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Annexe 1 - Différentes modalités pratiques du traitement a l'urée

Cette annexe est destinée au vulgarisateur qui aura à faire sa démonstration chez le paysan à qui il laissera les consignes et le matériel minimum nécessaire pour effectuer ultérieurement son traitement lui même. Le vulgarisateur aura fait effectuer les travaux nécessaires à la préparation de l'enceinte. Il devra avoir parfaitement réfléchi à tout ce dont il a besoin comme matériel et avoir fait préparer le fourrage afin de réaliser sa démonstration sans hésitation ni difficultés de dernière minute.

Qu'il s'agisse de traitements en petites quantités à l'échelle individuelle ou en grandes quantités à l'échelle de la grande exploitation ou de la coopérative, les opérations pratiques du "traitement à l'urée" sont les suivantes:

· la préparation du matériel,
· la préparation et la pesée du fourrage à traiter;
· la préparation de la solution d'urée;
· l'incorporation intime de la solution au fourrage à traiter;
· la couverture de la masse de fourrage traité

Un des facteurs clé de la réussite du traitement à l'urée est l'incorporation homogène de la solution dans la masse du fourrage à traiter. On utilise pour cela un arrosoir pour les petites quantités à traiter ou des pulvérisateurs pour les grandes quantités. La solution est arrosée lit par lit sur le fourrage. Lorsqu'il s'agit de fourrage en vrac ou en gerbe on le tasse énergiquement au pied pour compacter chaque couche à l'intérieur de l'enceinte de traitement.

A - Fourrages en vrac traités en petites quantités

Reprenons l'exemple du §432 où 200 kg de paille en vrac sont à traiter dans un couloir en brique de banco de 2 m3.

Les paramètres du traitement sont:

5 kg d'urée et 50 l d'eau par 100 kg de paille sèche

soit, pour cet exemple,

5 x 200/100 = 10 kg d'urée
50 x 200/100 = 100 l d'eau

1 Préparation du matériel

On achètera le minimum possible de matériel en ayant recours à des solutions locales et familières des paysans:

matériel à faire préparer par le paysan:

· pour le transport de l'eau: des seaux ou des fûts acheminés sur charrettes à proximité du lieu de traitement,

· pour préparer la solution: un ou deux fûts ou demi-fûts de récupération et des seaux ou encore des jarres en poterie, et des bâtons, branches ou manches de pelle pour remuer,

· pour mesurer les quantités d'urée: des récipients comme boites de conserve vides, calebasses,.... qui seront étalonnés par le technicien,

· pour arroser la solution: des arrosoirs (de 10 à 15 1) avec pommes pour une bonne répartition de la solution ou, à défaut, des seaux ou tout autre récipient comme des calebasses, dans ce cas on arrosera à la main,

· pour la couverture et l'étanchéité: feuilles de bananier, branches de cocotiers, bouses de vaches, argile mélangé à la paille fine, nattes de Seko (Andropogon gayanus), palissades en bambou, films plastique s'ils existent et s'ils ne sont pas trop chers ou sacs d'engrais de récupération qu'on aura cousu ensemble pour en faire des bâches, de la paille pour réaliser un toit incliné composé de plusieurs couches de paille si on ne dispose d'aucun des matériaux énumérés ci-dessus; enfin, quelques pierres, briques, branches d'arbre ou tout objet pesant pour recouvrir le dessus de l'enceinte,

· pour la mesure des quantités de paille: quelques morceaux de corde (2 m de long au moins) ou de ficelle solide

matériel à préparer par le technicien:

· pour les pesées et les mesures: un peson de 30 à 40 kg, une balance de 10 kg de portée par 100 g, un mètre à ruban, et de quoi écrire.

2 Préparation et pesée du fourrage à traiter

La paille à traiter devra être sèche, et non moisie. La laisser en petites gerbes si elle l'est déjà; si ce n'est pas le cas, bien prendre garde, en la retirant de la meule de stockage, à la maintenir brins alignés et à ne pas la mettre en vrac. Cela facilitera les opérations de pesée et de manutention ultérieures.

Faire quelques gerbes de paille de 10 kg avec le peson (photo 23). Repérer avec le paysan la longueur de corde qui entoure exactement les 10 kg de paille en serrant toujours de la même façon. Faire un noeud sur le brin pour repérer cette longueur. Le paysan pourra alors, ultérieurement et sans peson, préparer la paille par petits tas de 10 kg à l'aide de cette corde étalonnée.

Photo 23: pesée servant à étalonner une gerbe de circonférence donnée repérée avec une corde (Madagascar). Photo. Chenost.

Dans le cas de démonstration collective on pourra lui demander de regrouper la paille, ainsi "pesée", par tas de 50 ou 100 kg (photo 24). Ce travail préalable facilitera énormément la tâche le jour de la démonstration de traitement.

Photo 24: préparation de la paille de riz en gerbes de circonférence repérée avec la corde étalonnée préalablement (Madagascar). Photo. Chenost.

Les bottes de paille de riz, issues du battage manuel sont souvent homogènes (200 à 300 g). Avant chaque traitement, il est toujours utile de prélever au hasard une dizaine de bottes pour estimer leur poids moyen

3 Préparation de la solution

Peser les 10 kg d'urée avec la balance. Comme le paysan ne dispose pas lui-même de cette balance, étalonner un récipient avec lequel il est familier, un verre de thé par exemple pour les pays sahéliens.

Il faut 15 verres à die pour faire 1 kg d'urée. Il est possible d'étalonner des récipients plus grands comme des boîtes de conserve ou de lait concentré,..., ou tout récipient bien identifiable.

Verser les 100 l d'eau dans un fût de 2001. Là aussi les récipients seront étalonnés ou la hauteur de l'eau dans le fut repéré par une marque visible. Verser doucement les 10 kg d'urée dans le fût tout en agitant avec un bâton ou une pelle en évitant que se forment des blocs. L'eau doit se refroidir quand l'urée se dissout. Il faut environ 10 mn pour dissoudre toute l'urée.

4 Aspersion et tassement de la paille

La paille est arrosée couche par couche (photo 25) jusqu'à remplissage du silo, de la tranchée, du trou ou de la case. L'expérience montre que, pour assurer un bon tassement et une bonne humidification de la paille, tout en réduisant le nombre d'aspersions, il convient d'effectuer des couches (ou lits) de 20 cm une fois la paille tassée.

Photo 25: traitement de paille à l'urée dans un silo de séko (Niger). Photo. Kayouli.

Ainsi, un silo de 1 m de haut sera constitué de 100/20 = 5 lits.

Dans notre exemple où 200 kg de paille sont traités, il y aura 5 lits de 200/5 = 40 kg de paille chacun.

· Constituer le premier lit en étalant 40 kg de paille sur tout le fond du silo, gerbes parallèles aux bords. Bien tasser bien la paille en la piétinant fortement (en dansant, cette opération est souvent réalisée par des enfants), surtout sur les bords. Arroser ensuite la paille, tout en continuant à piétiner, avec la quantité de solution nécessaire, soit 20 l pour 40 kg de paille (rapport 50/100), c'est à dire 2 arrosoirs de 10 l. Il est très important d'arroser la paille de façon homogène: ne pas surcharger certains endroits en en oubliant d'autres.

· Une fois le premier lit terminé, étaler de nouveau 40 kg de paille et ainsi de suite jusqu'en haut.

S'il reste de la solution à la fin des opérations, ne pas hésiter à l'arroser sur le sommet du silo.

5 Réalisation de l'herméticité et couverture

Pour un bon traitement il faut, ni perdre de solution par infiltration dans le sol ou le long des parois, ni perdre d'ammoniac par évaporation dans l'atmosphère.

Si le sol ou les parois de l'enceinte ne sont pas jugés suffisamment imperméables, on pourra parfaire l'herméticité avec un badigeonnage de boue mélangée à de la paille ou du fumier (certains, plus riches, préfèrent badigeonner de ciment) ou, encore, avec les mêmes matériaux de récupération que ceux utilisés pour la couverture (cf ci-dessous).

Une fois que le silo, ou la case, ou le trou, est rempli, bien tasser la dernière couche: inviter plusieurs personnes à "danser" sur place. Il faudra alors le recouvrir. Plusieurs possibilités se présentent suivant les matériaux dont on dispose localement.

Cette couverture peut être:

· des bandes de plastique,

· des sacs d'engrais ou de farine de récupération en plastique cousus ensemble (photo 26) de façon à réaliser des bandes permettant de recouvrir le silo. Un ensemble de 2 x 4 = 8 sacs permet de réaliser une bâche de 2 m x 4 m. On peut en confectionner deux pour couvrir le silo de deux couches avec des rabats permettant de bien envelopper le fourrage; on pourra les réutiliser si ils sont bien nettoyés entre chaque saison de traitement

· des feuilles de bananier ou des nattes de sisal ou de séko (photo 27), mises en place préalablement, il suffira de les rabattre. Il est important que les bords et les angles soient bien couverts.

Photo 26: couture de sacs de plastique de récupération pour la confection de bandes de plastique (Mauritanie). Photo. Chenost.

Photo 27: traitement de paille à l'urée dans un silo de séko (Niger). Photo. Kayouli.

Il est également possible de couvrir avec de la boue mélangée à du fumier, comme pour le badigeonnage des parois.

Une fois le silo bien rempli et bien tassé il faudra alors placer des objets lourds (briques, pierres, sacs remplis de terre, etc...) pour assurer un bon tassement.

B - Fourrages en gerbes ou en balles traités en quantités importantes à l'échelle du groupement ou de la grande exploitation

Dans le cas de pailles pressées en balles parallélépipédiques, on procédera comme pour le traitement à l'ammoniac en tas.

L'arrosage de la solution d'urée est effectué manuellement à l'arrosoir, couche par couche, (photo 20) après avoir déterminé le poids moyen des balles et par conséquent celui de la couche totale. Les couches sont croisées pour éviter la perte de solution.

L'arrosage peut être mécanisé grâce à l'utilisation de rampes munies de buses connectées à un camion citerne équipé d'une pompe (photo 21) et d'un compteur précis. C'est ce qui avait été développé en Tanzanie avec les tiges de maïs pressées pour les traitements à l'échelle de la coopérative. On était même parvenu avec ce type de fourrage à ne plus pratiquer qu'une seule aspersion sur le sommet de la meule (constituée de 4 couches maximum dans ce cas) préalablement construite à l'avance. Les premiers essais avaient été couronnés de succès mais il serait bon de vérifier la répétabilité d'une telle opération dont la réussite dépend de la capacité du fourrage à retenir et absorber l'eau. Nous la déconseillerions avec certains fourrages à tiges rigides et lisses comme Andropogon gayanus.

L'herméticité est réalisée classiquement avec des films de plastique comme pour le traitement en tas à l'ammoniac. Des solutions susceptibles d'économiser le plastique sont à l'étude comme nous l'avons vu plus haut (couverture de la meule par badigeonnage de boue).

En Asie du Sud-Est (exemple du Cambodge) la paille est récoltée en petites gerbes d'environ 250 g. Les meules de gerbes sont montées par couches de 500 bottes (100 à 150 kg) en suivant la méthode traditionnelle de construction des meules (photos 18 et 19). Une couche de 100 kg est généralement réalisée avec 4 rangées de bottes qui se chevauchent en évitant de laisser un vide entre les bottes et en plaçant toujours la partie coupée des tiges vers l'extérieur. Cette couche est ensuite arrosée avec 50 litres de solution d'urée. Cette opération est répétée à chaque couche jusqu'à la fin de la construction de la meule. Il faudra veiller à ce qu'une telle meule ne soit pas trop étroite. Deux couches de gerbes, non traitées, sont alors placées au-dessus du stock traité. Un toit, incliné et débordant sur les côtés, est alors confectionné (photo 28) pour recouvrir l'ensemble.

Photo 28: traitement de la paille à l'urée en meules traditionnelles (Cambodge). Photo. Kayouli.

Photo 28': traitement de h paille à l'urée en meules traditionnelles (Cambodge). Photo. Kayouli.


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