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ETAPE 4 - PLANIFICATION ET MISE EN OEUVRE


CHAPITRE 8 - FORMULER UN PLAN DE MISE EN OEUVRE
CHAPITRE 9 - RESTRUCTURER L’ORGANISME D’IRRIGATION ET CRÉER DE NOUVELLES CAPACITÉS
CHAPITRE 10 - ETABLIR UNE ASSOCIATION D'UTILISATEURS DE L'EAU ET LA PRÉPARER À EN ASSUMER SES RESPONSABILITÉS
CHAPITRE 11 - QUESTIONS QUE DEVRONT PRENDRE EN COMPTE LE FSE ET LES AUE APRÈS LE TRANSFERT
CHAPITRE 12 - AMÉLIORER L'INFRASTRUCTURE D'IRRIGATION

CHAPITRE 8 - FORMULER UN PLAN DE MISE EN OEUVRE


En quoi consiste la formulation d’un plan intégré au niveau sectoriel ?
Quels sont les fonctions qui relèvent de l’organisme chef de file dans le processus de transfert ?
Qui devrait jouer le rôle de chef de file dans l’établissement des associations d’utilisateurs de l’eau ?
Quel devrait être le niveau de détail et de rigidité des objectifs du TGI ?
Pourquoi le suivi et l’évaluation sont-ils importants et comment les concevoir ?
Quelles connaissances, compétences et attitudes sont-elles nécessaires pour mettre en oeuvre le programme de TGI ?

RÉSUMÉ

Un plan de mise en oeuvre détaillé du TGI comprendra normalement les éléments suivants:

· changements de politique nécessaires (mandats de l’organisation, subventions, etc.)

· changements juridiques nécessaires (droits relatifs à l’eau et à la terre, statut et pouvoirs des AUE, procédures de règlement des différends, etc.)

· restructuration de l’organisation (réorganisation, déploiement du personnel, formation, etc.)

· accords pour la fourniture de nouveaux services de soutien (avis techniques, crédit, résolution des litiges, renforcement de la gestion du bassin fluvial, etc.)

· établissement et développement d’AUE;

· amélioration de l’infrastructure d’irrigation.

Chacun de ces éléments devra être corrélé avec le plan et il faudra indiquer comment il favorise les objectifs du TGI, désigner le responsable de sa mise en oeuvre et les moyens prévus pour ce faire, et définir sa place dans un calendrier de mise en oeuvre et les ressources dont il aura besoin. Pour le groupe de travail du TGI le principal enjeu consistera à vérifier que toutes les composantes essentielles de la réforme sont incorporées dans le plan.

Pour des raisons politiques et administratives, il pourrait être nécessaire de confier à des équipes spéciales, responsables vis-à-vis des services de la planification ou du budget ou du cabinet, la prise en charge de la restructuration de l’organisme d’irrigation. Ce dernier peut accomplir trois actions importantes pour appuyer le processus de TGI: tout d’abord mettre en oeuvre son plan de restructuration dès que possible, deuxièmement contribuer à communiquer aux organisations d’agriculteurs la nouvelle répartition des responsabilités et la nouvelle politique adoptée en matière de subventions et de future remise en état, troisièmement, assumer ses nouveaux rôles dès que possible.

Pour assurer que le suivi et l’évaluation secondent efficacement le programme de TGI, les planificateurs devront réduire au minimum les données à collecter, choisir des indicateurs d’“efficacité en matière d’information” et faire la distinction entre les informations provenant de tous les sites et celles relatives à des sites témoins. En outre, lors des réunions de planification il faudra passer régulièrement en revue les résultats du suivi et de l’évaluation et identifier les actions consécutives.

Parmi les compétences les plus recherchées dans le processus de planification du TGI occupent une place importante les aptitudes à négocier et à persuader, à analyser et à raisonner de manière abstraite et créative, à évaluer l’efficacité de la gestion et à concevoir des améliorations à apporter au périmètre d’irrigation de manière participative. Mais celles dont les planificateurs devront être dotés avant tout sont l’ouverture à de nouvelles idées et solutions et la volonté de s’y adapter, et la capacité de travailler avec engagement et persistance.


En quoi consiste la formulation d’un plan intégré au niveau sectoriel ?

Dans la plupart des cas une “commission spéciale” ou un “groupe de travail” sera chargé de coordonner l’élaboration du plan de TGI. Il est important que le plan soit global. Cela ne veut pas dire qu’il doit consister en un exercice détaillé ou orienté du sommet vers la base mais qu’il devra identifier tous les aspects essentiels du TGI. Si le plan n’est pas global, certaines composantes négligées risquent de rester mal reliées à la réforme. Un plan global pour le TGI comprendra normalement les éléments suivants:

· changements de politique nécessaires (mandats de l’organisation, subventions, etc.)

· changements légaux nécessaires (droits relatifs à la terre et à l’eau, statut et pouvoirs des AUE, procédures de règlement des différends, etc.)

· restructuration de l’organisation (réorganisation, déploiement du personnel, formation, etc.)

· accords pour la fourniture de nouveaux services de soutien (avis techniques, crédit, résolution des litiges, renforcement de la gestion du bassin fluvial, etc.)

· établissement et développement des AUE;

· amélioration de l’infrastructure d’irrigation.

Chacun de ces éléments devrait être corrélé avec le plan comme suit:
· montrer comment il appuie les objectifs de TGI;
· désigner le responsable de sa mise en oeuvre et les moyens de ce faire;
· produire un calendrier de mise en oeuvre;
· identifier les ressources nécessaires.
La tâche principale qui incombe au groupe de travail sera de vérifier que toutes les composantes essentielles de la réforme sont incorporées dans le plan. Cette vérification entraînera des communications fréquentes et la détection de problèmes et solutions entre le groupe de travail et chacune des parties intéressées. Cela voudra dire forger un consensus et promouvoir l’engagement vis-à-vis de la réforme. Des plans plus détaillés seront nécessaires pour des composantes spécifiques et aux niveaux régional et local.

ENCADRE 4

Les huit stades du plan de mise en oeuvre du programme de transfert de l’Andhra Pradesh en Inde.

Stade 1: Mobiliser le soutien politique au niveau le plus élevé de la direction et des services législatifs.

Stade 2: Encourager l’appui des parties intéressées.

Stade 3: Mettre au point la politique et la législation.

Stade 4: Etablir des organisations d’agriculteurs aux niveaux du cours d’eau, des canaux tertiaires, du projet et au niveau global.

Stade 5: Réaliser le transfert des fonctions de gestion.

Stade 6: Renforcer les capacités des AUE, des organismes d’irrigation et des autres organisations publiques.

Stade 7: Susciter la responsabilité et la transparence dans les organisations d’agriculteurs.

Stade 8: Entreprendre le suivi et l’évaluation à mi-parcours.


Quels sont les fonctions qui relèvent de l’organisme chef de file dans le processus de transfert ?

En général, les programmes de TGI sont réalisés dans des lieux où l’organisme d’irrigation chef de file avait été établi initialement dans le but de planifier et de construire des périmètres d’irrigation, et où son intérêt primordial continue à résider. Il pourrait ne pas être particulièrement efficace en matière de gestion et de financement des activités d’opération et d’entretien car, s’il l’avait été, le transfert de la gestion n’aurait sans doute pas été nécessaire. Plusieurs autres raisons pourraient expliquer pourquoi l’organisme devrait chercher une nouvelle orientation et abandonner l’administration pour se tourner davantage vers la gestion de l’eau à la base de la ressource - bassins fluviaux et couches aquifères - et vers la fourniture de services consultatifs techniques et d’appui aux organisations qui prennent en charge la gestion des périmètres d’irrigation.

Dans ces circonstances, devrait-on assigner à l’organisme d’irrigation un rôle directeur dans la mise en oeuvre du TGI ? Est-il capable et désireux de se réformer et de se restructurer ? A-t-il les compétences et la motivation voulues pour établir des associations d’utilisateurs de l’eau fortes ? Très souvent la réponse à toutes ces questions est négative. Néanmoins, il arrive fréquemment que c’est précisément à cet organisme qu’est assignée la tâche de réaliser le TGI. Une telle mesure risque d’avoir les effets préjudiciables suivants, ainsi qu’il a été observé dans de nombreux cas:

· l’établissement des AUE devient un exercice rapide, superficiel et réalisé du haut vers le bas;

· l’accent est mis trop fortement sur le développement de l’infrastructure;

· les investissements proportionnels des agriculteurs ou la promotion d’autres formes utiles de participation communautaire au développement de l’infrastructure ne sont pas suffisamment encouragés ou imposés;

· la sensation parmi les agriculteurs que le périmètre appartient au gouvernement et qu’il reviendra au besoin le remettre en état est renforcée;

· les agriculteurs tendent à retarder l’investissement dans l’infrastructure;

· les AUE sont faibles et apparaissent davantage comme des appendices de l’Etat que comme des fournisseurs de services autonomes;

· l’organisme d’irrigation continue à exercer un contrôle partiel sur les périmètres d’irrigation et à affecter du personnel opérationnel aux périmètres d’irrigation même après le transfert.

Pour des raisons politiques et administratives, il pourrait être nécessaire de confier à des équipes spéciales, responsables vis-à-vis des services de la planification et du budget, ou du cabinet, la prise en charge de la restructuration de l’organisme. Des ONG et des agriculteurs avisés pourraient entreprendre de manière plus efficace l’organisation des associations d’utilisateurs de l’eau.

Si l’organisme d’irrigation est incapable de se restructurer par ses propres moyens et s’il n’a pas les compétences voulues pour établir et développer des associations d’utilisateurs de l’eau, quel devrait donc être son rôle dans le processus de TGI ? Les observations et l’expérience suggèrent qu’il existe trois tâches importantes dont il peut s’acquitter pour favoriser le processus de TGI. Tout d’abord, il devrait entreprendre dès que possible la partie du travail de restructuration qui lui revient, à savoir les changements au niveau du personnel, la redéploiement de personnel et l’organisation de la formation aux nouvelles fonctions. Les agriculteurs auront ainsi l’impression que la restructuration est réelle et que l’organisme d’irrigation ne s’occupera plus des tâches qui sont désormais dévolues aux AUE. En deuxième lieu, il devrait contribuer à expliquer aux organisations d’agriculteurs la nouvelle répartition des tâches ainsi que la nouvelle politique relative aux subventions et à la future remise en état des infrastructures. Troisièmement, il devrait assumer ses nouveaux rôles aussi tôt que possible. Ils pourraient comprendre l’assistance technique et la formation à l’intention des nouveaux fournisseurs du service de l’eau et le renforcement de la gestion de l’eau le long des bassins fluviaux.

Qui devrait jouer le rôle de chef de file dans l’établissement des associations d’utilisateurs de l’eau ?

En ce qui concerne le TGI, deux types d’organisations devront être établies et développées au niveau local, à savoir l’association des utilisateurs de l’eau (l’organe directeur) et le fournisseur du service de l’eau (l’organe de gestion). Normalement, une AUE est régie par des statuts et un règlement. Elle devrait disposer de procédures, de méthodes et de sanctions lorsqu’elle entreprend la sélection des chefs, la mobilisation de crédits, le règlement des différends et la surveillance de la fourniture du service de l’eau. On trouve souvent ces compétences et ce type d’expérience chez les associations coopératives (y compris les organisations d’agriculteurs, les ONG s’occupant de développement, les sociétés de conseil locales oeuvrant dans le développement, les services de vulgarisation agricole et d’autres organisations gouvernementales. Il pourrait être nécessaire de faire appel à plusieurs organisations mais une seule devrait assumer la responsabilité de coordonner les apports.

ENCADRE 5 - ROLES TYPIQUES JOUES PAR LES ONG DANS LES PROGRAMMES DE TRANSFERT

· Faciliter les activités d’un groupe de travail sur le transfert

· Identifier des modèles d’organisation pour les associations d’agriculteurs

· Proposer et appliquer des méthodes visant à créer et à développer les associations d’agriculteurs

· Fournir une assistance juridique pour la formulation d’une législation

· Mettre au point et appliquer des méthodes de formation à l’intention des agriculteurs et du personnel de l’organisme d’irrigation

· Analyser la performance de l’opération et de l’entretien et recommander des mesures aptes à les améliorer

· Contribuer à la constitution d’une base de données et d’un système d’information.

· Mettre au point et appliquer des méthodes de diagnostic rural, et de suivi et évaluation.


Dans la mesure du possible, les planificateurs devraient éviter de confier cette tâche à des organisations inaccoutumées au rôle d’animateur. En définitive, ce sont les agriculteurs et leurs représentants qui devront prendre l’initiative d’établir leurs propres organisations. Il faudrait éviter également de faire appel à celles qui ont une réputation de corruption ou des intérêts établis contraires à ceux des AUE ou aux objectifs du TGI. En outre, on tend à dépenser des montants excessifs au cours de la phase pilote d’un programme de TGI en engageant, par exemple, des consultants coûteux et en confiant à des animateurs formés dans des universités l’organisation des agriculteurs sur le terrain. Si ces dépenses peuvent être justifiées pendant les premiers stades d’apprentissage du transfert, la stratégie générale d’établissement d’organisations d’agriculteurs devrait prévoir des solutions bon marché et pratiques. Une description de cette stratégie et du type d’organisation qui devrait jouer le rôle de chef de file dans l’établissement d’AUE viables devrait faire partie du plan de TGI.

Il pourrait s’avérer que l’organisation qui assume le rôle de chef de file soit différente de celle chargée d’établir et de former le FSE. L’orientation et les compétences requises ne seront pas les mêmes. Dans le cas du FSE l’accent portera sur la gestion de l’acquisition, de la livraison et de l’évacuation de l’eau de la zone irriguée relevant de l’AUE. La tâche de l’institut de formation sera de préparer le FSE à offrir un service acceptable, compatible avec celui défini par l’AUE. Parmi les matières principales devraient figurer l’élaboration d’un plan d’opération et d’entretien, des méthodes spécifiques de recouvrement des redevances pour l’eau et des autres recettes, l’application des techniques d’irrigation, l’entretien et l’évaluation de l’efficacité de la gestion. Normalement, l’organisme d’irrigation public jouerait un rôle important dans cette formation puisqu’il fournissait auparavant le service. Mais la formation peut être aussi dispensée par d’autres, comme des agriculteurs gestionnaires expérimentés provenant d’autres périmètres ou des ingénieurs détachés par des ONG ou des sociétés de conseil

Quel devrait être le niveau de détail et de rigidité des objectifs du TGI ?

Les planificateurs et les consultants ont tendance à préparer des plans qui sont trop élaborés et rigides. Normalement, le TGI est un processus d’apprentissage où les actions, les buts et les délais ne pourront être établis qu’au cours de la mise en oeuvre. Il est impossible de prédire les différentes réactions que pourront avoir les agriculteurs face à la prise en charge de la gestion, les problèmes qui devront être réglés sur le terrain, et les contraintes techniques ou financières qui pourront surgir pendant la mise en oeuvre, etc. D’une manière générale, les plans ne devront pas être plus détaillés qu’envisagé pendant la mise en oeuvre. Pour des situations complexes il faudra probablement des plans d’action plus généraux mais des mécanismes plus perfectionnés de mise à l’essai, de négociation et d’ajustement.

ENCADRE 6 - TROIS STRATEGIES VISANT A ORGANISER LES AGRICULTEURS: INDONESIE, PHILIPPINES ET COLOMBIE

Pendant les années 1980, l’Indonésie a entrepris plusieurs projets pilotes qui faisaient appel à des animateurs formés provenant d’ONG aux fins d’établir des AUE. Cependant le gouvernement a estimé qu’une approche aussi onéreuse ne représentait pas la stratégie nationale appropriée pour son programme de transfert de la petite irrigation qui avait démarré en 1988. Il a donc décidé de former des agents de terrain au rôle d’animateur au titre de ce programme. Cette approche financièrement viable a eu des résultats mélangés. On a observé chez ces agents la tendance à agir davantage comme représentants du gouvernement que comme agriculteurs et de chercher à faire adopter leur culture bureaucratique par les AUE.

Après avoir mis à l’essai les animateurs dans des projets pilotes, le gouvernement des Philippines a adopté le programme d’organisation des agriculteurs irriguants en 1983. Au titre de cette approche, on choisit et on forme localement des agriculteurs bien établis et on leur confie la tâche d’organiser les AUE. Cette approche s’est avérée être relativement rentable.

En Colombie, dès que le gouvernement a adopté son programme national de TGI en 1990, les associations d’utilisateurs de l’eau ont formé dans tout le pays une fédération nationale appelée Federriegos. Elle avait pour objectif de préparer les AUE à prendre en charge la gestion des périmètres administrés par le gouvernement. Chaque AUE paie des redevances pour soutenir la Federriegos qui engage des avocats pour faciliter les négociations de transfert, des ingénieurs pour résoudre les problèmes techniques, des comptables pour s’occuper de la formation en matière financière, etc. La Federriegos a en outre été invitée à faire partie de la commission consultative du nouveau ministère de l’environnement.


On observe aussi la tendance, souvent encouragée par les agences de financement et les banques de développement, à l’établissement de buts et de délais limites inflexibles. Les décideurs et les planificateurs devraient énoncer très clairement les objectifs voulus et le calendrier envisagé. Cependant, le plan ne devrait pas imposer un calendrier dont la rapidité et la rigidité des opérations compromettraient l’établissement de nouvelles organisations viables. On peut du reste éviter cette situation en faisant de l’appui aux organisations de gestion locales viables une importante fonction permanente à confier après le TGI aux organisations sectorielles.

Pourquoi le suivi et l’évaluation sont-ils importants et comment les concevoir ?

Comme toute autre réforme, le TGI est un processus novateur. Les plans le concernant sont en quelque sorte des hypothèses de travail qui devront être testées et modifiées dans la pratique. Différentes parties prenantes y participent et la négociation fait partie intégrante du processus. Les périmètres d’irrigation présentent de profondes différences au niveau des coûts et de l’intensité de gestion nécessaire pour réaliser les objectifs. La rétro-information, l’apprentissage et la souplesse dans la mise en oeuvre du programme sont des éléments essentiels, mais il faudra les limiter aux besoins d’une gestion de l’irrigation qui soit viable au plan local. Il est facile de se laisser juguler par un excès de négociation et de s’écarter du but fondamental. La négociation et la souplesse ne devront pas prendre le dessus sur un besoin plus important, à savoir mettre en oeuvre d’une réforme sujette à controverse suivant un calendrier rationnel et malgré les oppositions politiques. Pour cela il faut que le désir de changement l’emporte sur la résistance. Il faut aussi que la structure de base de la réforme apparaisse simple et claire aux parties intéressées.

Le suivi et l’évaluation sont à l’origine de deux problèmes fréquents: i) ils produisent un excès de données inutilisables et ii) ils ne sont pas suffisamment liés à un dispositif de décision-réponse. Ci-après sont proposées quelques solutions permettant de surmonter ces problèmes:

1. Chercher à minimiser. N’utiliser que des indicateurs pouvant satisfaire aux critères suivants:
· il s’agit d’aspects fondamentaux de la mise en oeuvre (accomplissement de tâches et réalisation d’objectifs) pour lesquels une vérification aux niveaux les plus élevés est impérative;

· ils donnent des informations sur les résultats et les impacts essentiels du programme lesquels doivent être documentés et communiqués aux niveaux supérieurs;

· ils n’excèdent pas la quantité optimale d’information qui peut être communiquée de façon pratique aux planificateurs et qu’ils peuvent absorber.

2. Choisir des indicateurs “efficaces en matière d’information”, c’est-à-dire des indicateurs qui décrivent une série de phénomènes associés. Un bon indicateur fournit des données sur de multiples aspects, ce qui réduit le besoin de collecte d’informations directes sur toutes les questions apparentées.

3. Faire la distinction aux fins du suivi entre les besoins identifiés au sommet et ceux identifiés à la base. Les planificateurs nécessitent un suivi réalisé au sommet pour comparer les résultats effectifs avec les résultats escomptés. Ils ont aussi besoin, tout comme d’autres parties intéressées, d’un suivi réalisé à la base qui fournit d’importantes informations concernant des questions inattendues et subjectives. Ce suivi est aussi important peut-être même davantage que le suivi du sommet à la base conventionnel. Si l’on ne surveille que les aspects identifiés par les autorités centrales on risque de compromettre gravement le processus d’apprentissage. Le suivi réalisé au sommet fait appel à des méthodes conventionnelles de collecte et de traitement des données. Le suivi réalisé à la base peut utiliser d’autres méthodes, telles que le diagnostic rural participatif, la documentation du processus, la participation directe des parties prenantes aux réunions des groupes de travail, etc.

4. Faire la distinction entre les quelques indicateurs qui requièrent des données provenant tous les sites et les indicateurs pour lesquels un échantillon est suffisant. On pourrait devoir collecter sur tous les sites des données portant sur les aspects fondamentaux de la mise en oeuvre et de la réalisation des objectifs. Des échantillons pris dans un petit nombre de sites seront sans doute suffisants pour les indicateurs des résultats et des impacts immédiats, et pour le suivi sur le terrain de problèmes pendant de la mise en oeuvre.

5. Les réunions du groupe de travail, du comité de coordination des politiques et d’autres groupes de planification devraient prévoir, comme procédure habituelle, l’examen des données du suivi et de l’évaluation. Ces examens aboutiront parfois à l’identification d’aspects à surveiller ou à analyser avant d’introduire des modifications éventuelles au programme. Les réunions sont aussi des occasions d’identifier les besoins d’information sur certains domaines spécifiques.

L’évaluation concerne les résultats, qui tendent à se produire immédiatement ou au bout d’un an ou deux, et les impacts, qui peuvent se manifester plusieurs mois ou années après la mise en oeuvre. Les indicateurs des résultats utilisés le plus communément sont les suivants:
· réduction ou redéploiement du personnel du périmètre d’irrigation;

· réduction des dépenses publiques relatives à l’opération et à l’entretien;

· coûts de l’irrigation pour les agriculteurs;

· changements dans le budget, les redevances et le taux de recouvrement des redevances du périmètre d’irrigation;

· changements dans les plans et procédures d’opération et d’entretien;

· état fonctionnel de l’infrastructure d’irrigation..

Ci-dessous figurent des exemples d’indicateurs d’impact utilisés le plus communément:
· zone faisant l’objet du service d’irrigation;
· efficacité de la livraison d’eau;
· efficacité de l’irrigation;
· intensité de culture;
· productivité agricole par unité de terrain et d’eau;
· productivité économique par unité de terrain et d’eau;
· revenu et emploi agricoles;
· importance de l’engorgement et de la salinité.

Quelles connaissances, compétences et attitudes sont-elles nécessaires pour mettre en oeuvre le programme de TGI ?

Ci-dessous figure une liste des domaines où seraient nécessaires certaines connaissances, compétences et attitudes spécifiques pour élaborer et adopter un programme de transfert de la gestion:

1. Etape 1: Mobilisation de l’appui
· Connaissances:
· priorités en matière d’irrigation, d’agriculture, de budget et de planification
· défaut de performance de la gestion de l’irrigation
· Compétences:
· négociation et persuasion
· raisonnement analytique et abstrait
· évaluation de la performance de la gestion
· cappacité de présentation verbale et écrite concise d’idées et d’informations
· Attitudes:
· esprit ouvert aux nouvelles idées et solutions
· nature travailleuse, capacité d’affronter les difficultés
2. Etape 2: Planification stratégique
· Connaissances:
· principes de planification stratégique
· différents points de vue des parties intéressées relativement au TGI
· Compétences:
· techniques de planification stratégique
· négociation et persuasion
· Attitudes:
· esprit ouvert aux nouvelles idées et solutions
· nature travailleuse, capacité d’affronter les difficultés
· prise en considération des points de vue et expériences de différentes parties prenantes
3. Etape 3: Résolution de questions de politique fondamentales
· Connaissances:
· institutionnelles, de gestion, financières et d’organisation technique du sous-secteur de l’irrigation
· procédures et problèmes de gestion aux niveaux du périmètre d’irrigation et de l’exploitation
· institutions locales de gestion des ressources naturelles: actuelles et potentielles
· aspects juridiques du TGI
· Compétences:
· négociation et persuasion
· analyse économique et des politiques et raisonnement abstrait
· logiciels pertinents (statistiques, tableurs, traitement de texte)
· capacité de présentation orale et écrite concise d’idées et d’informations
· Attitudes:
· esprit ouvert aux nouvelles idées et solutions
· nature travailleuse, capacité d’affronter les difficultés
· prise en considération des points de vue et expériences de différentes parties prenantes
4. Etape 4: Planification et mise en oeuvre
· Connaissances:
· méthodes de planification intégrées et multidisciplinaires
· institutionnelles, de gestion, financières et d’organisation technique du sous-secteur de l’irrigation
· institutions locales de gestion des ressources naturelles: actuelles et potentielles
· capacités d’entreprise des réalisateurs
· systèmes d’information sur la gestion
· ingénierie civile, hydraulique et agricole
· Compétences:
· négociation et persuasion
· capacité de présentation orale et écrite concise d’idées et d’informations
· logiciels pertinents (gestion de projets, tableurs, base de données)
· méthodes d’organisation de groupes
· méthodes de suivi et d’évaluation
· méthodes d’évaluation des besoins de formation
· conception et construction d’installations d’irrigation
· Attitudes:
· nature travailleuse, capacité d’affronter les difficultés
· prise en considération des points de vue et expériences de différentes parties prenantes
· capacité d’adapter ses propres idées et approches en fonction des enseignements tirés de la mise en oeuvre
Lorsque le personnel à affecter directement au programme de transfert de la gestion ne dispose pas de ce type de connaissances, d’aptitudes et d’attitudes, les planificateurs pourraient devoir recruter d’autres éléments, engager des experts en qualité de consultants ou organiser des activités de formation. En ce qui concerne la formation du personnel des opérations de terrain et des agriculteurs, l’expérience enseigne que la formation sur le tas ou en cours d’emploi et la formation par l’entremise des pairs (d’agriculteur à agriculteur, par exemple) donnent souvent de meilleurs résultats que l’enseignement théorique.

CHAPITRE 9 - RESTRUCTURER L’ORGANISME D’IRRIGATION ET CRÉER DE NOUVELLES CAPACITÉS


En quoi consiste la restructuration d’une organisation ?
Quels services de soutien faudra-t-il fournir aux AUE après le transfert ?
Mission et rôles
Direction et mode de financement
Mécanisme favorisant la responsabilité interne
De quelles capacités faudra-t-il doter le “nouvel organisme” ?

RÉSUMÉ

La restructuration de l’organisme d’irrigation comporte des changements importants au plan des objectifs, du mode d’opération et souvent du financement. Le TGI pourrait exiger de modifier le service de l’irrigation pour le rendre plus conforme à la nouvelle politique. Il pourrait convenir aux gouvernements d’instituer une commission spéciale de haut niveau formée de fonctionnaires spécialisés provenant de services apparentés, tels ceux de la planification, du budget, des affaires intérieures, de l’agriculture et de l’irrigation, pour entreprendre une planification stratégique et surveiller la restructuration. Ci-après figurent des exemples des changements introduits normalement dans les organismes d’irrigation à la suite du TGI:

· attribution de nouveaux mandats, comme la gestion des bassins versants et la réglementation et le suivi de l’impact sur l’environnement;

· fusion du service de l’irrigation avec celui de l’agriculture;

· conversion d’un organisme financé centralement à un service autofinancé;

· passage des fonctions de gestion aux rôles de réglementation et/ou construction et développement.

Ces changements comportent souvent le redéploiement du personnel des unités transférées et la réduction du personnel en surnombre de l’organisme.

De nombreux services de soutien pourraient s’avérer nécessaires après le TGI. Dans certains cas ils pourront être fournis par les AUE elles-mêmes, mais dans de nombreux cas c’est l’organisme d’irrigation ou le secteur privé qui devront s’en charger.

Les gouvernements choisissent normalement entre deux options lorsqu’ils réforment les services de l’irrigation après le TGI. La première consiste à faire du service un organisme public et de réviser simplement sa portée ou son mandat. Pour cela il faudra parfois procéder à la fusion de l’organisme d’irrigation avec un autre service comme celui de l’agriculture. La deuxième option consiste à convertir l’organisme en un département financièrement autonome responsable vis-à-vis d’une commission réglementaire (qui est le plus souvent un service interdépartemental)

La première option comportera, dans une large mesure, l’analyse des nouvelles capacités et des nouveaux besoins de l’organisme. On pourra les évaluer à l’aide de méthodes de planification qui analysent les points forts et les points faibles, les possibilités et les dangers. La deuxième option prévoira des analyses plus fouillées de la structure organisationnelle, des mécanismes de contrôle et des dispositifs de financement. Elle exige aussi un haut niveau de compétence, de contrôle de la gestion et des institutions juridiques fortes. De nombreuses solutions peuvent être envisagées pour renforcer la responsabilité intérieure de l’organisme, y compris la révision des lois relatives aux fonctionnaires publics, l’introduction d’incitations, la transparence et de nouveaux systèmes d’information.

Le TGI exige normalement que les organismes d’irrigation réorientent leur activité et crée les capacités nécessaires pour aider et guider les AUE, surveiller et réglementer l’impact sur l’environnement et gérer l’utilisation de l’eau entre les secteurs au niveau du bassin fluvial. Pour créer ces capacités il pourrait être nécessaire de former le personnel existant, de recruter de nouveaux éléments ou de faire appel aux services d’entreprises privées. Les planificateurs devront réfléchir activement sur la façon de tirer le meilleur parti possible de ce que peuvent offrir les secteurs public et privé afin de tenir compte des besoins futurs.


En quoi consiste la restructuration d’une organisation ?

Restructurer une organisation signifie changer radicalement ses objectifs, son mode d’opération et éventuellement son financement. Le TGI pourrait imposer de tels changements à l’organisme d’irrigation afin de le conformer à la nouvelle politique. Comme dans le cas du Mexique, le TGI pourrait faire partie d’une restructuration élargie des organisations publiques comportant la dévolution, la décentralisation et la fourniture de services autofinancés. Du fait de cette mobilisation générale et de l’appui politique, il sera probablement plus facile d’adopter et de mettre en oeuvre des programmes de TGI dans des pays où de vastes réformes sont en cours que dans ceux où la situation est restée inchangée.

On aura identifié de nouveaux mécanismes organisationnels en résolvant les questions de politique fondamentales décrites dans les chapitres 5 et 6. Normalement, un service de l’irrigation ne sera pas à même de pourvoir à sa propre restructuration, en outre il pourrait même être contraire au changement. C’est pourquoi il pourrait convenir au gouvernement d’instituer une commission spéciale de haut niveau formée de fonctionnaires spécialisés provenant de plusieurs services apparentés, tel que ceux de la planification, du budget, des affaires intérieures, de l’agriculture et de l’irrigation. L’objectif de la commission ou de l’équipe spéciale sera d’entreprendre une planification stratégique et de surveiller la mise en oeuvre de la restructuration en collaboration avec le groupe de travail sur le TGI. La restructuration pourrait comporter des changements dans les domaines suivants:

· mission et rôles de l’organisme;
· direction et mode de financement;
· responsabilité interne.
Si un gouvernement adopte un programme de transfert de la gestion avant d’avoir une vision claire des changements dont fera l’objet l’organisme d’irrigation après le transfert, il risque de renforcer la résistance au transfert. Les fonctionnaires pourraient craindre de perdre leur emploi, leur budget et leur influence. Le transfert de certaines des fonctions de l’organisme à des organisations d’agriculteurs pourrait faire songer à une amputation, si bien qu’il est essentiel d’avoir simultanément une idée claire de ce qu’il adviendra des unités transférées et de l’organisme public. Si l’on identifie de nouveaux rôles pour ce dernier, son personnel se sentira moins menacé par le transfert.

Ci-dessous figurent des exemples des changements typiques dont font l’objet les organismes d’irrigation du fait du TGI:

· licenciement du personnel en surnombre;

· attribution de nouveaux mandats tels que la gestion des bassins versants et la réglementation et la surveillance de l’impact sur l’environnement;

· fusion du service de l’irrigation et du service de l’agriculture;

· conversion d’un organisme financé centralement à un service autofinancé;

· passage des fonctions de gestion à des rôles de réglementation et/ou construction et développement.

Dans la plupart des cas, certains, voire la totalité, de ces changements seront nécessaires. Lorsqu’ils décident de restructurer l’organisme d’irrigation chef de file, les planificateurs devront tenir compte de l’éventualité d’un manque de crédits gouvernementaux, de contraintes législatives, de la résistance des milieux politiques aux réductions du personnel, de défauts de performance de la gestion aux niveaux du périmètre d’irrigation et du bassin fluvial, et décider quels services de soutien fournir aux AUE après le transfert.

Quels services de soutien faudra-t-il fournir aux AUE après le transfert ?

Nombreux sont les services de soutien dont les associations d’usagers de l’eau pourront avoir besoin après le TGI. Dans certains cas, ces services seront fournis par les AUE elles-mêmes mais dans beaucoup d’autres ils devront provenir des secteurs public, privé ou des ONG.

Appui juridique

· Droits d’usage de l’eau. Une fois que les droits d’usage de l’eau auront été établis et enregistrés (au niveau de l’utilisateur et de l’association), les gouvernements devront assurer qu’ils sont durables mais ne font pas l’objet d’abus ou de protection. Cette vérification sera d’autant plus importante si la concurrence pour l’eau est forte et que l’AUE est assujettie à une influence politique excessive. Les AUE pourront avoir besoin des services juridiques du gouvernement ou de cabinets d’avocats pour les aider à établir des précédents dans l’allocation des droits d’usages de l’eau ou pour protéger des droits existants.

· Statut juridique des AUE. Une législation supplémentaire ou des conseils juridiques pourraient s’avérer nécessaires en matière de contrats, de crédit, de droits d’accès, de taxes et d’impôts. Des juristes publics et des cabinets d’avocats privés pourront fournir ces services.

· Appropriation de l’infrastructure d’irrigation. Si le gouvernement a adopté une politique qui prévoit le transfert aux AUE de la propriété de l’infrastructure mais que cette démarche n’a pas été légalisée dans le transfert initial, une législation supplémentaire pourrait être nécessaire à cette fin.

· Règlement des différends. Les AUE pourraient devoir faire appel au gouvernement ou à d’autres autorités locales pour les aider à régler les confits qui pourraient éclater au sujet de la distribution de l’eau, des dommages infligés aux structures, du non-versement des redevances ou d’irrégularités fiscales.

Appui technique et formation

· Mesure des volumes d’eau. Il faudra dans de nombreux cas enseigner au personnel des AUE de même qu’au personnel d’encadrement faisant partie de la commission de l’AUE comment mesurer les volumes d’eau. Normalement, l’organisme d’irrigation se chargera de cet enseignement.

· Distribution de l’eau et drainage. Il pourrait être nécessaire de dispenser aux AUE une formation aux principes hydrologiques de base pour leur permettre d’opérer avec efficacité. Normalement cette formation théorique est fournie par l’organisme d’irrigation chef de file, mais pour les aspects plus pratiques un échange d’information entre agriculteurs est souvent très utile.

· Entretien. Les AUE auront sans doute aussi besoin d’être formées à la préparation de plans d’entretien, à l’organisation de réparations structurelles et aux pratiques d’entretien préventif recommandées. Cette formation sera fournie, dans la plupart des cas, par l’organisme d’irrigation mais dans ce cas aussi l’échange d’informations entre agriculteurs pourrait s’avérer utile.

· Vérifications au niveau de l’opération et de l’entretien. Ces vérifications comportent l’inspection par des experts indépendants des pratiques d’organisation et de gestion (y compris l’infrastructure, le budget et les registres) et la fourniture d’un certificat de conformité avec des normes d’efficacité convenues. Les vérificateurs pourraient provenir du gouvernement ou de firmes d’ingénieurs-conseils privées. Les vérifications sont généralement requises lorsque le gouvernement fait dépendre l’octroi de subventions de la conformité des AUE avec des normes de gestion déterminées (comme celles recommandées dans le présent manuel).

· Remise en état et modernisation. Les AUE pourraient nécessiter une assistance en matière de planification, conception, construction et financement de projets d’amélioration.

Appui financier, soutien à la gestion et formation

· Comptabilité. C’est l’un des points faibles de la plupart des AUE après le transfert. Il est parfois à l’origine de scandales et peut déterminer l’effondrement de l’organisation. Le gouvernement devra faciliter l’adoption de principes et normes communs de comptabilité ainsi que des méthodes convenues de fixation des prix, d’élaboration du budget et d’établissement des rapports, notamment lorsque l’octroi de subventions se poursuit après le TGI. Les vérifications financières par des experts-comptables indépendants sont extrêmement utiles car elles aident les AUE à maintenir leur crédibilité vis-à-vis de leurs membres et créanciers.

· Mobilisation des ressources, crédit et subventions. La mise au point d’un système efficace de recouvrement des redevances pour l’eau et la viabilité financière sont des objectifs clés de la plupart des programmes de TGI. Il pourrait être nécessaire d’obtenir une assistance consultative et des crédits du gouvernement, des banques ou d’un cabinet d’experts-comptables. Si l’AUE ne peut s’autofinancer immédiatement après le transfert, le gouvernement pourrait continuer à octroyer après le TGI des subventions pour l’opération et l’entretien dans une mesure progressivement décroissante. Les subventions serviraient à la remise en état et à la modernisation des installations, notamment si elles sont liées à un investissement proportionnel de la part de l’AUE.

· Principes et méthodes de gestion. Les membres du conseil d’administration de l’AUE et la direction du FSE auront sans doute besoin d’une formation et d’avis consultatifs pour perfectionner leurs capacités de gestion. Cette formation portera sur certains domaines tels que la gestion générale, la comptabilité, la gestion financière et du personnel et les systèmes d’information.

Gestion du bassin fluvial et du bassin versant

· Données sur l’hydrologie, la qualité de l’eau, la météorologie. Normalement ce type d’information devra être fourni par le service des ressources en eau et le service météorologique.

· Gestion du bassin fluvial et allocation de l’eau. Lorsque la concurrence pour l’eau se fait plus vive, le service des ressources en eau ou les autorités responsables du bassin fluvial pourraient devoir renforcer la gestion au niveau du bassin pour garantir une allocation de l’eau équitable et compatible avec les droits d’usage en vigueur. Une gestion plus efficace du bassin fluvial pourrait imposer que les AUE soient représentées dans les organismes de gestion du bassin, dans la coordination des calendriers de l’utilisation de l’eau et dans l’allocation de l’eau aux différents périmètres.

· Surveillance et réglementation de l’utilisation des terres et des eaux. Le gouvernement est tenu de manière croissante d’appliquer des règlements visant à combattre la dégradation de l’environnement et ce, pour que les périmètres d’irrigation ne soient pas affectés par de graves problèmes écologiques tels que le déboisement, l’érosion du sol, les pratiques impropres d’utilisation des terres et la pollution hydrique. Des fédérations de collectivités ou d’AUE peuvent jouer un rôle important dans les organismes consultatifs s’occupant des politiques de l’environnement.

Productivité agricole et rentabilité

· Fourniture d’intrants. Pour des raisons de productivité ou de rentabilité, les AUE pourraient vouloir après le TGI diversifier les cultures et encourager la commercialisation des produits agricoles. Lorsque les services de vulgarisation agricole sont inefficaces, les AUE ou des groupes d’agriculteurs pourraient devoir organiser leurs propres services, par le biais de réseaux ou de fédérations.

· Crédit. Les AUE auront sans doute besoin de l’aide du gouvernement ou des banques rurales pour apprendre comment organiser des services de crédit.

· Commercialisation et développement des entreprises. Une commercialisation accrue des produits agricoles imposera aux agriculteurs une meilleure connaissance des marchés et des possibilités de créer des entreprises agricoles. Des consultants, commerçants, exportateurs, entreprises et administrateurs pourraient fournir au niveau local des services consultatifs.

Les planificateurs devront entreprendre une analyse des besoins des utilisateurs de l’eau et de leurs organisations en matière de services de soutien et déterminer quels nouveaux services et restructurations sont nécessaires pour satisfaire au mieux ces besoins.

Mission et rôles

La mission d’une organisation consiste en l’accomplissement de ses principaux objectifs et rôles. Il est désormais habituel pour les organisations de définir leur mission. Une définition de la mission est une réponse succincte donnée aux questions suivantes: “Quel est mon objectif ?” ou “Quelles sont mes tâches ?” Ces définitions fournissent une direction et une indication de ce que l’organisation devrait faire. Elles représentent une norme vis-à-vis de laquelle sa performance peut être évaluée.

ENCADRE 7 MÉCANISMS DE REFORME DES ORGANISMES D’IRRIGATION

Depuis sa fondation en 1902, le Bureau de la mise en valeur des terres des E.U. avait pour mandat de transférer la gestion des périmètres d’irrigation aux organisations d’agriculteurs dès que ces derniers auraient remboursé la moitié de la somme qu’ils avaient accepté de verser pour couvrir les coûts du développement du périmètre. Cependant, aux Etats-Unis, les transferts n’ont été mis en oeuvre sur une très grande échelle qu’à la fin des années 1960 et dans les années 1970 - après que de nouveaux rôles ont été identifiés pour le Bureau et que des politiques claires concernant le redéploiement du personnel en surnombre avaient été adoptées. Les nouveaux rôles pour le Bureau comprenaient la réglementation et la surveillance de l’impact sur l’environnement et la gestion des bassins versants. Un grand nombre des employés en surnombre ont été ré-engagés par les nouveaux périmètres gérés par les agriculteurs; à d’autres ont été assignées des tâches différentes et d’autres encore ont choisi la retraite anticipée.

Le programme de transfert de la gestion en Turquie se singularise par le manque évident de résistance de la part de l’organisme d’irrigation. Une des principales raisons qui l’expliquent est la programme massif de développement de l’irrigation mis en oeuvre dans la partie orientale du pays, qui se déroulait en même temps que le programme de transfert. Le programme de construction attirait davantage le personnel de l’organisme que la gestion des périmètres existants. C’est pourquoi il n’a pas hésité à céder aux organisations locales les postes de gestion de l’opération et de l’entretien.


Quand bien même le service de l’irrigation disposerait déjà d’une définition de sa mission, il lui conviendra de la définir à nouveau lorsqu’il adopte un programme de TGI. La définition est un point de repère servant à communiquer le nouvel objectif organisationnel et culturel et le rapport du nouvel organisme avec la collectivité des agriculteurs. Ci-après figurent deux exemples d’une définition de la mission d’un service de l’irrigation. Le premier décrit l’orientation habituelle des services de l’irrigation avant le transfert de la gestion. Le deuxième propose une future mission pour un organisme après le TGI.

1. La mission du service est de mettre au point, d’opérer et d’entretenir des périmètres d’irrigation et de drainage, et de réglementer l’utilisation de l’eau de surface et souterraine à des fins agricoles en vue d’améliorer les moyens de subsistance des ruraux, de renforcer la production agricole et de protéger l’environnement conformément à la politique du gouvernement.

2. La mission de ce service est de réglementer l’utilisation de l’eau superficielle et souterraine à des fins agricoles en harmonie avec la politique du gouvernement visant à fournir une aide technique et financière aux associations d’utilisateurs de l’eau pour la création de périmètres d’irrigation et l’amélioration de leur efficacité.

Ci-après figure une liste des modifications que les organismes d’irrigation tendent à introduire dans leurs rôles après le TGI:

· fournir une orientation technique au FSE en fonction après le TGI;

· fournir des services consultatifs en matière d’administration, de comptabilité et de budget aux AUE;

· contribuer au règlement des différends;

· surveiller l’efficacité du FSE après le TGI;

· réglementer l’impact sur l’environnement.

· abandonner les tâches d’opération et d’entretien pour se consacrer à la construction et à la modernisation du périmètre;

· limiter la gestion à un niveau hydrologique plus élevé, tel que le bassin fluvial ou les principaux canaux de grands périmètres d’irrigation;

· entreprendre une planification et une gestion plus intersectorielles des bassins fluviaux ou des bassins versants.

Ces nouveaux rôles peuvent être groupés en trois catégories:
· fourniture de services consultatifs;
· suivi et réglementation;
· tâches de gestion de haut niveau.
Les décisions concernant les nouveaux rôles à confier à l’organisme après le TGI dépendront de l’évaluation des besoins en services de soutien des FSE et des défauts de performance au niveau des bassins fluviaux et des bassins versants.

Direction et mode de financement

Deux options se présentent en général aux gouvernements qui envisagent la réforme du service de l’irrigation après le TGI. La première consiste à conserver au service son statut d’organisme public et à réviser simplement son champ d’action ou son mandat. Cela comporte parfois la fusion de l’organisme d’irrigation avec un autre service comme celui de l’agriculture. La deuxième option consiste à convertir l’organisme en un service autofinancé responsable devant une commission réglementaire (qui est le plus souvent un service interdépartemental).

La première option comprendra, pour une large part, l’analyse des nouveaux besoins et capacités de l’organisme. On pourrait les évaluer par des méthodes de planification telles que l’analyse des points forts, des points faibles, des possibilités et des danger1. La deuxième option comportera une analyse plus fouillée de la structure organisationnelle, des mécanismes de contrôle et des dispositifs de financement. Elle exigera en outre un niveau élevé de spécialisation et de contrôle de la gestion ainsi que des institutions juridiques fortes.

1SWOT en anglais (strengths, weaknesses, opportunites and threats)
Dans la plupart des cas, les organismes d’irrigation conservent leur structure administrative précédente, c’est-à-dire d’organismes publics responsables vis-à-vis d’un ministère ou d’un cabinet. Normalement, cette option est adoptée lorsque les pressions financières ou politiques ne sont pas suffisamment fortes pour déterminer un changement plus radical de la structure administrative. Ou encore lorsque le gouvernement se rend compte que le rôle réglementaire de l’organisme lui impose de conserver son statut d’entité publique. Cependant, la formulation des politiques et des règlements tend à se concentrer davantage “en amont”.

En Indonésie, pendant les années 1990, la direction centrale de l’irrigation a décentralisé ses fonctions de direction et de gestion financière et limité son rôle à la formulation de politiques et à la planification stratégique. Toutefois, elle est restée une agence d’exécution financée au niveau central. Lorsque le Bureau de la mise en valeur des terres des Etats-Unis a commencé le transfert à grande échelle de la gestion de ses périmètres d’irrigation dans les années 1960 et 1970, il a maintenu sa structure administrative mais abandonné ses fonctions d’opération et d’entretien des périmètres pour assumer celle de réglementation environnementale des bassins fluviaux.

La commission centrale de l’eau du Mexique, la direction générale des travaux hydrauliques publics en Turquie et les services de l’irrigation et du développement des zones desservies de l’Andhra Pradesh ont tous conservé leur structure administrative de base mais réduit leurs domaines d’activité au développement, à la réglementation et aux services consultatifs techniques.

Certains gouvernements, comme les Philippines, l’Etat de l’Australie méridionale et l’Equateur, ont tenté de convertir l’organisme d’irrigation en un service semi-autonome et autofinancé. Le Pakistan a adopté cette politique et envisage, en outre, de créer des commissions de surveillance interdépartementales au niveau régional pour réglementer la gestion et le financement de l’irrigation des périmètres transférés. Bien que le gouvernement des Philippines ait converti son administration nationale de l’irrigation en un organisme financièrement autonome dans les années 1970, il demeure incapable de s’autofinancer entièrement par ses propres moyens et ne recouvre que 70% au maximum des redevances pour l’eau. L’Australie méridionale semble être sur la voie de l’autofinancement, en raison sans doute de la rentabilité de son agriculture et de ses fortes institutions juridiques. Il est encore trop tôt pour prévoir le résultat des réformes entreprises en Equateur et au Pakistan, mais il est raisonnable d’affirmer qu’elles auront besoin d’une forte volonté politique pour réussir.

Les sources fondamentales de financement des organismes d’irrigation après le TGI sont les suivantes:

· trésor public;
· fonds spéciaux affectés aux projets;
· fonds spéciaux régionaux;
· redevances pour le service de l’irrigation;
· revenus secondaires.
Les deux premières sources tendent à disparaître dans le monde entier. Cependant, si l’organisme réduit son champ d’action de manière draconienne, et se limite à assumer des fonctions de politique et réglementaires, il pourrait continuer à bénéficier du financement du trésor public. Les crédits affectés aux projets sont orientés de façon croissante par les donateurs vers les niveaux régional ou local et servent, pour une large part, au développement, à la remise en état des infrastructures plutôt qu’au financement des organismes d’irrigation. Les gouvernements régionaux, comme les Etats, les districts ou les autorités du bassin fluvial, disposent souvent de multiples sources de revenu provenant de taxes, prélèvements, etc. qui peuvent être partagées avec les organismes d’irrigation.

Si, après le TGI, l’organisme d’irrigation conserve un rôle dans la gestion de l’eau mais à des niveaux supérieurs “en amont” (canal principal ou cours d’eau), il pourrait se charger du recouvrement des redevances pour l’irrigation. Cependant, si le pourcentage des fonds publics diminue par rapport aux recettes tirées des redevances, l’organisme pourrait être incité à améliorer sa gestion afin d’accroître les revenus qu’il obtient du recouvrement des redevances. Parfois les organismes d’irrigation entreprennent des activités génératrices de revenus secondaires, comme la vente d’énergie électrique, la passation de marchés pour les travaux publics ou la vente de l’eau excédentaire. Ce type d’activités est très répandu en Chine. Les organismes pourraient, en fonction de leur nouveau mandat et de la disponibilité de fonds du trésor public, étudier des occasions de tirer des revenus de multiples sources.

Mécanisme favorisant la responsabilité interne

Des règlements concernant les fonctionnaires publics et certaines traditions peuvent affaiblir le sens de la responsabilité du personnel vis-à-vis des objectifs de l’organisme et des procédures opérationnelles. Ces règlement comprennent l’octroi d’un statut permanent au personnel, l’attribution de promotions fondées sur l’ancienneté, l’absence de primes sur le rendement, etc. Des pratiques non officielles de favoritisme et de corruption représentent une menace encore plus grave à la responsabilité interne. Ces problèmes expliquent en partie la raison pour laquelle le TGI a été conçu. Les ignorer ne fera qu’exacerber les difficultés rencontrées en amont, si c’est là que se concentrera l’attention de l’organisme après le TGI. De nombreuses options se présentent pour renforcer la responsabilité interne, y compris la modifications des règlements de la fonction publique, les incitations à accroître le rendement, la transparence, de nouveaux systèmes d’information, etc. De tels changements seront facilités si le TGI fait partie d’une réforme élargie déjà en cours. Dans certains cas il pourrait convenir de modifier les statuts de l’organisme et d’en faire, par exemple, un service semi-autonome, comme on l’a dit plus haut.

La commission spéciale devrait tirer parti de la possibilité de restructuration stratégique fournie par le TGI pour s’attaquer résolument à ces problèmes et introduire les modifications nécessaires. Ce n’est qu’en les surmontant directement que le nouvel organisme qui a fait suite au TGI pourra s’acquitter de ses fonctions de manière efficace et fournir le type de services réglementaires et de soutien dont ont besoin les périmètres d’irrigation après le transfert.

De quelles capacités faudra-t-il doter le “nouvel organisme” ?

La section ci-dessus concernant la mission et les rôles prévoit qu’à l’avenir il y aura trois types de capacités dont les organismes d’irrigation auront besoin après le TGI.

1. Capacité de faciliter et de conseiller

Les services de l’irrigation sont des systèmes administratifs hiérarchiques. Le personnel est habitué à donner ou à recevoir des instructions, à remplir des quotas administratifs et à suivre des procédures bureaucratiques. Le TGI pourrait déterminer le passage d’un rapport hiérarchique à un rapport de partenariat entre l’organisme et les agriculteurs. Comme en Indonésie et dans l’Andhra Pradesh en Inde, le TGI impose aux organismes d’abandonner la gestion des périmètres d’irrigation pour se consacrer à des services consultatifs de soutien et d’aider les nouveaux FSE à résoudre leurs problèmes. Il faudra un changement radical dans la culture organisationnelle, changement qui doit être soutenu par l’intérêt continu des niveaux supérieurs, par la formation et éventuellement par l’introduction de nouveaux critères d’évaluation du rendement. Des ONG expérimentées en matière de développement organisationnel pourraient jouer un rôle important en dispensant une formation en cours d’emploi au personnel du service.
2. Capacité de surveiller et de réglementer l’impact sur l’environnement
Cette capacité peut inclure le suivi de questions environnementales telles que le niveau de la nappe phréatique, l’engorgement, la salinité, le régime des eaux, l’envasement, l’intensité des arrosages, etc. Les organismes devront être capables de mesurer ces variables, d’analyser les données relatives et de formuler des recommandations pour l’action.
3. Capacité de gérer l’utilisation de l’eau entre les secteurs au niveau du bassin
Cela comporte une gamme encore plus étendue de compétences techniques et autres, y compris en matière d’hydrologie du bassin, de planification de l’utilisation des ressources en eau, de connaissances juridiques, de poids politique, de méthodes de négociation, etc. Cette capacité signifiera aussi une collaboration plus intense avec les secteurs de l’approvisionnement en eau à usage domestique, de la manufacture et de l’industrie, et de l’énergie et avec les administrations locales et régionales.
Pour certains des nouveaux rôles, le renforcement des capacités pourrait exiger la formation du personnel existant, le recrutement de nouveaux éléments et la passation de marchés avec le secteur privé. Le simple fait que le gouvernement conserve le rôle de fournisseur d’un service ne veut pas dire qu’il doit le fournir lui-même. Les besoins locaux et les capacités des secteurs public et privé détermineront les services à fournir et la façon de le faire dans un pays donné. Les planificateurs devraient penser activement à la manière de tirer le meilleur parti possible de ce que chaque secteur peut offrir afin de tenir compte des besoins futurs.

CHAPITRE 10 - ETABLIR UNE ASSOCIATION D'UTILISATEURS DE L'EAU ET LA PRÉPARER À EN ASSUMER SES RESPONSABILITÉS


Quels sont les facteurs qui favorisent l'établissement d'associations d'utilisateurs de l'eau viables ?
Quels sont les principes fondamentaux qui régissent l'établissement et le développement d'une AUE performante ?
Quels sont les principales caractéristiques organisationnelles d'AUE réussies ?
Comment se détermine l'adhésion à une AUE ?
Qu'entend-on par un service de l'eau convenu et mesurable ?
Fonctions d'un conseil d'administration d'une AUE

RÉSUMÉ

Le présent chapitre analyse tout d'abord les facteurs susceptibles de conduire à l'établissement et au développement de l'AUE viables. Plus est grand le nombre de ces facteurs plus le TGI aura de chances de réussir.

Des conseils sont fournis sur la manière dont les AUE devraient être organisées suivant des étapes et principes communément acceptés. L'importante question de savoir qui devrait prendre la direction de cette tâche est examinée et différentes options sont analysées.

Le chapitre met aussi en évidence les principales caractéristiques organisationnelles d'AUE réussies.

Il est impératif que les programmes de transfert de la gestion profitent de la réforme pour définir clairement les services de l'eau que la nouvelle organisation local entend fournir. Une bonne définition du service comprend: la zone où interviendra l'AUE pour livrer et évacuer l'eau, la quantité d'eau qui sera détournée et livrée, le moment de la livraison et de l'évacuation, et le mode de paiement du service de l'eau. Les autres services (entretien, règlement des différends, etc.) devront aussi être établis minutieusement.

Il est également important de définir correctement les tâches typiques du conseil d'administration de l'AUE, notamment celles relatives à l'organisation et la supervision du fournisseur du service de l'eau.


Quels sont les facteurs qui favorisent l'établissement d'associations d'utilisateurs de l'eau viables ?

Il est impossible d'énoncer en termes absolus toutes les conditions propices à l'établissement et au développement d'associations d'utilisateurs de l'eau. Certains facteurs pourraient être indispensables en un lieu et négligeables ailleurs. Dans quelques endroits, il y aura des facteurs qui revêtiront une telle importance qu'ils compenseront l'absence d'autres. En général, on peut supposer que plus est grand le nombre de facteurs motivants dans un endroit, plus sont nombreuses les probabilités d'établir des associations d'utilisateurs de l'eau viables.

Ci-dessous figure une liste des facteurs jugés propices à l'établissement et au développement d'associations d'utilisateurs de l'eau viables. Il ne s'agit pas des caractéristiques des AUE mais des conditions propres au cadre dans lequel elles peuvent naître. La liste est tirée de textes sur l'argument et d'interactions avec de nombreux praticiens au cours de réunions internationales et d'activités de terrain1.

· L'irrigation détermine une amélioration marquée de la productivité et de la rentabilité de l'agriculture irriguée par rapport à l'agriculture pluviale.

· L'agriculture irriguée est une importante composante des moyens de subsistance de la famille rurale.

· La plupart des agriculteurs sont des propriétaires fonciers ou des détenteurs de baux emphytéotiques.

· Un système généralement accepté de droits relatifs à la terre et à l'eau existe déjà ou l'on peut en supposer l'existence avant la mise en oeuvre du TGI.

· Les différences sociales ne sont pas suffisamment marquées pour interdire la communication et la prise de décisions conjointe par les agriculteurs.

· Les traditions sociales favorisent l'organisation collective de l'agriculture irriguée, les coopératives de producteurs et d'autres organisations rurales.

· Les agriculteurs sont mécontents du service de gestion de l'irrigation fourni par le gouvernement et estiment qu'une amélioration de sa qualité pourrait accroître de façon marquée la productivité et la rentabilité de l'agriculture irriguée.

· Les agriculteurs estiment que ces améliorations peuvent se réaliser grâce au contrôle de l'association sur la gestion des services de l'eau.

· Les agriculteurs croient que leur association peut réduire ou freiner l'augmentation du coût de l'irrigation qu'ils doivent supporter.

· Les agriculteurs croient en général que les avantages du TGI compenseront les coûts et que le rapport coûts/avantages du transfert est à peu près le même pour tous.

· Il est techniquement possible de mettre en oeuvre le service de l'eau en se servant de l'infrastructure existante ou après que les améliorations envisagées ont été apportées.

1Voir annexe 1 pour une liste de références pertinentes, y compris sur les associations d'utilisateurs de l'eau.
Certains de ces points pourront paraître quelque peu évidents mais, en réalité, rares sont les programmes de TGI qui tiennent compte de ces facteurs dans le processus de planification. L'établissement d'AUE dans des périmètres où un grand nombre de ces facteurs sont absents pourrait entraîner un surcroît d'efforts. La plupart des planificateurs n'auront ni le temps ni les ressources nécessaires pour rassembler sur les facteurs cités plus haut les informations qui permettraient d'établir un ordre de priorité et un calendrier de transfert. Pour convertir la liste présentée ci-dessus en un outil de planification pratique, on peut la réduire à quatre concepts:
· motivation économique du TGI;
· mécontentement vis-à-vis de la gestion existante;
· capacité de gestion locale et d'orientation collective;
· possibilité de réalisation financière et technique.
A chacun de ces facteurs peuvent être attribué un classement (avec des points allant de 1 à 3) et une moyenne générale (voir l'exemple figurant dans le tableau 5 ci-dessous). Les planificateurs peuvent travailler de concert avec les fonctionnaires locaux ou des ONG pour appliquer cette méthode de classification.

TABLEAU 5 - Exemple de classification des possibilités techniques d'établissement des AUE*

Indicateur

Périmètre 1

Périmètre 2

Périmètre 3

Périmètre 4

Motivation économique

Faible

Faible

Élevée

Moyenne

Mécontentement vis-à-vis de la gestion existante

Moyen

Moyen

Elevé

Elevé

Mngt. capacity

Low

Medium

High

High

Capacité de gestion

Faible

Moyenne

Elevée

Elevée

Viabilité financière

Faible

Faible

Elevée

Moyenne

Moyenne

1.2

1.5

3

2.5

* Niveaux: faible = 1 point; moyen = 2 points; élevé = 3 points
Normalement les périmètres dont la gestion est estimée facile à transférer ou qui ont une haute probabilité de succès sont transférés en premier. Ceux dont le transfert paraît problématique pourront demeurer inchangés en attendant que les gestionnaires acquièrent davantage d'expérience en matière de transfert. De telle sorte, les succès obtenus par les premiers transferts susciteront un soutien majeur pour le programme et serviront d'exemple pour les transferts plus difficiles qui se feront par la suite. Les agriculteurs expérimentés et le personnel du FSE des premiers transferts pourront dispenser par la suite une formation au personnel des périmètres présentant davantage de problèmes. Le système de classification décrit plus haut facilitera l'attribution de cet ordre de priorité.

Quels sont les principes fondamentaux qui régissent l'établissement et le développement d'une AUE performante ?

On ne peut fournir une recette universelle pour les tâches et techniques d'organisation spécifiques requises mais elles devront être définies de manière à être compatibles avec les conditions locales, et les objectifs et les attentes des participants. Cependant, les principes suivants sont en général bien acceptés comme base de l'organisation de groupes communautaires de gestion des ressources naturelles:

· S'assurer que les parties prenantes concernées puissent intervenir dans le processus.

· Chercher à identifier des représentants valables des agriculteurs et d'autres parties prenantes (comme les femmes, les utilisateurs non agricoles de l'eau, les notables du village, etc.)

· Si besoin est, faire appel à des animateurs pour faire avancer le processus d'organisation des AUE.2

· Les animateurs devraient jouer un rôle limité de facilitation de l'organisation. Ils n'assument pas la direction ni ne prennent de décisions et ne créent pas un rapport de dépendance vis-à-vis d'eux. Leur but est de contribuer à responsabiliser le groupe. Dans certains cas, ils pourront se limiter à présenter aux agriculteurs des solutions permettant l'établissement d'une AUE ou le développement de celle existante, laissant ensuite aux agriculteurs la tâche de s'organiser eux-mêmes. Dans des cas plus problématiques, une présence plus active pourrait être nécessaire.

· Les animateurs devraient encourager3 dès le début l'identification des groupes de membres et des problèmes de gestion, et décider s'il faut créer une nouvelle organisation ou se limiter à modifier celle existante.

· Le groupe devrait parvenir à un consensus quant au but fondamental de l'organisation, à la définition du service, aux politiques, aux règlements et aux procédures.

· Les visites et inspections de terrain, l'analyse participative des options, les apports de la vulgarisation, l'appui à la communication pour le développement et, si possible, l'expérimentation sont autant d'éléments qui contribueront au développement de l'organisation.

· Se charger d'une petite tâche préliminaire, comme un travail d'entretien ou de réparation, permettra de promouvoir l'engagement, notamment s'il s'agit d'une activité convenue et qu'elle prévoit un investissement de la part de membres éventuels de l'organisation.

· Lorsque le consensus est atteint, les statuts et les règlements devraient être rédigés, examinés et approuvés par toutes les autorités compétentes.

· Une cérémonie officielle d'inauguration, à laquelle participent des fonctionnaires de haut niveau et des hommes politiques, contribuera à mettre en évidence l'importance de l'organisation et le statut officiel qui lui a été conféré par les autorités.

2Dans le contexte de l'irrigation, un animateur est une personne qui travaille aux côtés des agriculteurs en vue d'organiser et/ou de développer une AUE et de l'aider à devenir fonctionnelle. On emploie parfois d'autres termes comme animateurs sociaux ou spécialistes du développement institutionnel.

3Les tâches de définition du service de l'eau et d'élaboration des critères régissant l'adhésion à l'AUE sont importantes et feront l'objet d'une analyse plus approfondie dans les sections qui suivent.

L'établissement et le développement des associations d'utilisateurs de l'eau relèveront des groupes suivants: i) animateurs oeuvrant avec les agriculteurs; ii) autres animateurs appartenant à la collectivité locale; iii) animateurs extérieurs provenant d'ONG; et iv) fonctionnaires publics tels que les vulgarisateurs ou les agents de communication pour le développement. La participation d'agriculteurs choisis et formés ou de membres de la collectivité locale offre l'avantage de tirer parti du savoir local, des réseaux sociaux existants et de chefs respectés par la collectivité. Ce système s'avérera normalement moins onéreux que le recrutement d'animateurs extérieurs à la collectivité. Cependant, les différences sociales, l'extrême pauvreté et l'analphabétisme rendront parfois difficile le recours à la population locale pour organiser les associations d'utilisateurs de l'eau. Les ONG, et les vulgarisateurs et les agents de communication pour le développement pourraient aussi contribuer mais leur vrai rôle serait de préparer la population locale à prendre en charge l'organisation.

Normalement, lorsqu'ils établissent une AUE, les représentants des agriculteurs et les animateurs communautaires préparent des documents et obtiennent l'approbation des membres de l'AUE pour les éléments et procédures suivantes:

· définition de la mission et textes fondamentaux relatifs à sa fondation;
· structure organisationnelle;
· politiques, règles et sanctions fondamentales;
· méthode de sélection des chefs;
· rapport entre l'AUE et les organisations extérieures;
· établissement officiel de l'organisation.

Quels sont les principales caractéristiques organisationnelles d'AUE réussies ?

Les caractéristiques intérieures que les textes attribuent le plus souvent aux associations d'utilisateurs de l'eau réussies sont examinées ci-dessous. La liste est fournie à titre d'orientation et vise à aider les planificateurs à établir des associations d'utilisateurs viables. Elles ne seront pas toutes nécessaires ni réalisables dans tous les endroits. Telles sont:

· une approche participative des procédures de prise de décisions;

· pleine maîtrise de l'infrastructure d'irrigation et droits éminents;

· plein contrôle exercé sur l'opération et l'entretien, le financement et le règlement des différends;

· responsabilité primaire en matière de financement de l'opération et de l'entretien, de la remise en état et de la modernisation;

· définition convenue et mesurable d'un service de l'irrigation;

· définition claire des membres de l'association;

· moyens d'exclure les non-membres et/ou mauvais payeurs de la jouissance des services;

· chefs élus et pouvant être démis de leurs fonctions par les utilisateurs de l'eau;

· politiques et règles claires sujettes à l'approbation des utilisateurs de l'eau.;

· administration, opérations et performance transparentes;

· redevances fondées sur un service réellement fourni et pratiques de comptabilité correctes;

· vérifications financières et techniques effectuées par le gouvernement ou d'autres entités indépendantes;

· pouvoir d'offrir d'importantes incitations et d'imposer de fortes sanctions pour assurer:

· le respect des utilisateurs de l'eau des règles et politiques convenues;

· la responsabilité des chefs de l'AUE vis-à-vis de l'assemblée des utilisateurs de l'eau.

· la responsabilité du personnel de gestion engagé vis-à-vis des chefs de l'AUE.

Cette liste peut être considérée comme l'aperçu d'une situation l'idéale. Certaines AUE pourraient être viables et efficaces sans toutes ces caractéristiques, mais l'expérience enseigne que plus elles en ont, plus elles auront de probabilités de réussir et de durer.

Comment se détermine l'adhésion à une AUE ?

C'est une question qui n'est pas toujours résolue très clairement. Si elle ne l'est pas, elle risque de créer des problèmes pour l'avenir. Les utilisateurs de l'eau consistent en général en propriétaires fonciers, fermiers, métayers, squatters, sous-locataires, etc. Devraient-ils tous avoir le droit de devenir membres l'AUE ? Qu'en est-il des propriétaires fonciers qui possèdent plusieurs parcelles dans le même périmètre ? Peuvent-ils bénéficier de plus d'un droit d'adhésion ? Devrait-il être permis à une seule personne par parcelle de devenir membre de l'association ? Ne devrait-il être consenti qu'à une seule personne par ménage de devenir membre et, dans ce cas, s'agira-t-il normalement de l'homme adulte du ménage (à moins que le chef du ménage, comme il advient souvent, soit la veuve) ?

Au niveau local, les agriculteurs et les animateurs devraient s'accorder sur ces questions avant l'établissement de l'AUE. Les animateurs devraient encourager la participation des femmes à ces débats car elles jouent souvent un rôle important dans l'agriculture et l'utilisation de l'eau, mais tendent à en être écartées, à moins d'un effort conscient accompli pour les y inclure.

Ci-après sont énoncés quelques principes de base qui paraissent être acceptés universellement:

· l'adhésion à une organisation devrait être définie par des règles claires indiquant les ayants droit au service de l'eau qui ont aussi l'obligation de le rétribuer;

· il pourrait être nécessaire de restreindre l'adhésion aux propriétaires fonciers ou aux fermiers relativement bien établis susceptibles de bénéficier du service de l'eau et de le rétribuer;

· normalement l'adhésion d'un seul membre d'un ménage est consentie.

L'adhésion à une AUE peut ou non entraîner le droit d'usage de l'eau. Elle inclut normalement le droit de vote aux réunions de l'AUE. La propriété foncière, les baux emphytéotiques, l'investissement dans le développement de l'infrastructure, le paiement de droits d'admission et l'engagement à observer les règles et à payer une redevance de service sont les conditions normales d'adhésion. Dans les cas où un propriétaire octroie un bail emphytéotique à un fermier pour cultiver une exploitation, l'adhésion pourrait être accordée soit au propriétaire soit au fermier. Ce choix peut faire l'objet d'un accord entre les deux parties concernées ou une règle de l'AUE pourrait être stipulée à cet effet. Les conditions d'adhésion devront être établies d'un commun accord par tous les utilisateurs de l'eau et être fondées sur des principes d'équité acceptés localement. Les AUE devraient avoir le pouvoir d'exclure les non-membres du service de l'irrigation ou d'annuler leur adhésion s'ils font un usage impropre de leurs privilèges où s'ils s'abstiennent régulièrement de payer pour le service.

ENCADRE 8 - LE COMITE D'AGRICULTEURS DU CANAL TERTIAIRE DE PALIGANJ, BIHAR, INDE: DES RESULTATS PROMETTEURS DANS UN CADRE PEU PROPICE

Il existe peu d'endroits où il serait plus difficile de préparer des agriculteurs à la prise en charge de la gestion de l'irrigation que les 12 000 hectares du canal tertiaire de Paliganj appartenant au périmètre situé au sud du Bihar en Inde. Cette région appauvrie a été définie par le gouvernement "socialement troublée" et y sévissent des tensions et des actes de violence entre castes et entre propriétaires fonciers et paysans sans terre. Les marges bénéficiaires relatives à l'agriculture irriguée sont extrêmement faibles et le risque d'échec des cultures est très élevé. La livraison de l'eau est irrégulière en raison partiellement des fréquentes manipulations de la distribution de l'eau et du manque d'entretien généralisé des canaux. A la fin des années 1980, le budget et le personnel du département des ressources en eau étaient si limités que le service ne pouvait entreprendre qu'un minimum de gestion au-dessous de la zone de la prise d'eau du canal tertiaire. Le personnel du service hésitait à pénétrer dans la zone en dessous de la prise d'eau car ils se sentaient menacés par des agriculteurs hostiles.

En 1988, l'Institut de la gestion des eaux et des terres du Bihar a entrepris un programme de recherche visant à améliorer la productivité de l'agriculture irriguée dans la zone de Paliganj en préparant les agriculteurs à assumer la gestion du canal et à améliorer l'opération et l'entretien. Pendant une période initiale de six mois, l'Institut s'est limité à écouter les agriculteurs, à observer les conditions régnantes et à évaluer l'efficacité de l'irrigation. L'équipe a progressivement identifié les perceptions des agriculteurs concernant les principaux problèmes d'irrigation et établi un bon rapport avec eux. D'après les agriculteurs, la contrainte majeure pesant sur l'efficacité de l'irrigation était la mauvaise distribution de l'eau le long du canal tertiaire.

L'équipe a tenu une série de réunions dans les villages bordant le canal et facilité la mise en place d'une organisation au niveau du canal tertiaire connue sous le nom de Comité des agriculteurs du canal tertiaire de Paliganj. Le comité consistait en représentants élus des villages. Il a rapidement formulé une stratégie pour améliorer la gestion de l'eau et l'entretien le long du canal. Des groupes chargés des canaux au champ ont ensuite été désignés au niveau du village pour donner un appui local à la stratégie et améliorer la gestion de ces canaux. De nouvelles procédures de rotation et d'entretien ont été établies, soutenues par des sanctions, ce qui a permis d'accroître considérablement le volume de l'eau disponible dans le tronçon en aval, et d'augmenter l'intensité de culture. Malgré l'absence d'autres facteurs de motivation, les agriculteurs dépendaient fortement de l'agriculture irriguée pour leur subsistance et percevaient de grandes possibilités d'amélioration grâce à la gestion collective du canal. Le comité n'a bénéficié que d'un appui limité de la part du service des ressources en eau mais n'a guère rencontré de résistance, et il continue à oeuvrer en tant qu'organisation relativement non officielle.


Il est reconnu de manière croissante que les femmes jouent souvent un rôle de premier plan dans l'utilisation et la gestion de l'eau, et elles devraient donc participer à la prise de décisions, même si leur époux est un membre officiel de l'AUE. Il pourrait être utile de prendre des mesures visant à encourager les femmes à participer aux réunions. Dans certains cas, il conviendrait d'accorder des droits de vote aux hommes aussi bien qu'aux femmes adultes d'un ménage pour certaines questions, telles que l'utilisation de l'eau et la répartition des activités collectives d'entretien auxquelles participent les hommes et les femmes.

Qu'entend-on par un service de l'eau convenu et mesurable ?

Souvent, les organismes d'irrigation publics ne spécifient pas le service qu'ils sont censés fournir. Ils tendent à opérer en fonction de règlements administratifs et de quotas, et sont parfois corrompus par des influences locales. Il est d'une importance capitale que les programmes de transfert de la gestion profitent de la réforme pour définir clairement le service de l'eau que le nouvel organisme entend fournir. C'est là le premier pas vers la conversion d'un organisme d'irrigation en une entité responsable vis-à-vis de ses clients, les agriculteurs.

Une définition du service devrait comprendre les quatre éléments suivants:

· la superficie intéressée par le service de livraison et d'évacuation de l'eau;
· la volume d'eau à détourner et à livrer;
· le moment où auront lieu la livraison et l'évacuation;
· le mode de paiement du service de l'eau.
La définition du service devrait être concise. Les détails touchant les procédures et les objectifs seront traités par la suite dans des manuels et des rapports sur l'opération et l'entretien, le cas échéant. La définition du service devrait délimiter clairement la zone qui a droit au service ainsi que la base servant à déterminer cette zone. Si différents types de services sont fournis aux unités il faudra le spécifier.

La quantité d'eau à détourner et à livrer peut être définie en termes de catégories, à savoir la part, le pourcentage ou le droit. Elle peut être définie par rapport à la demande et qualifiée en fonction des contraintes d'approvisionnement. Dans la mesure du possible, elle peut être définie en termes de volume. Le moment de la fourniture du service peut être défini par rapport au calendrier cultural et aux conditions d'approvisionnement ou le service peut être fourni sur demande. Le paiement devra être en relation avec la fourniture du service. Il peut être calculé en fonction du volume ou de la part d'eau livrée, de la zone desservie, de la saison ou annuellement.

La définition du service devrait être:

· mesurable;
· claire et transparente pour les agriculteurs;
· convenue par l'assemblée des agriculteurs.
Ci-dessous figure un exemple de définition de service pour un périmètre d'irrigation à petite échelle:
L'Association des utilisateurs de l'eau de Bima fournira les services de détournement de l'eau du déversoir de Bima, situé dans la municipalité de Bima, Etat X, et sa livraison aux terres agricoles où elle servira à des fins d'irrigation (NB: une carte indiquant la délimitation de la zone desservie devrait être jointe). L'eau sera livrée pendant la première et la deuxième campagne agricole jusqu'au volume maximum du droit d'eau (à savoir, un quart du débit du cours d'eau au déversoir) et sera réduit si la demande est inférieure à ce volume. L'association fournira aussi un service de drainage des terres agricoles irriguées par l'eau détournée du déversoir de Bima.

L'eau est allouée par l'association strictement sur la base de la taille de la parcelle, sauf si des difficultés de livraison exigent une irrigation par rotation. Pendant l'irrigation par rotation, l'eau sera allouée à des unités de rotation en fonction d'un calendrier fixe établi à partir du tronçon en aval des canaux et en remontant vers l'amont.

Les agriculteurs paieront une redevance pour le service calculée à partir du montant total du budget annuel estimé de l'association divisé proportionnellement par la superficie de la zone de la parcelle et le nombre de campagnes où le service a été fourni.

Une fois que le service de l'eau aura été clairement défini, l'AUE devra indiquer ses autres services, y compris l'entretien, le règlement des différends et, si possible, tout autre service de soutien à l'agriculture (comme analysé au chapitre 3). Lors de la résolution des questions de politique de l'étape de la planification, on devra avoir décidé, du moins au niveau national ou de l'Etat, si l'AUE sera une entité de gestion de l'irrigation à objectif unique ou si elle est autorisée à assumer d'autres fonctions aussi, telles que la fourniture de services agricoles. Si cette option n'a pas été définie dans la politique de TGI, les AUE nouvellement établies pourraient devoir décider si elles entendent continuer à se consacrer uniquement au service de l'eau ou si elle veulent devenir des organisations à buts multiples qui fournissent aussi des services agricoles et autres. Cette décision devra être formulée clairement dans la définition de la mission et dans les règlements de l'organisme, comme décrit ci-dessous.

Fonctions d'un conseil d'administration d'une AUE

Pour les AUE qui ont comme fournisseur du service de l'eau un organisme séparé, le conseil d'administration assumera normalement différentes responsabilités administratives vis-à-vis de ce fournisseur. Les tâches typiques du conseil d'administration d'une AUE sont les suivantes:

· préparer les documents juridiques de constitution (ces documents ne seront pas toujours nécessaires si l'organisme est une division de l'AUE);

· déterminer la structure organisationnelle du FSE et engager le directeur général ou le directeur exécutif;

· fournir l'orientation nécessaire au directeur du FSE en matière de préparation d'une politique du personnel et de description des tâches;

· fournir des conseils au directeur concernant le recrutement du personnel du FSE;

· fournir des avis sur le plan d'opération et d'entretien à soumettre pour approbation;

· donner au directeur des conseils sur la mise au point des installations et l'achat du matériel et de l'équipement nécessaires; fournir des avis au directeur pour la préparation d'un budget et d'un système de gestion financière à approuver;

· fournir des avis au directeur en matière d'évaluation des besoins de formation;

· fournir des avis au directeur pour la mise en place d'un système de suivi et d'évaluation, et d'information sur la gestion.

Les membres du conseil d'administration des AUE ne savent pas toujours que ces responsabilités leur incombent. Ce fait devait être énoncé clairement dans les règlements de l'AUE et une formation devrait être dispensée aux nouveaux membres du conseil d'administration sur la manière de remplir leurs tâches de surveillance afin de garantir la qualité du contrôle mais sans aboutir à une micro-gestion par des non-spécialistes qui ont parfois des motivations politiques. C'est là une question importante et il faudra lui accorder une attention spéciale dans les activités d'organisation et de formation.

CHAPITRE 11 - QUESTIONS QUE DEVRONT PRENDRE EN COMPTE LE FSE ET LES AUE APRÈS LE TRANSFERT


Qu'entraîne l'établissement du fournisseur du service de l'eau ?
Quels changements seront nécessaires au niveau des opérations après le transfert ?
Quels changements seront nécessaires au niveau de l'entretien ?
Comment le FSE peut-il obtenir le matériel nécessaire ?
Quels changement sont-ils nécessaires au niveau des redevances pour l'eau et de la gestion financière ?

RÉSUMÉ

Après l'établissement de l'AUE la première tâche de ses directeurs sera de désigner le fournisseur du service de l'eau (FSE). Le FSE pourrait consister en quelques individus qui accomplissent des tâches spécifiques (comptabilité, distribution de l'eau, etc.) ou en un bureau relativement important doté d'un personnel spécialisé. Les directeurs de l'AUE devront être à même de diriger le fournisseur du service. Cependant, il est important que les membres du conseil d'administration de l'AUE n'inhibent pas la capacité de gestion du directeur général du FSE en s'interposant et en donnant des instructions directement au personnel subalterne.

Parfois, après que la gestion a été transférée à une organisation d'agriculteurs, ces derniers identifient de nouvelles priorités en matière d'agriculture ou de service de l'irrigation. Les AUE devraient solliciter l'avis d'un organisme ou d'ingénieurs du secteur privé et des services de vulgarisation agricole pour déterminer la combinaison de procédures opérationnelles qui favorisera le mieux la réalisation de leurs nouveaux objectifs. Il est important que l'AUE s'écarte de la pratique antérieure de l'entretien différé. Il faudrait dispenser une formation spéciale concernant les avantages d'un entretien préventif et les méthodes relatives aux directeurs des AUE et au personnel du FSE par le biais de techniciens provenant d'organismes d'irrigation ou d'autres FSE locaux expérimentés.

L'une des premières priorités dont il faut tenir compte en préparant l'AUE à prendre en charge la gestion est d'assurer qu'elle dispose du matériel nécessaire pour entreprendre un entretien ordinaire et des améliorations progressives. Le gouvernement devra décider ce qu'il entend faire de son matériel d'opération et d'entretien dans les système transférés. Souvent une partie de ce matériel est fournie à l'AUE.

La gestion financière est probablement le défi le plus complexe et le plus délicat que la plupart des nouvelles AUE doivent relever. Les risques sont nombreux et il faudra un niveau élevé de compétence, de discipline, de vigilance et de transparence. Certaines pratiques de gestion sont analysées à cet égard. Le TGI ne sera efficace que s'il existe un engagement politique résolu à appuyer la viabilité financière locale des périmètres d'irrigation.


Les modèles organisationnels de base relatifs à l'association des utilisateurs de l'eau et au fournisseur du service de l'eau devront être établis pendant l'étape de la réforme consacrée à l'analyse des politiques (chapitre 6). Cependant, dans certains cas, le type de fournisseur du service de l'eau peut varier au sein d'un pays et n'être déterminé au niveau local que pendant la mise en oeuvre.

Qu'entraîne l'établissement du fournisseur du service de l'eau ?

Après l'établissement de l'AUE, la première tâche de ses directeurs sera de désigner le fournisseur du service de l'eau. Suivant l'échelle et la complexité du périmètre, il s'agira soit de recruter quelques individus seulement soit de mettre en place un bureau ou une entreprise dotée d'un personnel spécialisé. Dans ces deux cas, le directeurs de l'AUE devront être à même de diriger le fournisseur. Il s'agira de fournir des directives pour l'application de l'accord de service, préparer des plans saisonniers, adopter de nouvelles politiques et procédures et réglementer le service. Les directeurs de l'AUE devront être pleinement autorisés à recruter et à licencier les travailleurs et à veiller sur toutes les questions relatives au personnel du FSE.

Les tâches liées à l'établissement d'un FSE dépendront largement du type de fournisseur du service de l'eau en jeu. Deux types sont relativement simples: le fournisseur incorporé dans la structure de l'AUE et le fournisseur sous-traité. Lorsque l'AUE se charge de la direction et la gestion, elle ne devra désigner ou recruter qu'un petit nombre de personnes pour réaliser directement la distribution de l'eau, le nettoyage des canaux et le recouvrement des redevances pour l'eau. Quelque simples que soient ces opérations, l'AUE devra établir clairement les tâches à accomplir et maintenir sa capacité de licencier les travailleurs inefficaces.

Parfois l'AUE pourrait ne pas être active pendant toute l'année (pendant l'hiver, par exemple, quand l'irrigation n'est pas nécessaire). Elle pourrait aussi manquer du capital servant à acheter le matériel destiné à l'opération et l'entretien ou trouver trop onéreux de recruter des travailleurs à temps plein pour le FSE s'ils ne travaillent que pendant quelques mois par an. Dans ces cas, et lorsqu'existe un marché pour les fournisseurs des services d'opération et d'entretien, les AUE pourraient décider de sous-traiter les tâches suivantes:

· préparation d'un contrat qui énonce clairement toutes les tâches de gestion, ainsi que les termes et les conditions relatifs (y compris pour la prolongation ou la cessation du contrat);

· désignation des caractéristiques requises et des critères de sélection, à savoir compétences et expérience, disponibilité, possession de certains matériels, respect des principes de l'AUE, etc.;

· invitation à participer à des appels d'offres;

· mesures strictes assurant une sélection transparente et fondée sur le mérite, en harmonie avec les critères de sélection;

· assurance que l'entrepreneur choisi comprenne les principes de l'AUE en matière de responsabilité, de lignes de communication, de protocole vis-à-vis des agriculteurs et du niveau de pouvoir discrétionnaire dont ils jouiront pour résoudre des problèmes de terrain;

· suffisamment de moyens pour payer l'entrepreneur une fois le travail achevé.

Il est important que les membres du conseil d'administration de l'AUE n'inhibent pas la capacité de gérer du directeur général du FSE en s'interposant et en donnant directement des instructions au personnel subalterne. Le conseil d'administration de l'AUE devrait se centrer sur la politique et la surveillance, et traiter directement avec le directeur général. Autrement il affaiblira la responsabilité du personnel du FSE vis-à-vis du directeur et de celui-ci vis-à-vis du conseil d'administration.

Quels changements seront nécessaires au niveau des opérations après le transfert ?

Parfois, après le transfert de la gestion à une organisation d'agriculteurs, ces derniers identifient de nouvelles priorités en matière d'agriculture ou d'irrigation. Si les organismes publics n'étaient pas en mesure d'offrir les incitations nécessaires pour accroître la productivité de l'eau, les AUE pourraient maintenant les fournir. Il en est ainsi normalement si elles ont assumé la responsabilité principale du financement de l'irrigation, lié la livraison du service à sa rétribution, établi des priorités en fonction d'intérêts collectifs et obtenu la pleine maîtrise de la gestion de l'eau au sein de la zone desservie. Ci-dessous figurent des exemples des nouvelles priorités que les AUE pourraient choisir:

· étendre la zone irriguée;
· améliorer l'équité de la distribution de l'eau;
· réduire le volume d'eau livré par hectare;
· accroître l'intensité de culture par une meilleure efficacité de l'irrigation;
· accroître la production agricole par unité d'eau livrée.
Ces priorités pourraient exiger des travaux de nivellement ou de façonnage du terrain, l'application de restrictions sur le choix des cultures ou le zonage, de nouvelles pratiques et techniques d'épandage de l'eau, un nouveau calendrier de livraison de l'eau et un mode différent de corréler le paiement du service avec sa livraison. Les AUE devraient demander l'avis d'ingénieurs appartenant à l'organisme d'irrigation ou du secteur privé, et des services de vulgarisation agricole afin d'établir la combinaison de procédures opérationnelles la plus apte à favoriser la réalisation des nouveaux objectifs.

Quels changements seront nécessaires au niveau de l'entretien ?

Avant le transfert, le gouvernement était probablement responsable de l'entretien des canaux et du contrôle des structures. Les organismes d'irrigation publics mal payés ne s'engagent pas normalement dans l'entretien préventif. Les dommages, la dégradation et l'envasement se conjuguent au fil du temps jusqu'au moment où le problème est suffisamment grave pour justifier l'investissement de fonds spéciaux, tels que ceux affectés à la remise en état et à la modernisation.

Après le transfert, le gouvernement pourrait interrompre l'octroi des crédits destinés à l'entretien. Les agriculteurs pourraient aussi être forcés de financer la future remise en état. Dans ces cas, il est important que l'AUE abandonne la pratique précédente de l'entretien différé. Les agriculteurs se rendent compte généralement que retarder le moment d'entreprendre de petites réparations ne fait qu'entraîner des réparations plus importantes et plus coûteuses par la suite. Il faudrait que les techniciens des organismes d'irrigation ou le personnel d'autres FSE locaux expérimentés dispensent aux directeurs de l'AUE et au personnel du FSE une formation spéciale sur les méthodes d'entretien préventif et leurs avantages. Ces techniciens devraient eux-mêmes recevoir une formation en matière d'entretien préventif avant de tenter de former le nouveau FSE.

Comment le FSE peut-il obtenir le matériel nécessaire ?

Lorsqu'on prépare le FSE à prendre en charge la gestion il est impératif de s'assurer qu'il dispose du matériel nécessaire pour entreprendre les opérations d'entretien ordinaires et apporter des améliorations progressives. Certaines tâches occasionnelles exigeront des compétences et du matériel spécialisés. Pour cela il pourrait convenir d'engager des entrepreneurs plutôt que de chercher sur place les experts et le matériel.

La première question qui se pose est la suivante: quel est le matériel appartenant au gouvernement et situé sur le périmètre qui devrait être transféré à l'AUE ? Avec l'avis technique de l'organisme d'irrigation et en consultation avec le conseil d'administration de l'AUE, le FSE devra évaluer ses besoins en matériel et voir s'il peut les satisfaire avec le matériel disponible après le transfert. Le gouvernement devra décider ce qu'il entend faire de son matériel d'opération et d'entretien dans les périmètres dont la gestion est transférée. Il faudra pour ce faire répondre aux questions suivantes:

· Le matériel devra-t-il être transféré à titre gratuit, loué ou vendu à l'AUE ?

· Devra-t-on transférer la propriété ou les seuls droits d'usage ?

· Si le matériel est vendu faudra-t-il en fixer les prix (coût de remplacement, valeur loyale et marchande, prix de faveur, prix nominal) ?

· Si le matériel est vendu, le paiement se fera-t-il en versements échelonnés; sera-t-il assujetti à un impôt ?

· Quel recours pourra intenter gouvernement au cas où les AUE ne paient pas le prix du matériel ?

· Quelle formation est nécessaire pour utiliser correctement le matériel ?

ENCADRÉ 9 - EXEMPLE D'UNE COMPAGNIE D'ENTRETIEN FINANCEE CONJOINTEMENT PAR LES UTILISATEURS DE L'EAU ET LE GOUVERNEMENT

Au cours du processus de transfert au Pérou, des débats ont eu lieu avec l'organisation des utilisateurs de l'eau du périmètre d'irrigation de Chancay-Lambayeque en vue de créer une compagnie d'opération et d'entretien. Le capital principal de la compagnie (ETECOMSA) consistait partiellement dans le matériel d'irrigation cédé par le gouvernement (provenant de travaux de construction précédents) et partiellement en espèces fournies par les utilisateurs par le biais d'un système de collecte des redevances spécial. La compagnie appartient maintenant aux utilisateurs et son capital dépasse 1 million de dollars EU. Elle joue depuis plusieurs années et avec succès le rôle de FSE pour le périmètre d'irrigation.


Quels changement sont-ils nécessaires au niveau des redevances pour l'eau et de la gestion financière ?

A l'avenir trois forces s'exerceront probablement sur les AUE pour les inciter à s'engager davantage dans des pratiques de gestion financière normales. La première est le besoin d'une participation plus agressive aux marchés (intrants, produits agricoles, etc.) de l'agriculture irriguée, le deuxième est la concurrence pour l'eau croissante qui s'instaurera entre les secteurs encore plus commercialisés (industrie, approvisionnement urbain en eau et énergie) et le troisième est l'intensification du processus de TGI qui sera promu par l'élargissement ou la fédération des unités dévolues.

Lorsque les niveaux d'éducation des participants sont relativement élevés (jusqu'au niveau de l'enseignement secondaire) et que des structures appropriées de contrôle et de mesure de l'eau sont en place, il sera préférable de faire appel à des pratiques de gestion financière plus complexes. Cela devrait se faire au moment de l'établissement du FSE afin d'assurer dès le début des niveaux élevés d'efficacité et de responsabilité. Ci-dessous figurent des pratiques financières qui pourraient convenir dans ce type de milieu:

· Organiser la formation à des pratiques financières convenues du trésorier de l'AUE et du directeur financier du FSE (le cas échéant). En outre, fournir quelques cours de formation en matière de comptabilité à tous les directeurs de l'AUE et au personnel administratif du FSE.

· Assurer que les transactions financières ne sont font qu'en présence d'au moins deux témoins autorisés et exiger un compte rendu de la transaction.

· Mettre les registres financiers du FSE à la disposition des agriculteurs pour inspection.

· Lier le montant des redevances pour l'eau au budget des FSE.

· Fixer le montant des redevances proportionnellement au volume d'eau livrée.

· Faire appel à un expert-comptable indépendant qui travaillera avec l'AUE et le FSE.

· Gérer un fonds de réserve à long terme destiné à de futurs cas d'urgence, de remise en état et de modernisation (comme mentionné au chapitre 4).

Dans certains cas, comme au Mexique, en Colombie, en Chine et aux Etats-Unis, les agriculteurs avaient l'habitude de payer les redevances pour l'eau au gouvernement avant le transfert. Après ce dernier, c'est l'AUE qui s'est chargée du recouvrement des redevances. Seuls des ajustements dans les taux ou les mécanismes d'attribution du coût étaient nécessaires. Dans d'autres cas, comme en Indonésie ou au Sri Lanka, les agriculteurs n'avaient pas versé de redevances au gouvernement avant le transfert mais ce sont les associations d'utilisateurs de l'eau qui ont décidé après le transfert si elles voulaient ou non imposer des redevances. Lorsque la zone de service transférée est très limitée, il pourrait ne pas être nécessaire de le faire, la mobilisation périodique de main-d'oeuvre ou la collecte de matériaux, comme le sable et les pierres, pouvant suffire.

ENCADRE 10 - ATTITUDES DES AGRICULTEURS CONCERNANT LA VIABILITE A LONG TERME DE L'INFRASTRUCTURE D'IRRIGATION: EXEMPLES PROVENANT DES ETATS-UNIS ET DU PEROU

Trois directeurs généraux de grands périmètres d'irrigation aux Etats-Unis ont été interrogés. Ils étaient tous des ingénieurs et se plaignaient du fait que le conseil d'administration de leur AUE exerçait son influence pour maintenir les redevances pour l'eau à un niveau si bas que l'AUE retardait les travaux d'entretien et laissait se dégrader l'infrastructure. Un agriculteur informateur a admis en privé que la plupart des agriculteurs ne s'intéressaient pas aux coûts à long terme qu'entraîne l'absence d'entretien.

Lors d'une réunion au Pérou d'une AUE, un directeur de FSE a proposé aux membres une redevance pour l'eau fondée sur la prédiction des besoins d'opération et d'entretien de l'année suivante. Sans se préoccuper des avantages techniques de la proposition, les agriculteurs ont voté pour une réduction considérable de la redevance afin de la ramener à des niveaux plus tolérables. Cet épisode a eu lieu dans un milieu où les agriculteurs invitent souvent les politiciens à faire pression sur l'organisme d'irrigation pour qu'elle finance les réparations de leur périmètre.

Le renvoi de l'entretien par les agriculteurs qui, par la suite, supplient les décideurs à obtenir que les réparations soient financées par le gouvernement est une pratique très répandue dans de nombreux pays.


Dans des endroits où le niveau d'éducation des agriculteurs est faible et où les structures de contrôle et de mesure de l'eau sont rares on inexistantes, il faudra autant que faire se peut simplifier et rendre transparent le mode de rétribution du service et la gestion financière en général. Les agriculteurs de ces zones sont rarement habitués à traiter avec un trésorier de groupe permanent. Ils pourraient se montrer réticents à confier leur argent à la nouvelle organisation. Il pourrait être plus sage pour les AUE de ces zones de réduire au minimum le nombre de transactions financières nécessaires par des mesures telles que la mobilisation de la main-d'oeuvre parmi les membres de l'AUE pour les travaux d'entretien. Lorsqu'il est nécessaire d'exiger des redevances pour l'eau, les paiements peuvent être calculés sur la base de critères simples, facilement compris et mesurables, tels que la taille de la parcelle irriguée, le type de culture, l'intensité de culture et/ou le nombre d'arrosages appliqués au cours d'une campagne. Dans de tels cas, il faudra du temps pour que les agriculteurs aient confiance dans la gestion financière des nouvelles AUE.

La gestion financière est sans doute le défi le plus difficile et le plus délicat que les nouvelles AUE sont appelées à relever. Les risques sont nombreux et il faudra faire preuve d'un niveau élevé de compétence, de discipline, de vigilance et de transparence. Ci-après est décrite une situation typique ou de nouvelles organisations d'agriculteurs cherchent à établir et à recouvrer les redevances annuelles pour l'eau:

· Le FSE estime le coût total de l'opération, de l'entretien et de l'administration pour l'année suivante.

· Le coût total est divisé en parts ou unités sur la base desquelles sont calculées les redevances (hectare ou mètre cube, par exemple).

· Le FSE soumet la redevance proposée pour l'année suivante au conseil d'administration de l'AUE ou à l'assemblée générale de l'AUE pour approbation.

· L'AUE rejette souvent la proposition initiale qu'elle estime trop élevée et approuve un montant plus faible.

· En pratique certains agriculteurs pourraient refuser de payer la totalité ou une partie de la redevance.

Les directeurs des AUE tendent parfois à exercer leur influence sur le FSE pour qu'il maintienne les redevances pour l'eau aussi basses que possible, au point parfois de retarder les travaux d'entretien jusqu'au moment où l'infrastructure sera dégradée. Les agriculteurs sont souvent plus intéressés par une économie immédiate que par les coûts qu'entraînera l'entretien différé. Ils tendent à penser qu'ils seront capables d'exercer une pression sur le gouvernement pour qu'il se consacre à nouveau à l'avenir aux réparations, aux dommages urgents ou à la remise en état.

Il est probable que le FSE aura une perspective plus technique que le conseil d'administration de l'AUE dont l'orientation sera plutôt politique. Le gouvernement pourrait devoir instaurer des incitations pour encourager les AUE à éviter les retards dans l'entretien. La solution la plus logique (mentionnée au chapitre 4) serait que le gouvernement lie de droit de l'AUE aux subventions (pour des travaux spéciaux d'entretien, d'assistance d'urgence et de remise en état) à sa conformité avec des normes convenues d'entretien et la constitution d'un fonds de réserve. Le gouvernement peut établir une commission technique et fournir des techniciens et des experts financiers ou les engager et agir en qualité de garant d'un fonds de réserve à long terme.

Une solution logique au problème du non-paiement par les agriculteurs des redevances pour l'eau est de priver du service tous ceux qui sont en retard dans leur paiement. Cette mesure exige un niveau élevé de discipline politique. Un système extrêmement efficace utilisé dans plusieurs périmètres d'irrigation au Pérou est le "paiement contre livraison"; chaque arrosage doit être payé avant que l'eau ne soit effectivement livrée. Les AUE des Etats-Unis ont le pouvoir juridique d'appropriation et de revente des exploitations appartenant à des propriétaires qui n'ont pas versé les redevances pour l'irrigation après plusieurs campagnes. Dans d'autres cas, en Amérique latine et dans certaines parties de l'Asie par exemple, l'interruption de l'approvisionnement en eau est une sanction fréquemment infligée. Cependant l'engagement politique vis-à-vis de ces sanctions est souvent faible et le non-paiement des redevances pour l'eau est très répandu dans de nombreux pays.

Les planificateurs devront prendre conscience des problèmes qui peuvent se présenter lors des stades de développement des AUE et des mesures rigoureuses devraient être prises par les animateurs et les AUE pour éviter de graves problèmes. Le TGI ne saurait être efficace sans un engagement politique résolu à appuyer la viabilité financière locale des périmètres d'irrigation.

CHAPITRE 12 - AMÉLIORER L'INFRASTRUCTURE D'IRRIGATION


L'amélioration de l'infrastructure devrait-elle être incluse dans un programme de transfert de la gestion ?
Quel rôle souhaite jouer le gouvernement dans la remise en état de l'infrastructure d'irrigation ?
Comment planifier la remise en état de l'infrastructure
Comment identifier les améliorations et leur donner un ordre de priorité conformément aux objectifs du transfert ?
Résultats de l'étape 4: planification et mise en oeuvre

RÉSUMÉ

Le présent chapitre examine la question de l'inclusion ou non de la remise en état de l'infrastructure dans le programme de TGI. Il ne s'agit pas de décider si elle doit se faire mais plutôt si elle est nécessaire et comment la réaliser de manière à appuyer le but principal du transfert, à savoir créer des organismes d'usagers de l'eau autosuffisants pour remplacer le rôle du gouvernement dans la gestion des périmètres d'irrigation.

Les trois principes fondamentaux relatifs à l'amélioration de l'infrastructure et au transfert de la gestion sont probablement les suivants:

· L'association d'utilisateurs de l'eau devra identifier les travaux priorités et leur donner un ordre de priorité, et prendre des décisions financières.

· L'organisme d'irrigation devrait faciliter le processus sans le diriger et fournir une assistance technique.

· L'amélioration future de l'infrastructure devrait donner l'exemple d'une démarche progressive guidée par l'agriculteur plutôt que l'intervention entièrement subventionnée et non participative typique des attitudes du passé.

Il faudrait dresser un inventaire de tous les périmètres qu'on envisage de transférer, et les planificateurs devraient obtenir des données sur leur état de fonctionnement avant le transfert. Ils devront aussi réunir les recommandations des AUE concernant les améliorations nécessaires, le cas échéant, simultanément au programme de transfert. Une fois les priorités identifiées par l'AUE, une étude conjointe gouvernement- agriculteurs devrait être réalisée pour évaluer la faisabilité technique et financière des travaux envisagés.

Il est essentiel que le processus de remise en état mette en évidence la future relation qui s'instaurera entre l'AUE et le gouvernement. L'AUE devrait établir l'ordre de priorité à donner aux travaux qui seront réalisés et les financer conjointement avec le gouvernement. Elle devra en outre constituer un fonds de réserve pour les futures améliorations.


L'amélioration de l'infrastructure devrait-elle être incluse dans un programme de transfert de la gestion ?

Dans un programme de transfert, l'état de l'infrastructure matérielle des périmètres d'irrigation est très important car, dans de nombreux cas, la détérioration due au manque d'entretien et à d'autres raisons connexes pourrait avoir eu des effets préjudiciables. La remise en état et l'amélioration des milliers, voire des millions, d'hectares faisant l'objet d'un programme de transfert a de profondes répercussions au plan financier car ces travaux coûtent rarement moins de 1 500 dollars EU l'hectare. Chaque gouvernement devra examiner la question avec le maximum d'attention avant de s'engager.

Etant donné que la plupart des programmes de transfert sont réalisés dans le cadre de réformes économiques, les gouvernements hésitent normalement à entreprendre des programmes de remise en état de grande envergure. En général, la remise en état est limitée à certaines situations ou conditions spéciales qui devront faire l'objet d'une définition minutieuse avant le démarrage du processus.

Même si les investissements dans la remise en état sont modestes ils pourraient servir à symboliser une nouvelle approche de la gestion de l'irrigation. La promotion de l'amélioration progressive de l'infrastructure et les décisions prioritaires prises par les AUE appuieront le but principal du transfert, à savoir établir des organismes d'utilisateurs de l'eau autosuffisants pour remplacer le gouvernement dans la gestion des périmètres d'irrigation.

Quel rôle souhaite jouer le gouvernement dans la remise en état de l'infrastructure d'irrigation ?

Le gouvernement peut adopter trois positions en matière de financement des travaux de remise en état:

1. Une position de négociation où il traite individuellement avec les AUE concernées pour établir les engagements financiers que chaque partie prendrait relativement aux travaux de remise en état. Comme dans tout processus de négociation, les règles qui le gouvernent sont souples (dans un cadre donné).

2. Remise en état totale avant le transfert: en raison des contraintes financières cette solution est très improbable bien qu'elle ait été appliquée dans quelques cas.

3. La troisième position est celle de la définition de certaines règles gouvernant l'utilisation des subventions publiques (ou prêts à des conditions de faveur) qui seront octroyées sous certaines conditions aux AUE en vue des travaux de remise en état.

La troisième option est certainement la plus prometteuse aux fins de renforcer le processus de transfert mais, en tout état de cause, les gouvernements devront définir leur position avant d'entreprendre une planification plus détaillée de leurs activités dans ce domaine.

1. Financer la remise en état comme outil de négociation pour promouvoir le transfertbe a pre-requisite for management transfer ?

Les agriculteurs auxquels sont offerts des périmètres en mauvais état soutiendront qu'ils sont incapables de les gérer et qu'ils ne pourront mobiliser les crédits nécessaires non seulement pour l'opération et l'entretien mais aussi pour la remise en état. Ils pourraient même s'opposer au transfert. Certaines AUE essaieront d'exercer des pressions sur le gouvernement pour qu'il entreprenne la remise en état ou l'amélioration des périmètres d'irrigation avant le transfert. Par ailleurs, le gouvernement pourrait déclarer qu'il ne dispose pas des fonds nécessaires et que le périmètre s'est dégradé parce que les agriculteurs n'ont pas payé les redevances dues. Ces situations conflictuelles se manifesteront le plus probablement dans les périmètres d'irrigation où les coûts d'opération sont particulièrement élevés et/ou les agriculteurs ont rarement les ressources servant à payer les redevances. Dans ces cas, le financement de certains des travaux de remise en état les plus urgents peuvent représenter un levier important pour inciter les AUE à accepter plus volontiers un transfert qui ne leur paraît pas si attrayant.

Toutefois, cette approche axée sur la négociation (qui a été adoptée très largement au Mexique) doit être appliquée avec beaucoup d'attention, en définissant clairement les bases d'une négociation éventuelle. Au moment où les agriculteurs s'aperçoivent que les fonctionnaires publics acceptent de financer certains travaux de remise en état, ils trouveront toujours quelque question à soulever lors de la négociation. Un important paramètre qui pourrait contribuer à déterminer où seront affectées les subventions est la capacité des agriculteurs de payer les redevances pour l'eau d'irrigation. Les périmètres où cette capacité est normalement élevée devraient être exclus de telles négociations.

ENCADRE 11 - EXEMPLE DE LA FAÇON DONT LA REMISE EN ETAT PEUT SUSCITER LA SPECULATION ET LA DEPENDANCE PARMI LES AGRICULTEURS

Une visite faite pendant le stade pilote de mise en oeuvre du Programme de transfert de la gestion de la petite irrigation dans une zone montagneuse de l'ouest de Sumatra en Indonésie a révélé que le périmètre couvrait moins de 100 hectares et que son transfert aux AUE était en cours. Ce périmètre faisait l'objet d'une remise en état aux frais du gouvernement. Les agriculteurs avaient été invités à préparer une liste des principales réparations et améliorations qu'ils jugeaient nécessaires avant le transfert. Les directeurs de l'AUE ont dressé une liste d'environ 15 points. Le troisième point de la liste a suscité une certaine attention. Les agriculteurs voulaient que le gouvernement haussent la digue du canal principal d'environ 20 cm sur une longueur de 300 mètres près de la prise d'eau. La raison de cela était que le gouvernement avait construit cette digue environ 11 ans auparavant et qu'entre-temps et le canal s'était rempli de 10 à 15 cm de vase. Les agriculteurs ont affirmé que si on élevait la digue de 20 cm ils pourraient hausser le niveau de l'eau entrant dans la prise d'eau sans avoir besoin d'enlever la vase pendant encore 12 ans.


2. La remise en état avant le transfert

En vertu du principe que l'on ne peut s'attendre à ce que les agriculteurs prennent en charge la gestion d'un système d'irrigation dont le fonctionnement est entravé par son état de dégradation, l'organisme d'irrigation pourrait dans certains cas promouvoir une politique de remise en état avant le transfert. Suivant un autre raisonnement, ces réparations réduiront le coût futur de l'entretien à la charge des agriculteurs. En réalité il s'agit souvent d'une tactique visant à gagner du temps plutôt que d'une intention réelle d'intervenir, car la remise en état totale des périmètres d'irrigation exige des ressources dont la mobilisation ralentira certainement le processus.

Une politique malavisée de remise en état avant le transfert des périmètres d'irrigation, tout en étant difficile à justifier du point de vue financier, pourrait également compromettre la promotion de la gestion autonome. Certaines des conséquences préjudiciables éventuelles sont décrites ci-dessous.

Si le gouvernement patronne la remise en état avant le transfert, les agriculteurs auront encore davantage l'impression que le périmètre lui appartient. Les mauvaises pratiques habituelles se répéteront probablement. Les agriculteurs seront encore plus convaincus que le gouvernement entend poursuivre le financement de la remise en état. Ils seront alors encouragés à retarder l'investissement dans les travaux d'entretien, dans l'espoir que ces coûts pourront être attribués au gouvernement à l'occasion d'un projet futur de remise en état. Le périmètre risque ainsi, comme avant le transfert, de se dégrader rapidement à nouveau. Cependant, l'hypothèse du financement par le gouvernement de futurs travaux de remise en état peut s'avérer fallacieuse, et les agriculteurs risqueront de se heurter à de graves problèmes à l'avenir.

Les travaux de remise en état et d'amélioration entrepris sans la pleine participation de l'organisme d'utilisateurs de l'eau pourraient aller à l'encontre du but recherché ou ne pas être pleinement exploités par les bénéficiaires.

· Le coût du programme sera bien supérieur à celui d'une solution de rechange fondée, par exemple, sur un investissement conjoint de l'AUE et du gouvernement.

· La remise en état avant le transfert pourrait retarder la réforme en raison de la limitation des ressources et de la lenteur des procédures administratives nécessaires à la réalisation de ces travaux. Ces retards pourraient dissuader les organisations locales de participer activement au processus. En outre, si la mise en oeuvre de la réforme se prolonge elle pourrait être victime de l'apparition de nouvelles tendances politiques contraires au transfert, ce qui pourrait compromettre le programme.

3. Le financement conjoint et progressif des améliorations de l'infrastructure

Un programme de transfert altérera considérablement la relation entre le gouvernement et les utilisateurs de l'eau car ces derniers deviendront des partenaires du gouvernement et occuperont, pour ainsi dire, "le siège du conducteur" en ce qui concerne la gestion de l'eau pour l'agriculture. La dépendance des agriculteurs vis-à-vis du gouvernement devrait décroître sensiblement. Il faudra des signaux forts pour réorienter tant les agriculteurs que le gouvernement. Réalisée correctement, la remise en état sera une occasion de renforcer cette nouvelle relation.

On pourrait envisager à l'avenir un sous-secteur de l'irrigation où les AUE prennent en charge la gestion des périmètres d'irrigation, où le gouvernement se limite à fournir périodiquement des services de soutien technique et financier, selon que de besoin, et où les ressources publiques sont octroyées en montants limités pour stimuler plutôt que décourager l'investissement des agriculteurs dans leurs périmètres.

Si cette vision est réaliste, on peut s'attendre à ce que la relation entre les AUE et le gouvernement comprenne, au plan de l'amélioration de l'infrastructure, la plupart, voire la totalité, des éléments suivants:

· le gouvernement ne financera plus le gros du coût de la remise en état;

· il y aura une modalité connue de partage des coûts entre l'AUE et le gouvernement;

· le système de l'intervention immédiate "en cas d'effondrement des installations" du passé sera remplacé par des activités de réparation et de restauration continues, progressives, actives et à plus petite échelle. Les travaux seront réalisés en fonction des besoins, avant que la situation ne devienne assez grave pour exiger d'importants investissements de fonds extérieurs;

· les AUE puiseront dans le fonds de réserve (complété éventuellement par des crédits publics) l'argent nécessaire pour financer ces travaux progressifs de réparation et de restauration;

· les AUE identifieront les travaux à entreprendre et leur donneront un ordre de priorité, faisant appel à des techniciens extérieurs, le cas échéant;

· les AUE seront autorisées à réparer, modifier et étendre l'infrastructure d'irrigation.

Il se pourrait que l'amélioration de l'infrastructure ne soit qu'un outil de réorientation institutionnelle si l'AUE et le FSE sont déjà établis et que la pleine autorité de la gestion leur a été transférée. Ce n'est que par la suite que l'AUE sera en mesure de gérer le processus d'amélioration, de fixer un calendrier et un ordre de priorité pour les travaux d'amélioration et de mobiliser des ressources locales et publiques. Cette expérience préparera l'AUE et le FSE à assumer la responsabilité principale de la viabilité matérielle et financière de leur système d'irrigation.

Comment planifier la remise en état de l'infrastructure

Une fois que le gouvernement aura défini son rôle dans le programme de remise en état, il devra établir un plan bien précis indiquant dans quelle mesure et par quels moyens il entend fournir son assistance à la remise en état de l'infrastructure. Ce plan pourrait inclure:

· un inventaire de tous les périmètres que l'on envisage de transférer et pour lesquels les planificateurs devront obtenir avant le transfert des renseignements sur leur état de fonctionnement. Il n'est pas nécessaire de dresser un inventaire très détaillé car il ne servira qu'à donner une indication du nombre et de l'étendue des périmètres qui devront vraisemblablement être remis en état;

· réunir, le cas échéant, les recommandations des AUE concernant les types de travaux de remise en état qui sont indispensables;

· évaluer le coût relatif de diverses hypothèses de remise en état (quelques travaux à négocier, les travaux les plus urgents, des cas choisis, tous les travaux recommandés, etc.);

· identifier les critères auxquels les AUE devront obéir pour avoir droit à l'assistance du gouvernement;

· définir les conditions de transfert aux nouvelles AUE de matériel du gouvernement servant à l'opération et à l'entretien;

· définir les procédures financières et techniques à suivre si ces critères sont respectés;

· vérifier que les AUE sont habilitées juridiquement à sous-traiter des travaux de construction;

· identifier les besoins en formation des AUE en matière d'amélioration de l'infrastructure;

· estimer le calendrier du programme;

· estimer les coûts totaux pour le gouvernement et les sources éventuelles de financement.

Suivant la position adoptée, certains des points énumérés ci-dessous nécessiteront un traitement plus ou moins détaillé.

Comment identifier les améliorations et leur donner un ordre de priorité conformément aux objectifs du transfert ?

L'une des premières tâches dont doivent s'acquitter les nouveaux directeurs des périmètres transférés est de donner un ordre de priorité aux travaux d'amélioration ou de remise en état nécessaires. En établissant cet ordre, les AUE et les SFE tiendront probablement compte des critères suivants:

· assurer la continuité et l'équité de la distribution de l'eau;

· optimiser l'efficacité de l'irrigation et de l'économie d'eau;

· exécuter d'abord les travaux pouvant être réalisés avec les moyens dont dispose la collectivité et entreprendre plus tard ceux qui exigent un financement extérieur;

· étendre la zone desservie et le nombre de personnes qui rétribuent le service;

· réduire au minimum les risques pour la sécurité;

· réduire au minimum les pertes de terres productives que pourrait entraîner la multiplication des canaux;

· rendre transparent le système utilisé pour établir la distribution de l'eau;

· concevoir des améliorations qui minimisent les besoins de gestion et les coûts d'entretien.

Dans tous les cas, les membres de la collectivité devront être consultés et invités à participer activement à l'établissement des priorités. Parfois il peut être difficile de parvenir à un consensus si certains travaux profitent davantage à un groupe d'agriculteurs qu'à un autre. Il appartient aux chefs de l'AUE de forger un consensus ou de prendre des décisions qui sont dans le meilleur intérêt de l'association.

Une fois les priorités identifiées par l'AUE, une étude de préfaisabilité sera réalisée pour évaluer si les travaux envisagés sont réalisables techniquement et financièrement. Le revêtement des canaux est l'un des travaux d'amélioration préférés par les agriculteurs mais, dans de nombreux cas, il ne peut être justifié économiquement. Avant de fournir leur aide, les gouvernements voudront probablement que soient réalisées des études de faisabilité. Ces études devraient indiquer l'échelonnement des travaux établi pour aller de pair avec la disponibilité des crédits et la brièveté du temps destiné à l'exécution. Dans de nombreux périmètres, le temps d'interruption du service de l'eau qui peut être toléré est très limité.

ENCADRE 12 - REMISE EN ETAT ET TGI A MADAGASCAR

Madagascar adopté une stratégie particulière qui associe la remise en état au transfert de la gestion. Le programme prévoit des incitations pour encourager les agriculteurs à investir dans ces travaux. Elles sont conçues de manière à stimuler l'autoassistance chez les AUE locales.

De nombreux périmètres d'irrigation publics à Madagascar ont été gravement endommagés jusqu'à la moitié des années 1990. Le gouvernement a offert de payer 80'% du coût de la remise en état à condition que les agriculteurs acceptent de payer les 20% restants et de prendre pleinement en charge la gestion des périmètres après le transfert. Initialement, les périmètres ont été choisis dans les endroits où les agriculteurs acceptaient ces conditions. Pendant la première phase, une ONG ou une société de conseil facilite la formation d'une AUE et les agriculteurs identifient les améliorations nécessaires. Ensemble, ils préparent un plan de remise en état. L'AUE élabore un programme d'entretien annuel et établit une redevance pour l'eau. Si le taux de recouvrement de cette redevance n'est pas inférieure à 90%, on passe à la deuxième phase qui est la construction. Les agriculteurs doivent payer 20% de ce coût qui consiste pour une large part en la fourniture de main-d'oeuvre et de matériaux. A cette condition seulement, et si au moins 90% des redevances sont recouvrés, le projet peut procéder vers l'étape finale, qui consiste à terminer les réparations, à transférer la propriété juridique de l'infrastructure à l'AUE et à obtenir des services de soutien spéciaux de différents organismes publics, y compris des services de vulgarisation agricole, la formation en matière d'application de l'eau, le crédit, etc.


Pour conclure, il convient d'insister sur les trois principes fondamentaux relatifs à l'amélioration de l'infrastructure et au transfert de la gestion, à savoir:

· l'association d'utilisateurs de l'eau devrait occuper le siège du conducteur et identifier les travaux et leur donner un ordre de priorité, et prendre les décisions financières;

· l'organisme d'irrigation devrait jouer un rôle de facilitation et fournir une assistance technique et non pas diriger le processus;

· l'amélioration de l'infrastructure future devrait devenir une démarche progressive guidée par l'agriculteur plutôt qu'une intervention entièrement subventionnée et non participative, comme elle l'était par le passé.

Résultats de l'étape 4: planification et mise en oeuvre

Les résultats de l'étape de la planification et de la mise en oeuvre sont la préparation d'un plan de réalisation global, l'établissement d'associations d'utilisateurs de l'eau et de fournisseurs du service de l'eau et les améliorations de l'infrastructure.

Le plan devra aussi inclure une stratégie d'assistance pour les améliorations de l'infrastructure, y compris les conditions d'adhésion, les procédures financières, les aspects techniques et le mode et le calendrier de la mise en oeuvre. Ce plan devra traduire clairement le rôle du gouvernement dans le financement et les travaux de remise en état.

Les préalables pour la création d'une association d'utilisateurs de l'eau efficace en mesure d'assumer sa direction est son établissement officiel. L'AUE devrait avoir:

· approuvé et reconnu légalement les statuts et les règlements;
· formulé une définition convenue du service à fournir;
· formé un groupe de fonctionnaires dûment choisis et préparés;
· suscité l'engagement de ses membres vis-à-vis de l'organisation.
Etablir un fournisseur du service de l'eau et le préparer à le gérer devrait, normalement, inclure les conditions suivantes:
· établissement légal du FSE;
· recrutement du personnel du FSE, achat de l'équipement et formation;
· préparation d'un plan financier, d'un budget et d'un plan d'opération et d'entretien;
· constitution d'un fonds de réserve.
Un plan de mise en oeuvre de base est nécessaire pour réunir toutes les composantes essentielles de la réforme, forger un consensus et montrer que le plan est global et cohérent. Ce dernier devrait convaincre les bénéficiaires que la mise en oeuvre sera efficace et pratique et donnera les résultats attendus. Il devrait normalement inclure les composantes suivantes:
· les changements politiques et juridiques nécessaires;
· les besoins de restructuration de l'organisme suivant les besoins;
· l'organisation des nouveaux services de soutien;
· l'établissement et le développement d'associations d'utilisateurs de l'eau;
· l'établissement et le développement de fournisseurs des services de l'eau;
· l'amélioration de l'infrastructure d'irrigation,
· la mise en oeuvre d'un système de suivi et d'évaluation.


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