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Module 7: Les systèmes nationaux de contrôle des aliments: composantes et activités


7.1 Introduction et historique
7.2 L’importance du contrôle des aliments
7.3 Qu’est-ce que le contrôle des aliments?
7.4 Le développement d’une politique nationale de contrôle des aliments
7.5 La situation actuelle
7.6 Le commerce international des aliments
7.7 L’impact de l’Organisation mondiale du commerce
7.8 Les orientations futures du contrôle des aliments

Service la qualité des aliments et des normes alimentaires
Division de l’alimentation et de la nutrition

OBJECTIF

L’objectif de ce module est d’expliquer quels sont les principaux éléments d’un système national de contrôle des aliments, et comment ces composantes peuvent et doivent être gérées pour une efficacité maximale. Les pièges classiques y sont indiqués et les avantages d’un système efficace décrits. Les approches de gestion moderne sont présentées. On met en outre l’accent sur l’importance qu’il y a pour l’Etat, les industries et les consommateurs à collaborer entre eux afin de satisfaire aux objectifs nationaux de renforcement de la protection des consommateurs et de progrès économique par le biais d’un commerce d’aliments sains et de qualité.

POINTS CLÉS

· La structure de base du contrôle des aliments comporte une législation alimentaire et ses compléments réglementaires, un service d’inspection, des services d’analyses et de contrôle, et des services de soutien incluant la formation, la communication et le conseil.

· Pour développer une politique de contrôle des aliments, il serait souhaitable d’associer le secteur industriel et les organisations de consommateurs au travail de l’administration publique.

· Une politique globale de contrôle des aliments fondée sur l’examen de la situation actuelle et impliquant toutes les parties en présence aidera à générer les ressources nécessaires et suscitera les engagements correspondants.

· Dans le cadre des politiques de réduction des dépenses publiques, les systèmes de contrôle des aliments des pays développés font l’objet de restructurations. La mise en place de systèmes fondés sur la hiérarchisation des risques devrait aider à déterminer les domaines vers lesquels réorienter les moyens restants.

· Le respect de la disposition de l’Accord SPS, selon laquelle seules les mesures techniques scientifiquement justifiées peuvent être mises en œuvre, tend à favoriser les systèmes de contrôle des aliments qui prennent les risques en compte.

7.1 Introduction et historique

Le contrôle des aliments est une activité ancienne...

L’accès à des aliments sains, dans lesquels le consommateur a confiance et qui lui apportent les nutriments nécessaires fait partie des besoins fondamentaux de la personne. L’Etat a le devoir de s’assurer que ce besoin soit couvert. La production de denrées alimentaires saines et de bonne qualité est une condition nécessaire au développement harmonieux et durable de l’agriculture nationale et du commerce intérieur et international des aliments.

L’application de normes alimentaires destinées aux échanges commerciaux et à la protection des consommateurs est une véritable tradition. Moïse a rapporté les Tables de la Loi afin d’empêcher la consommation de la viande d’animaux considérés comme sales ou impurs, notamment celle d’animaux morts dans d’autres conditions que l’abattage rituel. Des tablettes assyriennes décrivent comment s’y prendre pour déterminer correctement les poids et mesures des grains. La civilisation des Egyptiens est la première à être connue pour avoir prescrit les conditions d’étiquetage de certains aliments. Dans la cité athénienne de l’Antiquité, la bière et les vins faisaient l’objet d’inspections garantissant la pureté et la stabilité de ces produits. Les Romains ont mis sur pied un système étatique extrêmement bien administré de contrôle des aliments pour protéger les consommateurs des fraudes et de la vente de produits dénaturés ou de mauvaise qualité. En Europe, au Moyen-Age, certains pays ont adopté des législations portant sur la qualité et l’innocuité des œufs, des saucisses, du fromage, de la bière, du vin ou du pain. Quelques unes de ces anciennes lois sont d’ailleurs toujours en vigueur aujourd’hui. La Révolution industrielle qui a débuté en Europe à la fin du XVIIIe siècle a donné un élan technique et économique au commerce transcontinental et intracontinental des aliments. En tant que science, la chimie des aliments date du milieu du XIXe siècle. Les premières normes alimentaires et les principes élémentaires des systèmes de contrôle des aliments datent approximativement aussi de cette même période.

Du Moyen-Age à aujourd’hui, les mesures de protection des consommateurs n’ont cessé d’évoluer et de se développer offrant une meilleure protection et abordant toujours mieux des problèmes d’un niveau de complexité croissant, liés à la qualité et à l’innocuité des aliments et aux pratiques commerciales. C’est en particulier le cas après l’introduction des techniques de production de masse et l’émergence des grands centres de peuplement urbains à la fin du XVIIIe siècle et au début du XIXe siècle. Des approches nouvelles et différentes du contrôle des aliments et de la protection des consommateurs s’avérèrent dès lors nécessaires pour traiter publiquement les problèmes alimentaires posés par ces considérables bouleversements. La plupart des pays qui ont vécu ces changements y ont répondu en promulguant un ensemble de lois et de règlements concernant les produits alimentaires et en mettant en place des institutions et organismes officiels afin d’administrer les activités de contrôle des aliments. Cette approche a fourni les bases et les éléments précurseurs au contrôle des aliments d’aujourd’hui.

7.2 L’importance du contrôle des aliments

... mais les problèmes de sécurité alimentaire et de fraude n’en sont pas moins actuels

Le contrôle des aliments joue un rôle important en ce qu’il garantit une offre d’aliments sains, nutritifs et de haute qualité dans l’intérêt de la santé de la population et des bénéfices économiques qui dérivent d’un commerce de produits alimentaires sains et de haute qualité. Des éléments récents se sont toutefois avérés suffisamment alarmants pour soulever quelques interrogations concernant l’efficacité des systèmes de contrôle des aliments. A l’échelon mondial, près de 800 millions de personnes souffrent tous les ans de malnutrition. La plupart des personnes touchées vivent dans des pays en développement. La malnutrition ne résulte pas uniquement d’une offre insuffisante en produits alimentaires mais aussi de la consommation de la variété limitée des aliments, des produits malsains et de mauvaise qualité, qui ne fournissent pas les niveaux appropriés des macro- et micro-nutriments nécessaires à une bonne santé. Chaque année, trois millions d’enfants meurent des maladies diarrhéiques (y compris la dysenterie) causées par la consommation d’aliments de mauvaise qualité et d’eau non-potable.

Lorsqu’on analyse les principaux problèmes liés à l’innocuité des aliments que rencontrent la plupart des personnes dans le monde, on s’aperçoit que les consommateurs sont soucieux de la présence de contaminants chimiques dans les produits alimentaires, notamment de mycotoxines (y compris les aflatoxines), de produits chimiques industriels tels que les diphénols poly-chlorés et les métaux lourds, de produits chimiques agricoles tels que les pesticides et les fertilisants, de la présence des résidus de médicaments administrés aux animaux et également de l’innocuité des additifs et des colorants ajoutés aux aliments. Dernièrement, la couverture accordée par les médias à l’irruption de graves maladies infectieuses d’origine alimentaire, provoquée par des produits domestiques ou importés (aussi bien aux Etats-Unis qu’au Royaume-Uni ou en Europe), a démontré que les questions de contamination biologique faisaient partie des problèmes considérés comme les plus importants par les consommateurs, en particulier dans les pays développés (voir le tableau 1).

Des inquiétudes croissantes sont exprimées au sujet d’organismes pathogènes qui, en outre, font preuve d’une résistance aux antimicrobiens. Certains consommateurs et scientifiques se sont aussi fortement interrogés sur l’emploi de nouvelles techniques, telles que les biotechnologies, dans le développement de produits alimentaires. Les consommateurs continuent de s’opposer aux ventes d’aliments irradiés. Cette technologie a fait pourtant l’objet d’analyses plus que minutieuses et a été considérée comme inoffensive durant de nombreuses années, tant qu’elle est employée conformément aux mesures de contrôle pertinentes. Après considération de ces problèmes, la nécessité d’un système efficace de contrôle des aliments paraît évidente pour garantir aux consommateurs l’innocuité et la qualité de l’approvisionnement, et pour promouvoir et faciliter le commerce des denrées alimentaires à l’intérieur et vers l’extérieur du pays.

Tableau 1: Les problèmes récents d’innocuité des aliments liés à leur contamination biologique

Contaminant

Vecteur

Origine

Population affectée

Conséquences économiques

Cyclospora

fraises et framboises

Guatemala 1996

1000 cas (EU)

Le pays exportateur a perdu des millions de dollars EU en valeur commerciale

Salmonella

mélange pour crème glacée

Etats-Unis 1994

240 000 cas

Perte financière pour le producteur et coût significatif pour sa réputation et les possibilités futures de ventes de son produit

Escherichia coli O157

hamburgers des fast food

Etats-Unis 1993

4 morts

Perte de confiance du consommateur dans le produit

Escherichia coli O157

rave d’hiver

Japon 1996

environ 9000 enfants d’âge scolaire touchés

Perte financière pour le producteur et coût significatif pour sa réputation et les possibilités futures de ventes de son produit

7.3 Qu’est-ce que le contrôle des aliments?

Même si il y a plusieurs définitions de ce qu’est le contrôle officiel des produits alimentaires, celle qui est retenue par la FAO précise qu’il s’agit de «toutes les activités obligatoires et nécessaires pour garantir la qualité et l’innocuité des produits alimentaires». Cette définition a été publiée dans l’Article 11 intitulé «L’administration des programmes de contrôle des aliments», du Manuel 14, Le contrôle de la qualité des aliments, de la série Etudes FAO: Alimentation et Nutrition. Le contrôle des aliments s’applique tout au long de la chaîne. Les trois éléments fondamentaux d’une structure de contrôle des aliments sont une législation alimentaire et ses compléments réglementaires, des services d’inspection et de contrôle, et des laboratoires avec leurs services de soutien (études, formation, information, et services de conseil).

Le contrôle officiel des aliments est institué par la législation. Sans une autorisation légale telle qu’indiquée par un acte juridique de l’Etat, aucune activité ne peut en effet légitimement prétendre être officielle et aucun de ceux qui l’exercent ne peut prétendre être crédible. En outre, personne n’a alors le moindre motif de se soumettre aux directives provenant d’une instance qui serait ainsi «non-autorisée». Même si cette définition ne semble concerner que le rôle de l’Etat dans le contrôle des aliments, elle implique en réalité d’autres partenaires, notamment l’industrie alimentaire et les consommateurs.

7.3.1 Le rôle de l’Etat dans le contrôle des aliments

La législation sur le contrôle des aliments

Il ne peut y avoir de contrôle des aliments sans une législation adéquate

Pour améliorer le contrôle des aliments, il faut donc commencer par examiner et réviser le cadre juridique sur lequel s’appuie le contrôle des aliments et, si nécessaire, par l’actualiser de façon à ce qu’il corresponde à l’environnement. Une législation alimentaire est l’expression de la volonté de l’Etat d’assurer la garantie de la qualité et de l’innocuité des aliments et la mise en place, en tant que politique nationale, des mesures nécessaires à la protection des consommateurs. Une législation alimentaire devrait par conséquent donner une définition précise des termes utilisés dans le texte. Elle précisera les procédures d’application de la législation ainsi que l’instance chargée de promulguer les règles, réglementations, codes de pratique, normes de qualité et d’innocuité, et les procédures de manutention, de transformation, de stockage, d’embarquement et de vente. Elle définira aussi le rôle et l’autorité des instances compétentes de l’administration ainsi que les pouvoirs délégués à ces instances et à leur personnel. Elle indiquera enfin quel est le rôle et la responsabilité du secteur privé et celui des autres acteurs tels que les industries, les institutions académiques, les comités scientifiques et les consommateurs par rapport à la qualité et à l’innocuité des aliments. Toute tentative de révision de la législation alimentaire devrait en outre tenir compte de la contribution des secteurs qui sont touchés tels que l’industrie agro-alimentaire et les consommateurs.

Les réglementations générales édictées dans le cadre de la législation devraient par ailleurs engager la contribution de tous les secteurs concernés. Elles devraient être spécifiques, claires, explicites et être rédigées dans un langage courant pour qu’elles puissent être comprises par des gens non-techniciens en la matière. Il y a des cas où les administrations ont à édicter des réglementations dont le contenu est sensible. Ces textes devraient être publiés sans contribution externe à l’administration. Dans d’autres cas, elles doivent établir clairement les conditions, limites et autres restrictions.

C’est une bonne stratégie que de faire suivre la parution de toute réglementation par la diffusion de matériel d’information conçu afin de fournir des explications et de répondre par anticipation aux questions. Si possible, des séminaires et ateliers de formation peuvent aussi être organisés pour aider à comprendre et à respecter la réglementation

Les composantes fonctionnelles d’un système national de contrôle des aliments

Les fonctions du contrôle des aliments reposent sur trois piliers...

Les services opérationnels de base d’un système de contrôle des aliments qui opèrent à niveau minimum regroupent une inspection, un service d’analyses et un service de contrôle du respect de la réglementation. L’inspection vérifie, par ses recherches et investigations, la bonne observance par les industries des exigences officielles de contrôle. Le service d’analyses effectue les tests et examens des produits afin de déterminer si ils satisfont bien aux dispositions obligatoires de la législation et des réglementations, notamment sur les normes alimentaires obligatoires, sur les limites de qualité et d’innocuité qui ont été fixées pour les contaminants chimiques et biologiques, sur les conditions d’emballage et sur les autres aspects qui doivent être testés. Le service de contrôle du respect de la réglementation sert d’organe de surveillance des actions juridiques qui ont pu être intentées. D’autres services opérationnels viennent en appui à ces activités, notamment sur le plan administratif, de la planification, de la programmation, de la recherche et de l’information, et de l’éducation et de la formation, afin d’aider les services internes de l’institution et, lorsque les moyens le permettent, les secteurs extérieurs affectés.

Un service d’inspection des aliments

En tant que service de base du contrôle officiel des aliments, l’inspection est opérationnelle lorsqu’elle bénéficie d’un personnel suffisamment nombreux et qualifié. Le rôle de cette inspection est de vérifier que les installations domestiques de production, de transformation et de manutention d’aliments et que les entreprises et installations d’importation et d’exportation d’aliments satisfont bien les dispositions juridiques et légales nationales. Normalement, les inspecteurs collectent les échantillons nécessaires aux différents types d’analyse afin de vérifier si les aliments suspects satisfont bien aux normes et ils prélèvent également des échantillons de produits commerciaux dans un but de suivi et de surveillance. Dans de nombreux pays, les inspecteurs mènent aussi les recherches sur les cas suspectés d’empoisonnement alimentaire, sur les pratiques commerciales et de distribution frauduleuses, sur les plaintes des consommateurs et des industriels et sur les importations ou exportations illégales de produits alimentaires.

... un service d’inspection bien formé...

Il est essentiel que les inspecteurs soient formés aux dernières techniques de recherche et qu’ils soient parfaitement compétents en ce qui concerne les nouvelles méthodes qui garantissent la qualité et l’innocuité des aliments, notamment en ce qui concerne les avantages et les inconvénients de chacune de ces méthodes. Ils doivent bénéficier des enseignements les plus récents sur les nouvelles technologies utilisées pour l’industrialisation et la transformation des produits, notamment sur ce qui est nécessaire pour s’assurer que ces technologies soient appliquées avec une efficacité maximale et présentent un comportement technique correct. Ils doivent également être capables d’évaluer le fonctionnement des équipements et des instruments utilisés pour la production afin d’en garantir le suivi et l’entretien. En bref, ils doivent être bien formés et doivent comprendre l’importance des règles de bonnes pratiques de fabrication, savoir reconnaître les écarts par rapport à ces bonnes pratiques et savoir identifier leur impact, lorsqu’il se produit, sur la qualité et la sécurité des produits. Les inspecteurs doivent enfin comprendre les usages et applications des systèmes d’analyse des risques - points critiques pour leur maîtrise (HACCP), afin d’améliorer les mesures existantes de contrôle et de garantie de la qualité utilisées par les industries agro-alimentaires.

Un service d’analyses

... la fiabilité des résultats d’analyse...

Le rôle des laboratoires est essentiel pour contrôler les aliments. Le personnel de laboratoire est chargé de confirmer ou d’infirmer les craintes des inspecteurs concernant la conformité des échantillons de produits alimentaires. Il doit aussi confirmer la qualité et l’innocuité des aliments en vérifiant si les niveaux et seuils obligatoires de contaminants, d’additifs, ou de tout autre produit réglementé, sont atteints et si les produits satisfont bien aux normes alimentaires obligatoires. Les laboratoires recueillent les données analytiques liées aux activités de contrôle comme, par exemple, celles qui portent sur les contaminants alimentaires, sur les contaminations biologiques, sur les critères de qualité et d’innocuité qui sont atteints, etc. Les laboratoires ont à traiter les problèmes analytiques très complexes provoqués par les interférences entre les composantes du produit. Ces problèmes ne peuvent être résolus que grâce à l’utilisation des ultimes instruments analytiques et de méthodes sophistiquées d’analyse. Ils requièrent en outre la maîtrise des dernières connaissances techniques qui ne pourront être acquises que par un programme de formation continue du personnel.

Vu que les résultats analytiques peuvent être à l’origine d’actions juridiques contre un fabricant de produits alimentaires, ils doivent être parfaitement exacts. Dans le système juridique de la plupart des pays, ces questions font l’objet d’un examen attentif, l’analyste de laboratoire étant en effet fréquemment obligé de prouver ses compétences techniques, de justifier les méthodes et techniques utilisées lors de l’analyse, la précision des instruments utilisés et finalement de défendre les résultats de ses analyses. Dans de telles circonstances, les laboratoires officiels de contrôle des aliments doivent entretenir un programme interne garantissant la qualité de leur travail afin d’assurer leur crédibilité.

Une unité de contrôle du respect de la réglementation

... et la sanction des violations

D’un pays à l’autre, la fonction de contrôle du respect de la réglementation est diversement assumée. L’autorité chargée du contrôle des aliments n’a pas toujours la responsabilité de mener des actions en justice. Le plus souvent, cette responsabilité échoit à un service juridique du Ministère de la Justice. Le service de contrôle des aliments est toutefois le service qui, généralement, recommande les peines et certaines formes de sanctions dans le cas des violations rencontrées au cours de ses activités d’investigation. Lorsque c’est le cas, le service de contrôle des aliments doit alors disposer d’un service de contrôle du respect de la réglementation. Ce dernier s’assurera que les recommandations des procédures pénales à entreprendre sont appropriées, que ces procédures sont étayées par des preuves soutenables suffisamment solides, et qu’elles méritent effectivement le temps et les efforts qui seront consacrés devant les tribunaux pour parvenir à un résultat exécutoire satisfaisant.

Le service de contrôle du respect de la réglementation sera donc responsable des actions considérées comme étant, par nature, de réglementation, telles que les actions de justice, et des programmes visant à ce que la conformité soit volontairement respectée. L’une des hypothèses couramment acceptées du contrôle des aliments soutient que la plupart des entreprises se soumettront à des règles et législations raisonnables pourvu qu’elles comprennent ce qu’elles doivent faire pour y satisfaire et qu’elles considèrent que c’est dans leur intérêt de le faire. En conséquence, un bon moyen pour s’assurer que l’alimentation est saine et de qualité satisfaisante, sans pour autant avoir à recourir aux sanctions, consiste à informer régulièrement les industries des réglementations et à travailler avec elles afin de les aider à se conformer à ces dernières.

La formation et l’appui aux activités

Les systèmes de contrôle des aliments doivent aussi travailler avec le secteur industriel et les consommateurs

Certaines des fonctions d’appui aux activités de contrôle des aliments concernent les services d’information, d’éducation et de formation. Ces fonctions n’ont pas nécessairement à être sous la responsabilité directe du service de contrôle des aliments mais, éventuellement, sous celle d’autres organismes publics. Ces derniers peuvent intervenir de façon horizontale au sein de différentes filières administratives et ces activités peuvent constituer leur tâche essentielle dans de nombreux secteurs comme, par exemple, l’éducation à la santé, les services d’information commerciale et industrielle, les services d’information aux consommateurs, etc. Dans certains cas, il s’agit d’une composante essentielle au processus de contrôle des aliments dans la mesure où, tant les industriels que les consommateurs ont besoin de disposer d’informations fiables pour prendre leurs décisions dans le monde des affaires et sur le marché. Les fonctionnaires chargés du contrôle des aliments doivent reconnaître la nécessité qu’il y a de communiquer aux personnes, selon des formats utiles, afin de les tenir informées des questions importantes de l’offre alimentaire.

Les services d’information et de formation peuvent organiser, lorsque c’est opportun, des ateliers et séminaires sur des sujets d’intérêt pour les industries et les consommateurs et ils peuvent élaborer des outils d’information destinés à être distribués au public. Une communication sous forme d’annonces dans des médias publics, de brochures publiées, de bulletins d’information, voire même sous forme de mise en place d’une page Web sur Internet, peut avoir beaucoup d’effets pour maintenir les gens informés. Des programmes d’éducation et de formation peuvent aussi être organisés directement ou par le biais d’institutions éducatives. Le service chargé des questions de consommation traitera des problèmes des consommateurs et travaillera avec les groupes de consommateurs, les médias et le public en général afin d’exposer les programmes de contrôle des aliments, d’obtenir et de fournir de l’information utile et significative. Ce service peut également aider aux relations avec la presse et les médias d’information afin de faire passer d’importants messages sur la qualité et l’innocuité des aliments. Cela sera particulièrement le cas lors de situations d’urgence, lorsque l’implication de la population est nécessaire afin de se protéger contre les risques sanitaires liés à la distribution d’aliments.

D’autres activités de support aux opérations dans l’infrastructure de contrôle peuvent inclure les services scientifiques et techniques. Ils fournissent le soutien nécessaire à la programmation des recherches ou à l’examen des dernières technologies en matière de contrôle ou de transformation des aliments. Ils peuvent assurer la liaison avec le monde académique sur les questions de transfert de technologies afin d’aider à résoudre les problèmes techniques. Les services scientifiques consultatifs sont absolument indispensables à un système de contrôle des aliments. Pour utiliser une méthode de programmation basée sur le risque dans le cas du contrôle des aliments, il est nécessaire de bien comprendre quels sont les risques alimentaires et comment les contrôler, les réduire ou les éliminer afin d’atténuer les risques sanitaires pour le consommateur. La communauté scientifique joue un rôle important dans le développement de méthodes, la conduite de recherches et la définition de la gravité des risques pour les consommateurs. Elle peut aider à résoudre des problèmes techniques et fournir de solides informations scientifiques pour étayer et soutenir les actions pénales entreprises. Lorsque c’est nécessaire, elle peut fournir des évaluations sur les additifs alimentaires, sur les contaminants et sur les résidus, en particulier dans les cas où un niveau de protection supérieur à celui des normes internationales s’avère nécessaire pour la population ou bien lorsque aucune norme internationale n’existe.

7.3.2 Le rôle de l’industrie

L’industrie alimentaire participe à la réalisation des objectifs d’une politique nationale de contrôle des aliments et en partage la responsabilité avec les agences nationales. C’est sur elle que repose l’application des codes de bonnes pratiques agricoles (production primaire) et de fabrication (transformation), ainsi que d’un système de qualité et d’innocuité, par exemple le HACCP. Le rôle de l’industrie comprend aussi la formation de tous les employés dans le domaine de la manipulation des aliments et d’un système général de qualité et d’innocuité. L’industrie peut aussi être impliquée dans la recherche pour le développement de techniques ayant une application future dans le contrôle des aliments, et peut donc ainsi être une source d’information et de nouvelles technologies. L’industrie informe aussi le consommateur à travers l’étiquetage et la publicité. En s’assurant que l’industrie est impliquée dans les activités nationales de contrôle des aliments, on peut développer un instrument supplémentaire pour maîtriser certains problèmes, et ceci est un avantage pour tous.

7.3.3 Le rôle des consommateurs

Doter les consommateurs de droits et de responsabilités signifie également qu’ils ont un rôle à jouer dans le système de contrôle des aliments. Tout en ayant le droit à une alimentation saine et de qualité, les consommateurs doivent comprendre qu’il est impossible que la totalité de l’offre de produits alimentaires soit absolument saine. Ils doivent comprendre comment ils peuvent protéger les aliments dans leurs foyers, durant le transport, lors de la préparation ou du service, ou encore lors des manipulations et du stockage des restes alimentaires, afin d’éviter que cette nourriture ne constitue un risque pour la santé. Les consommateurs sont une source importante d’information mais ils ont besoin d’un lieu au sein du système de contrôle des aliments, où faire connaître et concentrer leur mécontentement, où se plaindre des tromperies sur la marchandise et de sa mauvaise qualité, et où rendre compte des dommages et maladies provoqués par les aliments. Les organisations de consommateurs peuvent jouer un rôle important en représentant ces derniers dans le développement d’une politique nationale de contrôle des aliments, et en portant leurs préoccupations à l’attention des décideurs et de l’industrie.

7.4 Le développement d’une politique nationale de contrôle des aliments

Une politique nationale repose d’abord sur un constat de la situation existante

Le contrôle officiel des aliments requiert un engagement et des ressources. Pour obtenir cet engagement et ces ressources, il est essentiel d’élaborer une politique pertinente quant à ce qui doit être atteint, comment cela sera fait, qui le fera, et dans quels délais. L’élaboration d’une politique nationale est une activité d’intérêt national qui devrait par conséquent engager tous les secteurs impliqués par la qualité et l’innocuité des aliments. Il est souhaitable qu’un comité de travail établisse un constat de la situation existante. Ce comité devrait regrouper des individus ayant des compétences techniques (universitaires, scientifiques, juridiques et industrielles), sociales, culturelles et économiques, et une bonne connaissance du plus grand nombre possible des secteurs affectés. Il est aussi souhaitable que ce comité soit présidé ou placé sous la conduite et la direction d’une personnalité, simple citoyen ou leader politique, bien connue pour son habileté et ses références, et dont le passé et la réputation sont respectés. Le constat portera sur l’examen du cadre juridique, sur le type de denrées alimentaires produites pour le marché domestique et pour l’exportation, sur les méthodes de transformation, les conditions et usages en vigueur, et sur les pratiques de stockage, de transport et de manutention. Il serait en outre utile, d’une part de savoir quels sont les risques pour la santé provoqués par les aliments, par leur transformation et par les pratiques de stockage et de manutention et, d’autre part de disposer d’informations sur les précédentes infections alimentaires ou sur les dommages et maladies qui leur sont rattachés, ainsi que sur les causes qui leur ont été attribuées. Il est enfin essentiel de connaître tous les facteurs culturels, sociaux, religieux, économiques ou autres, qui pourraient avoir un impact sur la qualité et l’innocuité des aliments et sur les activités nécessaires au bon fonctionnement d’un système de contrôle des aliments.

Les informations collectées au travers de ce constat pourront ensuite être comparées avec les informations portant sur le personnel actuellement employé, l’allocation des ressources, le rôle des services opérationnels compétents, les niveaux de résultat du personnel et des organisations, et sur les forces et faiblesses du système existant de contrôle des aliments. Il faudra aussi évaluer la volonté de coopération des industries, leur capacité à devenir effectivement responsables de l’amélioration de la qualité et de l’innocuité de leurs produits et à évaluer également les résultats actuels de leurs activités. Le rôle des institutions académiques et universitaires dans l’industrie alimentaire (résolution de problèmes techniques, conception de nouveaux produits, activités de conseil) devra lui-aussi être analysé.

L’analyse des informations fournit l’occasion d’ouvrir des débats et discussions sur les éventuels objectifs à moyen et long termes, sur les mesures administratives visant à combler les lacunes au sein du système ou à y éviter les superpositions, et enfin sur la réduction des faiblesses et la mise en œuvre d’une approche par programme permettant de résoudre les problèmes existants à partir de méthodes fondées sur le risque. Un atelier réunissant, au plan national, les experts et les parties intéressées de tous les secteurs peut aussi fournir l’occasion de contribuer à l’élaboration de la politique globale. Des ré-allocations de ressources et des ajustements organisationnels peuvent, sur la durée, s’avérer nécessaires pour parvenir à l’efficacité et à l’efficience souhaitées.

7.5 La situation actuelle

7.5.1 Les carences habituelles du contrôle des aliments

Les faiblesses de nombreux systèmes de contrôle des aliments...

Si l’on observe les capacités de contrôle des aliments un peu de partout dans le monde, on se rendra toutefois compte que la plupart des pays sont classés comme pays à développer. Cela signifie qu’à l’échelon national, faute d’assistance technique et de moyens, peu de progrès peuvent être réalisés pour résoudre et gérer les problèmes de risques liés aux aliments nocifs. Et comme les nouveaux problèmes d’innocuité des aliments deviennent de plus en plus complexes, les pays en développement ont en outre chaque jour plus de difficulté à y faire face.

Si on cherche à identifier les capacités de contrôle des aliments de par le monde, on s’apercevra que la plupart des pays n’ont pas réussi à élaborer ni à mettre en place une politique nationale permettant d’instaurer un système de contrôle des aliments. La conception de tels systèmes serait pourtant nécessaire pour protéger la santé des consommateurs et pour promouvoir un commerce vigoureux de produits alimentaires sains et de qualité. Dans certains pays qui, eux, ont ce type de politique, il est par contre difficile de fixer des objectifs raisonnables, d’atteindre ces objectifs ou encore d’impliquer ceux qui ont le plus intérêt au succès de cette politique, à savoir les industries et les consommateurs.

On s’apercevra également que la majorité des pays ne disposent pas des systèmes d’administration permettant d’élaborer et de mettre en œuvre des programmes efficaces et efficacement gérés de contrôle des aliments. Souvent en effet, les programmes qui existent ne font l’objet d’aucune évaluation par rapport à des buts et objectifs préétablis. Les résultats des programmes ne font l’objet d’aucun suivi, ni évaluation. Des ressources sont gaspillées dans des activités improductives ou redondantes, et ces activités portent en outre bien souvent sur ce qui est le plus simple à faire plutôt que sur ce qui est le plus important. Le travail des salariés lui non plus n’est pas évalué, ni en termes de réalisation, ni en termes de production. La qualité du travail n’est pas mesurée et enfin, il n’existe en général aucun système de formation continue ou de renforcement des savoirs et compétences du personnel opérationnel.

Presque tous les pays, y compris les pays industrialisés, ont besoin de mettre à jour les législations et réglementations concernant les produits alimentaires afin que celles-ci rendent compte des changements rapides qui se produisent dans la mise en œuvre des méthodes modernes de contrôle des aliments. Des législations et réglementations modernes en matière d’aliments devraient en effet refléter non seulement les évolutions des règles du commerce international, mais aussi les responsabilités et les rôles respectifs des Etats, des industries et des consommateurs pour garantir l’innocuité des aliments. Mais de nombreux pays n’ont pas de législation alimentaire et fonctionnent donc à coup de directives issues d’un ministère ou d’un autre, ceux-ci étant parfois en conflit. La plupart des pays qui ont des législations alimentaires, ont par contre des textes de lois qui ont généralement été conçus il y a 30 ou 40 ans. Mises à jour par des amendements ou par des corrections effectuées petit-à-petit, ces législations forment maintenant un dédale complexe de règlements souvent incompréhensibles aux législateurs, aux industriels et aux consommateurs. En outre, dans de nombreux cas, des législations qui portent sur un domaine particulier contiennent des clauses ou des alinéas qui sont prévus pour réglementer aussi l’alimentation. Les législations sur la santé ou les législations agricoles peuvent ainsi contenir, par exemple, quelques paragraphes ou dispositions générales prévus pour réglementer l’alimentation. Nombre de lois sont par ailleurs rédigées selon une formulation tellement normative qu’elles finissent par devenir de véritables obstacles au progrès technique, par limiter l’innovation industrielle et par empêcher ou entraver le commerce.

Du fait du peu de moyens existants, les fonctionnaires chargés du contrôle des aliments sont mal équipés pour accomplir leurs différentes tâches. Les services d’inspection sont ainsi mal équipés pour réaliser le travail de terrain qu’implique habituellement toute procédure d’inspection. Et celle-ci ne tient souvent pas compte du fait que la réalisation d’évaluations et de vérifications requiert des systèmes de contrôle de la qualité et de l’innocuité plus sophistiqués comme par exemple les éléments d’un système HACCP.

Dans de nombreux pays, les laboratoires manquent d’instruments d’analyse pour tester correctement les produits alimentaires. Fréquemment, ils n’arrivent pas à s’approvisionner en réactifs, en solutions titrées, en solvants ou en tout autre produit d’analyse dont ils ont besoin. De plus, les méthodes et compétences techniques nécessaires à la réalisation des tests d’évaluation de la qualité et de l’innocuité des aliments leur font souvent défaut.

Dans beaucoup de pays, le fonctionnaire le plus important pour le contrôle des aliments est en fait l’inspecteur municipal ou d’une quelconque autorité locale. Ces inspecteurs ont souvent un niveau d’éducation et de formation moindre que celui de nombreux autres fonctionnaires de la filière officielle de contrôle. Ils ne profitent que rarement des formations continues qui leur permettraient de maintenir ou d’améliorer leurs compétences, alors que ce sont pourtant eux qui sont chargés de vérifier que les aliments vendus ou distribués dans les grands centres urbains sont effectivement sains, sans danger et nutritifs. En outre, ces inspecteurs font souvent partie des fonctionnaires les moins bien payés de la filière du contrôle des aliments. Et pour parachever le tableau, ils sont régulièrement responsables d’autres tâches liées à la santé telles que le contrôle des déchets, la lutte anti-vectorielle, la gestion des nuisances, la lutte contre les maladies transmissibles, la salubrité de l’eau et toute une série d’autre tâches liées à la santé. L’essentiel à retenir ici est que ce personnel chargé du contrôle des produits alimentaires est généralement insuffisamment formé et que l’information technique nécessaire à ses activités lui fait souvent défaut.

Dans le cas du personnel de laboratoire, on rencontre souvent des situations extrêmes d’un pays à l’autre. En matière de contrôle des aliments, plusieurs pays mettent l’accent sur l’analyse en laboratoire des produits finis. Souvent, le personnel de ces laboratoires a alors des diplômes de niveau universitaire. Dans ces conditions, ce sont parfois des salariés ayant une thèse de Doctorat qui effectuent les analyses chimiques et biologiques de routine des produits alimentaires; ils sont significativement sous-employés. A l’inverse, dans beaucoup d’autres pays, les employés des laboratoires ont tout juste un niveau élémentaire de formation si bien qu’ils ne peuvent guère réaliser d’analyses complexes des produits alimentaires. Ces analyses ne sont par conséquent jamais effectuées.

Une autre carence sérieuse est le manque de coordination entre les administrations et autres instances responsables du contrôle des produits alimentaires et leur difficulté à entraîner les organismes d’autres secteurs (industrie, monde scientifique, consommateurs) alors que ceux-ci pourraient apporter une contribution significative au processus. Dans quelques pays, les instances ayant autorité pour mener à bien diverses composantes du contrôle des aliments sont en concurrence les unes avec les autres. Dans certains cas, le manque de clarté quant aux chaînes de responsabilité, la faiblesse de rédaction des textes législatifs ou encore la superposition des compétences, créent de la confusion auprès des industries agro-alimentaires, des consommateurs et des institutions elles-mêmes. Dans de nombreux cas, les administrations publiques sont en lutte les unes avec les autres pour le pouvoir ou quant à leurs attributions. Elles réalisent alors les mêmes tâches et gâchent ainsi le peu de ressources dont elles disposent. Il n’est pas rare que des administrations publiques, ayant la responsabilité du contrôle des aliments, émettent des règles et réglementations contradictoires sur le même sujet ou qu’elles initient des programmes qui rentrent en conflit avec les programmes déjà existants d’autres administrations.

7.5.2 Les développements récents à l’échelon national

... sont pris en compte dans les nouvelles législations...

Il y a certains changements qui sont liés aux problèmes généraux de qualité et d’innocuité de l’offre alimentaire et aux nouvelles orientations prises par le commerce des aliments. Les efforts réalisés par la plupart des pays en vue d’actualiser leurs législations, règles et réglementations alimentaires constituent l’un de ces principaux changements.

Au cours de la dernière décennie, de nombreux pays ont fourni un effort concerté pour réviser et actualiser leur législation et leurs réglementations alimentaires. Les pays de l’Union Européenne ont effectué, ou sont en train d’effectuer, les changements nécessaires pour harmoniser leurs législations et réglementations nationales afin que celles-ci satisfassent aux conditions posées par la Commission européenne. Avec l’aide de la FAO, les Etats d’Europe Centrale et de l’Est anciennement à planification centralisée ont élaboré des législations alimentaires là où il n’en existait pas et ils ont abandonné les anciennes normes soviétiques d’application générale (GOST). A leur place, de nouvelles normes sont adoptées à partir des normes Codex. Les législations et réglementations qui sont ainsi mises en place s’appliquent beaucoup plus aux conditions d’une économie de marché. Presque tous ces pays ont l’espoir de rejoindre l’Union Européenne et sont donc en train d’essayer de satisfaire aux critères d’accession. L’harmonisation de leurs législations et réglementations sera nécessaire pour qu’ils deviennent membres.

Dans certains pays d’Asie, les industries dépendaient traditionnellement d’une approbation de l’Etat en matière de contrôle de la qualité et de l’innocuité des aliments. Mais de nouvelles méthodes sont actuellement définies dans les dispositions de la législation alimentaire. Elles confèrent à l’industrie des responsabilités plus importantes en ce qui concerne les mesures de qualité et d’innocuité des aliments. En Amérique latine, les procédures de certification et/ou d’enregistrement sont utilisées comme un moyen de garantir les mesures de contrôle des aliments. Ces procédures reposant souvent sur l’emploi d’une tierce partie, ce sont alors des organismes non gouvernementaux qui les appliquent.

La plupart des pays développés ont mis en place des systèmes qui abordent suffisamment les problèmes pour que les législations et réglementations soient révisées dans le cadre de procédures courantes et de routine.

... et dans la restructuration des organismes de contrôle

La réorientation du contrôle des aliments constitue une autre évolution. Il y a deux raisons à cela. La première tient compte de ce que la population accorde une attention considérable aux dangers d’origine alimentaire et aux risques y afférents. Mais les organismes officiels de contrôle des aliments sont encouragés à utiliser des systèmes de hiérarchisation des risques afin de déterminer les domaines prioritaires auxquels ils doivent consacrer leurs ressources limitées. De ce fait, il y a donc de moins en moins de ressources pour résoudre les problèmes liés aux autres questions que celles du risque ou de la toxicité, et les industries sont donc encouragées à résoudre ces problèmes par le biais de leur propre programme interne de respect de la qualité. En outre, la nouvelle approche intégrée du contrôle des aliments requiert une collaboration étroite entre l’Etat et les autres secteurs de l’industrie des aliments.

La plupart des organismes de contrôle des aliments souffrent, ainsi que les autres administrations, d’allocations budgétaires en baisse et sont donc censés faire plus avec moins. Ils doivent donc trouver des façons plus efficaces de faire leur travail sans pour autant sacrifier le contrôle ou la protection. Ces défis ont débouché sur quelques tentatives de nouvelles approches innovantes et sur quelques changements marquants des procédures traditionnelles du contrôle des aliments.

En Nouvelle-Zélande et en Australie, il a ainsi été décidé de mettre en place un unique organisme d’innocuité des aliments qui couvre les besoins des deux pays et qui répartit les moyens dont ils disposent sur des activités communes. Cet organisme est maintenant connu en tant qu’Agence Australo-Néo Zélandaise pour l’alimentation.

Au Japon, près de 3000 postes d’inspecteurs ont été supprimés de l’administration publique en recourant à des services d’inspection contractés auprès d’entreprises privées. En Asie, le rôle de l’Etat a été redéfini de telle façon qu’il garantit maintenant la qualité et l’innocuité des aliments en assurant le suivi des efforts des industries plutôt qu’en réalisant lui-même le contrôle de la conformité de la qualité, comme il le faisait auparavant.

En Amérique latine, la certification des mesures de qualité et d’innocuité est maintenant assurée par des tiers tandis qu’en Europe, on assiste à un effort concerté de réduction du nombre d’organismes impliqués dans le contrôle des aliments et de consolidation d’une ou de deux instances seulement par Etat.

7.6 Le commerce international des aliments

La croissance du commerce international des aliments...

Vu leur importance et leur impact sur le contrôle des aliments et sur le caractère plus ou moins équitable des échanges, certains facteurs relatifs au commerce international des aliments doivent être pris en compte. Le commerce des aliments connaît une croissance au niveau international à un taux extrêmement rapide et on s’attend en outre à ce que cette croissance continue au cours des prochaines années. Les statistiques de l’OMC montrent que le commerce international des aliments s’élevait à 380 milliards de dollars en 1997. Bien que la libéralisation des échanges et l’abaissement des tarifs douaniers et des barrières non-douanières comptent pour une part de cette croissance, il est clair que de nombreuses autres raisons doivent également être prises en compte comme raisons au contrôle des aliments.

Les consommateurs souhaitent que les produits alimentaires soient meilleur marché et qu’une grande variété de denrées soit disponible tout au long de l’année. Au cours des dernières décennies, on a assisté à des migrations massives d’un pays à l’autre et à des transferts de la population depuis les zones rurales vers les centres urbains en pleine croissance. Ces migrations ont entraîné une hausse de la demande en produits ethniques et traditionnels des personnes qui veulent accéder aux aliments de leur pays d’origine alors que ceux-ci ne sont généralement disponibles que par importation. La libéralisation des règles du commerce international qui a permis la libre circulation des marchandises sans barrières douanières ni barrières non-douanières (barrières techniques comprises) a eu comme impact l’ouverture de marchés qui étaient jusqu’alors protégés par des quotas d’importations et des politiques protectionnistes.

Les innovations techniques ont largement contribué à rendre tout ceci possible. Le développement des techniques d’emballage et de conditionnement a permis d’accroître la durée de conservation de la plupart des produits qui, auparavant, ne «tenaient pas la distance». Cela signifie que sans les techniques d’emballage, les produits se seraient endommagés bien avant d’atteindre leur destination prévue et ne pouvaient, par conséquent, pas être exportés vers des destinations lointaines.

... rend d’autant plus nécessaire l’existence de systèmes de contrôle adéquats

La production rapide, les pratiques de manutention et les méthodes de transport permettent que des aliments produits par un pays soient expédiés par bateau vers un autre pays situé à des milliers de kilomètres de là. Les méthodes telles que l’embarquement en container ou sur palettes, la réfrigération ou la congélation des compartiments, la transformation en mer des poissons, et les avions cargos ouvrent la possibilité à ce qu’une grande variété de produits frais et nutritifs soient maintenant disponibles tout au long de l’année. Mais elles permettent également que des produits contaminés se retrouvent, en quelques heures ou quelques jours, aux mains des consommateurs d’autres pays. De ce fait, elles contribuent aussi à accentuer les risques.

L’expérience des Etats-Unis en matière de contrôle des aliments

Il n’y a que peu de pays au monde qui contrôlent suffisamment les importations de denrées alimentaires pour savoir quels produits sont détenus ou refusés, et pour quelles raisons. Même si de nombreux pays commencent maintenant à collecter ce type d’informations, les Etats-Unis sont en fait la seule nation à avoir suivi ces données sur une certaine durée et à les rendre disponibles auprès du public et de toute personne intéressée par ces questions. Durant un certain temps, la FAO a suivi ces statistiques des Etats-Unis afin d’identifier le type de problèmes rencontrés dans le commerce des aliments pratiqué au niveau international. Le tableau présenté ci-après donne une indication des principaux problèmes rencontrés au cours des quatre dernières années. Sont indiquées entre autres raisons à la détention des produits: le non-respect de la législation sur les aliments en boite peu acides, la contamination aux métaux lourds, l’étiquetage incorrect, la présence de résidus des pesticides, les infractions sur les additifs alimentaires, les contaminations microbiennes, la présence de produits en décomposition et enfin de produits contenant des souillures.

Produits alimentaires saisis par USFDA - toute origine: 1996 v/s 1999

7.7 L’impact de l’Organisation mondiale du commerce

L’Organisation mondiale du commerce (OMC) a eu un impact spectaculaire sur le commerce des aliments. L’application des règles et conditions des Accords SPS et OTC pourrait également donner lieu à des changements tout aussi importants du contrôle des aliments.

Les règles de l’OMC mettent l’accent sur le rôle des normes internationales

Ainsi que cela a été indiqué précédemment, les normes Codex de qualité et d’innocuité sont devenues la référence de conformité par le biais de l’Accord SPS. Tous les pays qui pratiquent le commerce devront accepter cette réalité. Par définition, cet Accord porte sur toutes les mesures visant à protéger la vie et la santé des personnes et des animaux et à préserver les végétaux. Vu qu’il traite spécifiquement des aliments, il englobe le contrôle des additifs alimentaires, des contaminants des aliments, des toxines et des organismes pathogènes.

Parmi les points importants de cet Accord, une déclaration des Droits Fondamentaux reconnaît à tous les pays membres de l’OMC le droit d’appliquer des mesures sanitaires de protection de la vie et de la santé des personnes et des animaux et de préservation des végétaux. L’application de ce droit doit cependant s’appuyer sur les normes internationales (Codex, CIPV, OIE), ou bien être justifiée par l’emploi de méthodes d’évaluation des risques, acceptables ou formulées au niveau international, et être basée sur de solides éléments scientifiques.

Tous les pays membres de l’OMC doivent harmoniser leurs procédures et leurs normes en participant au travail d’élaboration des normes du Codex, du CIPV et de l’OIE, et accepter le principe d’équivalence, à savoir que c’est le résultat d’une mesure qui compte et non la méthode utilisée pour l’atteindre. La transparence est alors nécessaire et, pour cela, il faut alors disposer d’informations, émettre des notifications, faire preuve d’ouverture lors de la prise de décision et exécuter les procédures pour appliquer les termes de l’Accord. Le point d’information SPS sert à cet objectif. Les pays développés sont donc encouragés à fournir une assistance technique à leurs partenaires commerciaux des pays en développement, et en particulier à ceux qui ont des difficultés pour respecter les termes de l’Accord.

Ainsi que cela a été évoqué précédemment, les objectifs du Codex s’appuient sur un cadre juridique de législations et de réglementations qui visent à protéger les consommateurs et à empêcher les pratiques commerciales déloyales tout en aidant aux échanges commerciaux internationaux. L’objectif principal du contrôle des aliments est exactement le même et l’Accord SPS fait lui aussi la même chose par le biais de l’accord mutuel de ses pays membres à l’échelon international.

Il faut cependant souligner que l’Accord SPS reconnaît clairement que les réglementations techniques seront permises mais uniquement lorsqu’elles sont justifiées, et ce à l’aide de solides preuves scientifiques reposant sur des procédures d’évaluation des risques internationalement reconnues. Ceci revient de fait à engager les Etats à utiliser un système de contrôle des aliments basé sur le risque pour vérifier la conformité aux conditions d’échange internationales.

Les normes internationales peuvent être utilisées par des pays qui n’ont pas encore la capacité de créer leurs propres normes nationales

Dans ce cadre, nombre de pays en développement n’ont ni le personnel techniquement qualifié, ni les ressources financières permettant d’embaucher un médecin expert en toxicologie, afin de réaliser l’énorme travail d’examen nécessaire à l’évaluation de l’innocuité des substances proposées comme additifs alimentaires. La meilleure façon d’aborder ces questions est de regarder et d’analyser ce que le JECFA, la JMPR ou tout autre groupe ad hoc d’experts a déjà fait ou recommande. En ce qui concerne le JECFA et la JMPR, leurs recommandations ont été presque universellement acceptées par les parties intéressées, notamment par les Etats, par les organismes régionaux de normalisation et par le Codex pour ce qui touche aux DJA et aux LMR d’innocuité des additifs, des contaminants et des résidus des médicaments vétérinaires et des pesticides.

Au cours des cent dernières années, le contrôle des aliments a évolué lentement mais méthodiquement, étape par étape. Il a traité les problèmes posés par les modifications de la demande des consommateurs, par les progrès techniques, ou par les atteintes à l’environnement, et qui ont affecté l’alimentation et les nouvelles méthodes intensives de production et de transformation des denrées agricoles. Les défis qui sont posés ne sont qu’une suite de cette évolution, sauf pour les pays qui ont eu une dynamique d’évolution plus lente et qui se retrouvent en situation d’urgence. Ne pas profiter des avantages de la libéralisation du système d’échanges alors même que la demande est forte et qu’il est possible de tirer parti de nouvelles opportunités, et cela simplement parce qu’il n’y a pas de système de contrôle des aliments, semble réellement être une chance de perdue et un mauvais coup pour la croissance économique.

7.8 Les orientations futures du contrôle des aliments

A l’échelon international, certains changements spectaculaires ont lieu dans le contrôle des aliments et découlent en partie des transformations en cours du commerce international des aliments. Ces changements ont des répercussions mondiales à la fois positives et négatives. La plupart des économies des pays en développement reposent essentiellement sur l’agriculture. Dans la mesure où de nombreux pays en développement sont également des pays exportateurs, on s’attend à ce que les ressources additionnelles tirées de l’augmentation du commerce permettent d’améliorer les activités de contrôle des aliments, ce qui déboucherait sur une amélioration de la qualité et de l’innocuité des produits tant domestiques qu’exportés des pays exportateurs. Il s’agit là d’un des résultats les plus attendus de ces évolutions.

Mais la contrepartie de ces évolutions, notamment pour les pays en développement, c’est que l’accent est mis de plus en plus fortement sur les questions d’innocuité des produits alimentaires. Or ces dernières sont mal gérées et mal contrôlées par les pays en développement même si les résultats en la matière s’avèrent meilleurs pour les produits d’exportation que pour les produits domestiques. La mise sur le marché international de produits de mauvaise qualité ou de produits toxiques tend à accroître les risques du consommateur à plus grande échelle - au niveau mondial. Chaque compte-rendu d’un cas d’infection d’origine alimentaire lié à un produit d’exportation, tend à affaiblir la confiance que les commerçants et consommateurs ont dans l’innocuité des produits alimentaires importés, et cela indépendamment du pays exportateur responsable de l’irruption de la maladie. Les problèmes de qualité et d’innocuité des pays exportateurs peuvent par conséquent, presque du jour au lendemain, devenir les problèmes de qualité et d’innocuité d’un lointain pays importateur. C’est ce que montre l’exemple de la contamination des fraises et framboises par Cyclospora.

L’assistance technique destinée à renforcer les systèmes de contrôle des aliments est conçue dans le respect des règles de l’OMC

Les développements récents à l’échelle internationale montrent bien qu’une assistance est offerte aux pays dans le domaine du contrôle alimentaire. En résultat aux accords SPS and TBT, l’assistance technique est une obligation pour tout membre de l’OMC en mesure de la fournir. Cela n’a rien à voir avec le niveau de développement. Des pays en développement peuvent aider d’autres pays en développement sur certains sujets où ils ont acquis de l’expérience. Les pays membres devraient informer le Secrétariat des Comités SPS et OTC du type d’assistance technique demandée et des raisons de cette demande lorsque leur délégation nationale réclame avec insistance ce type d’assistance lors de réunions de l’OMC. Le contrôle des aliments va gagner en importance dans les années à venir, particulièrement lorsque de nouveaux cycles de négociations débuteront pour de nouveaux accords ou pour la révision des anciens accords. La mise en place d’un système de contrôle des aliments fiable, complet, efficace et efficient prend des années. Il faut donc commencer dès aujourd’hui à élaborer ce système si l’on souhaite être au point lorsque de nouvelles conditions apparaîtront dans le futur.

Un pays ne peut pas vraiment être dans l’erreur lorsqu’il utilise les normes Codex. Il est en effet conseillé de participer activement au Codex, dans la limite de ses moyens, de façon à ce que ses normes reflètent les contributions des différents membres et que chacun ait la possibilité de les infléchir. L’application du Codex et l’adoption de ses normes constitue en outre pour un Etat une façon de respecter les termes de l’Accord SPS. Le respect de l’application de l’Accord est une condition extrêmement sérieuse. Il sera donc nécessaire de disposer d’un système de contrôle des aliments suffisamment efficace et bien administré pour donner aux partenaires commerciaux les garanties dont ils ont besoin et établir avec eux des relations de confiance.

Une activité importante de la FAO

L’assistance technique peut être apportée par la FAO. Depuis 1975, 400 projets ont ainsi été mis en œuvre de par le monde et de très nombreux ateliers, séminaires et cours de formation ont été organisés. Des manuels et directives abordant l’ensemble des différents aspects du contrôle des aliments ont été rédigés. Un appui-conseil est également proposé, à la demande, sur des questions spécifiques.

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