Reboisement des zones dégradées à l'aide d'espèces sylvicoles d'origine locale


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Les propositions de reboisement des zones dégradées à l'aide d'espèces sylvicoles d'origine locale au Brésil ont tenté de tenir compte de la grande diversité des forêts tropicales au Brésil et de suivre le processus de régénération naturelle de œs espèces les écosystèmes. De ce fait, il semble nécessaire de s'interroger pour savoir comment des espèces individuelles prises parmi quelques centaines d'espèces d'arbres sont réparties sur quelques hectares d'une forêt tropicale typique ainsi que sur le rôle de la sucœssion secondaire dans le proœssus de renouvellement de œs forêts.

Une des caractéristiques principales des forêts tropicales, directement lice à leur diversité, a trait à la grande richesse des espèces sylvicoles dans œs écosystèmes et ceci est à mettre en relation avec la rareté moins d'un individu par hectare des espèces conspécifiques au sein de la forêt. Il est bon de noter que la grande diversité des espèces dans les forêts tropicales est le fait des espèces rares et non celui des espèces fréquentes.

En étudiant plusieurs études botaniques réalisées sur les forêts de l'état de Sao Paulo, KAGEYAMA, NAMKOONG et ROBERTS (1992) ont mis en évidence que seuls quelques 30% des individus appartenaient à l'une des trois espèces les plus fréquentes tandis que 30% en moyenne des forêts étaient boisées avec des espèces rares.

D'autre pan' le comportement des pollinateurs peut être considéré comme étant le résultat découlant logiquement de l'adaptation mutuelle intervenant entre les plantes et les pollinateurs qui pourrait se répercuter sur la structure de la forêt tropicale. KAGEYAMA (1989) a suggéré que les espèces d'arbres, pollinées par des vecteurs à propagation limitée, peuvent être concentrées voire fréquentes alors que les espèces pollinées par l'intermédiaire des animaux et de ce fait par des vecteurs à une propagation plus importante, peuvent être dispersées ou rares.

Il est admis que la rareté ou le caractère fréquent des espèces résulte de l'histoire de leur évolution et, pour œtte raison, il peut être associé à d'autres caractéristiques, telles que la distance de vol des pollinateurs et des disperseurs de semences, les stratégies de régénération, les modèles herbivores et les associations possibles avec des micro-organismes. De ce fait, les modèles de distribution spatiale des espéces au sein de la forêt pourraient être, d'une œrtaine manière, déterminés et devraient être suivis de projets de plantation des espèces dans les champs.

Le concept de reboisement mélangé à l'aide d'espèces sylvicoles d'origine locale requiert la prise en compte des conditions devant permettre d'associer les différentes espèces à planter. Trois conditions peuvent être mises en lumière dans le cadre de notre étude:

  1. celle basée sur la rareté de la distribution des plantes et des différentes espéces dans le champs (NOGUEIRA 1977);
  2. celle basée sur la distribution mise en évidence par les études phytosociologiques réalisées dans les forêts naturelles adjacentes (JOLY 1987); et
  3. celle basce sur la combinaison des groupes comportant des caractéristiques d'espèces à divers stades de la succession secondaire (KAGEYAMA et CASTRO 1989).

La succession secondaire semble être une conception pouvant être utilisée afin de séparer les espèces en groupes écologiques ayant les mêmes caractéristiques, en tenant en particulier compte du besoin ou non de œs espèces en espace plus ou moins grand à divers stades de développement des plantes, ceci afin de les utiliser pour des plantations mélangées.

Selon WHITMORE (1982), les espaces qui se forment dans les forêts sont comblés par d'autres groupes écologiques d'espèces d'arbres, adaptés au reboisement des espaces de différente taille. De œ fait, les espèces pourraient être séparées selon leur comportement par rapport aux espaces. Selon le critère utilisé, de tels groupes peuvent être classés de diverse manière. La dichotomie existante entre les espèces pionnières (intolérantes) et les espèces en apogée (tolérantes) test fréquente dans les documentations disponibles. DENSLOW (1980) a identifié trois groupes: les espèces poussant dans des espaces importants, œlles nécessitant de petits espaces et œllw poussant sans intervalles. WITHMORE (1975) a identifié quatre groupes, cependant il a admis que chaque espèce est unique dans ses caractéristiques d'adaptation. En plus de ceux déjà cités, œt auteur a identifié un groupe d'espèces se développant dans des forêts denses mais profitant des espaces existants. BUDOWSKI (1965), utilisant 21 caractéristiques propre aux forêts tropicales qui subissent des modifications à divers stades, a identifié lui quatre groupes d'espèces: pionnières, secondaires précoces, secondaires tardives et climaciques.

En cas de plantations mélangées, il est nécessaire de conœvoir des système au sein desquels les arbres appartenant à des classes de tolérance différentes ont des possibilités égales, chaque espèce dans sa propre niche, donnant lieu à une meilleure utilisation de l'environnement tant à la surface du sol qu'en sous-sol.

C'est pourquoi le reboisement mélangé devrait être composé d'espèces à divers stades de sucœssion, identiques aux forêts naturelles qui sont, elles, composées d'une mosaique d'étapes successives. Selon WITHMORE (1982), les forêts sont constituées par une mosaiques de phases structurelles qui changent constamment, chaque phase se transformant en une phase suivante, leurs compositions floristiques dépendant de œ fait de la fréquence et de la taille des espaces. Cette interprétation montre que la grande diversité des forêts tropicales tient davantage de la diversité des espaces que de œlle existante au sein des espaces eux-mêmes.

De œ fait, une plantation composée d'espèces mélangées peut être considérée comme un assemblage de grands espaces comprenant des espèces différentes contribuant à la grande diversité des espèces dans les forêts. Les espèces fréquentes et rares pourraient être plantées dans les champs en proportion de leurs densités naturelles.

Le Serviœ des Etudes Agricoles de l'ESALQ, Université de Sao Paulo, réalise actuellement des études ayant comme objectif principal de déterminer les modèles d'association des espèces sylvicoles, prenant la sucœssion secondaire comme référence. Ce programme de recherche a été renforcé dès 1988 grâce aux efforts de coopération nés entre l'ESALQ et La Compagnie Energétique de l'Etat de Sao Paulo (Companhia Energética do Estado de Sao Paulo-CESP).

Pour réaliser cette expérience, la terminologie de BUDOWSKI (1965) a été utilisée conjointement à une interprétation sylviculturelle pour les différents groupes d'espèces, en tenant compte de la succession secondaire. Le modèle proposé considérait que les espèces pionnières donnaient de l'ombre tandis que les espèces climaciques poussaient dans l'ombre, se complétant ainsi les unes autres. Les espèces secondaires précoces, par contre, joueraient le rôle de tuteur pour les espèces secondaires tardives. Les espèces pionnières et secondaires précoces seraient des espèces poussant en plein soleil (nécessitant des espaces importants); les premières ayant une durée de vie courte (entre 5 et 15 ans) l'ombre résultant en des cimes (denses); les secondes ayant une durée de vie plus longue (entre 30 et 50 ans) avec une cime étroite (croissance monopodiale). Les espèces secondaires tardives et climaciques seraient enclin à se développer. dans l'ombre, les premières profitant d'une lumière partielles (dans de petits espaces) et les secondes poussant dans l'ombre des voutes ainsi crées.

Parmi les quatre conditions identifiées dans l'Etat de Sao Paulo, vingt espèces furent choisies parmi les quatre groupes écologiques afin de pouvoir étudier toutes les combinaisons possibles d'espèces sylvicoles. Ces études touchaient non seulement des lots d'espèces pures mais aussi la combinaison des quatre groupes au même moment, s'élevant à 23 traitements, sur des lots d'une surface de 1000 m2 et une zone d'expérimentation couvrant 36.8 hectares.

Les résultats expérimentaux ont montré que l'association d'espèces sylvicoles, en les séparant en groupes écologiques selon la succession secondaire, constituait un moyen efficace pour orienter les plantations composées d'espèces sylvicoles locales mélangées. Les conclusions principales qui furent tirées de œtte recherche, menée durant quatre années en tenant compte des différents groupes écologiques d'espèces, furent les suivantes (Tableau 1):

  1. les espèces pionnières et secondaires précoces poussent davantage que les deux autres groupes, présentant un comportement similaire dans toutes les combinaisons avec les autres espèces;
  2. les espèces secondaires tardives tirent avantage, pour œ qui est de leur croissance, de l'ombre partielle causée par les espèces secondaires précoces et souffrent dans leur croissance de l'ombre totale causée par les espèces pionnières;
  3. les espèces en apogée tirent également avantage de l'ombre partielle causée par les espèces secondaires précoces et ont présenté des caractéristiques neutres quand elles poussaient complètement dans l'ombre causée par les espèces pionnières; œpendant elles présentaient un aspect plus sain quand elles poussaient à l'ombre;
  4. I'éclaircissement des espèces pionnières après deux ans passés dans les champs, afin de simuler la pousse dans des conditions d'intervalles naturels, s'est avéré bénéfique pour la croissance des espèces secondaires tardives et œlle des espèces en apogée;
  5. la taille des cimes et la forme des arbres des différents groupes d'espèces sylvicoles ont profondément été modifiées par l'association des espèces, en particulier pour les groupes appartenant aux étapes les plus avancées de la sucœwsion.