Le Groupe a utilisé l'analyse séquentielle de populations qui permet d'estimer les stocks et la mortalité par pêche à partir des données de capture par âges. Elle est aussi appelée analyse des cohortes, parce qu'elle permet de simuler séparément la dynamique de chaque cohorte, à partir des relations entre les effectifs suivants:

Nombre de poissons vivants au début de l'année t+1 Nombre de poissons vivants au début de l'année t Nombre de poissons capturés durant l'année t Nombre de poissons morts naturellement durant l'année t

3.1.3 - Relation stock-recrutement et effets de l'environnement sur le succès du recrutement

Le niveau du recrutement annuel-c'est-à-dire de l'effectif (cohorte) venant chaque année renouveler le stock et compenser les pertes subies par mortalité naturelle et par pêchedépend a priori de la biomasse parentale-par l'intermédiaire du nombre d'ceufs émis par la population-et de la survie de ces ceufs au cours des phases précoces, jusqu'à ce que la cohorte soit devenue relativement autonome par rapport à son environnement physique et biologique.

Longtemps, les deux relations-recrutement/stock parental et recrutement/environnement-ont été mal distinguées. On réalise mieux maintenant que:

Malgré leur comlexité, ces questions sont importantes pour la pêche mauritanienne. La distribution et la porduction des populations de petits pélagiques sont susceptibles de changer avec l'évolution du régime d'upwelling. Les populations de céphalopodes se sont fortement accrues, il y a une trentaine d'années, au cours d'une période de chalutage intense. Bien que cette question soit très importante pour l'avenir de la pêche mauritanienne, les causes de cet accroissement, et donc d'un déclin éventuel des populations de céphalopodes, ne sosnt pas élucidées.

3.2 - Ressources démersales

3.2.1 Céphalopodes1

3.2.1.1 - Données disponibles et traitement

Captures

Les statistiques de débarquement sont disponibles pour les trois groupes d'espèces suivants:

Les rejets sont nuls ou négligeables; en pratique, les débarquements correspondent aux captures (tabl. 1).

Pour le poulpe, la série de captures 1966–1983 a été complétée par les données du CNROP pour la période 1984–1992. Pour les seiches et les calmars, les séries de capture de 1984 à 1992 sont tirées des statistiques du CNROP. Les données plus anciennes relatives à la seule zone mauritanienne n'ont pas été préparées. Elles devraient être compilées.

1 - Cette partie du rapport final est pour l'essentiel basée sur le manuscrit de MM.E. Balguerias et C. Inejih.

Tableau 1 - Captures annuelles (tonnes) de céphalopodes par groupes d'espèces et flottilles.
AnnéesCongélateursGlaciersPêche artisanaleAutresTotal
poulpe     
198425 97080218-*26 790**
198530 325716546 87437 969
198640 9654413903 45745 253
198738 4161 3613 3002 65545 732
198831 8341 6662 50072636 726
198929 5588123 00016333 533
199018 3957202 350021 465
199124 2771 7344 621030 632
199230 7824 9208 257043 959
Seiches     
19846 870280007 150
19858 0008102 38710 468
19869 752217082910 798
19875 82047001 3207 610
19884 30339309455 641
19894 8755650865 526
19906 620609007 229
19915 650652006 302
19925 050565005615
Calmar     
198445630000756
198554740353904
1986399198041638
19872231900242
198880190099
19894935000543
19901 124145001 269
19911 241241001 482
19921 226475001 701

* :donnée manquante,

** :valeur incomplète.

Structure démographique

Les modèles analytiques d'évaluation nécessitent la connaissance de la structure démographique des captures (fréquences d'âge ou, à défaut, de taille ou de poids).

Pour les poulpes, on dispose des fréquences de poids. Les quantités débarquées sont enregistrées par catégories commerciales. Lors des inspections de la SMCP, ces catégories commerciales font l'objet d'un échantillonnage biologique destiné à ventiler les captures de chaque catégorie commerciale en classes de poids de 100 g chacune. Cet échantillonnage a permis de vérifier que la composition des catégories commerciales variait très peu dans le temps. On peut donc raisonnablement appliquer les mêmes clés poids-longueur ou âge aux débarquements des années où les captures n'ont pas été échantillonnées. Les prises par âge des années 1991 et 1992 ont été calculées selon la méthode utilisée lors des réunions tenues précédemment au CNROP (CNROP, 1993).

On ne dispose pas des mêmes informations sur la structure démographique des captures de seiches et de calmar. Pour les premières, on pourrait tenter d'utiliser les données des campagnes scientifiques de prospection. Pour le calmar, un échantillonnage des catégories commerciales est nécessaire. Un tel programme devrait être lancé.

En 1991, et surtout 1992, les captures de petits poulpes (moins de 200 g) ont diminué par rapport à celles des tailles intermédiaires (autour de 1 kg); la taille moyenne des captures s'est accrue pour dépasser 1 kg en 1992. Cette évolution correspond au développement de la pêche piroguière au pot dont les captures, centrées sur les tailles moyennes (fig.2), ont atteint 10 000 tonnes en 1992. Les analyses antérieures de production par recrue ont montré que la distribution des tailles des captures de la pêche piroguière était, en termes de productivité, meilleure que celui de la pêche chalutière (CNROP, 1990). Toutes choses égales par ailleurs, cette meilleure productivité du stock de poulpe au cours des dernières années devrait apparaître sur les modèles globaux.

Le fait que la pêche piroguière capture des individus plus âgés ne peut être avancé à l'encontre de ce mode de pêche. En effet, si le recrutement est effectivement réduit par la pêche des reproducteurs-ce qui n'est pas observé-, il le sera davantage, à effectif capturé égal, si les individus sont capturés avant d'avoir pu pondre une première fois, c'est-à-dire si les captures comprennent plus d'immatures que d'adultes. En outre, pour un même tonnage total de capture, le nombre d'individus capturés est d'autant plus grand que la pêche porte sur des individus plus jeunes, donc plus petits.

Figure 2

Figure 2- Distribution par taille des captures des flottilles de congélateurs, de glaciers et de pirogues (années 1989).

Effort de pêche

Différentes flottilles participent à l'exploitation des céphalopodes dans la ZEE mauritanienne (CNROP, 1992; Inejih, en préparation), à savoir:

L'élaboration, pour chaque flottille, de séries d'effort de pêche, cohérentes avec celles de captures et cumulables, se heurte à deux difficultés:

Pour réduire ces biais, les estimations d'effort ont été intercalibrées de la façon suivante (tabl. 2):

Figure 3

Figure 3 - Flottille de congélateurs: variation saisonnière de la composition dpécifique des captures de céphalopodes (1992).

Tableau 2 - Pêche des céphalopodes (toutes espèces): efforts nominaux exercés par les principales flottilles (données CNROP).
 Congélateurs (jours de pêche)Glaciers (jours de pêche)Pêche artisanale (effectif des pirogues pêchant le poulpe)
 Annéeréduit(novembre à mai)annéefévrierjuillet
198420 11312 5492 033--
198520 69212 2183 610--
198623 55913 2672 877--
198728 84317 2424 802-99
198821 65912 3252 546177142
198922 84815 1333 737146178
199019 96011 8822 376277343
199118 95510 6823 976280327
199214 4288 4873 807281385

Prises par unité d'effort et indices d'abondance

Des pue annuelles ont été calculées pour chaque groupe d'espèces et chaque flottille (tabl. 3). Pour la pêche artisanale, on a calculé deux séries d'abondance annuels en divisant la capture totale annuelle de poulpe réalisée par la pêche artisanale, par les effectifs de pirogues en février et en juillet.

Tableau 3 - Prises par unité d'effort par groupes d'espèces pour différentes estimations d'effort effectif.
AnnéesPoulpeSeichesCalmar
CongélateursGlaciersPêche artisanale (Capture totale annuelle par effectif pirogues)CongélateursGlaciersCongélateursGlaciers
(t/j)(t/j)févrierjuillet(t/j)(t/j)(t/j)(t/j)
19841, 290, 39--0, 340, 140, 020, 15
19851, 470, 20--0, 390, 020, 030, 00
19861, 740, 15--0, 410, 080, 020, 07
19871, 330, 28-33,30,200,100,010,00
19881, 470, 6514, 217, 60, 200, 150, 000, 01
19891, 290, 2220, 616, 90, 210, 150, 020, 01
19900, 920, 308, 56, 90, 330, 260, 060, 06
19911, 280, 4416, 514, 10, 300, 160, 070, 06
19922, 131, 2929, 421, 40, 350, 150, 080, 12

Depuis 1987, les pue des glaciers et des congélateurs évoluent assez parallèlement au sein de chaque groupe d'espèces (fig.4). Ceci s'expliquerait par le fait que les glaciers affrétés ciblent les céphalopodes, le poulpe particulièrement. Ils auraient done une stratégie de pêche voisine de celle des congélateurs. Les indices d'abondance de poulpe de la pêche artisanale sui vent la même évolution que celles des chalutiers. Les pue calculées refléteraient done bien la variation d'abondance, après 1987, des trois groupes d'espèces, et particulièrement celle du poulpe. Par contre, les pue de chaque groupe d'espèces ne varient pas parallèlement. Cette divergence peut provenir d'une évolution différente de l'abondance des trois ensembles d'espè ou/et de changements dans les stratgies de pêche des chalutiers, pricipalement les glaciers (on sait qu'avant 1987 les glaciers recherchaient relativement plus le poisson).

Le tableau l de l'annexe 4 donne, pour les trois groupes d'espèces et par zone, et la période 1982-92, les résultats des campagnes de chalutage du N/O ‘N'Diago’ (kg/demi-heure de trait). Le tableau 4 donne des indices d'abondance moyens annuels (moyennes annuellesdés désaisonnalisées), calculés à partir de ces données. Les années où les prospections ont été nombreuses et bien réparties dans le temps ont servi pour estimer un schéma de variation saisonnière et la moyenne de l'and'indices d'abondance saisonniers, rapports entre la valeur saisonnière et la moyenne de l'an née). Ce schéma a été utilisé pour désaisonnaliser les estimations des années où les prospections étaient moins fréquentes et mal réparties dans le temps. Les indices d'abondance du poulpe, des seiches et du calmar ainsi calculés (fig. 5) suivent approximativement, mais avec une amplitude moins forte, l'évolution donnée par les statistiques commerciales (fig.4). Ces données confirment, pour les seiches et le calmar-mais pas pour le poulpe-, l'amélioration des rendements durant la seconde moitié des années 80. Une certaine inversion des tendances des rendements de poulpe et de seiches apparaît, tant au niveau des indices d'abondance des campagnes de prospection du ‘N'Diago’, que de ceux déduits des statistiques commerciales. Ceci pourrait résulter d'un intérêt plus grand pour la pêche des seiches et des seiches et des calmars les années où le poulpe est relativement moins abondant.

En résumé, les différences d'évolution des indices d'abondance des mêmes groupes d'espèces (pue des congélateurs, des chalutiers, et du navire de recherche) peuvent provenir:

  1. de différences dans le volume des échantillons, celui des flottilles commerciales étant supérieur à celui des prospections scientifiques;

  2. du temps nécessaire aux pêcheurs pour détecter les zones de forte concentration des espèces;

  3. de changements dans le choix des espèces cibles, qui se traduisent par la concentration des opérations de pêche sur certaines secteurs, variables selon les saisons.

Figure 4

Figure 4 - Évolutin des pue des trois groupes d'espèces dans les différentes flottilles.

Tableau 4 - Indices d'abondance moyens annuels désaisonnalisés des céphalooodes (moyennes annuelles des campagnes du‘N'Diago’ - kg/ 30 m de de chalutage - corrigées pour tenir compete de leur répartition saisonnière.
 19821983198419851986198719881989199019911992
Moyenne annuelle           
Poulpe11,46,49,6 4,45,858,9510,06,011,38,6
Seiches3,33,952,1 1,71,551,44,25,33,82,1
Calmar0,90,850,6 0,70,30,671,330,91,62,2
Facteur de désaisonnalisation           
Poulpe0,781,00,93 1,861,01,01,00,930,930,73
Seiches0,861,00,67 0,931,01,01,00,670,670,82
Calmar0,851,01,11 0,371,01,01,01,111,110,67
Indices annuels désaisaonnalisés           
Poulpe8,906,408,95 8,205,858,9510,005,5910,506,26
Seiches2,833,951,40 1,591,551,404,203,532,531,73
Calmar0,770,850,67 0,260,300,671,331,001,781,40


Figure 5

Figure 5 - Évolution des indices d'abondance tirés des campagnes de prospection (moyennes annuelles désaisonnalisées).

3.2.1.2 - Évaluation des stocks

Modèle global

  1. Poulpe

    La série historique des données de capture et d'effort a étéanalysée à l'aide d'un modèle généralisé (logiciel Prodfit, trois classes d'âge dans les captures, stock en état de transition, m = 1 et m = 2). La figure 6 représente l'evolution de la capture moyenne anuelle en fonction de l'effort, pour le stock en situation d'équilibre. La courbe convexe (m=2; r=0,82) représente mieux la distribution des données d'observation, que la courbe asymptotique (m = 1). Elle passe par un maximum de 49 000 tonnes pour un effort total annuel de l'ordre de 250 000 heures de pêche. En 1992, l'effort déployé était e 370 000 heures de pêche, soit 50% au-dessus de celui correspondant au maximum de production.

    Figure 6

    Figure 6 - Stock de poulpe: modèle global généralise (pour m=1 et 2), ajusté sur les données de 1966 à 1992

    La courbe pour m=1 donne un maximum de production moyenne légèrement supérieur à 39 000 tonnes. Ce maximum correspond à un effort de 900 000 heures de pêche. Le coefficient de corrélation est de 0,87. Le maximum de production équilibrée obtenu par ce traitecontre, obtenu pour un niveau d'effort de pêche considérablement plus élevé.

    Les estimations du potentiel de capture obtenues à l'aide des deux modèles sont légèrement supérieures-ce qui est conforme à l'amélioration du profil de capture survenue ces dernières années -, mais du même ordre que celles obtenues précédemment. L'evaluation du Groupe de travail de 1985 donnait une production maximale équilibrée de 35 000 tonnes, pour un effort de 230 000 heures de pêche. Celle de Gilly et Maucorps (1988) concluait que le potentiel maximum de capture était de 40 000 tonnes, pour un effort 250 000 heures.

    Selon le profil de capture (qui dépend notamment de l'importance relative de la pêche artisanale et de la pêche industrielle), et les fluctuations naturelles du recrutement (le modèle global rend compete implicitement des variations passées, mais pas des veriations futures), le potentiel du stock de poulpe est compris entre 40 et 50 000 tonnes (peut-être plus proche de la limite supérieure). Bien qu'il se soit réduit ces dernières années, l'effort déployé par l'ensemble des flottilles sur le stock de poulpe dépasse largement celui qui correspond aux objectifs de la politique sectorielle (vior § 5.2.1).

    La différence des estimations de l'effort correspondant au maximum de production, obtenues avec m=2 et m=1, n'est pas critique pour déterminer l'objectif d'aménagement. Le niveau d'exploitation correspondant aux objectifs de la politique sectorielle se situe, en effet, à gauche du maximum physique de production. Or, les deux modèles diffèrent surout sur leur partie droite. L'effort correspondant au maximum de production avec m = 1 ne constitue pas, en termes économiques, un objectif d'aménagement rationnel. En effet. entre 100 000 et 90 000 heures de pêches, la production - donc le revenu total - augemente peu comparativement à l'effort - donc au coût total de production.

  2. seiches et calmar

    L'analyse des pue en fonction de l'effort corrigé n'améliore pas sensiblement la cohérence des résultats obtenus en utilisant les efforts de pêches non corrigé. Dans ces conditions, l'utilisation des données corrigées ne se justifie pas. Le Groupe a done utilise, selon les mêmes procédures que pour poulpe, les séries statisques 1984–1982 correspondant aux captures des deux groupes d'esèces. Le traitement de ces données par un modèle global ne donne pas de résultat chhérent. Cela est vraisemblablement dûàla mauvaise estimation des efforts cible dominante, et où les straégies des flottilles ont changé.

    Avec les données disponibles, les stocks de calmar et de seiches ne peuvent pas être évalués. Au cours des dernières années (89–91), tous les indices d'abondance disponibles pour ces espèces ont augmenté par rapport à ceux de la période 86–88, et lus nettement pour le calmar. Ce redressement peut être dû à des causes naturelles, ou à des changements dans le régime d'exploitation. On remarque que les indices tirés des campagnes (fig.5), s'ils augmentent bien pour le calmar après 1987, diminuent pour les seiches après 1989.

    Du fait de la prédominance du poulpe dans la pêche des céphalopodes, l'aménagement de la pêcherie peut rester basé sur l'évaluation du stock de poulpe. En 1992, le poulpe représentait 85 % des prises de céphalopodes. Dans les conditions actuelles, l'état des stocks de seiches et de calmar, ou les incertitudes concernant cet état, ne peuveant être avancés comme arguments en faveur d'une intensification de la pêche des céphalopodes. Si elle existe, cette possibilité devrait être utilisée pour réduire l'effort exercé sur le poulpe. Cette possibilité dépend de la capacité à modifier la répartition de l'effor exercé total entre le poulpe, d'une part, et les autres espèces, d'autre part. Ceci peut être recherché par l'emploi d'engins sélectifs (casiers ou turluttes), ou par l'incitation des pêcheurs à modifier leurs stratégies de pêche-en modulant par exemple le taux par espèces de la taxe d'exportation. Si ces conditions pouvaient être réunies, un transfert graduel de l'effort exercé sur le poulpe vers les seiches, et surtout le calmar, est envisageable. L'évaluation des stocks de seiches et de calmar deviendrait alors urgente.

  3. traitement complémentaire des statistiques

    L'analyse des statistiques commerciales (y compris de la pêche artisanale) et des campagnes de prospection a montré la bonne qualité et la sensibilité générales des données. Le traitement de ces données devrait être raffiné, en accordant une attention particulière aux données relatives aux seiches et au calmar. On partira pour cela de l'analyse des statistiques individuelles des bateaux (petites strates espace-temps où les rendements sont les plus élevés), de façon à classer ces derniers sur la base de leurs stratégies de pêche (maximisation indifférente de la capture totale de céphalopodes, recherche préférentielle des seiches ou calmar pendant certaines saisons, notamment celles où les rendements de poulpe sont minima). Cette analyse peut être étayée par une enquête auprès des patrons de pêche. Les résultats des campagnes de prospecpection ne sont pas à négliger. Si les statistiques commerciales représentent un volume d'échantillonnage supérieur, on ne peut exclure que des strates bien choisies des campagnes de prospection pouissent donner des indices plus sensibles, ou moins biaisés dans le temps. Ensuite, l'évolution des séries les plus homogènes de pue ainsi indentifiées sera comparée à la même échelle, l'objectif étant de sélectionner les séries susceptibles de fournir les estimations les plus vraisemblables de l'abondance relative des différentes espèces, ou de strates particulières (âge ou tailles de celles-ci.Si l'on dispose de plusieurs séries apparemment fiables, elles pourment être combinées.

    Le CNROP devrait donc entreprendre dès maintenant les traitements suivants:

Modè le analytique 1

  1. traitement des données

    Les données disponibles ne permettent d'appliquer ce modèle qu'au stok de poulpe. Comme au cours des groupes de travail précédents, des analyses de pseudochoretes ont été conduites sur des séries d'effectifs moyen capturés par classes de taille, corespondant à différentes périodes de l'histoire de la pêcherie mauritanienne, à savior:

    Les effectifs capturés par trailles sont donnés dans le tableau 2 de l'annexe 3. La figure 7 représente les effectifs moyens par âges pour les quatre périodes considérées.

    Figure 7

    Figure 7 - Distributions de fréquence des captures de poulpe (moyennes correspondant aux quatre périodes retenues dans l'histoire de la pêcherie).

    Ces analyses par pêriodes visaient àmettre en êvidence des changements dans le régime d'exploitation (effort global et distribution en fonction de l'âge), et d'en tirer des indications sur les interventions justifiées par l'état actuel de la pêcherie.

    L'état des connaissances de la biologie du poulpe et les statisques disponibles obligent à reconsidérer l'hypothèse d'invariance de la mortalite naturelle pendant la phase exploitée. Cette hypothèse soulève un réel problème: les analyses démographiques confirement de plus en plus clairement les acquis de la biologie, à savoir que la mortalité naturelle s'élève après la ponte, brutalement chez les femelles, et probablement fortement chez les mâles. La prise en compte de ce phénomène dans les analyses de chortes ne devrait pas poser de problème méthodologique. Elle modifierait pourtant de façon significative les conclusions. La difficulté majeure réside dans la détermination du diagramme de mortalité naturelle après la ponte, ainsi que celle de l'âge de première reproduction (âge moyen et variabilité de cet âge). Ceci nécessite un travail important d'expérimentation et d'observations directes.

    A cette incertitude s'ajoutent la méconnaissance de l'âge des poulpes, qui empêche de suivre convenablement l'évolution des cohortes dans la pêcherie, et l'imprécision sur l'estimation du taux annuel effectif d'exploitation. Pour ces raisons, seules des méthodes grossières, dont les limitations se répercutent sur la validité des conclusions, peuvent être employées.

    1 - Cette partie du rapport final est pour l'essentiel basée sur le manuscrit de MM. A. Fonteneau et D.Jouffre.

  2. taux de mortalité par pêche

    Ces incertitudes se répercutent nécessairement sur les estimations de mortalité par pêche en fonction de l'âge déduites de ce traitement (fig. 8), et il n'est pas possible d'apprécier l'ampleur des erreurs résultantes. Néanmoins, quelles que soient les analyses effectuées, les solutions les plus raisonnables conduisent à des conclusions comparables.

    Figure 8

    Figure 8 - Analyse de pseudocohortes du stock de poulpe: profils de mortalité par pêche au cours de quatre périodes de l'histoire de la pêcherie.

    Le schéma d'exploitation aurait évolué de façon sensible. Il semble que l'on puisse distinguer trois périodes dans l'histoire de la pêcherie:

  3. production par recrue

    Dans la mesure où elles sont représentatives, les estimations précédentes de mortalité par pêche peuvent être utilisées pour affiner ce scénario. Pour cela, on peut les introduire dans un modèle de production par recrue - de Ricker par exemple -, qui intègre les effets de la croissance, de la mortalité naturelle, et de la mortalité par pêche en fonction de l'âge. On peut ainsi apprécier l'efficacité technique de la pêche à exploiter convenablement les cohortes (indépendamment des niveaux annuels du recrutement). Si l'on admet une mortalité naturelle (M) constante et égale à 1, 0 pendant toute la phase exploitée, le recrutement annuel moyen serait de l'ordre de 11 à 14 millions de poulpes de 100 grammes, et serait resté relativement stable au cours des dernières années. Si l'on admet un recrutement moyen et stable de 12 millions d'individus de 100 g chaque année, un tel traitement conduit aux conclusions suivantes (annexe 4, tabl. 3a et 3b):

Une analyse approfondie de l'évolution des diagrammes de capture depuis l'origine de la pêche, ainsi que leur comparaison entre les différentes flottilles actuellement en activité, permettraient d'approfondir ces premières conclusions. Cette analyse devrait porter à la fois sur les aspects démographiques (évaluation) et sur les aspects réglementaires (aménagement). Il s'agit de vérifier si la réduction relative des captures de petite taille est due principalement à l'augmentation de l'activité de la pêche piroguière, ou si elle s'est produite également dans la pêche chalutière. Si c'était bien le cas, il faudrait en examiner les raisons pour en tirer des enseignements sur les possibilités pratiques de mieux protéger les juvéniles dans ce type de pêche. Malgré les incertitudes qui affectent l'évaluation par un modèle analytique, les résultats que l'on obtient sont très comparables à ceux obtenus avec le modèle global. Sans être une preuve, cette similitude renforce la confiance que l'on peut accorder aux premières conclusions.

3.2.1.3 - Besoins de recherche sur l'écologie et la dynamique des populations de poulpe

Programme de recherche régional sur la biologie et l'écologie du poulpe

Les stocks de poulpe de la région sont les plus importants du monde. Les exportations de céphalopodes sont pour les pays riverains une source majeure de devises. Les recettes substantielles que certains Etats tirent déjà de leurs pêcheries pourraient être significativement accrues si ces dernières étaient convenablement gérées. Si, actuellement, l'amélioration des régimes d'exploitation dépend d'abord de l'adoption de mécanismes nécessaires à l'allocation des droits de pêche (§ 5.2.1), l'évaluation et le suivi de l'état des stocks seront essentiels pour l'aménagement. En fait, la demande en matière d'évaluation et de suivi des stocks croîtra avec le progrès de l'aménagement.

Actuellement, l'obstacle majeur à l'amélioration des évaluations de stocks réside dans l'insuffisance des connaissances sur la l'écologie du poulpe. Vu la similitude des stocks, des conditions écologiques et des pêcheries, et le coût de recherches nouvelles, les pays de la sous-région ont grand intérêt à coopérer à l'exécution de telles investigations. Les sujets prioritaires de recherche sont les suivants:

En 1992, des chercheurs spécialistes de ces questions ont élaboré un programme de recherche intensif, étalé sur trois ans, portant sur la biologie, le comportement, l'écologie, l'identité (par marquage et méthodes génétiques) des populations de poulpe, et la modélisation bio-économique des pêcheries. La réalisation de ce programme devrait apporter des réponses à la plupart des questions évoquées ci-dessus. Vu son importance pour l'avenir des pêcheries de poulpe de la sous-région, le Groupe recommande vivement que les centres de recherche des pays riverains et les instituts de recherche et de développement étrangers qui s'intéressent à leurs travaux collaborent à sa réalisation.

Simulation des pêcheries

Le CNROP devrait entreprendre sans tarder des analyses de simulation de la pêcherie de céphalopodes, en vue d'évaluer:

Les statistiques de prise par âge et par saison doivent permettre de simuler les effets, à court, moyen et long termes, sur le stock et la pêcherie de diverses mesures de protection des juvéniles (périodes de repos biologique, maillage). Ces simulations fourniraient l'information nécessaire pour évaluer l'effet, sur le chiffre d'affaire, de la variation du prix du poulpe en fonction de la taille des captures.

L'aménagement devra définir aussi l'équilibre entre les deux composantes - artisanale et industrielle - de la pêcherie. La simulation des interactions techniques entre pêches piroguière et chalutière fournirait aux économistes l'information sur la ressource dont ils ont besoin pour évaluer les conséquences en termes de création de richesses et de devises, de réalisation de la rente halieutique, ou d'emploi, de différents schémas de partage du potentiel du stock de poulpe.

3.2.2 - Poissons démersaux du plateau continental 1

3.2.2.1 - Évolution du stock et de la pêche

Les captures mauritaniennes annuelles de poissons démersaux par flottilles sont données dans le tableau 5 et la figure 9.

Tableau 5 - Captures annuelles (en tonnes) de poissons démersaux des flottilles mauritaniennes.

AnnéesCongélateurs∑ Glaciers*Pêche artisabaleTotal Mauritanie
198420 6565 42210 20336 281
198524 7516 4778 97240 200
198615 5648 4468 01232 021
198722 4554 85711 25438 565
19888 4913 58417 44129 517
19898 0774 9028 33221 311
1990113003636437719313
199158223793439514010
19924 9301 3736 51812 821

* : chalutiers mauritaniens et affrétés

La figure 9 fait apparaître une baisse régulière de la production totale de poissons à partir de 1987. Après avoir atteint 40 000 tonnes en 1985, les débarquements totaux ont décliné pour descendre en dessous de 13 000 tonnes en 1992. Avec des différences, cette baisse s'observe dans les trois flottilles. Elle est particulièrement marquée pour les congélateurs, dont les captures déclarées sont tombées de 24 700 tonnes en 1985 à 5 000 tonnes en 1992.

1 - Cette partie du rapport final est basée sur la contribution de M. G. O/M. Fall et D. Leung Tack.

Figure 9

Figure 9 - Captures annuelles (en milliers de tonnes) de poissons par flottilles et totales

Cette évolution reflète des processus complexes qui compliquent l'analyse des données (CNROP, 1992):

Compte tenu de l'intérêt plus grand et plus constant manifesté par les glaciers mauritaniens pour la pêche des poissons, leur pue devrait fournir un meilleur indice de l'abondance du stock. Le tableau 6 donne le nombre et les caractéristiques physiques moyennes des bateaux de cette flottille, et leur évolution au cours de la dernière décennie. La structure de la flottille est restée homogène. Par contre, son effectif a fluctué, pour décliner à partir de 1989. Le tableau 7 donne pour la même période:

L'évolution des différents indices d'abondance (fig. 10) révèle:

Tableau 6 - Effectif et caractéristiques moyennes des glaciers mauritaniens (1984 à 1992).
AnnéeNombreTonnage moyen
(tonneaux de jauge brute)
Puissance moyenne
(CV)
Longueur moyenne
(HT,m)
1984248847319
1985187235219
1986297637719
1987297636919
1988347438519
1989286136419
199026 *7628320
199112 **9229620
199216 ***9131020

* :pour un total de 34 glaciers;
** :pour un total de 26 glaciers; arrêt des glaciers de l'armement ALMAP;
*** :pour un total de 36 glaciers.

Tableau 7 - Quantités totales annuelles de poisson débarquées par les flottilles mauritaniennes, pue des glaciers mauritaniens, et indices d'abondance tirés des campagnes de prospection en saison froide et saison chaude (campagnes du ‘N’Diago').
AnnéesDébarquements (tonnes)Pue (tonnes/jour de mer)Prospections scientifiques (tonnes/demi-heure)
 ∑ Mauritanie *Glaciers mauritanienssaison froidesaison chaude
1982   211,7 
1983   231,4 
198436 2812 8301,04363,6 
198540 2003 1641,60  
198632 0225 0741,40  
198738 5654 3871,05174,8198,4
198829 5163 4871,00225,8230,4
198921 3114 8571,20201,3144,9
199019 3133 3941,95249,0 
199114 0103 1771,06 **97,3184,7
199212 82118400,60 ***  

* :Congélateurs + glaciers + pêche artisanale.
** :Année où le nombre de glaciers mauritaniens a fortement diminué;
*** :Année où le stock de poulpe s'est redressé.

Les débarquements annuels des glaciers par principaux groupes d'espèces (tabl. 8) ne montrent pas une évolution homogène. On observe bien, à partir de la fin des années 80, une baisse des débarquements pour plusieurs groupes (sparidés, serranidés, sélaciens), mais le déclin apparaît à des dates différentes et est plus ou moins prononcé selon les groupes. Si les haemulidés (hors Plectorhynchus mediterraneum) connaissent une baisse similaire, celle-ci ne se manifeste qu'en 1992 chez cette dernière espèce. Pour les serranidés, la baisse s'observe à partir de 1989 dans les statistiques commerciales, et aussi dans les indices d'abondance tirés des campagnes de prospection (surtout de saison froide).

Figure 10

Figure 10 - Poissons démersaux: évolution des pue des glaciers mauritaniens et des indices d'abondance (saisons chaude et froide) des campagnes de prospection.

Tableau 8 - Débarquements annuels des glaciers par principaux groupes d'espèces.
 198419851986198719881989199019911992
Sparidés3368601582207517512990 1398313
Serranidés47588015021999 752
Sciaenidés188309365326448539 3147
Haemulidés*1613440778382 421
Plectorhynchus         
mediterraneum43244531146127175 4550
Pseudupaeneus         
prayensis2267181153151 760
Pleuronectiformes80135243370452474 556259
Sélaciens4445792652738682 452
Autres poissons         
démersaux12846192117990171203 401478
Total poissons         
démersaux283031645074438734894805339433621062
Effort (j.de mer)2 7201 9753 6764 1593 6263 9751 7373 1771 840

* :non compris Plectorhynchus mediterraneum.

L'évolution des pue (débarquements)montre des évolutions différentes selon les groupes d'espèces (tabl.9): ils passent par un pic en 1988 pour les serranidés et les rougets, en 1989 pour les sparidés et les sciaenidés, alors qu'ils augmentent régulièrement chez les poissons plats jusqu'en 1991, et que pour les sélaciens, ils déclinent depuis 1985. Ces variations paraissent refléter au moins autant des changements dans le choix des espèces cible que dans l'abondance absolue des espèces. Ces changements de stratégie dans l'exploitation des poissons (y compris dans les taux de rejet) réduisent beaucoup la signification des indices d'abondance et des efforts effectifs tirés des statistiques commerciales. On sait que ces dernières années les glaciers étrangers et les congélateurs ont eu tendance à s'intéresser davantage à la pêche du poulpe (Girardin, 1988), et à accroître en conséquence leurs rejets de poissons. Une observation conforte cette interprétation: en 1992, l'effort des congélateurs s'est déplace vers la zone centrale de la ZEE (Inejih, en prép.); alora que, dans cette zone, le poissons est relativement plus abondant, cette abondance n'apparaît pas dans les débarquements. La réduction des liaisons aériennes par lesquelles une partie importante du poisson noble débarqué à Nouadhibou était exportée en frais vers l'Europe peut étre la cause de ce changement de comportement, Si c'était le cas, le stock de poisson devrait être moins fortement exploité que ne l'indiquent la baisse des débarquements par jour de pêche des glaciers, et l'estimation de l'effort de pêche tirée des mêmes statistiques commerciales.

Tableau 9 - Pue annuelles (tonne/jour de mer) des glaciers mauritaniens pour certains groupes d'espèces.
AnnéesSparidésDiagrammeSerranidésSciaenidés RougetSélaciensPoissons plats
19840,120,160,020,070,000,160,03
19850,320,230,030,160,010,290,07
19860,580,090,020,100,020,070,07
19870,760,010,040,080,020,070,09
19880,640,040,060,120,040,020,13
19891,100,040,030,140,040,020,12
19900,510,140,020,100,020,010,18
1991-------
19920,120,000,000,000,000,000,14

Toutefois, la prédominance de la pêche des céphalopodes (51 300 tonnes de céphalopodes contre 12 000 tonnes de poissons débarquées en 1992) fait que les flottilles qui les flottilles qui recherchent ces espèces peuvent contribuer à maintenir un effort de pêche élevé sur les stocks de poisson. Il est peu probable, par ailleurs, que le recrutement soit la cause de la baisse apparente des rendements de poissons: d'une part, parce que le recrutement des poissons démersaux est souvent relativement stable (par rapport à celui des petits pélagiques ou de diverses espèces de bivalves par exemple); d'autre part, parce, parce que les fluctutation du recrutement au niveau des espèces devraient ê tre amorties au niveau de leur ensemble.

Deux évaluations de la biomasse minimale de poissons démersaux du plateau continental, basées sur les résultats de prospections, on été publiées (Josse et Garcia, 1985). La première correspond à la période 1982-1984 (campagnes du `N'Diago' pour le plateau continental entre 0 et 200 m,et de l"Almoravide' pour le secteur du banc d'Arguin et de la baie du Lévrier). Les biomasses minimales estimées de poisson démersal sont de 57 500 tonnes pour le plateau continental et de 27 500 tonnes pour la baie du Lévrier et le banc d'Arguin, soit 85 000 tonnes au total.

La seconde correspond à la période 1989-92 (campagnes du ‘N'Diago’); elle n'inclut pas le secteur de la baie du Lévrier et du banc d'Arguin. Les estimations de biomasse par saisons et par zones, tirées des campagnes du ‘N'Diago’ (tabl. 10) montrent une grande variabilité spatio-temporelle. Les biomasse les plus fortes ont été successivement recontrées dans les secteurs centre, sud, et nord. On sait néanmoins, de par la répartition des activités de chalutage, que la partie nord du plateau mauritanien est exploitée plus intensivement que la partie sud (de la latitude de Nouakchott à la frontière sénégalaise). La biomasse minimale moyenne pour l'ensemble du plateau est de 91 400 tonnes.

Ces deux estimations de biomasse instantanée pour l'ensemble du plateau continental (57 500 tonnes pour la période 1982–84 et 91 400 pour la période 1989–92) diffèrent d'autant plus significativement que la différence est de sens opposé à l'évolution des rendements des glaciers. Cette différence ne peut vraisemblablement s'expliquer par une meilleure efficacité du chalut du ‘N'Diago’ (obtenu par des modification du train de pêche en 1989), car des corrections ont été apportées pour tenir compete de ces modifications. Cette différence incite, néanmoins, a penser que la baisse des quantités de poissons débarquées par les glaciers proviendrait en grande partie de leur intérêt plus grand pour la pêche des céphalopodes, et de problèmes de gestion et de commercialisation rencontrée par les sociétés qui arment ces bateaux (SALIMAUREM et ALMAP).

Les données disponibles ne permettent donc pas d'établir un diagnostic clair de l'état du stock. Néanmonins, le stock de poissons du plateau serait moins intensément exploité que ne l'indique la baisse des rendements apparents (débarquements) des chalutiers glaciers.

Tableau 10 - Estimations des biomasses minimales de poissons démersaux du plateau continental mauritanien (résultats des campagnes de prospection du N/O ‘N’Diago').
SaisonsAnnéesSecteurs
nordcentresudtotal
Saison
froide
198932,4(84%)41,0(84%)35,3(89%)108,7
199018,6(76%)25,9(79%)33,7(83%)78.2
199113,1(72%)21,5(84%)15,0(84%)49,6
Saison
198924,7(68%)34,2(86%)19,8(89%)78,7
199136,9(92%)33,5(82%)25,2(90%)95,6
Inter-
Saisons
198914,9(67%)65,3(91%)38,0(86%)118,2
199234,6(92%)33,5(70%)42,7(84%)110,8
Moyennes
annuellles
198924,0(74%)46,8(88%)31,0(88%)101,8
199018,6(76 %)25,9(79 %)33,7(83 %)78,2
199125,0(86 %)27,3(82 %)20,1(88 %)72,5
199234,6(92 %)33,5(70 %)42,7(84 %)110,8
Moyenne1989–9225,1(80 %)36,4(83 %)30,0(86 %)91,4
Densité moy.(t/m2) 10,913,812,512,5
N.B.: Les pourcentages indiquent la proportion de poissons démersaux dans les prises totales.

3.2.2.2 - État du stock et potentiel de capture

Josse et Garcis (1985) estimaient à 50 000 tonnes le potentiel de sparidés du plateau continental (prise moyenne de 25000 tonnes doublée pour tenir compte des rejets importants par les flottilles ne s'intéressant pas directement à la pêche du poisson). Le potentiel des autres espèces était évalué à 34 000 tonnes: considérées comme moins surexploitées, la prise moyenne courante de ces espèces n'a été multipliée que par un facteur de 1,5. Le potentiel total de poisson démersal ainsi calculé était donc de 84 000 tonnes, soit 67 000 tonnes pour la fraction disponible sur le plateau continental.

Pendant la période 1984-92, les débarquements moyens annuels ont été de 8 000 tonnes pour les sparidés, et de 20 000 tonnes pour les autres espèces, soit 28 000 tonnes au total. C'est approximativement le tiers de l'estmation précédente. Cette moyenne est tombée à 13 000 vu, d'un changement dans la stratégie des flottilles se traduisant par un intérêt moindre pour le poisson et par une augmentation du taux de rejet. A partir de 1988, le taux d'exploitation a peutêtre diminué avec la baisse de l'effort de pêche exercé sur les céphalopodes.

Avec les données disponibles, on ne peut évaluer le potentiel de stock. Malgré les conclusions en partie divergentes auxquelles conduit l'analyse des différentes informations, il paraît peu probable que l'exploitation se soit intensifiée au cours de la dernière décennie. Toutefois, aucun signe d'amélioration de l'état du stock n'a été décelé dans les données étudiées.

3.2.2.3 - Besoins de recherche

Même si les stocks de poisson ont actuellement une importance moindre dans la pêche mauritanienne, cette part n'est pas négligeable. Elle est susceptible de croître dans l'avenir, notamment si l'état du stock de céphalopode se dégrade. Il est donc important de vérifier rapidement la part d'un changement dans les stratégies de pêche de commercialisation, et de l'intensité de la pêche, dans le déclin des débarquements. Pour cela, les investigations ou améliorations suivantes sont nécessaires:

3.2.3 - Poissons démersaux du talus1

3.2.3.1 - Merlus

Information sur la pêcherie

Depuis plusieurs dizaines d'zaines d'années, une flottille de chalutiers étrangers, essentiellement espagnols, exploite troiis espèces de merlu: le merlu européen, le merlu sénégalais et le merlu noir sur le plateau et le talus continental (Bravo de Laguna, 1985; Wysokinski, 1986; Chavance et Girardin, 1991). Les espèces ne sont pas distinguées dans les statistiques. Les merlutiers espagnols opèrent à partir de Cadiz. Avant 1990, la flottille était composée de chalutiers de pêche fraîche (“bous”). A partir de 1990, des congélateurs sont venus renforcer la flottille, la rendant ce faisant plus hétérogène (tabl.11). En 1990, les marées étaient de 17 jours environ, et l'activité annuelle totale de chaque bateau de 135 jours de pêche. Le maillage des chaluts est de 60 mm.

Tableau 11 - Structure de la flottille de chalutiers espagnols pêchant le merlu dans la ZEE mauritanienne en 1989–90 (Ramos y Fernandez, 1992).
Classe150-200200-250250-300300-350350-400400-450450-500Total
Poucentage7,710,233,320,615,42,610,2100,0

La pêche s'effectue tout le long de la côte mauritanienne, entre 140 et 750 m. On considère qu'entre le cap Blanc et le cap Timiris, les trois quarts des captures sont constituées de merlu sénégalais et, qu'entre le cap Timiris et Saint-Louis cette espèce serait un peu abondante. Durant la période froide, la flottille concentre ses activités dans le secteur nord où le merlu sénégalais est saisonnièrement plus abondant (en relation probablement avec le déplacement du front thermique vers l'équateur).

1 - Cette partie du rapport final est pour l'essentiel basée sur le manuscrit de MM.M. Diop et bU.Lowenberg..

Statistique de pêche

Jusqu'en 1986, les statistiques espagnoles n'étaient pas déclarées par ZEE, mais par divisions statistiques du COPACE (Ramos y Fernandez,1992). La ZEE mauritanienne ne couvre qu'une partie des divisions COPACE 34.3.1 et 34.1.3. Le Groupe a analysé les données relatives à la période s'étendant de la fin de la période des “Accords Bilatéraux” (1983–1987) et couvrant toute cell des “Accors Communautaires” (1987–1991). Pendant la période 1983– 1992, les captures annuelles de merlus (Espagne et Mauritanie) ont oscillé entre 6 580 et 12 750 tonnes (tabl.12). Les rendements ont varié, sans tendance nette, entre 2,2 et 4,0 tonnes/jour de pêche. Les informations disponibles sur la composition spécifique des captures de la flottille espagnole (Ramos y Fernandez, 1992) sont données dans le tableau 13.

Tableau 12 - Merlus:évolution des captures, des rendements et de l'effort de pêche pendant les années 1983 à 1992.
AnnéeCaptures annuelles(tonnes)Rendement (t/jour pêche) merlutiersEffort corrgé (jour pêche)
MerlutiersChalutiers pélagiquesChautiers de fondTotal
198312754  127543,993196
19848 295  8 2952,383 485
19856 580  6 5802,173 032
19866522328714899573,153161
1987814154610087873,232720
198894741007100105813,293216
198910163247 104102,903590
19901121013932,111381,12,245081
19919335506,5 9841,53,362935
199290867,3 9093,32,483667


Tableau 13 - Composition spécifique des captures de la flottille merlutière espagnole (Ramos y Fernandez, 1992).
Espèces198419851986198719881989199019911992
Merlus82956580652281419474101631121093359079
Dentés profonds69725740720330526222211-
Diagramme-------3-
Pageot-------15-
Congre-------100-
Baudroies-------22
Langouste rose348266865522231300
Geryon--------16
Crevettes         
- alistado--------18
- gamba--------2
- langostino------- 0
- carabinero--------0
Divers crustacés-------12153
Céphalopodes--------3
Divers120317318068321078958162018101006

Biomasses minimales et potentiel de capture

Sur la base de prospections réalisées par un navire allemand, un Groupe de travail précédent avait estimé en 1984 la biomasse absolue de merlus présente sur le talus contiental mauritanien à 13 000 tonnes en 1982, et à 23 000 tonnes en 1983 (FAO, 1986). A partir des prospections du ‘N'Diago’, la biomasse de la fraction juvénile de merlus a été estimée à 8 600 tonnes pour l'année 1982, et à 2 200 tonnes l'année suivante. La biomasse totale instantanée de merlus (adultes + juvéniles) présente dans la ZEE mauritanienne aurait donc été de 21 600 tonnes en 1982, et de 25 200 tonnes l'année suivante. La convergence des estimations globales de ces deux prospections n'est qu'apparente, puisque les deux estimations diffèrent sur la part relative des juvéniles et des adultes.

Deux estimations du potentiel de merlus de la ZEE mauritanienne ont été publiées:

Un réexamen des données relatives à période 1983–92 conduit aux observations suivantes:

Compte tenu de la stabilité des pue, des bonnes prises (9 000–11 000 tonnes) maintenues au cours des dernières années (1989–92), et de la faible mortalité exercée sur les juvéniles par les chalutiers spécialisés (Ramos y Fernandez, 1992), on peut estimer que les concentrations de merlus présentes dans la ZEE mauritanienne pourraient supporter de façon régulière un prélèvement au moins égal à la première estimation (13 000 tonnes). Ce chiffre n'est pas un potentiel maximal de capture, lequel ne peut pas être évalué avec l'information disponible. Il ne correspond pas non plus à la production d'un ensemble déterminé de populations car la répartition des populations exploitées dans la ZEE mauritanienne déborde ce secteur (la structure et la distribution des populations ouest-africaines de merlus restent mal connues).

A condition d'être accompagné de mesures garantissant que les données nécessaires aux évaluations soient collectées, déclarées et analysées, un accroissement contrôlé de l'effort de pêche est envisageable. Simultanément, les prises accessoires dont on soupçonne la pêche pélagique, et les captures de juvéniles effectuées accessoirement par les flottilles de chalutiers opérant sur le plateau, devraient être estimées. Une intensification de la pêche par paliers permettrait de préciser ces premières conclusions.

3.2.3.2 - Autres espèces

Le Groupe de travail de 1985 avait estimé à 71 000 tonnes le potentiel de l'ensemble “autres espèces profondes”, constitué par les poissons du talus à l'exclusion apparemment des merlus. Il avait admis en première approximation que ce potentiel était égal à la moitié du potentiel démersal du plateau (incluant les céphalopodes). La meilleure connaissance du peuplement halieutique du talus apportée par les campagnes de chalutage expérimental effectuées plus au sud dans le golfe de Guinée (superficie, nature et abondance relative des espèces) indique que ces hypothèses étaient trop optimistes. En effet, l'importance des espèces actuellement commercialisées (sparidés profonds essentiellement) par rapport aux espèces de valeur commerciale faible ou nulle (munidae, poissons de petite taille, crevettes non commercialisables,…) est nettement plus faible sur le talus que le plateau. L'évaluation de leur potentiel devrait être reprise. Dans l'attente, les captures de poissons commercialisables (hors merlus) du talus pourraient être limitées à 10 à 15 000 tonnes.


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