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DISCUSSION ET CONCLUSIONS

Evaluation globale du régime fiscal forestier

Efficacité du régime fiscal forestier

Un certain nombre d’indicateurs permettent de juger l’efficacité du régime fiscal forestier actuel :

les recettes engendrées par les services de la douane en ce qui concerne l’importation et l’exportation des produits bois – ces recettes sont évaluées à plus de 1,2 milliards en 1999 (voir Tableau 18 et Tableau 19) ;

les investissements effectués sur les forêts en aménagement à partir des fonds d’aménagement générés par les taxes sur le transport et la commercialisation du bois au niveau des marchés ruraux – cette contribution est de l’ordre de 55 millions de FCFA en moyenne par an (voir Tableau 16, Tableau 17 et Tableau 25) et va augmenter avec la mise en place de nouveaux marchés ruraux de bois ;

les revenus et le chiffre d’affaire des structures locales de gestions dans le cadre de leur activité de vente de bois dans les marchés ruraux de bois – ce revenu cumulé est présentement de l’ordre de un (1) milliard de FCFA (voir Tableau 15) et cela est un moyen efficace de lutte contre la pauvreté ;

la contribution du secteur forestier sur le PIB national qui était de 4 % en 1990 est entrain d’augmentée et l’objectif pour l’année 2004 est de rehausser cette contribution à 8 % ;

les efforts de l’Etat dans le cadre des investissements vers des secteurs plus prometteurs comme celui des productions forestières utiles (gommiers, arbre nourricier et alimentaire etc.) - cet effort est passé de 1 million de FCFA en 1991 à 1,4 milliard de FCFA en 2001 (voir Tableau 21) ;

la volonté manifeste des communautés à la base de prendre en charge la gestion et l’exploitation de leurs propres formations forestières et la volonté de l’Etat à persévérer dans la décentralisation de la gestion des ressources forestières ;

l’intérêt accordé au secteur par de nouveaux financements des bailleurs de fonds ; et

la tendance de la population à plus valoriser l’arbre sur pied.

Aussi dans le cadre de la mise en œuvre de la nouvelle politique forestière, il est envisagé l’augmentation progressive de la taxe sur les exploitations de forme incontrôlée. Ce qui, de surcroît, contribuera à l’augmentation des recettes de l’Etat.

 

 

Efficacité du contrôle

Il apparaît clairement que le régime fiscal est confronté par une « fraude légale » qui a des répercussion non seulement sur le niveau des recettes mais aussi sur l’appréciation de l’efficacité du contrôle. Celui-ci est pénalisé par certaines insuffisances à tous les niveaux dont entre autres :

le manque de moyens de fonctionnement des services des Eaux et Forêts ;

le salaire très faible des agents de contrôle ;

la mauvaise interprétation des textes par certains agents ; et

le non respect des règles par certaines catégories de population : violation des règles par les militaires, surcharge de certains types de véhicules, etc.

Le taux de contrôle qui était de 11 % de 1985 à 1990. Il est seulement de 30 % à nos jours. A titre d’exemple, on peut estimer à environ 20% l’écart entre le volume taxé et le volume réellement transporté. Les textes actuels lient les mains des agents chargés du contrôle et conduisent souvent à cette situation défavorable malgré la mise en place des moyens de communication efficaces tels que les talkies-walkies qui permettent d’améliorer les opérations de contrôle et de répression des contrevenants.

L’administration chargée des forêts continue à croire que de l’efficacité du contrôle des flux de bois aux entrées et sorties du pays ou des grandes agglomérations en dépend l’augmentation efficace des recettes fiscales. Il faut donc :

surveiller les conditions d’exploitation et d’application des orientations et directives contenues dans les Schéma Directeurs D’Approvisionnement ;

limiter le prélèvement à la possibilité de la ressource ; et

réduire la fraude.

Cela justifiera l’augmentation des recettes forestières. L’un des objectifs majeurs que se fixe actuellement la politique forestière est d’assurer le contrôle de la filière bois à 80 % à l’entrées des grands centres urbaines. L’élaboration et la révision de certains textes d’application peuvent également être l’occasion de mettre en place un système d’intéressement avec, dans la mesure du possible, des retenues à la source, qui soit à la fois incitatif pour les agents et pour orienter les prélèvements vers les marchés ruraux de bois.

 

Suivi des recettes forestières

Un dispositif a été mis en place pour suivre l’évolution du système et des recettes forestières. Il n’est pas encore systématiquement rodé et ce malgré les moyens mis en place (informatique, bordereau de versement) et les mesures prises (circuit cours d’envoi des états, coordination avec le Trésor national). Malheureusement les informations ne sont pas enregistrées et collectées régulièrement, les versements ne sont pas effectués à temps et le suivi des comptes se fait de façon anarchique. Il est toujours nécessaire de dépenser une énergie et un temps considérables pour obtenir des informations qui devraient être disponibles et présentes dans les différents services concernés. Il est souvent difficile d’interpréter certains tableaux pour apprécier les tendances. En effet dans certains cas des informations sur la régie par exemple sont manquantes.

Comme mesures à prendre, du côté par exemple des dépenses, il est nécessaire au niveau central comme au niveau décentralisé d’élaborer des plans de travail et des budgets y relatifs sur la base d’une prévision des recettes. Cela permettra de faire des choix prioritaires et aussi de faire des délégations de dépense aux régions en fonction de la disponibilité des fonds. D’autre part, des difficultés existent au trésor public quand au déblocage des factures engagées. Sur la base d’un budget annuel et trimestriel, le Ministère en charge des forêts peut faire débloquer du trésor les fonds correspondant aux dépenses programmées, les mettre sur un compte dans une banque commerciale et faciliter ainsi les déboursements.

 

Impact du régime forestier fiscal sur l’aménagement durable des forêts

Avec la nouvelle organisation, des fonds d’aménagement des forêts ont été créés à différents niveau. Ces fonds devraient contribuer à l’aménagement durable des forêts soumises à l’exploitation du bois. Les caractéristiques et les enseignements tirés du fonctionnement de ces fonds révèlent plusieurs impacts en ce qui concerne l’aménagement durable des forêts :

La plupart des fonds sont alimentés par des prélèvements fiscaux sous forme de taxes, de redevances ou une subvention ponctuelle d’un partenaire (cas du Projet Energie Domestique). La présence d’une taxe permet de bénéficier de la régularité des ressources financières. L’apport initial d’un partenaire de référence permet le démarrage rapide des activités en attendant que les mécanismes de prélèvement fiscaux se mettent en place de façon permanente. Le cas du Projet Energie Domestique phase II de consolidation est assez significatif.

Les comptes sont en général logés dans les comptes courants ou d’affectations spéciaux du Trésor public et gérés par les Directions centrales du Ministère chargé des forêts (cas des comptes 3001 et 3002). Ce qui permet une mobilisation plus facile des fonds destinés à l’appui de l’aménagement durable des forêts. Alors que les fonds versés dans un compte du trésor sont soumis au principe de l’unicité de la caisse. Les procédures de décaissement sont longues et lourdes ; ce qui peut entraîner des lenteurs et retards dans l’exécution de certains programmes d’aménagement forestier.

 

Dépenses publiques en matière d’aménagement durable des forêts

Les finances publiques constituent de nos jours le meilleur moyen d’intervention de l’Etat dans l’aménagement et le développement des forêts. Mais les procédures budgétaires sont exécutées en application des textes fondamentaux et réglementaires ci-après :

La loi n° 61-32 de 19 juillet 1961, relative aux loi des finances ;

La loi n° 90-10 du 13 juin 1990, relative à la Cour suprême ;

L’ordonnance n° 84-34 du 27 septembre 1984 modifiant la loi n°61-32 de juillet 1961 ;

L’ordonnance n° 85-32 du 14 novembre 1985 instituant le code de marché public ;

Le décret n° 61-174 du 24 août 1961, portant application du système de gestion du budget national ;

Le décret n° 68-75 du 21 juin 1968, fixant les modalités d’exécution des dépenses de l’Etat ;

Le décret n° 73-86/MF/ASN du 9 août 1973 portant organisation du trésor national ;

Le décret n° 93-45 du 12 mars 1993, portant règlement général de la comptabilité publique ;

Le décret n° 93-176/PRN/MF du 3 décembre 1998 relatif à l’organisation et aux attributions du contrôle financier ;

Le décret n° 98-187/PRN/MFRE/P du 9 juillet 1998, portant modification du décret n° 68-75 du 21 juin 1968, fixant les modalités d’exécution des dépenses de l’Etat ; et

L’institution 051/MF du 6 septembre 1967 sur la comptabilité des dépenses publiques.

Bien que l’importance du secteur forestier ait été affirmée à travers tous les plans et programmes nationaux, force est de constater que les investissements publics en matière du développement forestier restent faibles par rapport à d’autres secteurs comme l’agriculture. Il ne représentent guère un peu plus de 1 % des dépenses totales de l’Etat.

Les tentatives de mise en place de financement du monde rural n’ont pas donné les résultats escomptés. Les fonds locaux de développement et les fonds locaux d’aménagement des ressources forestières mis à la disposition des structures communautaires n’ont fonctionné.

Aussi, tant au niveau central et qu’au niveau des collectivités, les procédures d’exécution des dépenses budgétaires prévues par les textes juridiques et institutionnels ci-dessus énumérés se heurtent dans la pratique à des obstacles techniques et humains comme la diversité des opérations et le gaspillage, qui rendent toutes prévisions et autorisations financières aléatoires. De même, à travers les mécanismes d’exécution, des lacunes existent, notamment la non application de certains textes devenus caducs ou des textes qui existent et qui n’ont jamais connus d’application. On peut citer par exemple le non fonctionnement de la Chambre des comptes et de discipline budgétaire chargée de faire le contrôle à posteriori de l’exécution du budget. En effet, depuis 1981, aucun rapport de la chambre n’a été soumis au Parlement dans les perspectives de l’édition de la loi de règlement.


A ces contraintes s’ajoutent encore :

Le fait que le Niger n’est pas un pays de transformation et d’exportation de produits forestiers.

Des encrages institutionnels des projets assurant difficilement la mobilisation optimale de l’ensemble des intervenants : cas du Plan National de l’Environnement pour un Développement Durable (PNEDD), du Fonds pour l’Environnement Mondial (FEM) et du Projet de Gestion des Ressources Naturelles (PGRN) qui sont respectivement sous la tutelle du Ministère de plan et du Ministère de Développement rural.

La réduction de la présence de l’Etat dans la production, la commercialisation et le transport des produits forestiers a été déjà engagée. Elle se poursuit actuellement dans le cadre du produit bois énergie. En fait l’administration devrait se focaliser sur l’information, la sensibilisation, le contrôle et la mise en place des conditions juridiques et réglementaires en ce qui concerne surtout les produits forestiers non ligneux.

Une faible participation des collectivités territoriales dans le développement du secteur forestier : il s’agit d’actions conçues par les services techniques sous forme de fiches d’opérations. Dans les perspectives d’une décentralisation, les collectivités territoriales auront leurs propres formations forestières et seront amenées à faire des investissements d’intérêts collectifs de plus grande envergure.

L’absence d’entreprises privées : malgré la nouvelle réglementation sur le transport et la commercialisation des produits bois, les entreprises privées tardent à se mettre en place. Les rares investissements se font dans les plantations de gommier et le transport de bois énergie. La production de la gomme arabique qui se veut promoteur est actuellement découragée par le prix de la gomme sur le marché international. Quant au transport de bois énergie, il se fait par des moyens de transport assez vétustes qui ne peuvent transporter que de petites quantités de bois.

Des organisations rurales souvent informelles : il existent actuellement un certain nombre de textes qui régissent la création d’organisations paysannes. Ce sont les textes sur les associations ou organismes ruraux à caractère coopératif et mutualiste. Par la suite, la liste des organisations paysannes s’est élargie à travers par exemple l’ordonnance relative au commerce et au transport de bois énergie et les organisations dans le cadre de la gestion des terroirs. A ce titre, elles assument, en partie ou en totalité, un certain nombre de responsabilités dévolues aux collectivités ou à l’administration rurale. Malheureusement à cette date, il n’existe aucun texte officiel régissant les statuts de ces organisations.

 

 

Attitude face à la situation actuelle

Orientations sur l’organisation des filières

Le faible prix du bois n’incite pas les consommateurs à économiser le bois et la demande qui s’accroît avec l’augmentation de la population urbaine va en défaveur des politiques de gestion durable des forêts. Le prix de revient du bois plus cher dans les marchés ruraux que dans l’exploitation de type incontrôlée n’incite pas les commerçants transporteurs à s’orienter vers les zones en aménagement. L’une des mesures la plus probante pour lutter contre cette vision des acteurs principaux de la filière bois est l’augmentation des taxes dans les systèmes d’exploitation incontrôlé pour renchérir le prix de bois. Mais cela attire souvent la fougue du syndicat des exploitants du bois et c’est une mesure très difficile à prendre par le politique.

De nos jours, il est plus intéressant de jouer sur le taux de contrôle pour assurer le recouvrement normal des taxes liées à l’exploitation et au commerce du bois et pour permettre à tous les niveaux de l’administration en charge des forêts d’assurer de façon autonome ses tâches de contrôle et de suivi administratif des formations forestières exploitées.

 

Orientations sur le financement du secteur forestier

Bien que présentant des avantages certes en ce qui concerne le financement facile et durable de l’aménagement des forêts, la mobilisation des fonds d’aménagements présente quelques insuffisances qui ne permettent pas le bon fonctionnement du secteur :  

Le manque de clarté dans les objectifs de ces fonds (cas des fonds d’aménagement au niveau des SLG et des collectivités) ainsi que le manque de textes juridiques ne permettent pas souvent que les ressources de ces fonds soient totalement consacrées à la réalisation de leurs objectifs. Ainsi, on a constaté que ces différents fonds sont sous utilisés ou ont servi à financer des frais de fonctionnement au détriment des activités de terrain.

Dans beaucoup de cas, la situation du Trésor public caractérisée souvent par une absence de liquidité rend difficile le décaissement effectif des fonds.

En ce qui concerne les fonds alloués par l’Etat, les textes de libération des fonds connaissent des retards dans leur adoption et publication entraînant a insi l’impossibilité de bénéficier des ressources prévues.

Aussi, le système de contrôle de ces fonds, ainsi que la production de bilans financiers sont pratiquement absents.

Enfin, la mobilisation des ressources prévues connaît des difficultés de recouvrement ou de reversement. Les services chargés de leur recouvrement ne sont pas en effectif suffisant ou n’ont pas suffisamment de moyens.

En terme de perspective, le financement de l’aménagement des forêts se fera à travers la mise en place du « Fonds National de l’Environnement  (FNE)» prévu par la loi n°98-56 du 29 décembre 1998 relative à la gestion de l’environnement. Le FNE n’est pas encore fonctionnel mais sera l’aboutissement d’un long processus tant sur le plan mondial que sur le plan national.

 

 

 

 

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