VANUATU

Son Excellence Monsieur Rialuth Serge Vohor, Premier Ministre de la République de Vanuatu


Le peuple et le Gouvernement de Vanuatu vous saluent et vous félicitent pour votre élection à la présidence de cette auguste assemblée qui réunit les chefs d'Etat et de Gouvernement des pays membres de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture à une période complexe de l'évolution humaine et des relations internationales. L'association de la République de Vanuatu à cette importante Organisation, ainsi qu'à la communauté internationale, ne date pas de quelques années. Notre contribution aux décisions et aux programmes d'action relatifs aux problèmes de l'agriculture et de l'alimentation sera, par conséquent, limitée aux circonstances qui nous sont caractéristiques et spéciales.

Cependant, la place et le rôle de l'agriculture dans la société mélanésienne de Vanuatu, à la fois dans le contexte du développement économique et du bien-être social, ont toujours été primordiaux, ce qui nous lie très étroitement avec nos frères et soeurs des pays membres de cette Organisation. Je me dois de marquer notre reconnaissance aux "leaders" qui, lors de la Conférence mondiale de l'alimentation en 1974, ont eu la sagesse, d'une part d'examiner le problème de la production et de la consommation alimentaires et, d'autre part, de s'être établi l'objectif principal d'éliminer la faim, l'insécurité alimentaire et la malnutrition dans le monde. La situation actuelle, 20 ans après la Conférence, ne semble malheureusement pas avoir amélioré de beaucoup dans la plupart des pays en voie de développement. Paradoxalement, le nombre des personnes souffrant de sous-alimentation chronique ou atteintes de carences protéino-énergétiques aiguës reste très élevé, et l'assistance de la communauté internationale en faveur de l'agriculture dans les pays les plus affectés continue à diminuer.

En outre, il apparaît que le pourcentage de l'aide globale au développement accordée au secteur de l'agriculture est en régression alors que les pays du Sud continuent à miser sur ce secteur et à accorder beaucoup d'attention et de ressources locales. De nouvelles mesures de réforme ont été, ou sont actuellement, mises en place par un certain nombre de gouvernements, en particulier dans la région du Pacifique, y compris par la République de Vanuatu, visant à assurer le développement économique et à subvenir aux besoins alimentaires d'une manière durable dans une perspective à long terme. Ces mesures de réforme au niveau national, bien que prises avec une volonté et un engagement politiques fermes, seront mises en oeuvre et soutenues avec beaucoup de difficultés si l'appui technique, matériel et financier de nos partenaires en développement dans le secteur agricole n'est pas maintenu ou augmenté à long terme.

La tenue de ce Sommet mondial est une opportunité unique, pour les pays membres de la FAO et d'autres encore, de revoir la situation actuelle de l'alimentation, de réitérer l'engagement continu de nos gouvernements respectifs à un redressement rapide de la situation et d'adopter des politiques et des stratégies globales et nationales, ainsi qu'un Plan d'action approprié, qui seront susceptibles à la fois de sensibiliser et de mobiliser le soutien des pouvoirs publics et des institutions privées dans nos pays respectifs et la communauté internationale. Bien évidemment, la magnitude des problèmes liés à l'alimentation et les mesures de réforme proposées diffèrent d'un pays à un autre, ou d'un îlot à un autre, ou encore de la zone rurale à la zone urbaine, ou encore d'un groupe de personnes à un autre. Avec une population d'environ 170 000 habitants, vivant sur des îles tropicales ayant une superficie foncière totale de 12 000 km2 et entourées d'une zone maritime exclusive de quelque 665 000 km2, la République de Vanuatu, comme beaucoup d'autres pays insulaires du Pacifique, pourrait être considérée comme dotée de ressources naturelles, y compris agricoles, en quantités adéquates pour assurer, ou tout au moins contribuer, au maintien d'un système d'alimentation autosuffisant et un développement national socioéconomique durable.

Le simple fait que plus de 80 pour cent de la population continuent à maintenir un système de subsistance dans les milieux ruraux, et la force de la tradition familiale mélanésienne qui veille à ce que les membres de la famille, de près et de loin, ne manquent pas de nourriture quotidienne, représentent deux éléments majeurs dans la situation actuelle de Vanuatu. Cependant, comme les autres pays insulaires, le Vanuatu et sa population sont également affectés par la situation politique et économique internationale actuelle, en particulier la nouvelle situation politique d'aide de la communauté des bailleurs de fonds.

Alors que les pays insulaires sont relativement éloignés des zones de guerres civiles, de conflits ethniques et d'autres pressions sociales, les nouvelles politiques adoptées par la communauté des bailleurs de fonds pour répondre à cette nouvelle situation sociopolitique internationale ont un impact négatif sur les programmes d'assistance existant dans la région du Pacifique. Les ressources disponibles dans les programmes d'assistance de l'extérieur sont réduites, forçant les gouvernements régionaux, y compris Vanuatu, à revoir leurs priorités sectorielles et à adopter des mesures de réforme structurelle et politique parfois assez délicates. Le système de subsistance agricole établi dans les zones rurales est graduellement remplacé par un système de commercialisation des produits agricoles, en particulier, le copra, le cacao et la viande de boeuf, représentant environ 80 pour cent des revenus des exportations domestiques. La part du secteur agricole dans le produit national brut est d'environ 25 pour cent. La pression des réformes dans le secteur agricole a un effet significatif sur le système foncier, en particulier dans les zones rurales. Le taux de croissance de la population, qui est actuellement de 2,8 pour cent, est un autre facteur important dans ce contexte. Parallèlement, le mouvement de la population des zones rurales vers les centres urbains est devenu un souci majeur, avec un taux annuel de 7,6 pour cent.

Tous ces éléments et d'autres sont à l'origine des changements sociaux et économiques au Vanuatu, entraînant ainsi un changement des modes de consommation, en particulier la consommation beaucoup plus importante des produits importés que celle des produits locaux. Les produits de consommation importés représentent environ 20 pour cent de la valeur totale des importations et 80 pour cent de la valeur totale des exportations domestiques.

La dépendance des produits de consommation importés devient de plus en plus importante dans les zones rurales. La question de la qualité des produits de consommation importés et du pouvoir d'achat des populations urbaines et rurales vient donc se poser, question que le Gouvernement évoque continuellement en vue de trouver des solutions pour une sécurité alimentaire durable, à la fois pour les centres urbains et pour les zones rurales, particulièrement pour les Nivanuatu ayant des revenus bas ou modestes - ceci, dans le respect des traditions familiales mélanésiennes.

Le Gouvernement de Vanuatu s'est engagé à prendre certaines mesures de réforme visant à résoudre les problèmes actuels et potentiels d'alimentation. Parmi ces réformes, les mesures suivantes sont à noter: la décentralisation du Gouvernement et l'élargissement du mandat des gouvernements provinciaux dans l'administration de certains secteurs, en particulier le secteur agricole. L'objectif principal de cette politique est non seulement de rendre l'administration des affaires publiques plus efficace et moins coûteuse, mais aussi et surtout de développer davantage les infrastructures de base dans les zones rurales nécessaires pour minimiser l'exode rural, et créer des petites industries, en particulier des industries à base agricole, utilisant les produits locaux. Parallèlement, les services éducatifs et sanitaires, en particulier dans le contexte de l'alimentation des enfants et des femmes enceintes, font l'objet de réformes majeures au niveau national. La bonne mise en oeuvre et le maintien de cette politique de réforme nécessitera, bien entendu, un soutien technique et financier important à long terme de nos partenaires d'autres pays en développement, à la fois à un niveau bilatéral et multilatéral.

La création des farés ou centres de nutrition ou d'alimentation dans les zones les plus peuplées, avec l'assistance de certaines agences de l'Organisation des Nations Unies, est un exemple concret des mesures de réforme. Ces farés ou centres d'alimentation ont pour objectif, à court terme, d'enseigner aux femmes et aux autres membres des communautés rurales les différentes techniques pour améliorer la santé grâce à la consommation des produits locaux et, à long terme, d'encourager la participation communale dans les programmes d'alimentation, et de réduire les problèmes de malnutrition par des programmes éducatifs de prévention. La commercialisation de la production de subsistance par la création de petites industries à base agricole est un autre aspect politique majeur du Gouvernement de Vanuatu, susceptible de contribuer à long terme à la création de nouvelles sources de revenus pour la communauté locale, à la diversification des produits alimentaires locaux, au maintien de la sécurité alimentaire et à la réduction de la dépendance des produits de consommation importés. L'exploitation et le développement durable des ressources agricoles constituent un autre élément de réforme important dans la politique du Gouvernement de Vanuatu. Et nous sommes engagés non seulement à poursuivre cette politique au niveau national, mais également à la promouvoir à l'échelle régionale.

Comme je l'ai mentionné plus haut, la République de Vanuatu possède l'environnement adéquat et les ressources agricoles potentielles pour assurer le maintien de la sécurité alimentaire de sa population et un développement économique durable à long terme. Cependant les problèmes de malnutrition et de sous-alimentation existent, à une échelle qui nous est propre. Le Gouvernement de Vanuatu a entrepris des mesures de réforme, parfois difficiles, pour résoudre ces problèmes, en collaboration étroite et régulière avec le secteur privé et les organisations non gouvernementales, dont le rôle est devenu de plus en plus important. Parallèlement, le soutien des partenaires en développement dans les différentes initiatives sera toujours requis et nécessaire. Ce Sommet mondial, je l'espère, servira à mieux illustrer ce besoin.


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