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Les problèmes devant la Conférence

Exposé de M. MARCEL LELOUP

Directeur de la Division des Forêts et produits forestiers de la FAO

MESSIEURS, permettez au Directeur de la Division des Forêts et produits forestiers de préciser le problème qui vous est posé. Les chiffres réunis dans la préparation de cette Conférence font ressortir que les pays d'Europe et du bassin méditerranéen qui avaient importé 6 millions de standards en 1937, n'en recevront même pas 3 millions en 1947; pour 1948 les prévisions sont à peu près les mêmes.

Les besoins étant évidemment plus élevés qu'avant la guerre, la crise, qui frappe surtout les pays importateurs de l'Europe occidentale et méridionale, se trouve ainsi bien définie. Elle est due essentiellement au fait que, pour des raisons très diverses, les pays exportateurs d'Europe et d'Amérique du Nord ont tous réduit leurs exportations dans une mesure considérable, et que certains d'entre eux, notamment l'U.R.S.S. et la Pologne, qui fournissaient en 1937 près de 2 millions de standards sont passés dans les rangs des pays importateurs.

L'Hotel du Roi d'Angleterre, à Marianské-Lazné, où s'effectua la majeure partie du travail de la Conférence

Ces chiffres ont par eux-mêmes une éloquence suffisante. Faut-il encore rappeler la misère des populations sans toit vivant sous les ruines ou dans des abris de fortune, privées de l'hygiène la plus élémentaire, misère causée par ces déficits de bois? Permettez-moi de souligner que cette misère échappe souvent à toute statistique, ainsi que me l'a démontré une expérience personnelle. J'étais l'été dernier à Varsovie. Impressionné par les ruines de cette ville où 5% seulement des bâtiments restent intacts, j'ai posé la question: combien de personnes sans abri? «Techniquement parlant", me répondit un haut fonctionnaire du bureau statistique, «nous ne pouvons constater la présence de personnes sans logement à Varsovie. En effet, pendant la nuit, toute la population disparaît, sans doute parce que plusieurs familles se partagent la même chambre, et que même dans les maisons bombardées, plusieurs pièces restent encore utilisables. Ce ne sont que les deux millions de familles rurales qui vivent dans des trous de terre, auxquelles notre statistique réserve le terme sans logement».

A ces besoins pressants il importe de répondre par des mesures rapides et aussi efficaces que possible. La chose est d'autant plus nécessaire que la crise où le monde et l'Europe se débattent aurait pu, sinon être évitée, au moins être rendue moins grave, si les mesures utiles avaient été prises en temps opportun.

Une erreur grave a été commise dans le passé, erreur dans laquelle il importe de ne pas retomber une fois de plus, celle de détacher l'examen des questions intéressant le bois - qu'il s'agisse de son utilisation ou de son commerce - des questions intéressant la source qui le fournit, c'est-à-dire la forêt elle-même.

Les ressources forestières

Le monde renferme environ 3.000 millions d'hectares de forêts dont 1.200 millions sont dès maintenant exploités. Cette source considérable de bois est susceptible, s'il n'en est pas abusé, comme il arrive malheureusement trop souvent, de se reconstituer indéfiniment. De très vastes surfaces autrefois déboisées sont encore susceptibles d'être rendues de nouveau productives.

D'autre part, la forêt présente cet avantage incomparable que, suivant les nécessités économiques, les coupes peuvent, sans inconvénient majeur, y être réduites de telle façon est possible de parer aux crises de surproduction en mettant les produits en stock sur les massifs eux-mêmes.

Malgré cette particularité, le bois de construction a connu des crises de surproduction et de sous-production semblables à celles des autres grandes matières premières. Elles s'expliquent, non seulement, par les causes générales de ces crises bien connues, mais encore par des erreurs de politique forestière qu'il s'agit d'éviter à l'avenir.

En effet, d'un côté, les abus d'exploitation sans égard à la reconstitution des massifs forestiers, la négligence à développer de nouvelles ressources par l'ouverture de nouvelles forêts ou par le reboisement de terres incultes, la négligence aussi à diriger l'évolution des forêts existantes en considération de la tendance des besoins de l'industrie et du commerce, entraînent la sous-production.

D'un autre côté, la méconnaissance par les forestiers, les propriétaires et les exploitants de forêts des courants économiques réels et des besoins régionaux ou mondiaux en bois entraîne la surproduction.

Il n'est donc pas douteux que toutes les suggestions qui pourront être émises ici concernant le bois de construction auront une influence directe sur la forêt, et inversement, de telle sorte que les délégués devront considérer sous ses deux faces tous les problèmes qu'ils étudieront.

Il convient d'ajouter que l'introduction de la forêt dans les délibérations de la Conférence lui interdit, sinon de distinguer entre les problèmes à court terme et à long terme, du moins d'examiner isolément les uns et les autres.

La forêt ne peut se comparer à la terre agricole sur laquelle chaque année peuvent se succéder, suivant les besoins de l'homme, les produits les plus divers et où la récolte d'une année est sans grande influence sur la récolte de l'année suivante. Sur la forêt, toute mesure à court terme aura une répercussion qui se fera sentir peut-être pendant de longues années. Et d'autre part, pour obtenir dans cinq, dix ou peut-être cinquante ans, un résultat déterminé sur le marché des bois, il est nécessaire de prévoir dès maintenant les mesures appropriées.

Ces considérations, dont il n'est pas nécessaire de souligner plus longtemps l'importance, justifient, me semble-t-il, l'amplitude du programme présenté à la Conférence.

Toutefois, en l'organisant, la FAO a eu un autre but, qu'elle considère comme essentiel à la réussite de ses délibérations. Ce but a été de réunir dans une même conférence, en vue de confronter leurs points de vue, les représentants des pays européens importateurs aussi bien qu'exportateurs.

Nécessité de la solidarité

Tous les pays d'Europe ont souffert, à des degrés divers, mais au même titre, des longues années de guerre et des dévastations qui les ont accompagnées. Solidaires lorsqu'il a fallu composer avec leur ennemi commun, puis l'éliminer par la force ces pays se retrouvent maintenant solidaires pour les besoins de la paix, et essentiellement pour les besoins de leur reconstruction. Le premier pays à reconnaître, bon gré mal gré, cette solidarité européenne, sera l'Allemagne pour laquelle il existe une obligation morale de coopérer de tout son pouvoir à la reconstitution économique des pays dévastés, et c'est pour cette raison que dans les ordres du jour proposés il a été prévu que son cas serait examiné séparément.

M. Marcel Leloup

Mais cette solidarité n'existe pas moins pour tous les pays d'Europe, liés de si près l'un à l'autre par les besoins de leur commerce, de leur industrie et de leur agriculture qu'il est presque inconcevable que l'un d'eux puisse longtemps maintenir une situation économique et sociale saine au milieu de voisins dont les conditions ne seraient pas analogues.

Mais, en ce qui concerne le bois de construction, comme en ce qui concerne nombre de produits alimentaires ou industriels, l'Europe ne se suffit pas à elle-même. Quoiqu'elle fasse, elle doit, pour assurer la satisfaction de ses besoins, recourir aux pays d'outre-mer. Les conditions de la vie moderne ont rendu ainsi tous les pays du monde tributaires de la même solidarité.

C'est pourquoi les gouvernements des pays exportateurs de bois des autres parties du monde ont été invités à envoyer leurs représentants à la présente conférence. Je ne veux pas laisser passer cette occasion de les remercier pour avoir répondu à l'invitation de la FAO.

Vous avez entendu tout à l'heure le chiffre des déficits prévus pour l'Europe pour 1947 et 1948. Pour les années suivantes, l'évolution du marché ne présente pas de perspectives plus brillantes pour une raison bien simple: à savoir que les forêts actuellement accessibles en Europe et en Amérique du Nord ne sont plus suffisantes pour couvrir les besoins de ces continents et des autres parties du monde qui, normalement, dépendent des importations de bois de ces régions. Dans ces conditions, il a semblé que la tâche la plus essentielle de la FAO consistait à mettre cette conférence face à face avec ces perspectives et de lui fournir une documentation aussi précise que possible sur les éléments statistiques de cette situation.

C'est sur la base de ces renseignements que chaque Etat aura à décider de sa politique, non seulement pour l'avenir immédiat, mais même pour une période s'étendant jusqu'en 1960 ou au delà, puisque, en matière forestière, il est indispensable de penser en décades et en siècles.

Malheureusement, les renseignements réunis par la FAO sont très peu satisfaisants dès que nous dépassons l'année 1948. L'hésitation des Gouvernements et des Administrations à répondre à des questions s'appliquant à un avenir relativement éloigné est très compréhensible. D'autre part, une idée au moins approximative des plans et possibilités au delà de l'avenir immédiat constitue un élément indispensable pour les discussions qui s'ouvrent aujourd'hui. Il constitue d'ailleurs un élément régulier de tout aménagement forestier bien organisé.

J'espère donc que les délégués réunis ici voudront bien combler, dans les discussions des Comités, les lacunes de notre documentation statistique, et permettre ainsi à la Conférence de se faire une idée sur les tendances générales de l'évolution à venir.

Il est à prévoir que les politiques forestières et les plans d'activité économique tels qu'ils sont actuellement définis n'aboutiront qu'à des résultats insuffisants pour assurer un équilibre convenable de la balance européenne des bois de sciage. Il appartiendra alors à la Conférence d'examiner dans quelles mesures il serait possible de les modifier et de les coordonner en vue d'arriver au résultat recherché et, en premier lieu, d'obtenir pour 1947 et 1948 une amélioration aussi importante que possible du bilan du bois de construction.

Consommation et production

Deux grands moyens d'action apparaissent à première vue qui englobent en fait toutes les mesures que la Conférence pourra envisager: la régularisation de la consommation, et la régularisation, ou pour appeler les choses de façon plus précise, l'augmentation de la production.

Parlons donc d'abord de la régularisation de la consommation. Les nécessités actuelles obligent à diminuer celle-ci dans la plus large mesure possible. De nombreux pays ont dû déjà apporter de dures restrictions à la consommation du bois de sciage. D'autres peuvent redouter de recourir à ces solutions. Mais ces restrictions ne doivent pas toujours et obligatoirement se traduire par des retards apportés aux programmes de construction ou à la satisfaction des besoins essentiels des Etats. Les progrès de la technologie mécanique de bois, de la fabrication des panneaux à base de déchets de bois, les procédés actuels de pré fabrication permettent en effet des économies de bois telles que, si ces techniques modernes pouvaient être partout appliquées, elles aboutiraient peut-être a la résorption totale du déficit de bois de construction.

On méditera utilement, par exemple, sur le chiffre fourni par l'éminent Président, du Sous-Comité de technologie mécanique du bois qui indique que pour un programme de 100.000 logements utilisant dans des conditions moyennes 1 million de m3 de bois de sciage l'emploi des méthodes que nous venons d'indiquer brièvement entraînerait une économie de l'ordre de 275.000 m3.

Mais le moment viendra où, les travaux de reconstruction terminés, L'abondance régnera de nouveau et où peut-être les marchés se trouveront à nouveau encombrés sous l'excès de la production. Quand on considère que sur d'énormes surfaces du globe la population vit sous de misérables abris, privée des conditions les plus élémentaires de l'hygiène et du confort; quand on considère que, plus près même de nous, des familles entières s'entassent encore dans d'affreux taudis qui sont la plaie des grandes villes, on peut penser que, pour le bois du moins, une telle dépression des marchés ne devrait jamais se produire. Mais il appartient aux intéressés de faire l'effort collectif nécessaire pour le développement de nouveaux marchés, effort qui ira de pair avec les progrès de la civilisation, et de le faire en temps voulu pour assurer un développement harmonieux de l'économie mondiale.

Tels sont, Messieurs, les moyens dont il semble qu'on puisse disposer pour régulariser la consommation et dont il vous appartiendra d'examiner en détail le mécanisme et les possibilités.

Augmenter les coupes

En ce qui concerne la production, il faut pour assurer la régularisation remonter à la source, c'est-à-dire aux forêts elles-mêmes. Et ici l'évolution générale des besoins mondiaux aussi bien que ce que nous venons de dire des progrès possibles de la consommation, montre que le but essentiel à rechercher est l'augmentation de cette production.

Sans doute doit-on considérer l'éventualité de crises possibles, de dépression des marchés, et prévoir les mesures nécessaires pour protéger contre ces crises la forêt aussi bien que les ouvriers et les industries qui en vivent. Mais ces crises ne sont que des épisodes dans l'histoire économique du monde et le but essentiel doit être la production maximum des massifs boisés compatible avec un rendement soutenu et le maintien en bon état des terrains et du capital forestier.

En ce qui concerne notamment les possibilités pour 1947 et 1948, il ne faut pas se dissimuler que la solution la plus efficace à laquelle la Conférence devra sans doute s'arrêter sera l'augmentation des coupes prévues dans la plupart des pays européens.

Nous savons tous que les forêts européennes ont souffert de destructions et surtout de surexploitation pendant les années de guerre. Ce ne sera que dans quelques années que nous aurons des statistiques établissant en détail le montant du dommage.

Cependant il semble dès maintenant que les réserves créées dans la plupart des pays d'Europe au cours de plusieurs décades d'aménagement systématique ont été suffisantes pour permettre aux forêts européennes de subir le choc de guerre sans une diminution trop sensible du capital forestier.

D'autre part, les dommages de guerre sont tous de caractère essentiellement local, et ont souvent été compensée dans l'intérieur du même pays par une sous-exploitation de forêts plus éloignées des grandes voies de communication.

Et puis il ne faut pas oublier que le capital forestier présente une certaine élasticité et que, jusqu'à un certain point, la forêt constitue une sorte de caisse d'épargne où il est permis à l'épargnant dans le besoin de puiser sous l'expresse condition que des mesures soient prises pour assurer au plus tôt et dans les meilleurs conditions possibles la reconstitution du capital ainsi entamé.

Au cours d'une conversation avec le Ministre de la Reconstruction, alors que j'étais encore Directeur général des Eaux et Forêts de France, celui-ci me disait soit étonnement de voir le pays manquer de bois alors que partout la forêt lui paraissait cependant encore étendue et florissante. «Sans doute, lui dis-je, nous pouvons et devons encore couper davantage, mais à la condition que simultanément des crédits suffisants soient mis à la disposition des forestiers pour réparer les dommages infligés au domaine boisé de la nation».

La même remarque peut s'appliquer à l'Europe tout entière et même au monde car la surexploitation des forêts n'a pas touché que le continent européen. Et ce qui rend plus difficile encore la position de ce continent, c'est que cette surexploitation oblige de grands pays autrefois exportateurs, comme les Etats-Unis, où les prélèvements sur le capital forestier ont été plus importants encore qu'en Europe, à réduire ou à supprimer complètement les exportations.

Ainsi, là où d'immédiates ou rapides compensations peuvent être obtenues à la réduction du capital forestier, soit par la mise en exploitation de nouveaux massifs encore vierges, soit par le reboisement de terrains inutilisés, un effort est encore possible, sans doute, par rapport aux prévisions. Du moins pour l'immédiat, c'est vers cette solution que les délégués devront probablement s'orienter.

Il ne faut pas se dissimuler que la mise en œuvre de ces coupes supplémentaires présente des difficultés nombreuses, mais c'est précisément pour résoudre ces problèmes au sein même de la Conférence, ou pour en préparer la solution à la plus brève échéance possible au moyen de mesures étudiées par leurs soins, que les représentants des pays européens se trouvent ici réunis.

Et puisque des résultats tangibles ont pu être obtenus en bien d'autres matières, et notamment en ce qui concerne de nombreux produits alimentaires il est permis de dire que ces problèmes ne sont nullement insolubles, que seule a manqué, jusqu'ici, l'opportunité de les résoudre, et que la Conférence peut et doit apporter elle aussi des solutions pratiques aux problèmes urgents qui nous préoccupent.

Même ainsi, les coupes supplémentaires offrent une solution insuffisante: d'ailleurs elles ne sauraient constituer qu'un palliatif à très court terme.

Recourir aux forêts inexploittées

De la documentation de la Conférence, il vous apparaîtra comme une nécessité que l'Europe se tourne vers les massifs encore inexploités du globe et leur demande le supplément de bois qui lui est indispensable. Et bien qu'il ne s'agisse pas, en général, de forêts européennes, il vous appartiendra de présenter à ce sujet des suggestions qui seront prises en considération par d'autres conférences régionales ou par la Conférence générale annuelle de la FAO. Il vous appartiendra même d'examiner dans quelles conditions ces ressources pourraient être mises à la portée de nos besoins, quels sont les obstacles qui s'y opposent et les moyens de les surmonter.

Ces ressources, en effet, si elles ne sont pas illimitées, sont du moins considérables. Toutefois, vous estimerez qu'il importe d'éviter en y puisant les fautes trop souvent commises dans le passé et qui ont pour résultat de les épuiser.

La législation forestière de la plupart des pays, ou du moins des plus évolués d'entre eux, repose sur le principe que la forêt est un capital légué par les générations précédentes à la génération actuelle et que celle-ci doit restituer intact, sinon amélioré, aux générations futures.

Ce principe est applicable aux forêts du globe tout entier et l'on peut même dire qu'il s'impose avec plus de force aux forêts tropicales, élément essentiel de la prospérité présente ou future de peuples souvent déshérités, comme ceux de l'Afrique, soit qu'on les considère comme protectrices du sol ou régulatrices du climat, soit qu'on les considère comme sources de richesses économiques.

L'ouverture des forêts neuves, et surtout des forêts tropicales, ne doit pas être une simple affaire d'exploitation. Elle doit être aussi une opération sylvicole menée en vue de l'enrichissement de ces massifs, ou tout au moins de leur maintien en parfait état de végétation, au même titre qu'une coupe dans nos forêts européennes a essentiellement en vue la reconstitution et l'amélioration du capital forestier.

L'ouverture de nouvelles ressources forestières ne constitue pas, néanmoins, le seul moyen d'augmenter la production du bois de sciage et vous en aurez d'autres à examiner, sur lesquels il n'est pas nécessaire, pour l'instant, de retenir longtemps votre attention.

Moderniser l'équipement

L'amélioration du matériel des scieries en vue de la réduction des déchets est l'un de ces moyens. Celle du matériel d'exploitation et ses possibilités de mécanisation en sont un autre, qui permettrait de remédier à l'insuffisance du nombre des travailleurs de la forêt, insuffisance qui, dans de nombreux pays, constitue l'un des principaux obstacles au développement de la production.

Améliorer les conditions de travail

Une mécanisation plus poussée des méthodes d'exploitation aurait d'ailleurs aussi pour avantage de rendre moins pénible le travail des bûcherons et des débardeurs et d'en faciliter par là même le recrutement. Elle fait partie de l'amélioration des conditions de vie des travailleurs de la forêt, conditions qui peuvent souvent être rendues plus confortables et qui doivent l'être si l'on ne veut pas voir diminuer encore le nombre des ouvriers qui demandent leurs moyens d'existence aux durs travaux de la forêt. Un massif boisé est bien souvent pour ces ouvriers, non seulement l'endroit où ils travaillent, mais aussi celui où à proximité immédiate duquel, ils passent leur vie tout entière ou tout au moins les longs mois de l'exploitation. Un minimum de confort et d'hygiène doit leur être assuré à eux et si nécessaire, à leur famille.

Dans l'éventualité de crises de dépression, la protection des ouvriers contre le chômage nécessite aussi une étude spéciale. Ces travailleurs ont en effet le droit d'attendre de la forêt une stabilité de leurs conditions de vie aussi complète que dans les autres industries.

Développer les matériaux de substitution

Enfin le développement des matériaux de substitution à base de bois ouvre de larges perspectives, non seulement par ce qu'il est de nature à faciliter les économies de bois de construction, mais parce que, par l'utilisation des déchets qu'il permet, il assurera la valorisation de produits jusqu'ici inutilisés. Tout en augmentant les possibilités de travail en forêt, d'où ces déchets, maintenant abondonnés sur place, devront et pourront être économiquement enlevés, il facilitera aussi l'aménagement rationnel des massifs forestiers et les progrès de la sylviculture, trop souvent contre-carrés par l'impossibilité de disposer commercialement de certains de ces produits.

Résultats attendus de la conférence

Il a été dit que la présente Conférence ferait naître de grands espoirs. Sans doute ne faut-il pas se leurrer et penser que d'une seule consultation comme celle-ci, peuvent sortir, au bout de quelques jours, les solutions qui mettront fin non seulement à la crise qui nous occupe, mais encore à tous les problèmes que posent le bois et la forêt. Le résultat obtenu serait satisfaisant déjà si, avec une certaine réduction du déficit de bois pour 1947, et une réduction plus substantielle pour 1948, pouvaient résulter une série de recommandations unanimes susceptibles de fournir la base d'une coordination de la politique forestière et des programmes de construction de l'Europe, gages d'une coopération future aussi bien sur le plan régional que sur le plan mondial.

Sans doute serait-il facile d'évoquer ici, pour dire toute l'importance de votre tâche, les millions de familles qui attendent de cette réunion un soulagement a leurs longues souffrances, des millions d'êtres humains dont, du succès de vos délibérations, dépendent la santé et le bien-être, peut-être la vie ou la mort, mais chacun de vous connaît; les difficultés de son propre pays et pourra aisément se rendre compte, par les contacts qu'il prendra ici, de celles où se débattent les autres pays européens et même les pays d'outre-mer.

La Finlande aux vastes ressources forestières (Photo: American Forestry Association)

Au reste, les chiffres parlent par eux-mêmes et vous vous rendrez aisément compte que la différence entre les besoins d'importation et les possibilités d'exportation ne peut être comblée que par des mesures rapides et soigneusement concertées.

Ces mesures d'urgence, c'est à vous, Messieurs qu'il appartient de les rechercher, et, en terminant, j'émets le vœu qu'allant plus loin encore, vous puissiez examiner ici la possibilité d'une procédure de plus longue haleine qui permettra d'épargner dorénavant à la forêt, aux ouvriers et au': industries du bois, la menace de crises futures.


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