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L'expérience du CIERRO

Par Jacques da Matha - Directeur du CIERRO, Centre Interafricain d'Etudes en Radio Rurale de Ouagadougou, Burkina Faso

D'un point de vue historique, nous constatons qu'aux débuts de la radio en Afrique de l'Ouest, la radio rurale n'existait pas. Des émissions étaient diffusées en langue nationale, mais les préoccupations quotidiennes des populations, comme la santé ou toute question liée à l'agriculture, étaient rarement traitées.

Les premières radios commencèrent à diffuser des programmes éducatifs sur les difficultés et préoccupations rurales. Ensuite, il y eut les forums radio et les clubs radio qui sont en quelque sorte à l'origine des radios rurales, puis des radios locales.

L'idée d'une radio éducative s'inspire de l'expérience canadienne, où ce type de structure existe. L'UNESCO se pencha sur la question et essaya de voir comment cette approche pouvait être utilisée en Afrique, pour promouvoir alphabétisation et éducation.

Un atelier fut organisé en Afrique anglophone, à Moshi, en Tanzanie, afin que l'Afrique bénéficie de cette expérience. Il fut alors décidé d'appliquer les leçons tirées du Ghana, aux autres pays africains. En conséquence, pendant les années suivantes (de 1958 à 1966), de nombreuses radios rurales furent établies en Afrique de l'Ouest, et plus exactement au Bénin, au Burkina Faso, au Mali, en Côte d'Ivoire et au Sénégal.

Comment ces différentes radios produisent-elles leurs programmes ?

Comme indiqué par Messieurs Lamonde et Keita, l'objectif est d'établir des liens stables avec les populations locales. Nous savons que de nombreuses radios sont situées dans les capitales, mais nous savons aussi que ces radios doivent vraiment atteindre les villageois, s'adresser directement à eux, afin de comprendre leurs réels besoins et attentes, et d'en tenir compte dans leurs émissions quotidiennes.

Mais, nous avons compris que les programmes dans une certaine mesure n'atteignaient pas la cible et n'encourageaient pas la participation des auditeurs. D'autres radios furent donc installées, pour encourager les populations, pour recueillir leurs réactions, permettant ainsi de répandre les informations utiles en zones rurales.

Le processus de déréglementation qui survint dans les pays africains dans les années 1990 coïncida avec la création des radios rurales locales. A l'heure actuelle, nous avons plus d'une centaine de radios rurales au Mali, plus d'une trentaine au Burkina Faso, une trentaine au Bénin, et dix ou douze au Sénégal. Des radios rurales sont créées également au Niger et au Togo.

Ces radios sont détenues par les populations locales, qui ne pourraient plus s'en passer. Prenons le cas d'une radio au Bénin : quand un problème technique empêcha la poursuite des programmes, les villageois vécurent cet incident comme une véritable catastrophe, dans la mesure où ils n'avaient aucun autre moyen de communiquer avec leurs grandes familles. En conséquence, cette même communauté décida de trouver les moyens financiers permettant de faire revivre la radio.

Aujourd'hui, il existe différents types de radio, à savoir des radios professionnelles, associatives ou communautaires. Toutes jouent un rôle particulier en termes de service public, en particulier en encourageant la communauté tout entière à participer activement aux projets importants pour elle.

J'ai centré mon exposé essentiellement sur l'Afrique de l'Ouest, et mes collègues ici présents vous parleront bien sûr de l'Afrique anglophone durant notre rencontre.

En conclusion, je voudrais dire que des partenaires institutionnels comme l'UNESCO ou l'AIF ont joué un rôle crucial dans la création et le développement de ces radios rurales.

J'ajouterai que les tentatives menées afin de créer un réseau reliant ces radios constituent un fait essentiel. Nous devons les aider à échanger des informations. Nous nous y attelons depuis ces trois dernières années en collaboration avec l'AIF.

 

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