12. L’alimentation et le commerce
international


Documents d'information technique
Résumé analytique
© FAO, 1996


 Table des matières

Remerciements
Résumé analytique

1. INTRODUCTION

2. CARACTÉRISTIQUES DU COMMERCE AGRICOLE

3. LE COMMERCE ET LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE

La signification de la sécurité alimentaire
Le commerce et les disponibilités alimentaires
Le commerce et l’instabilité de l’offre alimentaire
Le commerce et l’accroissement du revenu
Commerce, répartition des revenus et sécurité alimentaire des ménages

4. COMMERCE, DÉVELOPPEMENT DURABLE ET SÉCURITE ALIMENTAIRE

Considérations générales
Effets sur l’environnement de la libéralisation du commerce agricole
Effet du durcissement des normes écologiques sur le commerce agricole

5. UN NOUVEAU CONTEXTE POUR LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE
L’évolution des politiques agricoles nationales
Le Cycle d’Uruguay et la croissance des revenus
L’Accord sur l’agriculture du Cycle d’Uruguay
Incidences du Cycle d’Uruguay
Les inquiétudes des pays en développement
Perspectives à plus long terme

6. PROCHAINES ÉTAPES DES NÉGOCIATIONS COMMERCIALES

BIBLIOGRAPHIE


Remerciements

La préparation des documents techniques du Sommet mondial de l’alimentation a mobilisé, outre le personnel de la FAO, un grand nombre d’experts de la communauté scientifique mondiale sollicités dans le cadre du partenariat avec les institutions internationales et les milieux gouvernementaux ou non gouvernementaux. Le processus a été supervisé à la FAO par un Comité de lecture interne, composé de fonctionnaires choisis à titre personnel et chargé de s’assurer que l’ensemble de la documentation est conforme aux critères appropriés de qualité et de cohérence.

Le présent document a été préparé par M. Alan Matthews de Trinity College (Dublin, Irlande), puis complété par Jim Greenfield et Panos Konandreas, fonctionnaires de la FAO, sous la direction générale de Hartwig de Haen. Après un premier examen effectué au sein de la FAO par divers collègues et par le Comité de lecture, une version préliminaire a été publiée et distribuée pour observations aux gouvernements, aux organisations intergouvernementales et non gouvernementales (OIG et ONG), ainsi qu’à d’autres spécialistes. Des observations et des conseils très appréciés ont été adressés par MM. Tim Josling (Stanford University, Etats-Unis), Adel Beshai (Université américaine du Caire, Egypte), Romeo Bautista [Institut international de recherche sur les politiques alimentaires, (IFPRI)], M. Kassas (Université du Caire, Egypte), Ammar Siamwalla (Institut thaïlandais de recherche sur le développement); l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), l’Organisation mondiale du commerce (OMC), Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), Consumers International, le Comité de liaison de l’Asie du Sud-Est sur la sécurité alimentaire et le commerce équitable, et Focus on the Global South.

Tout en remerciant les nombreuses personnes qui ont participé à la rédaction du présent document, le Secrétariat de la FAO en assume la pleine responsabilité.


Résumé analytique

Le commerce est essentiel à la sécurité alimentaire mondiale. Sans lui, les pays dépendraient exclusivement de leur propre production; l’ensemble des revenus serait bien inférieur, le choix des produits serait beaucoup plus étroit et la faim serait plus répandue. Bien que tout cela soit évident, en particulier pour le commerce intérieur, la relation entre le commerce et la sécurité alimentaire pose un certain nombre de questions complexes qui sont examinées ci-après.

Le commerce mondial des biens et services en 1994 a atteint 5 190 milliards de dollars EU, le commerce des produits agricoles représentant 485 milliards de dollars EU. Depuis la Conférence mondiale de l’alimentation de 1974, le volume des échanges agricoles a augmenté de 75 pour cent et leur valeur a plus que triplé, tout comme celle des échanges de produits alimentaires. A la suite de cycles successifs de libéralisation commerciale, le commerce mondial s’est développé beaucoup plus vite que la production. En conséquence, l’économie mondiale est beaucoup plus intégrée aujourd’hui qu’elle ne l’a jamais été: les pays comptent de plus en plus sur le commerce comme source de revenus et d’approvisionnement. L’intégration croissante de l’économie mondiale fait partie de la tendance générale à la globalisation.

Le commerce international influence la sécurité alimentaire de multiples façons. En premier lieu, le commerce permet à la consommation alimentaire de dépasser la production vivrière dans les pays où l’expansion est limitée. Sur la période 1970-1990, la consommation de produits agricoles a augmenté de 10 pour cent plus vite que la production dans 93 pays en développement couverts par l’étude FAO de 1995 Agriculture mondiale: Horizon 2010 (WAT2010). C’est grâce aux importations en général que l’on peut couvrir les besoins de consommation alimentaire à un coût moindre que s’il fallait compter seulement sur la production intérieure. Certains pays peuvent avoir des raisons particulières de chercher à atteindre l’autosuffisance alimentaire, il est en général plus judicieux du point de vue économique d’adopter la politique plus souple de l’autonomie alimentaire, à condition que les importateurs puissent compter sur le marché mondial comme source fiable et efficace de ravitaillement et que les exportateurs disposent de débouchés pour leurs produits. Malgré les obligations de notification et de consultation faites aux membres de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) en ce qui concerne les restrictions d’exportation, les pays importateurs s’inquiètent et se demandent si les importations seront disponibles au moment voulu et s’il y a des risques d’embargo commercial. Dans une certaine mesure, l’expansion du commerce mondial des céréales devrait écarter les craintes concernant les approvisionnements mondiaux mais les importateurs continuent à s’inquiéter des mesures limitant les exportations. En ce qui concerne le rôle du marché mondial comme source de recettes pour les pays en développement, la forte expansion du volume de leur commerce s’est accompagnée d’un déclin des termes de l’échange pour leurs produits, ce qui a considérablement érodé les gains attendus. De plus, la capacité des pays en développement d’importer des produits alimentaires est souvent limitée par leurs lourdes obligations concernant le service de la dette.

Le commerce des produits alimentaires a également un rôle important à jouer dans la stabilisation des approvisionnements et des prix intérieurs. En l’absence de commerce, les fluctuations de la production intérieure devraient être compensées par des ajustements de la consommation et/ou des stocks. Le commerce permet donc de faire face aux fluctuations de la consommation et libère les pays d’une partie du fardeau de la constitution de stocks. Toutefois, pour tous les importateurs (et exportateurs) réguliers, l’instabilité des cours internationaux peut créer un problème pour les consommateurs, les producteurs, les transformateurs et les gouvernements.

Le commerce international a un effet déterminant sur l’accès aux vivres car il influence les revenus et l’emploi. Alors que des politiques commerciales plus libérales contribuent à terme à la croissance économique, la question principale du point de vue de la sécurité alimentaire est de savoir si celle-ci profite aux pauvres. Même si dans la plupart des pays en développement, il semble que les industries d’exportation utilisent davantage de main-d’œuvre que les industries de substitution des importations et que l’emploi tende à augmenter dans les économies orientées vers l’extérieur, les liaisons entre le commerce, la croissance, l’emploi et la pauvreté ne sont pas évidentes car chacune de ces variables est influencée par d’autres facteurs.

A condition que des politiques nationales soient en place pour assurer que les gains tirés du commerce profitent aux pauvres et pour protéger ces derniers des éventuels effets négatifs, la libéralisation du commerce peut jouer un rôle important dans l’amélioration de la sécurité alimentaire même si l’ajustement au nouveau régime commercial ne va pas sans problèmes. Les estimations des effets de la libéralisation du commerce, y compris du Cycle d’Uruguay, diffèrent beaucoup, mais des études laissent à penser qu’il y aura d’importants gains de revenu dans les prochaines années. Si l’on ajoute les effets, difficilement mesurables, des améliorations des règles commerciales et de l’Accord du Cycle d’Uruguay sur les Services, le Cycle d’Uruguay devrait permettre d’améliorer le niveau des revenus et donc la sécurité alimentaire. Les difficultés que les pays pourraient rencontrer pendant le processus de réforme ont été reconnues et les pays en développement bénéficient d’un traitement spécial et différentiel, essentiellement sous la forme de périodes d’ajustement plus longues et d’engagements de réduction moins lourds. Les accords du Cycle d’Uruguay reconnaissent aussi que pendant le processus de réforme, les pays les moins avancés et importateurs nets de produits alimentaires auront peut-être des difficultés à importer des denrées de base à des conditions raisonnables. En conséquence, il faut assurer l’application rapide de la Décision du Cycle d’Uruguay relative aux Mesures concernant les effets négatifs possibles du programme de réforme sur les pays les moins avancés et les pays en développement importateurs nets de produits alimentaires.

Il convient de noter que le Cycle d’Uruguay pourrait ne pas beaucoup modifier le volume de l’aide alimentaire; en effet, si les quantités liées à l’écoulement des excédents sont susceptibles de baisser, le volume de l’aide accordée au titre de la décision susmentionnée pourrait bien augmenter. Les pays qui ne fournissent pas d’aide en nature devraient envisager activement de recourir à des transactions triangulaires d’aide alimentaire et à d’autres moyens d’assistance technique et financière pour accroître la productivité dans les pays touchés.

La libéralisation du commerce telle qu’elle est reflétée dans le Cycle d’Uruguay ne modifiera sans doute pas sensiblement la disponibilité nette de produits alimentaires au niveau mondial, car la réduction de la production dans les pays où les coûts sont élevés sera généralement compensée par une production accrue dans d’autres pays. Etant donné l’évolution probable à moyen terme en faveur des prix relatifs des produits alimentaires, les pays devraient envisager de réviser leurs politiques agricoles et de répercuter les accroissements des cours mondiaux sur leurs secteurs nationaux afin de stimuler les investissements dans la production vivrière. Les effets du Cycle d’Uruguay sur la stabilité des cours mondiaux des produits alimentaires sont incertains. Quatre facteurs entrent en jeu: les effets positifs de la tarification, les effets négatifs du déclin des stocks mondiaux de produits alimentaires, l’effet positif résultant du fait qu’une part plus importante des stocks est détenue par le secteur privé et les effets incertains du déplacement des lieux de production.

Dans l’ensemble, en encourageant la croissance des revenus, en élargissant la gamme et la variété des produits alimentaires disponibles sur le marché local, en réduisant les risques liés aux fluctuations de la production intérieure et en permettant à la sécurité alimentaire mondiale d’être assurée de manière plus efficace, la libéralisation du commerce contribue à améliorer la sécurité alimentaire dans ses trois dimensions qui sont l’accès, la disponibilité et la stabilité. Toutefois, du fait de la libéralisation du commerce, on peut craindre que les changements structurels qui accompagnent la croissance économique entraînent une baisse de la sécurité alimentaire dans les pays et les ménages très pauvres incapables de profiter des nouvelles possibilités commerciales; les importations de produits alimentaires pourraient devenir plus coûteuses; l’instabilité des cours mondiaux des produits alimentaires pourrait augmenter si les stocks mondiaux baissent; et d’autres préoccupations non commerciales subsistent, par exemple les conséquences pour l’environnement et l’avenir des communautés rurales. Chaque pays doit faire en sorte que ces préoccupations éventuelles soient dûment prises en compte dans les politiques nationales.

Le commerce, l’environnement, la durabilité et la sécurité alimentaire sont également étroitement liés. A long terme, la sécurité alimentaire mondiale dépend du maintien et de la conservation de la base de ressources nationales pour la production vivrière. Le commerce affecte l’environnement de trois manières, à savoir: il augmente les revenus, ce qui stimule la demande de biens tirés de l’environnement et les moyens de satisfaire cette demande; il modifie les lieux de production et de consommation; et l’activité commerciale elle-même utilise des ressources et peut entraîner des gaspillages et autres dommages pour l’environnement.

On se préoccupe de plus en plus des effets des normes écologiques plus strictes sur le commerce des produits agricoles et donc aussi sur les gains à l’exportation des pays en développement et sur leur sécurité alimentaire. La communauté internationale élabore actuellement de nouvelles politiques dans ce domaine. Ces questions figureront sans doute en bonne place dans les futures discussions commerciales multilatérales.

Le fait que le protectionnisme agricole soit encore très répandu plaide en faveur d’une libéralisation commerciale plus poussée dans l’agriculture, malgré les progrès déjà réalisés. En effet, l’Accord du Cycle d’Uruguay sur l’agriculture a reconnu que l’objectif à long terme des réductions progressives importantes de l’appui et de la protection résultant d’une réforme fondamentale était un processus permanent. Des négociations à ce sujet commenceront en 1999.