Previous PageTable Of ContentsNext Page

ANNEXE VIII: RAPPORT NATIONAL SUR LE SECTEUR FORESTIER

BENIN

par

Pascal Djohossou

INTRODUCTION

Le présent rapport donne un aperçu du secteur forestier au Bénin. Il renseigne sur la politique économique qui sert de cadre au déroulement des activités du secteur et donne les éléments caractéristiques qui façonnent la gestion des ressources forestières aux plans de définition de politique, de dispositions législatives et réglementaires ainsi que de renforcement institutionnel.

CONTEXTE

Economie et politique économique

Pays essentiellement agricole, le Bénin exporte principalement des produits primaires (coton, produits du palmier à l'huile et fruits tropicaux) dont les prix sont fixés sur le marché mondial.

L'agriculture procure des revenus à plus de 70% des ménages béninois et assure au pays l'autosuffisance alimentaire.

Le secteur primaire participe, en 1997, pour 39,2% au PIB (4ème Revue de Performance des Projets: MPREPE/BM, Mai 1998) auquel contribue, plus spécialement, la culture du coton dont la filière est aujourd'hui bien organisée.

Les données officielles de l'Institut National des Statistiques et d'Analyse Economique (INSAE) indique que la contribution du secteur forestier à l'économie générale du pays serait de 2.8% avec, pour le bois de chauffage: 2,3%, le charbon de bois: 0,1% et autres: 0,4%.

Le Bénin a un secteur commercial très actif qui occupe 21% de la population. Il existe un commerce de transit considérable entre le Bénin et ses voisins, dont en particulier le Nigeria, portant sur la réexportation des biens de consommation importés ainsi que sur les produits vivriers et les textiles de production domestique.

Il se développe également entre le Bénin et le Nigeria un important commerce frontalier relevant du secteur informel et portant essentiellement sur l'importation du Nigeria des produits manufacturés et de produits pétroliers largement subventionnés.

L'actuelle politique de développement économique du Bénin se présente comme le prolongement des réformes engagées depuis 1989. Ces réformes mettent en avant un plus grand libéralisme économique et une réduction progressive de l'intervention de l'Etat tout en prenant en compte la dimension sociale du développement du pays.

Cette politique de développement économique touche de nombreux domaines dont les principaux axes sont:

l'assainissement des finances publiques par la compression des dépenses et la mobilisation des ressources;

la restructuration administrative des principaux ministères et un programme de compression de la fonction publique;

la restructuration du secteur financier;

le désengagement progressif de l'Etat de plusieurs entreprises de services publics;

l'amélioration de la structure des incitations à l'activité et à l'investissement dans le secteur privé.

Pour atteindre ces objectifs, le Bénin entend continuer entre autres à utiliser les moyens d'intervention à sa disposition, en particulier le Programme d'Ajustement Structurel(PAS) engagé auprès du FMI et de la Banque Mondiale depuis 1989. De plus, le Bénin est parti prenante à la politique d'intégration sous-régionale et d'élargissement des débouchés extérieurs à travers l'UEMOA.

Situation sociale

Sur la période de 1989 à 1997, les secteurs sociaux (santé, éducation, habitats et autres) ont absorbé 15,83% des investissements publics réalisés. Priorité a été donnée aux secteurs dits productifs avec 78,62% (particulièrement au secteur agricole); pendant cette même période, l'Administration a consommé 5,55%.

Au lendemain de la dévaluation, les prix ont flambé, l'inflation atteignait un niveau jamais égalé de 54% en décembre 1994. Mais, déjà en 1995, la tension sur les prix a ramené le taux d'inflation à 3,12%; le plus bas de la zone UEMOA cette année là. Depuis 1996, on assiste cependant à une hausse générale des prix d'au moins 6%.

Les indications générales sur l'Emploi au Bénin montrent que:

40% de la population totale est active (personnes de plus de 15 ans);

70% de la population active se concentre en agriculture;

7% de la population active occupe un emploi dans l'industrie;

23% de la population active se retrouve dans le secteur tertiaire.

L'INSAE estimait, en 1992, qu'environ 46% de la population active (soit plus de 800 000 personnes) _uvrait dans le secteur informel. Notons qu'il est enregistré tous les ans sur le marché du travail une présence d'environ 60 000 jeunes sortis pour la plupart des centres de formation et en quête d'un premier emploi.

Contexte social du secteur forestier

Au Bénin, la forêt couvre environ 65% du territoire national. Jusqu'à un passé récent, on estimait la couverture végétale du pays à 631km² de forêt dense, 12 744 km² de forêt claire et de savane boisée ainsi que 60 596 km² de savane arborée. Mais ce couvert recule au rythme annuel moyen de 1 000 km² en raison d'une part, de l'exploitation incontrôlée du bois pour divers usages et d'autre part, du fait de la pratique des feux de brousse par des paysans au mépris des dispositions réglementaires qui interdisent une telle pratique.

La conjugaison de toutes ces pratiques (exploitation anarchique de bois, feu de brousse) portent des atteintes graves à l'écosystème en particulier à l'agriculture à cause de la baisse de la fertilité des sols.

C'est pour préserver un environnement sain et créer un contexte de développement durable qu'il a été institué une Journée Nationale de l'Arbre depuis le 1er Juin 1985 ainsi qu'une Campagne Nationale de Reboisement à partir de la même date.

Le secteur forestier contribue pour beaucoup dans la réduction du chômage, de la pauvreté. Il appui pratiquement tous les autres secteurs de production. Il améliore les conditions de vie des femmes et des jeunes à travers plusieurs activités génératrices de revenus. Tout ceci témoigne du fait qu'il serait difficile et complexe de quantifier la contribution du secteur forestier au PIB.

RESSOURCES FORESTIERES

Propriété des terres

L'accès à la terre est très difficile dans le Sud où les pratiques de vente foncière sont de plus en plus courantes et où la pression démographique a conduit à une surexploitation des ressources agricoles alors que les méthodes de production n'ont subi aucune amélioration réelle permettant une augmentation durable de la productivité. Dans le Nord du pays, le système coutumier prédomine, la terre est souvent négociée et concédée symboliquement mais cette forme de concession demeure précaire.

Tableau 1: Estimation de la répartition actuelle des terres

 

Superficie(ha)

Occupations du sol

Domaine classée

   
 

Forêt classée

Parcs nationaux et zones cynégétiques

Domaine protégé

Total national

1. Galerie forestière

94 128

110 299

25 613

230 040

2. Forêt dense sèche

12 323

14 440

3 353

30.116

3. Savane claire et savane

545 079

639 632

584 774

1 769 485

4. Savane arborée et arbustive

442 589

519 226

2 871 675

3 833 490

5. Végétation saxicole

62 963

73 953

107 835

244 751

6. Savanes cultivées(jachère/ culture)

217 129

 

4 154 112

4 371 241

Sous-total formations naturelles productives

1 374 211

1 357 550

7 747 362

10 479 123

7. Plantations forestières

 

· Teck

12 081

   

12 081

· Autres bois d'_uvre

3 299

   

3 299

· Acacia auriculiformis

1 915

   

1 915

· Cassis spp

650

   

650

· Casuarina equisitifolia

342

   

342

· Eucalyptus spp

599

   

599

· Anacardier

4 857

   

4 857

· Autres bois de feu et de bois de service

84

 

11 750

11 834

Sous total plantations forestières

23 827

0

11 750

35 577

8. Cultures sous palmiers/palmeraies

   

647 500

647 500

9. Plantations de cocotiers

   

11 875

11 875

10. Sols dénudés

   

45 625

45 625

11. Eau

   

32 500

32 500

12. Agglomérations importantes

   

10 000

10 000

Sous - total autres occupations

0

0

747 500

747 500

Total

1 398 038

1 357 550

8 506 612

11 262 200

Source: Etude filière Bois au Bénin, MPREPE, 1997

L'Etat reconnaît officiellement, tant la propriété traditionnelle que la propriété individuelle. L'absence de législation ou même d'un registre foncier rural fait que le régime foncier n'est pas générateur de sécurité et, en l'absence d'un marché transparent, n'assure pas une utilisation optimale des terres. La situation foncière actuelle est caractérisée par une complexité de règles et de coutumes régissant l'utilisation des terres et des points d'eau. Au système foncier traditionnel issu de la propriété collective se sont superposés des systèmes codifiés fondés sur le droit de propriété exclusif. L'appropriation des terres par l'Etat, à des fins de mise en valeur, relève désormais d'une époque révolue; cependant, l'appropriation individuelle non immatriculée connaît un essor, quelques fois à des fins spéculatives. La forte pression sur la terre conduit constamment à des litiges de proximité. D'autre part, dans le Nord, des nouveaux venus s'installent sur des domaines non encore cultivés, quelques fois de manière anarchique, et sont acceptés volontiers par les populations déjà installées, avec ou sans l'aval des chefs traditionnels, selon les disponibilités en terres. Il apparaît nécessaire d'adapter la politique foncière du Bénin aux types de situations prédominantes, sans pour autant vouloir imposer un système étranger au détriment des mécanismes locaux qui demeurent en partie efficaces.

Utilisation des terres

Les exploitations sont très variées, tant du point de vue des superficies que du niveau d'équipement. Les superficies varient de moins de 2 ha dans les zones très peuplées des préfectures du Sud à plus de 10 ha dans le Nord en principe en relation avec le nombre de personnes sur les exploitations. Les superficies cultivées par actif agricole varient de moins de 2 ha à 8 ha en moyenne dans les exploitations équipées en attelages dans les zones cotonnières. Le pourcentage d'actifs varie de 40 à 60% par rapport aux effectifs des exploitations qui sont de 8 à 12 personnes.

En 1991, les terres cultivées représentaient près d'un million d'hectares pour un potentiel cultivable total de 4,8 millions d'hectares sans prendre en considération les terres "protégées" (1,2 millions de terres cultivables). Ce tableau très optimiste pour l'ensemble du pays cache des disparités importantes entre les départements et encore plus à l'intérieur des départements.

RESSOURCES FORESTIERES NATURELLES

Superficie

Tableau 2: Evolution des superficies boisées(ha) de 1980 à 1995*

Type de formation

1980

1985

1990

1995

Forêts décidues, semi-décidues et galeries forestières

63125

59 427

55 946

52 669

Forêts claires et savanes boisées

1 274 375

1 119 726

1 129 449

1 063 289

Savanes arborées et arbustives

6 095 625

5 738 560

5 402 411

5 085 954

Formations saxicoles

235 000

221 234

208 275

196 075

Formations périodiquement inondées

162 500

152 981

144 020

135 584

TOTAL

7 830 625

7 371 928

6 940 101

6 533 571

Source: CENATEL, 1995.

* Les données ne sont pas disponibles au-delà de 1995

Volume

Tableau 3: Potentiel ligneux par sous-filière

Sous - filière

Volume ligneux disponibles(m3 par an)

Bois énergie

Bois de service

Bois d'_uvre

10 900 000

2 700 000

652 000

Source: Etude filière Bois au Bénin; 1997,MPREPE. 

RESSOURCES FORESTIERES PLANTEES

Le tableau suivant donne l'évolution des superficies plantées de 1985 à 1999. Il s'en dégage un taux annuel de reboisement de 3 421 ha.

Tableau 4: Recapitulatif des journees nationales de l'arbre et des campagne nationale de reboisement de 1985 -1999

Annees

Journees nationales de l'arbre (nbre de plants mis en terre)

Campagne de reboisement(nbre de plants mis en terre)

Total

Superficies estimees en(ha)

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

173 552

297 823

309 023

374 183

296 131

152 193

316 820

258 231

163 206

676 729

297 659

178 637

254 786

127 572

93 569

1 106 950

1 382 653

2 443 945

2 960 368

1 873 877

1 629 349

2 098 787

1 878 236

1 735 279

3 592 501

3 367 233

4 378 931

3 117 342

3 779 870

4 059 392

1 280 502

1 680 476

2 752 968

3 334 751

2 170 008

1 781 542

2 415 607

2 136 467

1 898 485

4 269 230

3 664 892

4 557 568

3 372 128

3 907 442

4 152 961

1 106

2 006

3 546

4 295

2 718

2 172

3 016

2 871

2 518

5 212

4 885

5 564

4 323

4 596

5 191

Total

3 970 114

39 404 713

43 375 027

54 019

Source: DFRN, 1999.

Production, commerce et consommation des produits forestiers

Production

Les sources de production sont les suivantes:

l'exploitation des forêts naturelles en zones protégées;

l'exploitation de plantations privées;

l'exploitation des plantations de l'ONAB;

l'importation de madriers (Togo et Nigeria);

l'exploitation des Forêts Classées.

La production se fait par les différentes catégories d'acteurs: ONAB, paysans exploitants, exploitants forestiers agréés ou clandestins.

Les techniques de production, aussi bien de bois d'_uvre que de bois énergie, induisent d'énorme pertes de ressources; les rendements matières sont:

pour la production de madriers: 30% avec usage de la tronçonneuse qui reste le mode de transformation très répandu au Bénin malgré son caractère non réglementaire;

pour le charbon de bois: 10 à15%(les techniques de carbonisation utilisées sont artisanales).

Pour le bois d'_uvre les principales essences exploitées sont: Khaya senegalensis, Ceiba pentendra, Khaya grandifolia, Tectona grandis, Antiaris africana, Milicia exselsa, Isoberlinia dorka, Pterocarpus erinacus, Afzelia africana, etc.

La production de grumes au Bénin est principalement faite en association avec les usines de sciage dites modernes. Ces dernières transforment surtout des grumes de teck en débités et aussi en parquets ou frises à parquets en deuxième transformation.

Une certaine quantité de grumes est également sciée en débités par les petits ateliers de débitage qui eux-mêmes sont souvent intégrés à une menuiserie ou ébénisterie. De manière générale, toutefois, ces ateliers de débitage refendent surtout des madriers et peu de grumes.

Commerce

Marché local: Le prix de revient des débités produits au Bénin diffèrent significativement selon qu'il s'agit du marché de zones rurales du Bénin ou du marché des centres urbains du sud. Deux exemples représentatifs de chacun de ces sous-marchés sont décrits ci-après. Dans un premier temps, les prix de revient de la zone Natitingou/Djougou sont présentés, suivis des prix de revient des débités dans les centres urbains du Sud.

Tableau 5: Prix de revient des débités aux ateliers de débitage au Bénin

Elément du coût

Nord Bénin

Sud Bénin

 

(F CFA/ madrier)

(F CFA/ madrier)

Achat de billes de l'exploitant

5 500

5 500

Chargement sur camion

100

100

Transport

1 000(moyenne 200 km)

1 500 (moyenne 300 km)

Frais de route

100

200

Déchargement

300

400

Marge aux grossistes et Dépôts

-

4 800

Débitage en planches ou chevrons

500

1 000

TOTAL

7 500 F CFA/unité

13 500 F CFA/unité

Prix de revient au mètre cube

(1 madrier =.096 m3)

78 100 F CFA /m3

140 600 F CFA /m3

Source: Etude filière Bois au Bénin, 1997. MPREPE

Marché international

Les prix de vente sur le marché international résultent d'âpres négociations entre acheteurs et vendeurs internationaux qui tiennent compte d'un ensemble de facteurs influençant les différents marchés des produits du bois à travers le monde.

Le seul commentaire significatif à formuler ici est que les prix à l'exportation des produits du bois sont en fluctuations constantes et que les producteurs du Bénin n'ont absolument aucun moyen de les influencer directement. Leur niveau de production est tout à fait négligeable à l'échelle internationale.

AUTRES PRODUITS DU SECTEUR FORESTIER ET LEUR ROLE

Le bois de feu et le charbon de bois

La consommation de combustibles ligneux au Bénin est d'environ 5.200 000 tonnes par an de bois de feu et de 19 000 tonnes par an de charbon de bois. La consommation du bois comme source d'énergie est le fait d'environ 80% de la population béninoise.

Les produits forestiers non-ligneux

Il existe une gamme très diversifiée de produits forestiers non-ligneux au Bénin. Cette gamme inclut les pâturages pour les animaux, les terres fertiles pour l'agriculture, les cours et plans d'eau pour la pêche; diverses matières premières pour l'artisanat; le miel; le gibier et autres produits de cueillette pour l'autoconsommation et la commercialisation; etc. Cependant, faute de statistiques, il n'est pas aisé d'apprécier à sa juste valeur, l'importance de ces différents produits.

Au rang des produits forestiers non-ligneux, la faune sauvage est valorisée à travers le tourisme. Les parcs nationaux de la Pendjari et du W accueillent de nombreux visiteurs pendant la saison touristique (15 Décembre - 30 Avril (15 Mai)). Il faut par ailleurs préciser que la valeur récréative des forêts et leur intérêt socio-culturel restent encore insuffisamment exploités surtout en ce qui concerne les forêts des périmètres de reboisement urbains ou péri-urbains.

POLITIQUES, LEGISLATION ET INSTITUTIONS FORESTIERES

Lois et politiques d'aménagement des forêts

La loi 93-009 du 2 juillet 1993 portant régime des forêts en République du Bénin et son décret d'application constituent un acquis majeur dans les évolutions récentes, en ouvrant la possibilité de contrats de gestion entre l'Etat, les communautés rurales et les particuliers pour l'aménagement des ressources naturelles. Les autres avancées récentes comme l'interdiction d'exporter des grumes ou le charbon de bois, ainsi que l'exonération des produits issus des forêts des particuliers et des coopératives de toute taxe d'exploitation, sont aussi des acquis intéressants pour favoriser la mise en _uvre de la politique forestière.

En effet, en 1994, une politique forestière a été définie. Son objectif global est la conservation et la gestion rationnelle des ressources du domaine forestier (sol, eau, flore, faune), en vue d'en assurer la pérennité et garantir une production soutenue de services et de biens pour le bénéfice des populations. Les orientations stratégiques mettent l'accent sur:

la promotion de la participation des populations à la gestion des ressources forestières;

la gestion rationnelle des ressources forestières;

la conservation du patrimoine forestier et la protection des ressources fauniques;

le renforcement du cadre institutionnel et la réorganisation du service forestier.

Secteur privé

Le secteur privé a été impliqué dans l'élaboration de la politique forestière. Le processus d'élaboration a englobé l'ensemble des acteurs du secteur, et dans plusieurs ateliers de réflexion sur la réforme de l'Administration forestière.

Néanmoins il n'existe toujours pas de cadre formel de concertation entre le secteur public et le secteur privé et celui-ci n'est pas systématiquement consulté sur les choix stratégiques, par exemple pour les besoins d'adaptation du cadre juridique, la promotion des filières ou les besoins d'évolution des taxes et des redevances. L'appui de l'Administration forestière à la structuration du secteur et au développement du rôle des organisations professionnelles comme interlocuteurs à part entière dans la mise en _uvre concertée de la politique forestière, reste à être amélioré.

Secteur public

Suite aux importantes réformes des années 1989 et 1990 sur les plans politique et économique, l'Etat a dû redéfinir son rôle et améliorer l'efficacité de son intervention. Des idées fortes ont été développées et mettent en outre l'accent sur la garantie de la pérennité du patrimoine écologique national. Sur le plan national, les acteurs du secteur public qui interviennent sont la DFRN et les DFPRN au sein des CARDER, l'ONAB, le CENATEL, le CENAGREF, l'ABE et les divers projets forestiers.

Mais des dysfonctionnements existent soit au sein de chacune de ces structures ou dans la complémentarité qui devrait régir leurs actions dans le sens d'un développement durable des ressources naturelles. Ceci s'explique, d'une part, par l'organigramme actuel de la DFRN qui est dépassé et ne correspond plus aux besoins de la nouvelle politique forestière dans la mesure où il s'inspire d'une conception centralisée. Cette dernière dissocie d'une part l'aménagement et d'autre part la gestion des ressources naturelles, prévoit encore des responsabilités directes des services centraux dans la mise en _uvre, conçoit les populations comme des participants et non des moteurs de la mise en _uvre, accorde peu d'importance aux fonctions de planification, suivi et évaluation, et ne mentionne pas les fonctions relatives au développement des capacités des communautés, des ONG et des opérateurs privés.

D'autre part le décret 97- 279 réorganisant la DFRN en 4 services qui sont:

Etudes, Synthèse et Evaluation;

Suivi de la Gestion des Plantations et Forêts Naturelles;

Suivi de la Gestion de la Faune;

Secrétariat Administratif.

Mais aucun arrêté n'est venu depuis 3 ans mettre en place les services et préciser leurs attributions, toujours dans l'attente de la réorganisation de l'Administration forestière. L'organigramme actuel de la DFRN est donc toujours un frein à la mise en _uvre de la politique forestière en empêchant une organisation interne conforme aux besoins et en négligeant des fonctions importantes. On note aussi, une faiblesse des relations entre la DFRN, les Directions Départementales de Forêts au sein des CARDER et surtout les agents de terrain.

Investissement dans le secteur forestier et des produits forestiers

Le secteur forestier est handicapé dans son fonctionnement par des dotations budgétaires insuffisantes. Ceci s'explique notamment par:

l'absence d'un fonds forestier national;

une volonté politique freinée par des restrictions budgétaires générales;

une priorité accordée au secteur forestier qui, plus est marqué par des dysfonctionnements internes.

Cependant, le partenariat avec les institutions internationales a permis au Bénin de mobiliser au cours des vingt dernières années environ trente milliards de Francs CFA à travers une dizaine de Projets forestiers. La nouvelle politique forestière (1994) et les orientations stratégiques de l'audit institutionnel du secteur forestier (1999) laissent présager des possibilités d'investissement plus importants au cours des années à venir.

Renforcement institutionnel et accroissement des capacités nationales

L'objectif principal de l'audit institutionnel du secteur forestier récemment réalisé avec le concours de la Banque Mondiale à travers les fonds de préparation du Projet de Gestion des Forêts et Terroirs Riverains (PGFTR) est de diagnostiquer le dysfonctionnement du secteur forestier et de définir une stratégie de renforcement des capacités nationales.

La stratégie définie repose sur six principes directeurs à savoir:

s'inscrire en cohérence avec les principes de la politique forestière et au service de ses objectifs;

privilégier le renforcement de la Direction des Forêts et des Ressources Naturelles et de ses services déconcentrés;

contribuer à la préparation du Projet de Gestion des Forêts et Terroirs Riverains;

partir des communautés rurales qui sont appelées à devenir progressivement des acteurs centraux de la mise en _uvre de la politique forestière;

prendre en compte la perspective de la décentralisation;

mettre en place un cadre pérenne et efficient.

Sujets environnementaux

Les sujets environnementaux (protection de l'atmosphère, gestion des déchets toxiques, protection des eaux, conservation des sols, etc.) sont régis par des instruments et mécanismes juridiques bien définis.

La préservation d'un environnement sain, satisfaisant et favorable à un développement durable est une exigence constitutionnelle au Bénin. Les dispositions pertinentes de la constitution du 11 décembre 1990 soulignent l'importance accordée à la question.

Les principes fondamentaux de la protection de l'environnement et de la conservation des ressources naturelles relèvent du domaine de la loi. Ainsi la loi portant Régime des Forêts se trouve confortée par la loi n° 98-030 du 12 février 1999 portant Loi Cadre sur l'Environnement en République du Bénin. Ces deux lois constituent des mécanismes juridiques importants dans le domaine de la gestion de l'environnement.

Il faut signaler que l'Agence Béninoise pour l'Environnement travaille actuellement à la mise en place d'un Système d'Information et de Suivi de l'Environnement sur Internet.

Aménagement durable des forêts

Outre la mise en place des projets de reboisement et d'aménagement de forêts prévus et appuyés par différents bailleurs de fonds, le gouvernement béninois devrait appliquer de façon stricte sa politique forestière et viser à limiter la production annuelle à un niveau assurant la pérennité de la ressource. Considérant l'importance à accorder à la préservation du capital forestier, à la pleine utilisation de l'appareil de production en place et à la maximisation de la transformation locale de la ressource forestière, le gouvernement devrait s'inspirer de l'expérience des projets en cours sur son territoire et s'appliquer à généraliser l'approche participative pour l'aménagement et la gestion des forêts classées.

Il devrait aussi revoir les mesures fiscales touchant l'exploitation et la transformation des ressources forestières et envisager une répartition locale et /ou régionale d'une partie des taxes et redevances afin d'alimenter un fonds forestier permettant de réinvestir dans le développement forestier local et la mise en _uvre des plans d'aménagement participatif des ressources forestières.

La participation des communautés rurales à la gestion participative des ressources naturelles est certes permise et cadrée par la loi 93-009. Néanmoins le cadre juridique est encore inadapté ou incomplet car:

la participation des communautés rurales n'est envisagée que dans le cadre de contrats de gestion passée avec l'Etat. En dehors de cette situation, elles n'ont pas voix au chapitre concernant l'exploitation forestière dans le domaine protégé car celle-ci reste régie par un mécanisme de permis de coupe délivré par les services forestiers aux exploitants (sans prise en compte même consultative, du point de vue des communautés);

le texte d'application est insuffisamment précis en ce qui concerne les modalités du contrat de gestion forestière, les mesures conservatoires et les sanctions (art. 45 et 48 de la loi), notamment pour la nature et surtout les critères de représentativité des structures villageoises habilitées à contracter avec l'Etat (art. 31 du décret);

l'absence de fiscalité différente entre les forêts aménagées et celles non aménagées pénalisent les groupements d'exploitation opérant dans les premières; en effet la possibilité de fraude est plus importante dans les forêts non aménagées, ce qui fait une concurrence déloyale aux opérateurs en forêt aménagée acquittant leurs taxes et redevances.

Biodiversité et durabilité des écosystèmes

Le Bénin à l'instar de plusieurs autres pays est bien conscient de la valeur intrinsèque que représente sa diversité biologique sur les plans écologique, scientifique, économique et socio-culturel. En conséquence, il a signé et ratifié la Convention sur la Biodiversité, respectivement le 13 juin 1992 et le 30 juin 1994. Et c'est dans ce cadre qu'un comité national de suivi de la Convention sur la Biodiversité a été installé. Un Programme Biodiversité et Gestion de l'Environnement est en cours au CBDD. Dans ce cadre des actions sont menées avec le PAZH, l'ABE et la Cellule animée par le Point Focal sur la Diversité Biologique au Bénin.

Les objectifs visés sont de deux ordres:

_uvrer à une meilleure connaissance et à la conservation des ressources biologiques du pays et à l'utilisation durable des éléments constitutifs;

assurer une exploitation rationnelle du patrimoine biologique pour l'amélioration des conditions de vie des populations locales.

Un Système d'Information et de Suivi de l'Environnement sur Internet dont la mise en place est en cours à l'Agence Béninoise pour l'Environnement voudrait entre autres contribuer à l'atteinte de ces objectifs.

Les orientations à plus ou moins court terme en matière de gestion de la biodiversité concernent:

l'élaboration d'une stratégie nationale;

l'élaboration d'un plan d'actions dont la mise en _uvre serait assurée dans le cadre d'une structure de projet.

Conservation des sols et des eaux

La loi cadre sur l'Environnement et la loi portant régime des forêts de même que l'Agenda 21 National contiennent des dispositions réglementaires pour l'utilisation et la conservation des sols et des eaux.

Les objectifs visés en ce qui concerne la conservation des sols sont notamment:

créer des mécanismes susceptibles de faciliter la participation de tous les acteurs, notamment les collectivités et les populations locales, au processus de prise de décision en matière d'occupation et de gestion des terres.

établir un diagnostic sur les potentialités et les contraintes de développement de chaque localité.

adopter et mettre en _uvre des politiques propres à assurer la meilleure utilisation possible des sols et la gestion durable des terres.

créer et renforcer un système de planification, d'évaluation et de gestion des terres à partir d'un plan d'aménagement du territoire national.

Quant à la gestion des eaux, les objectifs définis sont notamment:

formuler des plans d'action pour l'utilisation durable de l'eau dans l'agriculture, l'élevage, la pêche, l'énergie, le transport, le tourisme, etc.

définir une stratégie nationale de gestion et de préservation des ressources en eau.

Dans le cadre de ces derniers objectifs, le Ministère des Mines, de l'Energie et de l'Hydraulique a récemment élaboré un document d'analyse prospective intitulé "VISION EAU 2025''

TAXATIONS

Les textes actuels posent plusieurs problèmes importants:

la non réactualisation des taxes et redevances depuis 74 fait que leur niveau est devenu ridiculement bas. Ceci limite les possibilités de rentrées fiscales pour l'Etat et favorisant l'arrivée de nouveaux opérateurs, alors que l'accès à un patrimoine public (devenu rare) devrait soit être rendu plus difficile que dans d'autres secteurs, soit générer des recettes compensatoires pour la communauté;

les procédures de recouvrement ne facilitent pas la perception des taxes et redevances.

Perspectives pour les ressources forestières

A défaut d'un inventaire forestier national, l'évaluation des ressources forestières n'est faite qu'à partir d'hypothèses diverses appuyées par quelques données d'inventaire disponibles seulement pour quelques forêts. Aussi, il n'existe pas de statistiques permettant de cerner avec une précision suffisante le niveau de consommation des produits forestiers. Diverses études ont été menées et ont abouti à des estimations plus ou moins concordantes. Celles relativement récentes contenues dans le rapport de l'Etude de la filière Bois au Bénin donnent les indications suivantes:

Tableau 6: Disponibilité et consommation en ressources forestières au Bénin

 

Disponibilité

Consommation(1997)

Observations

Bois d'_uvre

652 000 m3 de grumes par an

112 000 m3 de grumes par an

dont 52 000 m3 de teck; 60 000 m3 de bois rouges et de bois blancs dont 30 000 m3 importés du Togo et du Nigeria

Bois de service

2 700 000 m3 par an

20 000 à 25 000 m3 par an

 

Combustibles ligneux

10 900 000 m3 par an

7 642 000 m3 par an

Pour 2012 la projection de consommation est de 11 530 000 m3 par an.

Le ratio de couverture de besoins a été de 1,43% en 1997 et sera de 0,95% en 2012

Source: Etude filière Bois au Bénin, MPREPE, 1997

Les projections de consommation sur des bases très simples (maintien des tendances démographiques et des habitudes de consommation en combustibles ligneux) montrent qu'à l'horizon 2012 les besoins nationaux ne peuvent être couverts si aucune évolution marquante n'intervient pour améliorer le niveau actuel des ressources.

Par ailleurs, il existe des habitudes de consommation aussi bien pour le bois d'_uvre que pour le bois de service ciblées sur les espèces dont les quantités ou volumes n'ont pu être estimés dans le cadre des études disponibles.

Enfin l'intégration économique et douanière sous-régionale sera un levier important pour le développement des secteurs privés nationaux, dont celui de la filière bois, mais posera aussi des problèmes certains pour la mise en _uvre de la politique forestière béninoise. A cet égard, l'évaluation de l'offre et de la demande en produits forestiers devra tenir compte des dispositions de cette intégration économique surtout en ce qui concerne:

la libre circulation des produits locaux, incluant le bois brut ou équarri, rendra caduque la disposition actuelle concernant l'exportation des grumes (en effet toute restriction quantitative ou toute entrave non tarifaire deviendra illégale). Il s'en suivra une remise en question de l'un des instruments de valorisation et de réduction de pressions; de même, il s'avéra quasiment impossible de faire respecter l'interdiction d'usage de la tronçonneuse, dès lors que les produits tronçonnés circuleront librement sans justificatif de leur origine;

le libre accès au marché béninois par les pays frontaliers pourrait générer une demande donc une pression accrue sur certaines essences nationales.

CONCLUSION

Le secteur forestier au Bénin a connu des avancées significatives surtout depuis l'avènement du renouveau démocratique. La nouvelle politique forestière, les lois et dispositions réglementaires dont le Bénin s'est doté, de même que les accords et conventions signés et/ou ratifiés, concourent à la création de meilleures conditions cadres pour la gestion des ressources forestières et la durabilité des écosystèmes. Diverses actions ou projets mis en _uvre sont dans le cadrage des nouvelles orientations de la politique forestière.

Cependant, il reste encore beaucoup à faire pour rendre plus performant le fonctionnement du secteur forestier. En particulier, l'accent devra être mis sur:

la connaissance de l'état des ressources afin de pouvoir en planifier une gestion rationnelle et durable;

l'actualisation des textes fixant les taxes et redevances pour l'exploitation forestière;

la mise en _uvre de la stratégie de renforcement des capacités de la DFRN tel que prévu par l'audit institutionnel;

une meilleure implication du secteur privé dans la gestion des ressources forestières;

une analyse et une projection de la gestion du secteur forestier sur le moyen ou le long terme afin de retenir une stratégie pour renforcer les tendances positives et atténuer les effets des tendances lourdes.

Fort heureusement, les actions prévues, initiées ou en cours, tendent à lever ou à minimiser les différentes pesanteurs afin que la forêt vive et soutienne durablement l'économie nationale.

BIBLIOGRAPHIE

Project BEN/96/001/PRCIG, INSAE Sept. 1996. Tableau de Bord Social.

MPREPE, Plan d'Orientation 19998-2000, Juillet 1998. Rapports thématiques.

INSAE, 1998. Point Conjoncturel Premier Semestre 1998.

INSAE, Juin 1997. Compte économique 1993-1995, Estimation 1996; Prévision 1997: Résultats et Analyses

MPREPE, Bilan et Perspectives à court et à moyen termes de l'Economie Nationale, 2ème Edition.

Rép. du Bénin, Cellule Macro-économique de la Présidence, 1995. Rapport sur l'Etat de l'Economie Nationale.

Rép. du Bénin, Cellule Macro-économique de la Présidence, Décembre 1997. Rapport sur l'Etat de l'Economie Nationale: Développement récents et perspectives à moyen terme.

MPREPE/BM, 7-9 Mai 1998. 4ème Revue de Performance des Projets.

DP/MPREPE, PNUD, Bilan et Perspectives à court et à moyen terme de l `Économie Nationale; 3ème Edition.

MPREPE, 1998. Etude sur Filière Bois au Bénin.

BENIN, BHUTAN, COSTA RICA, THE NETHERLANDS, 1998. Conference of the Parties to the Convention on Biological Diversity.

CBDD, Note d'Information Numéro 3: Programme Biodiversité et Gestion Durable de l'Environnement.

PGFTR/DFRN/MDR, Décembre 1999. Diagnostic Prospectif, Tome 1.

PGFTR/DFRN/MDR, Décembre 1999. Diagnostic Prospectif, Tome 2.

PGFTR/DFRN/MDR, Décembre 1999. Diagnostic Prospectif, Tome 3.

LE FLAMBOYANT, No 52 - Décembre 1999.

ABREVIATIONS

BM: Banque Mondiale.

CBDD: Centre Béninois pour le Développement Durable

DFRN: Direction des Forêts et des Ressources Naturelles.

DFPRN: Direction des Forêts et de la Protection des Ressources Naturelles

DP: Direction de la Planification.

INSAE: Institut National des Statistiques et Analyses Economiques.

MDR: Ministère du Développement Rural.

MPREPE: Ministère du Plan, de la Restructuration Economique et de la Promotion de l'Emploi.

PAZH: Projet d'Aménagement des Zones Humides

PGFTR: Projet de Gestion des Forêts et Terroirs Riverains

PNUD: Programme des Nations Unies pour le Développement.

Previous PageTop Of PageNext Page