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8 Détermination de la valeur des forêts et fixation
des prix, redevances forestières et collecte des revenus

Thèmes traités dans le présent chapitre:

• Les méthodes de détermination de la valeur des biens tangibles et intangibles des forêts, des biens et des services marchands et non marchands.

• Les types de taxes forestières, leurs avantages et leurs inconvénients.

• La conception d’un système de revenus forestiers pour les concessions sur le bois et les contrats d’acquisition.

8.1 Introduction

Les fonctionnaires chargés de passer des contrats avec des entités du secteur privé doivent faire en sorte que ces contrats soient avantageux pour le pays. Ainsi, l’administration forestière publique qui attribue des concessions forestières à une société privée doit s’assurer que l’opération sera la plus avantageuse possible pour le pays. Par conséquent, le décideur devra se poser les questions suivantes: les avantages qu’en tirera le pays justifient-ils de modi- fier l’utilisation de la forêt? Ou faut-il maintenir l’utilisation actuelle?

Pour prendre cette décision, il faudra procéder à une analyse qui consistera à mesurer et à évaluer les changements que cette modification de l’exploitation de la forêt pourrait provoquer, par exemple, une concession forestière. Ainsi, le fonctionnaire responsable doit disposer d’une liste des impacts positifs et négatifs de l’octroi d’une concession forestière et d’un moyen de traduire tous ces impacts en une mesure commune à des fins de comparaison. La mesure la plus pratique pour effectuer cette comparaison est la valeur monétaire des impacts. L’étude du bilan des avantages et des inconvénients pour la société dans les termes décrits est appelée analyse d’«efficacité économique».

Etant donné que c’est avec un particulier, selon toute probabilité, que le gouvernement passera le contrat, le décideur public devra également estimer la valeur commerciale de ce contrat, c’est-à-dire quelle est la valeur de la concession forestière en termes commerciaux. Cela est globalement le même type d’analyses que celles qu’effectueront les concessionaires privés intéressés au contrat. Ce type d’analyse est appelé normalement analyse «financière» et porte sur les flux monétaires résultant du changement d’utilisation. Du fait que l’analyse financière fournit un profil des flux monétaires résultant du contrat, c’est un facteur clé dans la négociation de l’accord entre le gouvernement et le particulier. Une autre raison pour laquelle le décideur public exigera aussi une analyse financière, est qu’il sera nécessaire de determiner l’impact du changement d’utilisation en terme d’argent entrant dans la trésorerie ou en sortant. Les analyses financières doivent toujours être faites du point de vue d’une partie intéressée, c’est-à-dire l’administration forestière publique, les entreprises privées, etc. Par contre, dans l’«analyse économique», seul le point de vue de la société compte.

Il y a deux autres différences fondamentales entre analyse financière et analyse économique; celles-ci se rapportent premièrement aux coûts et bénéfices (ou impacts positifs et négatifs) inclus dans l’analyse et deuxièmement à la manière dont ces coûts et benefices (impacts) sont évalués.

Les forêts ont de multiples impacts qui n’ont pas de valeur monétaire et qui n’influent donc pas sur les intérêts naturels des contractants privés en maximisant la rentabilité commerciale. Néanmoins, ces impacts intéressent la société dans son ensemble. Par exemple, les forêts sont dépositaires d’une grande richesse en diversité biologique. Elles contribuent également à conserver les ressources en eau et en sol et stockent du carbone. Il s’agit là de services forestiers qui présentent tous un intérêt aux niveaux local, national, voire mondial, mais qui, n’ayant pas de marchés ni de prix établis, ne présentent que peu ou pas du tout d’intérêt financier pour les entrepreneurs privés et n’entrent pas en ligne de compte dans leurs analyses financières. Toutefois, ils ont une importance dans l’analyse des impacts et de la valeur «économiques» des forêts1.

En outre, même dans le cas où il existe des prix de marché, ils peuvent être imparfaits, c’est-à-dire qu’ils ne reflètent pas obligatoirement la vraie valeur des biens et services offerts à la société. Ce sont les monopoles et d’autres imperfections du marché qui rendent cela possible. Les mesures gouvernementales telles que taxes ou interdictions d’exporter affectent aussi la valeur économique des ressources, entrées et sorties. La société est intéressée par la valeur «réelle» des ressources, tandis que les enterprises commerciales se concentrent sur les prix de marché existants, sans tenir compte du fait que ceux-ci peuvent être affectés par les imperfections du marché ou les mesures gouvernementales.

Un autre aspect des différences de valeur entre ces deux types d’analyse vient du fait que les impacts – coûts et bénéfices – s’exercent à différents moments dans le temps. Etant donné que les coûts et bénéfices doivent être réduits à un dénominateur commun, les impacts s’exerçant à différents moments dans le temps doivent être «soupesés» de différentes manières. Un dollar d’aujourd’hui ne correspond pas à ce que sera le dollar dans 10 ans. La technique utilisée pour rendre ces valeurs homogènes est appelée «actualisation». L’avenir est relativement moins important que le présent et donc, dans 10 ans, le dollar (qu’il s’agisse de coût ou de bénéfice) sera «escompté» par rapport à 1 dollar d’aujourd’hui. La société doit penser aux générations futures et devrait donc «escompter» l’avenir moins drastiquement que les entités commerciales, telles que les concessionnaires, dont l’horizon temporel est plus bref. En d’autres termes, l’analyse économique devrait évaluer l’avenir plus que les analyses financières des opérateurs privés.

8.2 Concepts fondamentaux pour l’évaluation des biens et services forestiers: étapes de l’évaluation

Le processus décrit ci-dessous peut être utilise pour répondre aux questions liées à la valeur pour la société d’un changement dans l’utilisation des terres forestières ainsi que les impacts commerciaux ou financiers de cette décision. Dans le débat ci-après, on suppose que le changement dans l’utilisation des ressources forestières sera une concession forestière, mais la même méthode peut être appliquée à tout changement intervenant dans l’exploitation des ressources forestières. On distingue quatre étapes dans une analyse financière ou économique (voir l’encadré récapitulatif ci-après).

Etape 1. Identification et évaluation chiffrée des apports et des résultats physiques associés à la concession forestière. L’analyse tente dans ce cas de mesurer tous les changements physiques qui se produiront dans le temps à la suite du changement intervene dans l’utilisation, à partir de la mise en route des opérations de la concession forestière. En effectuant l’analyse financière, seuls les apports et les résultats ayant un prix de marché seront pris en compte (par exemple, les effets qui créent des dépenses et des recettes). En revanche, l’analyse de l’impact économique de la concession identifiera et quantifiera également tous les apports et résultats non marchands.

Les impacts économiques du contrat sont définis par la différence entre deux situations: avec le contrat et sans le contrat. La variation estimée entre ces deux situations peut être légitimement attribuée au contrat. Les scénarios «avec et sans» sont le fondement de l’évaluation économique et ne devraient pas être confondus avec les situations du contrat «avant et après». Cela est dû au fait que certains changements sont destinés à se produire même si le contrat n’a pas été exécuté et, par conséquent, ces changements ne peuvent être attribués au contrat. Seuls les changements découlant du contrat doivent être pris en compte dans l’évaluation. Par exemple, supposons qu’une forêt donnée subisse une pression du fait de la coupe illicite et que l’on estime, malgré les efforts du gouvernement, qu’au cours des 20 prochaines années, 20 pour cent de tous les bois précieux seront exploités illégalement. Dans ce cas, l’analyste chargé de l’évaluation des coûts et bénéfices d’un contrat de concession qui devrait s’étendre sur 20 ans, estime qu’«avec» la concession, 100 pour cent du volume de bois précieux seront exploités. Toutefois, dans l’évaluation économique du contrat de concession, l’analyste ne doit attribuer que 80 pour cent de tous les bois précieux comme impact du contrat. Vingt pour cent seraient perdus de toute manière, avec ou sans la concession sur le bois. Si l’analyste devait comparer la situation avant et après dans l’analyse économique, il attribuerait 100 pour cent de la perte de bois précieux au contrat. Cela serait faux, car 20 pour cent du bois serait exploité même si le contrat de concession n’était jamais signé.

Etape 2. Evaluation des apports et des résultats.

L’étape suivante consiste à fixer des valeurs unitaires pour les apports et les résultats en tenant dûment compte de l’évolution probable de ces valeurs dans le temps. Dans le cas de l’analyse financière, on utilisera les prix du marché. Les prix du marché montent du fait que la disposition des consommateurs à payer pour un facteur de production ou un produit donné et la disposition des producteurs à vendre ce facteur de production ou ce produit coïncident. Ainsi, dans les marchés parfaits, le prix du marché pourrait servir à la fois pour l’analyse financière et l’analyse économique. Toutefois, cette coïncidence peut être modi- fiée par des imperfections dans le marché, par le manque de marchés ou par des mesures gouvernementales. Dans l’analyse économique, les apports et les résultats sont évalués en termes de disposition des consommateurs à payer pour eux. Lorsque les prix du marché ne reflètent pas adéquatement une disposition à payer, il faut fixer des prix virtuels qui seront utilisés dans l’analyse économique. En outre, on traite différemment les taxes et subventions dans les deux types d’analyse. Dans l’analyse économique, les taxes ne figurent pas comme coûts ni les subventions comme bénéfices, alors que dans l’analyse financière de l’opérateur privé, c’est ainsi qu’elles apparaîtraient. On explique plus loin la raison de ce traitement différent.

Etape 3. Comparaison des coûts et des bénéfices.

Cette étape est nécessaire pour déduire une valeur totale du changement d’utilisation. Elle vise à répondre aux questions fondamentales posées plus haut. Le changement d’utilisation des ressources forestières représente-t-il, somme toute, la meilleure utilisation possible pour la société dans son ensemble? Quelles seraient les incidences commerciales et les impacts sur le budget du gouvernement? Quel est le prix «juste» que le gouvernement pourrait demander pour la concession? Cette étape suppose une comparaison des coûts et des bénéfices enregistrés à différents moments et donc, que ces coûts et bénéfices doivent être ajustés ou escomptés au même moment, habituellement le présent, afin d’avoir une mesure de valeur commune.

Etape 4. Prise en compte de l’incertitude.

Les trois étapes précédentes fournissent Presque tous les éléments pour décider si le changement d’utilisation – le contrat de concession forestière – est le meilleur moyen de gérer les ressources et quel pourrait être un prix raisonnable pour un contrat avec une entité du secteur privé. Il y a encore un autre aspect de l’analyse de la valeur du contrat de concession qui touche de très près à sa négociation. Il s’agit de la valeur de l’incertitude associée aux calculs effectués Durant les trois étapes précédentes. Etant donné que les analyses financières et économiques portent sur l’avenir, identifier les impacts et les valeurs futurs avec soin et précision pose toujours problème. Il sera donc très important dans l’évaluation du contrat de procéder à un test pour déterminer dans quelle mesure les résultats sont affectés par certaines des variables clés de l’évaluation.

Ces étapes sont examinées ci-dessous. Le processus est complexe et se heurte à de nombreux obstacles et à des situations spéciales. La description ci-dessous n’est qu’une synthèse des principaux concepts. Pour une analyse approfondie du sujet, il est vivement recommandé au lecteur intéressé de consulter les publications de la FAO ci-après: Gregersen et Contreras, 1992; Gregersen et al., 1993 et Gregersen et al., 1995.

8.3 Méthodes d’évaluation

8.3.1 Identification et evaluation chiffrée des apports et des résultats

Un changement dans l’utilisation des forêts tel que celui découlant de l’application d’un contrat de concession forestière donne un certain nombre de résultats divers et nécessite plusieurs apports.

Il existe de nombreuses méthodes d’analyse pour classifier les apports et les résultats. L’une, populaire, consiste à différencier effets directs et effets indirects. Les effets directs sont ceux qui seraient pris en compte dans l’analyse financière, tandis que les effets indirects ne le seraient pas. Ces classifications n’ont guère d’importance, si ce n’est qu’elles rappellent à l’analyste de ne pas s’en tenir à l’analyse financière pour estimer la valeur économique des changements dans l’utilisation.

Aux fins de l’analyse économique, tout effet qui se traduit par une augmentation des biens et services recherchés est un résultat, tandis que le contraire est un apport indépendamment du fait que les résultats ou les apports sont commercialisés ou ne le sont pas. Les circonstances varient. Par exemple, on peut vendre du bois de feu sur un marché tandis que sur un autre il peut être produit et distribué gratuitement. Dans le premier cas, le bois de feu concerne l’analyse financière, mais pas dans le second. Toutefois, le bois de feu étant un bien qui a une valeur pour la société, l’analyse économique le prendra en considération même s’il n’est pas vendu sur le marché et que son prix de marché équivaut à zéro. Il ne faut jamais oublier que presque tous les produits issus de la forêt peuvent être ou non commercialisés dans une situation spécifique. Ainsi, en théorie, l’analyse de la valeur de l’utilisation de la forêt doit être effectuée dans le contexte de chaque cas particulier.

Les biens et services de consommation produits par les forêts qui ont normalement un prix de marché comprennent: produits du bois, bois de feu et autres combustibles fournis par la biomasse, fruits, noix, feuilles, plantes médicinales, fourrage, matériel génétique, animaux de la forêt, peaux, etc. Il y a aussi d’autres biens qui ne sont pas nécessairement consommés, mais qui ont une valeur marchande. Il s’agit notamment des usages touristiques et récréatifs des forêts et des services de protection des sols et des eaux. Dans certains cas, l’activité économique associée au contrat de concession forestière comporte la formation de la main-d’œuvre et des améliorations de sa productivité. Il est clair que cela résulte de leur utilité pour la société, bien qu’elle soit difficile à chiffrer et à évaluer. Enfin, d’autres services ne sont pas payés jusqu’ici par des transactions commerciales, par exemple, la préservation de la biodiversité, les échanges gazeux et le stockage du carbone.

Il faut souligner que les apports et les resultants sont les deux faces de la même médaille. Par exemple, la sédimentation a pour effet de réduire la perte de capacité d’emmagasinage du barrage qui, à son tour, se traduit par des pertes en aval causées par la disponibilité décroissante d’eau du barrage. Si le contrat de concession forestière réduit ces avantages fournis par la forêt, en raison de l’amenuisement du couvert forestier, il est clair que cela comporte un coût pour la société.

Outre les apports directs pris en compte dans l’analyse financière, il y a plusieurs autres apports associés à la concession forestière, qui ne sont pas directement commercialisés sur les marchés. Par exemple, l’utilisation de machines pour l’exploitation forestière et de scieries mobiles peut polluer l’eau et diminuer la qualité de l’air. L’équipement lourd peut endommager gravement les sols et la végétation et la faune restantes. Les routes peuvent favoriser la pénétration illégale et donc la détérioration de la forêt restante. Tous ces effets sont négatifs pour la société dans son ensemble mais, généralement, le contractant privé ne doit pas payer pour le dommage causé car ces effets ne font pas l’objet d’un commerce. Ainsi, s’ils ont une importance pour l’analyse économique, ils sont négligeables dans le cas de l’analyse financière.

Enfin, de l’avis de certains analystes, certains produits des forêts qui ne sont pas très importants aujourd’hui, pourraient acquérir demain une grande importance. Par exemple, un nouveau médicament issu d’une plante forestière pourrait être découvert pour traiter le cancer. Si les forêts actuelles sont converties à d’autres usages, cette plante pourrait être irrémédiablement perdue. Cette option, garder ces avantages potentiels mais inconnus actuellement, devrait être incluse d’une façon ou d’une autre dans l’analyse économique, car il est clair que cela est important pour la société. Des individus peuvent être disposés à payer pour preserver ces options inconnues. Dans d’autres cas, la simple existence de la forêt est un service que beaucoup de personnes apprécient.

Il ressort de ce qui précède que, bien que bon nombre des biens et services produits par les forêts puissent être très réels, il est souvent difficile de les chiffrer pour pouvoir estimer si un changement dans l’utilisation est la meilleure chose à faire pour la société.

Cela rend souvent difficile la tâche de l’analyste. Toutefois, dans la majorité des cas, il n’est pas nécessaire de disposer d’une liste détaillée et complète des apports et des résultats ni de savoir comment ils arrivent au fil du temps pour décider rationnellement s’il est opportune sur le plan social d’attribuer ou non une concession forestière.

8.3.2 Evaluation des apports et des résultats

8.3.2.1 Utilisation des prix du marché

Dans les analyses financières, la procédure est relativement simple et ne sera pas traitée ici dans le détail car il existe d’excellents guides sur ce sujet. Dans ce type d’analyse, seuls les apports et les résultats qui ont un prix sur le marché comptent. Les prix du marché sont utiles parce qu’ils sont observables et objectifs, même si l’utilité de leur emploi semble vague. Tant qu’il y a un marché fonctionnant bien, les prix définissent la valeur économique et ainsi l’analyse financière peut servir de base à la realisation de l’analyse économique.

Comme il a déjà été mentionné, les prix du marché reflètent rarement de manière adequate la vraie valeur économique des biens et services forestiers. Cela est imputable à plusieurs déficiences du marché telles que les informations inexactes, la domination d’un grand concessionnaire, les monopoles, les «effets externes» et ainsi de suite. En outre, il a aussi été précisé que les prix du marché subissent l’influence des politiques gouvernementales, telles que taxes, réglementations commerciales, etc. Pour le contractant privé, une subvention augmente les recettes et les taxes augmentent les coûts. Néanmoins, ces paiements de transfert du et vers le gouvernement ne représentent pas un changement dans la valeur de l’apport ou du résultat pour la société. Dans le cas d’une subvention, le gouvernement partage simplement une partie du coût de la production et cela en soi ne diminue pas le coût reel pour la société. Dans le cas d’une taxe, le gouvernement prend une partie de la valeur des résultats obtenus, mais cela ne change pas la valeur de ces résultats. Simplement, leur valeur est partagée entre l’entrepreneur et le gouvernement. C’est la raison pour laquelle, dans l’analyse économique, les taxes ne sont pas calculées comme coûts supplémentaires et les subventions ne font pas partie des bénéfices supplémentaires. Le gouvernement peut aussi introduire d’autres politiques qui influent sur les prix, telles que les mesures de contrôle des prix, les interdictions d’exporter des grumes ou des subventions dans d’autres secteurs comme l’agriculture qui faussent les prix des forêts, de maintes façons, directes ou indirectes.

Outre les complications introduites par les déficiences du marché et les mesures gouvernementales, il y a un autre aspect de l’utilisation des prix du marché dans l’analyse économique qui demande à être éclairci. Etant donné que les impacts de la concession forestière se manifesteront dans l’avenir, il faudra prévoir leurs changements futurs. Il est recommandé d’opérer avec des prix à l’abri des effets de l’inflation, à moins que des changements soient attendus dans les prix relatifs. Par exemple, le prix d’un bois précieux rare, extrait de la concession, peut changer dans l’avenir par rapport à d’autres prix du fait qu’il devient de plus en plus rare. La procédure pour calculer ces changements relatifs sur de longues périodes est une tâche spécialisée et comprend de très nombreux éléments impondérables, tels que les tendances futures dans les préférences des consommateurs et les changements technologiques qui, selon certains, portent souvent à un manque de crédibilité. Ainsi, cette tâche spécialisée ne sera pas examinée ici. De plus, on s’attend à ce que tous les prix changent à la meme cadence sur le long terme, et ainsi, à moins qu’il existe une raison majeure pour faire le contraire, il est conseillé d’utiliser les prix actuels dans l’analyse économique.

Les prix du marché peuvent être utilisés dans l’analyse économique dans la mesure où ils reflètent les valeurs économiques. Cela adviendra si les marchés sont performants, avec un grand nombre de vendeurs et d’acheteurs qui disposent tous d’informations suffisantes. Aucun vendeur et aucun acheteur n’est suffi- samment important pour pouvoir controller l’information ou pour influencer les prix du marché. Etant donné que les marchés internationaux tendent à représenter les options pour l’ensemble de la société, certains analystes préfèrent utiliser les prix à l’exportation pour tous les biens qui peuvent être commercialisés. Les prix à l’exportation ne peuvent être utilises pour des biens n’entrant pas dans le commerce international, c’est-à-dire ceux dont le prix intérieur est inférieur au prix à l’importation (caf), mais supérieur au prix pratiqué sur le marché international (fob). Le bois de feu s’inscrit souvent dans cette catégorie.

Dans tous les cas, lorsqu’un prix de marché est inadéquat ou qu’il n’existe pas, il faut recourir à certains moyens indirects pour determiner la disposition de l’acheteur à payer, qui est la source de la valeur économique. S’il s’agit d’apports, on utilise souvent le terme de coût d’opportunité. Cela est dû au fait que l’utilisation d’un apport dans la concession forestière détourne cet intrant d’autres usages et cela représente un sacrifice ou un coût dans l’analyse économique. Toutefois, cette valeur qui est perdue dans le nouvel emploi non réalisé, est aussi mesurée en termes de disposition à payer et donc, en définitive, la disposition à payer est la base pour mesurer aussi bien les benefices (résultats) que les coûts (apports). Si cela fournit une définition conceptuelle satisfaisante de la valeur économique, il faut être plus précis pour mettre en pratique le concept.

La figure 8.1 présente une vue d’ensemble des méthodes d’évaluation utilisées en analyse économique.

8.3.2.2 Techniques utilisant indirectement les prix du marché

Il est rare qu’un marché soit idéal et parfait. Mais il est souvent possible d’utiliser les prix de marché établis pour un bien ou un service en vue d’en déduire la valeur économique d’un autre bien ou service. A ce sujet, un appel à la prudence s’impose. Les techniques servant à calculer les valeurs économiques sont parfois utilisées de manière arbitraire ce qui semble un camouflage pour justifier une décision particulière plutôt qu’une analyse objective. Deuxièmement, les hypothèses et les données requises pour certaines de ces techniques sont difficiles à appliquer, en particulier dans les pays en développement qui manquent d’informations de base. Ces problèmes ressortiront dans les paragraphes suivants lorsque les diffi- cultés rencontrées pour utiliser ces techniques seront décrites. Pour cette raison, le texte ciaprès ne constitue pas un inventaire exhaustif des nombreuses techniques existantes.

a. Prix résiduels ou dérivés. Il s’agit probablement de l’une des techniques les plus populaires utilisées pour déduire le prix d’un bien ou d’un service en se fondant sur des estimations des valeurs des biens et services établies à un stade ultérieur du processus de production-consommation. La valeur du bois est calculée sur la base du prix sur le marché le plus compétitif. Cela peut être le prix à l’exportation du bois, par exemple. Ensuite, tous les coûts du traitement, du transport et de la récolte sont déduits pour arriver au prix résiduel du bois sur pied dans la forêt. Ce prix est ensuite appliqué au volume à extraire de la concession forestière. La procedure n’est pas sans présenter des obstacles. L’évaluation doit prendre en compte les variations entre les essences et les qualités, et les valeurs résiduelles changent naturellement selon le lieu et la topographie et au fil du temps comme la disponibilité et la technologie changent. En outre, pour calculer le prix du bois sur pied dans les concessions, il faut aussi tenir compte des coûts indirects découlant, par exemple, des dommages causés aux grumes dans les forêts restantes et aux ressources en sols et en eau. De plus, il peut y avoir une série d’échanges commerciaux multiples lorsque le bois passé de la forêt aux consommateurs. Ainsi, les exploitants peuvent vendre leur bois à un marchand local qui à son tour pourrait devoir faire appel à un sous-traitant pour transporter le bois, d’un parc à bois débités, jusqu’au marché. Là, le bois peut changer de mains lorsque, par exemple, il est vendu à une scierie. La production de la scierie peut aller à un fabricant de meubles avant d’arriver au consommateur final. Cette procedure peut fonctionner correctement si tous les intermédiaires et le marché final pour le bois ne connaissent pas de distorsions importantes. S’il n’en est pas ainsi, il faudra s’efforcer d’évaluer la pertinence des divers marchés et de corriger les déficiences du marché ou les distorsions politiques. De plus, les prix et les coûts aux différentes étapes supposent que des opérateurs efficacies entreprennent ces tâches. Cela n’est pas toujours le cas et donc des ajustements peuvent être nécessaires pour corriger également ces faiblesses inévitables.

De la même manière, certains marchés sont très étroits (très peu de participants vendent et achètent) et affichent de fortes variations saisonnières. En particulier, dans le cas de produits autres que le bois, les marches échappent largement à l’enregistrement officiel, de sorte que les données sur les prix et les quantités ne sont pas rapidement disponibles. Des prix de marché observables peuvent refléter une situation très étroite qui peut difficilement être extrapolée à des domaines plus vastes. Ainsi, le succès et la précision de la procédure dépendent de la qualité des estimations sur toute la chaîne des transactions. Malgré toutes ces limitations, cette méthode est l’une des plus communément utilisées, simplement parce qu’il n’y a guère d’autres solutions plus faciles et plus précises.

b. Prix de substitution. Selon cette méthode, on estime la valeur du bois ou d’autres produits forestiers d’après la valeur connue d’un bien ou d’un service de substitution ou comparable. Cela suppose que le prix d’un produit similaire pour lequel il existe un marché raisonnablement compétitif peut s’approcher du prix du bien sans un prix de marché satisfaisant. Ainsi, la valeur du bois de feu non marchand dans une certaine localité pourrait être estimée à l’aide du prix du bois de feu dans d’autres localités où il existe un marché actif. Autre possibilité, elle pourrait être fixée à un niveau proche de celui de la valeur d’autres combustibles tells que le charbon de bois ou le kérosène. Cette dernière approche, toutefois, suppose qu’en l’absence de bois de feu, d’autres combustibles tels que le kérosène seraient en fait utilisés, ce qui n’est pas toujours le cas. Si des biens sont des produits de substitution parfaits, le prix de l’un peut remplacer le prix de l’autre. Mais lorsque la possibilité de substitution diminue (kérosène à la place du bois de feu, par exemple), d’autres procedures peuvent devoir être utilisées.

c. Coût des voyages. La valeur d’un bien ou d’un service forestier est considérée égale à la valeur de l’effort déployé par le consommateur pour arriver sur les lieux où le bien ou le service forestier se trouve. On estime que si l’individu est disposé à payer pour le voyage, l’expérience forestière doit être au moins aussi précieuse que les frais encourus pour le déplacement. Par exemple, une activité récréative peut exiger beaucoup de temps et d’effort. On a souvent eu recours à des études des coûts de voyage pour estimer la valeur récréative des forêts. On procède à des enquêtes pour calculer toutes les dépenses pour parvenir au site particulier, y compris les coûts de transport, l’hébergement et ainsi de suite, ainsi que les données sur les visiteurs, telles que le niveau du revenu. Avec cette information, il est possible d’établir une courbe de la demande pour le site et ainsi d’évaluer la disposition du consommateur à payer pour des services récréatifs.

d. Méthode hédonique. Cette méthode permet d’estimer des valeurs d’après les valeurs connues d’autres biens assimilables techniquement ou qui présentent une soussérie de caractéristiques similaires. Elle a été utilisée pour estimer la valeur de la pollution atmosphérique et acoustique basée sur la manière dont la pollution influe sur la valeur des biens immobiliers. Si plusieurs maisons sont identiques mais situées à des distances différentes de l’aéroport, par exemple, les différences dans leurs valeurs peuvent être attribuées à la pollution acoustique. Ainsi, la valeur totale de ces differences représente alors le coût de la pollution acoustique liée à l’existence de l’aéroport. La méthode suppose des prix des terrains compétitifs et une série importante de données pour éliminer d’autres facteurs qui pourraient aussi affecter la valeur des résidences. En raison de ces exigences, la méthode n’a pas été appliquée aux forêts dans les pays en développement.

e. Coût de remplacement ou coût évité. Cette méthode s’appuie sur le concept qu’un certain hectare de forêt ne peut avoir une valeur supérieure à celle de services similaires fournis d’une autre manière. Ainsi, la valeur du stockage du carbone d’une forêt ne peut être supérieure au coût des autres moyens de retenir la même quantité de carbone. Par conséquent, la solution la plus économique pour fixer le carbone peut être utilisée comme une estimation de la valeur de stockage du carbone des forêts.

f. Valeur des accroissements de production. La valeur de la production se manifestant dans des activités liées aux forêts, telles que l’accroissement de la production agricole en aval, peut être utilisée pour estimer la valeur de la fonction particulière des forêts en amont. La méthode exige de bonnes informations sur les rapports facteurs de production-produits (comment un hectare de forêt affecte le ruissellement et comment celui-ci à son tour affecte la productivité agricole, par exemple) et la valeur de ces effets liés. A proprement parler, elle devrait aussi tenir compte de l’effet des imperfections possibles du marché et des distorsions des politiques. La méthode est relativement facile à appliquer quand elle se rapporte à des estimations d’une fonction unique des forêts, telle que leur effet sur le regime hydrique, mais elle devient plus complexe lorsque plusieurs fonctions sont en jeu, là où la possibilité de compter deux fois existe, par exemple, si l’eau sert à alimenter une installation industrielle ou une usine hydroélectrique et à fournir l’eau pour la consummation domestique (Bishop, 1999).

g. Méthode du coût d’opportunité. Selon cette méthode, on estime la valeur correspondent aux possibilités auxquelles on a renoncé en utilisant la forêt. On suppose que la valeur de la forêt est au moins égale à la valeur des possibilités non exploitées, par exemple, si la forêt est sur une terre agricole, la valeur du maintien de la terre sous forêt doit être au moins égale à la valeur des produits agricoles qui pourraient être produits sur cette terre. Ou si l’on utilise des excréments d’animaux comme combustible, le coût d’opportunité pourrait correspondre aux accroissements des rendements agricoles auxquels on a renoncé en n’utilisant pas ces excréments pour amender le sol. La méthode est valide si la population a de fait converti la forêt à l’agriculture ou utilisé les excréments pour amender le sol au lieu de le brûler. Cela peut être ou non le cas.

8.3.2.3 Techniques utilisant des prix non marchands

Toutes les méthodes examinées jusqu’ici ont un rapport direct ou indirect avec les prix du marché ou utilisent des prix du marché pour estimer la disposition à payer. Une autre méthode consiste simplement à demander aux consommateurs d’indiquer leurs préférences en supposant des marchés hypothétiques et le montant qu’ils seraient prêts à payer pour certains biens ou services.

Evaluation contingente. Cette méthode est appliquée pour estimer la disposition du consommateur à payer un certain bien ou service, ou à accepter une compensation s’il reçoit un bien ou un service qu’il ne souhaite pas avoir (par exemple, perdre une portion de forêt). La méthode suppose que le montant que la personne a déclaré être prête à payer pour le service serait payé en réalité si cette situation devait se présenter. Elle est utile dans tous les cas où il y a peu de possibilités d’estimer des valeurs de nonutilisation à l’aide d’autres méthodes telles que celles qui s’appuient sur des produits de substitution ou de remplacement. Par exemple, la méthode a été utilisée pour estimer combien de personnes seraient disposes à payer ou à contribuer pour conserver la diversité biologique dans les pays tropicaux. Des critiques ont signalé la possibilité de biais dans la préparation des questionnaires ou dans les interviews, ainsi que le fait que les personnes interrogées pourraient ne pas être complètement honnêtes en déclarant leurs préférences et leur disposition à payer. Cela est dû au fait qu’elles savent que la situation décrite dans l’enquête n’est qu’une hypothèse et qu’en réalité, elles n’auront pas à payer les valeurs qu’elles déclarent être disposées à payer (pour un examen des variantes de cette méthode, voir Bishop, 1999).

8.3.3 Comparaison des coûts et des bénéfices

Après avoir défini les apports et les résultats de la concession forestière et estimé leurs flux physiques dans le temps et leur valeur, on peut commencer à comparer les bénéfices et les coûts dans le but de déterminer le résultat net du changement d’utilisation proposé (en l’occurrence, la concession).

Et comme on l’a mentionné plus haut, plus une forêt donnée sera utilisée dans l’avenir, moins cette utilisation aura de valeur par comparaison avec la même utilisation aujourd’hui. En économie, c’est le concept de «valeur temporelle». Ainsi, l’établissement du résultat économique ou financier net du changement d’utilisation, est mené en trois étapes:

• établissement de flux de valeurs;

• actualisation des coûts et bénéfices;

• calcul de la valeur du changement d’utilisation.

8.3.3.1 Etablissement de flux de valeurs

Cette méthode consiste à combiner les informations sur les apports et les résultats physiques avec leur valeur (prix du marché ou prix virtuels) pour établir des tableaux décrivant les valeurs s’affichant au fil du temps.

S’il s’agit d’une analyse financière, on parlera d’un tableau de cash-flow et il comprendra seulement les facteurs de production et les produits avec des prix du marché et leurs prix respectifs. Dans le cas de l’analyse économique, on parlera d’un tableau de flux de valeurs. Ce tableau comprend les apports et les resultants marchands et non marchands et les prix virtuels.

Comme on l’a mentionné plus haut, les tableaux de cash-flow et de flux de valeurs different en ce sens que le cash-flow concerne certains paiements de transfert comme les taxes, subventions et remboursements de prêts. Il faut prendre en compte d’autres aspects. Dans l’analyse financière, les coûts interviennent au moment où sont faits les paiements qui peuvent différer du moment où les facteurs de production sont effectivement utilisés. Par exemple, un facteur de production peut être utilisé aujourd’hui mais payé en plusieurs tranches, sur 3 ans, dans le tableau de cash- flow. Chacun de ces paiements durant ces trios années est signalé comme un coût dans l’année respective. Dans le tableau de flux de valeurs, c’est l’utilisation effective du facteur de production qui importe, et non quand le paiement a lieu. Ainsi, si le facteur de production est utilise aujourd’hui, il représente le coût pour l’économie. Un raisonnement analogue s’applique dans le cas de facteurs de production qui se matérialisent aujourd’hui mais dont la valeur est payée par les acheteurs sur une certaine période.

8.3.3.2 Actualisation des coûts et bénéfices

Si tous les impacts devaient intervenir en meme temps, l’analyste pourrait se contenter d’additionner coûts et bénéfices et de les comparer sans rien faire d’autre. Toutefois, une concession forestière s’étend en général sur plusieurs années et les coûts et bénéfices s’échelonnent sur une longue période. Comme nous l’avons déjà mentionné, les valeurs intervenant à différents moments ne peuvent être directement comparées. La raison en est que la valeur est liée au temps. Les impacts se manifestant durant différentes années doivent être «homogénéisés » en un dénominateur commun. Il faut donc introduire un facteur d’ajustement. C’est le taux d’actualisation et le processus d’ajustement est appelé actualisation2.

Dans l’analyse financière, on utilisera le taux d’actualisation en vigueur. Ce taux est cense représenter quelles ressources pourraient créer, dans la meilleure alternative de marge possible, le coût d’opportunité du capital. En réalité, ce taux varie d’une situation à l’autre. Dans les marchés imparfaits, par exemple, ceux auxquels un petit exploitant est confronté, il peut être très élevé. Si le contractant participant à la concession forestière a un bon crédit, le taux peut être beaucoup plus faible. Ainsi, dans la majorité des cas, un taux débiteur moyen peut être approprié. Il n’y a pas une seule formule pour déterminer un taux unique. Etant donné que l’analyse financière est effectuée du point de vue d’une partie spécifique, par exemple, un concessionnaire financier potentiel, le taux d’actualisation à utiliser est celui que le concessionaire trouvera sur le marché. Si l’analyse financière est effectuée du point de vue du trésor public, on peut utiliser le taux en vigueur pour les bons du trésor, et ainsi de suite.

La situation est encore plus complexe dans le cas de l’analyse économique, car le taux à utiliser devrait être la valeur que la société dans son ensemble attribue au temps. La majorité des individus préfère recevoir les bénéfices le plus vite possible et repousser les coûts. Ce désir sera plus ou moins intense selon que la société préfère consommer tout de suite ou plus tard. Mais l’on estime en général que le taux d’actualisation futur de la société est plus faible que celui des entrepreneurs privés, en partie parce que la société (et le gouvernement) doivent penser aux besoins des générations futures.

Il n’y a pas de solution facile à ce problème. Laisser différents analystes examiner diverses options économiques et utiliser différents taux d’actualisation n’est pas une bonne solution. C’est pourquoi les bureaux de planification appliquent normalement un taux standard pour toutes les analyses économiques. Ainsi, l’analyste devrait obtenir le taux d’actualisation approprié d’une unité centrale de planification. Si ce taux n’était pas disponible auprès du bureau de planification, l’analyste pourrait choisir un taux, de 8 ou 10 pour cent par exemple, et l’utiliser pour l’analyse principale, et ensuite tester la sensibilité des résultats à d’autres taux, par exemple, 7 ou 11 pour cent, et déterminer si ces autres taux modifieraient sensiblement les conclusions de l’analyse. La section ci-après traitera de ce thème.

8.3.3.3 Prise en compte de l’incertitude

A ce stade, l’analyste peut fournir au décideur la grande partie des informations necessaries pour décider si l’idée de conclure un contrat de concession forestière avec un particulier est bonne pour l’ensemble de la société. L’analyste peut fournir une mesure de la valeur économique nette de la proposition de concession forestière et, si une analyse financière a été effectuée du point de vue des contractants potentiels, indiquer à combine devrait s’élever le prix du marché de la concession que les contractants potentiels sont disposes à payer pour le contrat. Enfin, si une analyse financière a également été effectuée pour examiner les répercussions pour le gouvernement, l’analyste pourrait fournir des informations sur les effets du contrat sur les recettes gouvernementales.

Toutefois, il reste une série d’aspects qui peuvent influer sur le pouvoir de négociation des parties intéressées et l’utilité de la concession forestière. Comme il ressort de ce qui précède, tous les calculs ci-dessus se réfèrent à des événements qui se produiront dans l’avenir et qui sont donc incertains. Dans le cas d’un contrat de concession forestière, l’incertitude peut être forte car elle augmente rapidement à mesure que l’horizon de planification s’élargit. Les contrats pour les concessions pourraient bien atteindre 30 ou 40 ans et beaucoup des effets s’étendent généralement au-delà de cette période.

S’il existe de nombreuses observations sur des événements passés similaires, ou sur des estimations et des tendances passées, l’analyste peut être en mesure d’estimer les probabilities que certains événements se produisent réellement dans l’avenir. Par exemple, une gamme de variation de prix futurs de certaines essences de bois pourrait être calculée dans certaines limites probables. On parlera alors de risque. Lorsqu’il n’y a aucune ou seulement qu’une petite base pour tirer des probabilités, on parlera d’incertitude. Dans la plupart des cas, il s’agit à la fois de risque et d’incertitude et les analystes peuvent avoir recours à l’analyse de sensibilité pour vérifier la solidité de leurs conclusions. Si cette analyse fait ressortir certains paramètres qui modifient complètement les résultats de l’analyse, il sera bon de poursuivre l’analyse de ces paramètres. En conséquence,l’analyse de sensibilité fournit des informations utiles sur les priorités pour la recherche future concernant les aspects de l’analyse qui pourraient être les plus faibles et les plus critiques.

En résumé, déterminer la valeur des forêts et les conséquences d’un changement d’utilisation n’est pas une tâche aisée. Cela nécessite des projections à long terme, qui sont incertaines, avec et sans les scénarios de changements (par opposition à avant et après), et l’identification et la quantification d’un certain nombre de biens et services, d’apports et de résultats, pour lesquels le marché est parfois inexistant ou imparfait. Ce serait une grave erreur de tenter d’évaluer chaque chose en termes économiques, en particulier, lorsque la base pour déduire les valeurs est peu solide. Il est conseillé de commencer par mesurer et estimer les impacts les plus faciles à évaluer. Somme toute, les valeurs ne sont necessaries que pour prendre des décisions. Si l’on peut recueillir une quantité suffisante d’informations, seulement sur la base des impacts les plus importants pour prendre une décision rationnelle, il n’y aura rien d’autre à faire. Il faudra tenir compte du temps et des resources humaines limitées, nécessaires pour parvenir à une analyse détaillée. Dans de nombreux cas, conduire une analyse de sensibilité pour des variables clés aidera à décider si d’autres travaux sont nécessaires et, si oui, sur quells aspects de l’analyse.

8.4 Etablissement des taxes forestières

Cette section porte sur le choix et la conception des taxes forestières et donne un aperçu general des options disponibles pour fixer des taxes pour l’utilisation des ressources allouées en vertu d’un contrat. Les taxations sur les resources forestières sont souvent appelées droits, redevances d’abattage, loyers, taxes, revenus et droits d’utilisation3.

Les données obtenues moyennant l’estimation des valeurs décrites dans la section ci-dessus sont utilisées par le gouvernement comme l’un des principaux éléments pour determiner les taxes à prélever sur les contrats forestiers sur domaine public. D’autres facteurs tels que les priorités politiques, les aspects liés à l’équité, l’atténuation de la pauvreté, les objectifs de développement régionaux, etc., peuvent aussi influer sur cette décision. Ainsi, les taxes peuvent avoir plusieurs objectifs, notamment la gestion durable des forêts sous contrat, la perception des recettes publiques et l’orientation des initiatives privées en fonction des autres nombreux objectifs de la société.

Les taxes sont normalement établies par unité de volume de bois (mètre cube de bois) ou par unité de surface de la forêt sous contrat (hectares ou acres) ou une combinaison des deux méthodes.

8.4.1 Taxes fondées sur le volume de bois

8.4.1.1 Redevances d’abattage fondées sur le volume

Dans les pays développés et la plupart des pays en développement, le bois sur pied est vendu sur la base du volume de bois (Gray, 1983; Grut, Gray et Egli, 1991). D’où le terme redevances «d’abattage».

Elles sont utilisées dans presque toutes les provinces canadiennes, aux Etats-Unis, Indonésie, Malaisie, Philippines et dans divers pays d’Afrique et nombreux autres pays à travers le monde.

Les redevances d’abattage peuvent être adaptées aux essences et aux dimensions du bois, et, bien sûr, peuvent être complétées par d’autres droits pour tenir compte des conditions d’extraction, par exemple, les défauts du terrain.

Etant donné que ce sont les arbres sur pied ou les grumes qui ont une valeur pour l’industrie forestière, il est probable que les taxes fondées sur le volume de bois coupé continueront d’être une composante importante des systèmes de revenus forestiers.

Atouts et faiblesses des prix des redevances d’abattage fondées sur le volume: les redevances fondées sur le volume peuvent refléter fidèlement la valeur du bois sur pied et du bois rond vendu du fait que les prix des redevances d’abattage peuvent être diversifiés par essence, qualité et emplacement, caractéristiques qui déterminent la valeur du bois.

Les prix des redevances d’abattage fondées sur le volume exigent la mesure des grumes, une supervision, un système de facturation, et tous les frais administratifs y afférents. Diversifier les prix de ces redevances pour refléter exactement les valeurs des redevances peut ajouter à la complexité des prix des redevances et au système de collecte des revenus, des frais administratifs, et créer des problèmes d’évasion.

Pour les juridictions ayant une administration forestière très développée, les prix des redevances d’abattage fondées sur le volume resteront probablement le système de revenues forestiers le plus utilisé. Les prix des redevances qui reflètent la valeur du bois d’œuvre peuvent aider à soutenir l’aménagement forestier. Mais à moins que les redevances d’abattage ne soient associées à des restrictions en matière de gestion, elles pourraient entraîner un écrémage de la forêt si l’extraction ne concernait que les arbres les plus précieux.

8.4.1.2 Redevances d’abattage par arbre

Les redevances d’abattage par arbre ont été utilisées dans quelques pays seulement, au Ghana et au Nigéria, par exemple. Des feuillus précieux en Amérique du Nord, en Europe et ailleurs, sont parfois vendus comme arbres individuals sur une base par arbre, souvent pour des milliers de dollars.

Les redevances d’abattage par arbre sont un prix uniforme pour chaque arbre vendu ou abattu. Sous cette forme, elles représentent un simple système de revenus. Aucune verification des grumes n’est nécessaire et il est facile de vérifier les charges en comptant les souches. En général, les redevances d’abattage par arbre conviennent particulièrement bien au bois de dimension et de qualité uniformes.

Atouts et faiblesses des redevances d’abattage par arbre: les redevances d’abattage par arbre ont l’avantage d’être simples. Elles evident les frais administratifs, les problèmes et les difficultés rencontrées pour mesurer les grumes. Il est facile de vérifier les paiements par une inspection sur le terrain et en comptant les grumes. Mais elles ne peuvent pas refléter correctement la valeur de tous les arbres et pourraient donc ne pas être capables de créer autant de revenus qu’un système rationnellement conçu fondé sur le volume de bois abattu et les prix du marché du bois. Les redevances par arbre sont très appréciées là où il est important que l’administration reste simple et où la vérification de la mesure des grumes est coûteuse ou difficile.

Les redevances d’abattage par arbre peuvent être utilisées pour soutenir la coupe sélective. Cela permet souvent d’avoir une «selection par la qualité», les arbres plus petits ou moins précieux restant sur pied.

Ces redevances peuvent aussi constituer un système de prix utile pour la plantation de bois, à la fois pour les éclaircies et pour la coupe finale. Dans les opérations forestières en plantation, l’on peut compter les arbres sur le bord des routes avant le transport, ou les souches après la coupe, ou l’on peut marquer et facturer les arbres avant la coupe.

8.4.1.3 Ventes de bois pour une somme forfaitaire

Dans le cas d’une vente de bois pour une somme forfaitaire, tous les arbres marchands de la zone, ou seuls les arbres marqués pour la coupe, sont vendus pour un montant unique. Les acheteurs coupent alors autant d’arbres (ou d’arbres marqués) qu’il veulent et utilisent toutes les parties de l’arbre souhaitées. Aucun autre paiement ne sera demandé. Ainsi, l’acheteur est encouragé à utiliser autant d’arbres, et autant de parties de chaque arbre, qu’il pourra vendre. Les ventes pour une somme forfaitaire ont été utilisées en Europe, dans certains états des Etats-Unis et par des propriétaires de forêts privées pour la vente de blocs de bois.

Les ventes de bois pour une somme forfaitaire exigent un inventaire détaillé ou un inventaire des essences de la zone. Le bois contenu dans la zone est alors vendu en bloc. Si le peuplement doit être coupé à blanc, tout le bois est vendu. S’il doit être coupé selon un système de coupe sélective, les arbres à couper sont marqués et seuls les arbres marqués sont vendus. Le bois peut être vendu à un prix forfaitaire fixé et évalué par l’administration. Mais il est vendu en général à la criée, ou par soumissions scellées. Dans tous les cas, on doit procéder à un inventaire des essences fiable, à la fois pour rassurer le gouvernement au sujet de ce qui est vendu et pour réduire l’incertitude parmi les soumissionnaires.

Atouts et faiblesses des ventes de bois pour une somme forfaitaire: ce type de vente a l’avantage de simplifier la procédure administrative et d’encourager l’utilisation. Toutefois, s’il est effectué dans le cadre de plans de coupe sélective, il peut nécessiter des competences considérables et de nombreuses mesures. Il convient mieux dans le cas de coupes claires, où les soumissions en régime de concurrence peuvent être encouragées (en supposant une situation d’enchères concurrentielles) et où il est possible de mener des enquêtes fiables avant la vente.

Les ventes de bois pour une somme forfaitaire peuvent parfaitement convenir lorsqu’il s’agit de forêts de même classe d’âge, de seconde génération, spécialement pour le bois de plantation. Ce bois est de dimensions uniformes, il fait facilement l’objet d’enquêtes et celles-ci seront plus fiables.

8.4.1.4 Taxes forestières sur les produits forestiers transformés

Les taxes forestières peuvent être perçues sur des volumes de bois de sciage, contreplaqués ou d’autres produits forestiers transformés au lieu des redevances d’abattage sur le volume de matières premières. Elles peuvent également être perçues comme taxe ad valorem (pourcentage de la valeur).

Ainsi, dans certaines juridictions, les taxes fixées pour les scieries sont fondées sur la production de bois et non sur la production de grumes. Cette méthode est en général inefficace car elle décourage l’utilisation appropriée du bois et sa récupération.

L’Indonésie qui fondait les redevances forestières sur les volumes de grumes est passée à la production de produits ligneux transformés (contreplaqués et sciages) en 1985 (Gray et Hadi, 1990). Dans les Etats de Sabah et du Sarawak en Malaisie, les redevances pouvaient être payées soit sur la production de bois rond soit sur la production de sciages (Gray, 1983). Plusieurs provinces canadiennes (Manitoba, Saskatchewan et Newfoundland) ont perçu des taxes forestières sur la production de bois d’œuvre plutôt que sur celle de bois rond.

Atouts et faiblesses des taxes forestières sur les produits transformés: les taxes forestières sur les produits forestiers transformés sont plus faciles à administrer que les charges sur la coupe du bois. Les points de mesure sont moins nombreux et plus centraux. Les problèmes d’évasion sont amoindris et il est plus facile d’appliquer des mesures de contrôle.

Toutefois, comme on l’a mentionné, les droits sur les produits forestiers transformés n’encouragent pas à utiliser le bois de façon rationnelle. Du fait que des droits sont prélevés sur les produits transformés, il n’y a pas de taxes sur les grumes, il n’y a pas à payer pour le bois gaspillé, et on n’est donc pas encouragé à récupérer davantage de produits transformés. Il s’ensuit que les taxes calculées sur la base des produits forestiers transformés pourraient pénaliser les firmes qui parviennent à mieux utiliser le bois et à en récupérer une plus grande quantité.

8.4.1.5 Taxes à l’exportation sur les grumes et les produits transformés

Les taxes à l’exportation sont fondées sur des volumes de grumes ou des produits ligneux exportés à un taux par unité, spécifié pour chaque essence, catégorie ou qualité, ou comme taux ad valorem (pourcentage de la valeur).

Les taxes à l’exportation sur les grumes ou les produits ligneux transformés peuvent être perçues dans le but d’obtenir des revenus, en remplacement des autres taxes forestières ou à des fins touchant à l’économie politique, pour encourager la transformation dans le pays. Toutefois, leurs effets sur la foresterie et l’industrie forestière sont souvent complexes et elles ont parfois des résultats imprévus.

Taxes à l’exportation sur les grumes

De nombreux pays appliquent des taxes à l’exportation sur les grumes en remplacement des redevances d’abattage fondées sur le volume de bois. Il est plus facile de mesurer les volumes et de percevoir les revenus dans les ports d’exportation ou aux frontières que dans des localités éloignées dans la forêt. Cela fonctionne bien si une grande partie du bois récolté est exportée.

Les taxes à l’exportation sur les grumes peuvent aussi servir à encourager à transformer le bois dans le pays. En réduisant le marché d’exportation au moyen de taxes, les prix intérieurs des grumes tendront à baisser, profitant ainsi à l’industrie forestière (Repetto et Gillis, 1988). Toutefois, une offre de grumes bon marché ne favorisera pas l’efficacité dans l’emploi de la matière première, l’utilisation ou la compétitivité. Cela pourrait au contraire contribuer à soutenir et à maintenir des opérations de transformation inefficaces et ruineuses, et décourager une meilleure utilisation. Les bas prix des grumes pourraient aussi pousser à convertir les terres forestières à d’autres usages, par exemple, l’élevage en ranch.

Taxes à l’exportation sur les produits transformés

Suivant le même raisonnement, des taxes à l’exportation ont été imposées sur des produits ligneux soumis à une transformation peu importante tels que les sciages pour encourager le développement des industries comportant un degré de transformation plus élevé, telles que la fabrication de meubles. L’Indonésie, par exemple, a introduit une taxe à l’exportation sur les bois de sciage en 1989 pour encourager la transformation plus poussée du bois de sciage en des produits plus transformés et en meubles (Gray et Hadi, 1990).

Atouts et faiblesses des taxes à l’exportation: les taxes à l’exportation sur les grumes sont plus faciles à administrer pour les pays exportateurs de grumes que les prix des redevances d’abattage fondées sur le volume. Si elles sont associées à des taxes sur la production de grumes des usines de transformation, elles peuvent remplacer les prix des redevances d’abattage fondées sur le volume. Pour certaines juridictions, où il n’y a pas de système administratif bien développé, tout bien pesé, elles peuvent être préférables aux redevances d’abattage fondées sur le volume. Les taxes à l’exportation sur les grumes peuvent aussi servir à encourager la transformation des bois à l’intérieur du pays. Néanmoins, pour ce faire, elles doivent être associées à d’autres taxes forestières sur les grumes transformées localement. Une seule taxe sur les grumes destinées à l’exportation fera en general baisser leur prix sur le marché intérieur, augmentera le gaspillage ainsi que la conversion des terres forestières à d’autres utilisations plus rentables.

Les taxes à l’exportation sur les produits transformés (sciages, contreplaqués ou autres produits) ont divers effets de distorsion difficiles à prévoir sur l’industrie forestière, sur les prix des grumes, les prix des produits, l’utilisation, la productivité et les investissements. Si on décide de les appliquer, non sans avoir procéder à une analyse minutieuse de leurs effets incitatifs et de leur impact, il faudra faire prevue de prudence.

Il vaut mieux opter pour des taxes à l’exportation sur les grumes que pour des interdictions d’exporter ou des limitations de l’exportation. Les taxes à l’exportation sur les grumes peuvent décourager les exportations de bois rond et encourager la transformation des bois à l’intérieur du pays, et elles créeront un revenu à partir des grumes qui seront encore exportées.

8.4.2 Prélèvements fondés sur la surface forestière

8.4.2.1 Droits initiaux de licence sur les contrats forestiers

Les droits initiaux de licence sur les contrats forestiers peuvent être prélevés au moment de l’attribution du contrat. Ils peuvent prendre la forme d’un droit forfaitaire fixe, ou de droits fondés sur la surface, sur la superficie totale ou sur la surface forestière productive du contrat. Un droit initial de licence fondé sur la superficie totale de la concession est plus facile à administrer. Il est facile et rapide de calculer la superficie totale sur laquelle le droit s’applique. Un droit initial de licence fondé sur la surface forestière productive ou la superficie opérationnelle, nécessiterait de mener à bien un inventaire forestier.

Des droits initiaux de licence ont été utilises dans plusieurs pays. Dans la plupart des juridictions, les droits initiaux de licence sur des accords de fourniture de bois d’œuvre à long terme sont très modestes. La Côte d’Ivoire a prélevé un droit initial de licence sur de nouvelles concessions, fondé sur la superficie totale de la concession. Le Cameroun a prélevé des droits initiaux sur la superficie totale de la concession. Toutefois, ces droits initiaux représentent moins d’1 pour cent du revenu forestier (Grut, Gray et Egli, 1991). L’Indonésie a prélevé un droit initial de licence fondé sur la superficie totale de la concession payable au moment de la délivrance de la concession (Gray et Hadi, 1990).

Atouts et faiblesses des droits initiaux de licence sur les contrats forestiers: les droits initiaux de licence sur les contrats forestiers sont simples et faciles à administrer, en particulier s’ils sont prélevés en tant que charge fixe ou sous forme de droit par hectare sur l’ensemble de la superficie. Ces droits sur les contrats forestiers et autres tenures forestières ont trios objectifs: a) couvrir les coûts administratifs du traitement de la demande, des levés, des inventaires, des inspections, de l’examen de l’environnement et de l’administration de l’opération approuvée; b) refléter une partie de la valeur du contrat forestier, la valeur de l’offre sûre de bois; et c) empêcher les demandes de licences spéculatives. Il est possible d’utiliser plus fréquemment les droits initiaux de licence pour refléter la valeur des tenures forestières, et pour couvrir les frais administratifs supportés. Les droits de licence initiaux par hectare, associés à des loyers annuels fondés sur la surface (examines plus loin, peuvent encourager une foresterie plus intensive ainsi que la gestion et l’utilisation des forêts.

8.4.2.2 Taxes de surface sur les contrats forestiers

Utilisées dans de nombreux pays, les taxes de surface prélevées chaque année, sont des systèmes de revenus forestiers simples, faciles à administrer et à collecter. Toutefois, dans la majorité des pays, elles représentent une très petite partie des revenus forestiers totaux (moins de 5 pour cent) et ne jouent aucun role ou presque dans la gestion des forêts (Grut, Gray et Egli, 1991).

Les taxes de surface peuvent constituer une source de revenu plus importante et completer les redevances d’abattage fondées sur le volume. Les taxes de surface versées annuellement peuvent aussi servir à refléter la valeur de sécurité de l’offre de bois prévue par le contrat forestier et à percevoir une partie de cette valeur comme revenu forestier. Lorsqu’elles sont perçues une fois par an, les taxes de surface encouragent à exploiter les forêts sous contrat de manière plus efficace, plus intensive et à améliorer l’utilisation dans les operations d’abattage (par exemple, produire plus de bois sur une surface plus petite). Les taxes de surface minimales par hectare peuvent servir à refléter la valeur des terres forestières dans d’autres emplois, apportant ainsi un appui aux politiques en matière d’utilisation des terres.

Atouts et faiblesses des taxes annuelles de surface sur les contrats forestiers: ces taxes presentment des avantages qui en font une composante utile d’un système de revenus forestiers. Elles sont faciles à administrer avec moins de biais par rapport aux investissements à long terme. Par ailleurs, il est plus facile de surveiller la conformité. Toutefois, elles doivent être intégrées dans des plans d’aménagement; autrement il y a une incitation à écrémer la forêt. Elles encouragent également à utiliser les terres forestières de manière plus efficace et à économiser sur les surfaces forestières. Elles peuvent soutenir et encourager une foresterie plus intensive au titre des contrats d’exploitation forestière. Elles poussent particulièrement à convertir des terres en surplus à d’autres usages. Il s’agit précisément de la prochaine variante expliquée ci-après.

8.4.2.3 Droits sur les coupes annuelles autorisées au titre de contrats forestiers

Un droit fondé sur la coupe annuelle autorisée est une solution pouvant remplacer la taxe annuelle de surface. Ainsi, la Bolivie impose un droit sur les concessions forestières qui équivaut à 1 dollar par hectare, mais en meme temps, elle impose une période de rotation minimale de 20 ans et exige un plan d’aménagement forestier durable. Ainsi, au cours d’une année donnée, seulement 5 pour cent de la superficie de la concession peut être exploité. Cela réduit l’incitation à extraire seulement les bois les plus précieux. Un droit fondé sur la coupe annuelle autorisée refléterait mieux la valeur du contrat forestier et la sécurité de l’offre de bois, mais reste plus complexe.

Atouts et faiblesses des droits sur les coupes annuelles autorisées au titre de contrats forestiers: ces droits refléteraient mieux la valeur de la concession et de l’offre de bois garantie par la tenure de la concession forestière. Toutefois, ils exigent un calcul de la coupe annuelle autorisée avant de pouvoir être perçus. Des plans d’aménagement sont nécessaires et il faut procéder à des contrôles de la conformité.

8.4.3 Prélèvements fondés sur des critères autres que le bois

8.4.3.1 Taxes sur la propriété au titre des contrats forestiers

Les taxes sur la propriété et les variations sont appliquées aux forêts sur des terres privées au Canada, aux Etats-Unis et en Europe. Normalement, elles ne concernent pas les contrats forestiers relatifs à des terres publiques. Toutefois, des taxes sur la propriété ont été appliquées à des forêts sur domaine public dans quelques pays en développement. Par exemple, en Indonésie, une taxe sur la terre et d’amélioration est appliquée sur les terres forestières publiques dans les concessions forestières (Gray et Hadi, 1990).

Atouts et faiblesses des taxes sur la propriété au titre de contrats forestiers: les taxes sur la propriété étant fondées sur des valeurs estimées, elles peuvent refléter des valeurs différentes de la forêt. Toutefois, la complexité de la procédure administrative, les besoins de main-d’œuvre et le coût financier que comporte l’estimation des valeurs rendent moins attrayant ce type de taxation.

8.4.3.2 Droits forestiers minimaux

Les droits minimaux fondés sur la surface et les droits minimaux fondés sur le volume de bois établissent un plancher à la fois pour les taxes de surface et pour les redevances d’abattage et peuvent empêcher que le bois et les concessions soient vendus à un prix trop bas. Les droits minimaux sur les forêts garantissent que les contrats sur le bois et les forêts ne sont pas bradés sans rien rapporter au pays. Ils peuvent être fixés de manière à refléter la valeur du bois ou des surfaces forestières pour d’autres usages (protection de l’environnement, faune sauvage, aliments dérivés des forêts, protection des bassins versants, diversité biologique, etc.). Comme nous l’avons suggéré plus haut, ces avantages autres que la production de bois peuvent être importants (Bishop, 1999; Kramer et al., 1992).

8.5 Mise en place d’un système de revenus forestiers pour les contrats d’exploitation forestière

Normalement, lorsqu’ils sont utilisés individuellement, aucun des types de prélèvement mentionnés ci-dessus ne permet d’obtenir tout le montant du revenu et la conformité que le gouvernement (la société) attend d’un contrat d’exploitation forestière particulier. C’est pourquoi on utilise couramment plusieurs types de prélèvement en association, ce qui constitue un système de revenus forestiers. Le système de revenu approprié pour un contrat spécifique dépend des conditions socio-économiques du pays et des variables telles que le type de forêt, l’information disponible, la capacité administrative, les techniques des opérations, etc.

Un système de revenus forestiers, des droits et des taxes, doivent contribuer à l’aménagement durable des forêts, à l’utilisation efficace du bois, être relativement simples à administrer et permettre à l’industrie forestière de se conformer facilement L’industrie forestière a un intérêt dans un système de revenus forestiers qui appuie et favorise une production efficace et la conformité facile. Un système de revenus forestiers mal conçu peut facilement faire monter les coûts pour l’industrie, décourager la récupération et l’utilisation, réduire la compétitivité et, à la fin, réduire les valeurs du bois et les revenus potentiels disponibles.

Mettre en place un système de revenues forestiers pour réaliser les objectifs de politique forestière et saisir tous les revenus prévus signifie commencer par choisir des types de prélèvement fondés sur les avantages de chacun et ensuite les utiliser conjointement de manière à ce qu’ils puissent se renforcer et se completer mutuellement. La structuration du système de revenus forestiers est le principal facteur determinant pour le succès d’un contrat d’exploitation forestière du point de vue de la société.

Le système de revenus forestiers retenu sera fondé sur les types de prélèvement choisis du fait que:

1. Comme on l’a déjà mentionné, un type de prélèvement peut en compléter un autre. Par exemple, les offres à prime sur les ventes de bois peuvent refléter les valeurs du bois non saisies par les redevances d’abattage fondées sur le volume. Les rentes foncières par hectare peuvent faire baisser les taxes fondées sur le volume sur la coupe de bois.

2. Des situations différentes de la foresterie dans le pays peuvent exiger des mécanismes de prélèvement différents. Par exemple, les ventes de bois à prix forfaitaire ou les redevances d’abattage par arbre pourraient convenir pour des forêts de plantation, ou de petits blocs de bois, mais pas pour du bois tropical de croissance ancienne. Les offres à prime peuvent fonctionner dans des zones où l’offre de bois est limitée et dans de nombreuses zones où sont installées des entreprises forestières, mais pas là où il n’y a pas de concurrence ni là où l’offre de bois est pléthorique.

3. Le système de revenus forestiers devrait contribuer à plusieurs critères de politique forestière. Cela exige divers mécanismes de prélèvement, peut-être autant que de critères. Pour répondre à plusieurs critères ou objectifs stratégiques, il faut au moins un système, ou un instrument, pour chaque critère ou objectif. Avec moins de systèmes de revenus, il ne sera pas possible de répondre à tous les critères stratégiques. Dans la pratique, il serait souhaitable de choisir moins de droits et de charges par souci de simplicité, et de ne pas s’attacher à répondre à tous les critères.

Dans les pays développés ou en développement, la plupart des revenus forestiers dependent en grande partie des redevances d’abattage fondées sur le volume, qui représentent 90-95 pour cent ou plus des revenus forestiers pour la plupart des pays. Néanmoins, les redevances d’abattage et d’autres droits fondés sur le volume sont notoirement difficiles à collecter et sont sujets à des abus et à la corruption (mesures sous-estimées, sous-déclaration, classification erronée des espèces, coupe illicite, etc.). Les redevances d’abattage et autres droits fondés sur le volume exigent que les services forestiers disposent des moyens necessaries pour mesurer le volume des grumes ou verifier de manière indépendante ce volume et les registres des entreprises forestières. Ainsi, selon la capacité administrative du gouvernement et les niveaux de transparence dans la mise en œuvre des contrats d’exploitation forestière, les redevances d’abattage et les autres droits forestiers fondés sur le volume peuvent être complétés, voire remplacés, par des taxes de surface plus faciles à collecter sur la zone du contrat forestier. Alors que les taxes de surface peuvent entraîner quelques pertes de revenues potentiels pour les gouvernements, il est très possible que, selon les circonstances particulières du contrat, ces pertes soient plus faibles que celles dérivant des systèmes fondés sur les droits, sur le volume qui, en théorie, pourraient être plus efficaces mais, dans la pratique, ne peuvent pas être efficacement mis en œuvre.

8.5.1 Les systèmes de revenues forestiers pour les produits forestiers non ligneux

Les politiques en matière de prix et les systèmes de revenus pour les produits et valeurs autres que le bois sont plus difficiles à concevoir et à mettre en œuvre, et ce, pour trois raisons. Premièrement, les produits et valeurs autres que le bois représentent une gamme beaucoup plus large d’utilisations forestières.Deuxièmement, les nombreux produits autres que le bois ont une valeur non commerciale. Il s’agit notamment de biens tels que les valeurs de la nature sauvage et de la biodiversité; les effets externes et les avantages subsidiaires et coûts induits comme la protection des basins versants, ou des ressources ou produits appurtenant à tous comme la faune sauvage et les poissons. Par leur nature même, ces produits et valeurs non commerciaux sont difficiles à estimer. Troisièmement, la plus grande partie des produits forestiers autres que le bois est récoltée par des individus et des ménages, ou par de très petites entreprises, ce qui rend très difficile de superviser la récolte et de collecter des taxes forestières. En outre, une bonne partie est constituée de produits forestiers de subsistence pour lesquels on ne saurait exiger plus qu’un droit symbolique.

Pour toutes ces raisons, il serait donc difficile de fixer des prix pour tous les produits forestiers autres que le bois. Néanmoins, il est souvent possible de concevoir des politiques de prix et des systèmes de revenus ingénieux applicables à plusieurs situations et d’utiliser ces politiques comme un outil de gestion des ressources. On présente au tableau 8.1 quelques systèmes de revenus qui pourraient être appliqués aux produits forestiers autres que le bois. Il ne s’agit que d’une liste partielle destinée à montrer que le même traitement pourrait être appliqué aux produits forestiers ligneux et non ligneux.

Comme nous l’avons montré plus haut dans ce chapitre, des systèmes de fixation des prix des ressources ont été mis au point pour mesurer les valeurs des ressources non marchandes pour une gamme de ressources et dans plusieurs pays. On a appliqué des systèmes de fixation des prix à l’aménagement de l’environnement, à la gestion de la qualité et de la quantité des eaux, à la lutte contre la pollution des eaux, à la gestion des déchets sauvages et du trafic.

Des systèmes de fixation des prix ont été utilises jusqu’à un certain point pour refléter les valeurs des produits forestiers autres que le bois et pour gérer la ressource – pour la gestion des installations récréatives par le biais de droits d’entrée dans les parcs et de droits d’usage des installations de loisirs, de droits d’accès aux terrains de camping, de permis et de droits différentiels pour les résidents et les non-résidents et pour l’emploi en période de pointe et en période creuse; pour la chasse et la pêche par des droits de licence pour les résidents et les non-résidents et sur les étiquettes pour les espèces; et pour la gestion des eaux par la fixation de prix et de droits de licence pour l’eau. Il est possible de peaufiner les politiques de prix dans ces domaines et d’utiliser plus largement les prix dans la gestion des ressources.

On trouve aussi d’autres exemples et des expériences concernant des systèmes de revenues pour des produits et valeurs non marchands dans d’autres domaines de la politique gouvernementale, dans la théorie et la pratique des finances publiques, dans les finances des gouvernements locaux, dans la théorie et la pratique de la fixation des prix des services ublics et dans les taxes pour l’utilisation des services appliquées par les gouvernements locaux.

Toutefois, les valeurs non marchandes ne peuvent pas toutes être reflétées dans les prix et revenus. Pour que ces valeurs soient dûment prises en compte dans la gestion des ressources, il pourrait être utile de fixer quelques valeurs et prix comptables même bruts pour les produits et utilisations non forestiers et non marchands. Ces valeurs brutes pourraient alors être utilisées pour la gestion interne des resources et la planification de l’emploi des terres forestières.

Un examen complet et détaillé des systèmes de revenus potentiels concernant ces produits et valeurs ne relève pas de notre propos. Toutefois, il est important que les produits non ligneux et les valeurs non marchandes soient reconnus et pris en compte.

Tableau 8.1: Systèmes de revenus applicables à des produits forestiers autres que le bois

Bois de feu et charbon de bois

1. Droits sur le bois de feu ou le charbon de bois entrant sur des marchés commerciaux établis ou à des points en lisière de forêt. Droits par volume, chargement de camion, poids ou autres caractéristiques faciles à mesurer.

2. Permis de coupe de bois de feu commercial, ou permis de produire du charbon de bois.

3. Permis de récolte de bois de feu pour les ménages – simple permis annuel ou pluriannuel modeste ou symbolique, utilisé principalement pour suivre de près la récolte et l’utilisation de bois de feu et pour souligner que les forêts appartiennent au public.

4. Contrat et licence de bois de feu communautaire pour la gestion communautaire des ressources en bois de feu dans une forêt publique particulière.

Utilisation des ressources de subsistance

5. Les prix ou droits pourraient ne pas être appropriés pour la majeure partie des utilisations des ressources servant à la subsistance, en raison de la complexité des procedures administratives ou de la répartition des revenus.

Systèmes de revenu concernant des activités récréatives

6. Droit d’entrée annuel ou journalier dans les parcs ou autres installations récréatives.

7. Droit d’entrée sur les terrains de camping, les emplacements de pique-nique et autres installations.

8. Droits différentiels entre les installations pour encourager l’emploi des installations moins fréquentées ou sous-utilisées.

9. Droits de période de pointe et de période creuse pour encourager l’emploi en période creuse et en période de pointe.

10. Droits différentiels entre les résidents nationaux et les visiteurs étrangers.

11. Contributions volontaires pour des utilisations spécifiques et fonds spéciaux.

Chasse et pêche

12. Droits de permis, annuel ou journalier.

13. Droits de permis différentiels par région, emplacement ou espèce.

14. Etiquettes prévendus pour chaque animal ou poisson à capturer.

15. Contributions volontaires pour des fonds spéciaux destinés à financer l’aménagement ou la modernisation.

Produits de l’aménagement des bassins versants

16. Permis annuels d’utilisation de l’eau fondés sur les volumes autorisés de prélèvements ou l’emploi sur place.

17. Loyers pour l’énergie hydraulique.

Prix comptables pour les produits et valeurs des ressources non marchands

18. Plusieurs prix comptables pourraient être utilisés, non pas comme sources de revenus, mais comme prix internes pour l’aménagement des forêts, la gestion multiusages, l’aménagement des terres, la budgétisation et la planification ministérielles.

8.5.2 Méthodes de paiement pour les contrats d’acquisition

Les sections précédentes avaient pour theme les taxes forestières et les systèmes de revenues forestiers pour les contrats d’exploitation forestière. La présente section traite des conditions de paiement pour les contrats d’acquisition de biens et services. Le calendrier des paiements – qu’il s’agisse de prix fixés à l’avance ou de prix ajustés en fonction de l’inflation, de la hausse des coûts ou d’autres facteurs – la base et la méthode de paiement doivent être clairement spécifiés dans le contrat d’acquisition. Les paiements, la méthode et le calendrier des paiements, les procédures d’ajustement, etc., auront un effet sensible sur les offres ou les prix négociés car ils influent sur les flux nets de trésorerie pour le contractant retenu, ainsi que sur le niveau de risque que peuvent supporter le contractant et le gouvernement.

On décrit ci-dessous sept différents systèmes de paiement: 1) contrat à prix fixe, 2) paiements annuels ou périodiques plus offre à prime, 3) contrat par quantité unitaire, 4) contrat par quantité unitaire plus prime, 5) contrat sur dépenses contrôlées, 6) contrat avec responsabilité de réalisation, et 7) contrat conditionnel.

Comme nous l’avons montré plus haut dans ce chapitre, des systèmes de fixation des prix des ressources ont été mis au point pour mesurer les valeurs des ressources non marchandes pour une gamme de ressources et dans plusieurs pays. On a appliqué des systèmes de fixation des prix à l’aménagement de l’environnement, à la gestion de la qualité et de la quantité des eaux, à la lutte contre la pollution des eaux, à la gestion des déchets sauvages et du trafic.

Des systèmes de fixation des prix ont été utilises jusqu’à un certain point pour refléter les valeurs des produits forestiers autres que le bois et pour gérer la ressource – pour la gestion des installations récréatives par le biais de droits d’entrée dans les parcs et de droits d’usage des installations de loisirs, de droits d’accès aux terrains de camping, de permis et de droits différentiels pour les résidents et les non-résidents et pour l’emploi en période de pointe et en période creuse; pour la chasse et la pêche par des droits de licence pour les résidents et les non-résidents et sur les étiquettes pour les espèces; et pour la gestion des eaux par la fixation de prix et de droits de licence pour l’eau. Il est possible de peaufiner les politiques de prix dans ces domaines et d’utiliser plus largement les prix dans la gestion des ressources.

On trouve aussi d’autres exemples et des expériences concernant des systèmes de revenues pour des produits et valeurs non marchands dans d’autres domaines de la politique gouvernementale, dans la théorie et la pratique des finances publiques, dans les finances des gouvernements locaux, dans la théorie et la pratique de la fixation des prix des services publics et dans les taxes pour l’utilisation des services appliquées par les gouvernements locaux.

Toutefois, les valeurs non marchandes ne peuvent pas toutes être reflétées dans les prix et revenus. Pour que ces valeurs soient dûment prises en compte dans la gestion des ressources, il pourrait être utile de fixer quelques valeurs et prix comptables même bruts pour les produits et utilisations non forestiers et non marchands. Ces valeurs brutes pourraient alors être utilisées pour la gestion interne des resources et la planification de l’emploi des terres forestières.

Un examen complet et détaillé des systèmes de revenus potentiels concernant ces produits et valeurs ne relève pas de notre propos. Toutefois, il est important que les produits non ligneux et les valeurs non marchandes soient reconnus et pris en compte.

8.5.2.1 Contrat à prix fixe

Aux termes d’un contrat à prix fixe, le gouvernement verse une somme d’argent fixe, indépendamment des autres facteurs (conditions économiques, frais réels du contractant, etc.). Le prix du contrat est simplement le montant de l’offre d’une entreprise ou le prix du contrat négocié. C’est la méthode la plus simple, couramment utilisée par les gouvernements pour l’acquisition de biens ou de services (Cassidy, 1994).

Cette méthode convient parfaitement pour des projets de brève durée, ou des contrats comportant de petites sommes d’argent. Aux termes de ces contrats, le paiement est généralement fait une fois que le contrat a été rempli. Cela encourage la conformité (qualité du produit ou du service). Le contrat peut aussi comporter des dispositions prévoyant la retenue d’une partie du paiement final jusqu’à ce que le contrat ait été exécuté, ou que le programme ait été réalisé de façon satisfaisante. Dans d’autres cas, le paiement peut être divisé en plusieurs versements tout au long de la durée du contrat à des étapes préétablies. Le contractant bénéficiera ainsi d’un flux de trésorerie qui lui permettra de couvrir ses frais, tandis que le gouvernement pourra échelonner les versements. Néanmoins, pour encourager le contractant à mener à bien le projet, il est important qu’une partie suffisante des paiements soit retenue jusqu’à la fin du contrat et que cette partie retenue suffise à encourager l’exécution.

Ce type de contrat présente des avantages et des inconvénients. Il est facile à concevoir et à attribuer. Les frais administratifs sont généralement peu élevés et la perception des paiements est simple. Nonobstant, le prix du contrat étant fixe, après la signature, le contractant devra supporter tous les risques associés aux changements dans les coûts, les prix, les taux d’intérêt et autres facteurs qui influent sur les finances du projet. En conséquence, les contractants augmenteront leurs offres, et le prix des biens et services pour le gouvernement pourrait être plus élevé.

8.5.2.2 Contrats avec paiements annuels ou périodiques plus offre à prime

Cette méthode est applicable à des contrats d’acquisition permanents ou à long terme. Les paiements annuels ou périodiques sont spécifiés dans le contrat, et l’offre ou la négociation comporte un paiement supplémentaire sous la forme d’une prime. Celle-ci peut être versée au début, annuellement ou périodiquement.

Ce type de contrat est presque aussi simple à gérer que le contrat à prix fixe. Les frais administratifs sont généralement peu élevés. Néanmoins, comme pour le contrat à prix fixe, une fois le contrat signé, c’est le contractant qui assume tous les risques associés aux changements dans les coûts, prix, taux d’intérêt et autres facteurs qui influent sur le financement du projet.

8.5.2.3 Contrat par quantité unitaire

Les paiements peuvent être spécifiés sur la base de la production unitaire. Ils sont faits périodiquement (tous les mois ou tous les trimestres, par exemple), sur la base de la quantité (volume, nombre, etc.) des biens ou services fournis. Cette approche convient pour des contrats de longue durée, ou lorsque le contrat total est important. Pour gérer ce type de contrat, il est nécessaire de procéder à des mesures régulières et systématiques de la quantité et de la qualité des produits, et à un accord entre les parties sur la quantité et la qualité de la production. Les méthodes de mesure et la qualité des produits de ces contrats devront être vérifiées. La mesure des résultats du projet et la vérification feront croître les coûts administratifs du contrat. Elle peut aussi favoriser la subornation et la corruption.

8.5.2.4 Contrat par quantité unitaire avec une prime en plus

Ce type de contrat est identique au précédent, mais vient s’y ajouter une prime forfaitaire verse au début ou annuellement. Cette prime est déterminée par des soumissions en régime de concurrence ou par des négociations.

8.5.2.5 Contrat sur dépenses contrôlées

Aux termes de ce type de contrat, le gouvernement verse un droit à l’entreprise et se charge des frais encourus par l’entreprise pour mener à bien un projet qui pourrait être fondé sur une somme forfaitaire ou sur la production unitaire comme décrit plus haut. Cette méthode est utilisée pour des projets d’investissement, tels que la construction de routes et d’installations, mais elle peut aussi être utilisée pour des contrats visant à fournir des services, par exemple inventaires forestiers, inspections, mesure des grumes (vérification), certification des forêts, etc. Les gouvernements peuvent devoir utiliser ce type de contrat lorsqu’il y a incertitude au sujet de sa durée et de ses coûts, et lorsque les contractants ne sont pas disposes à faire des offres à d’autres conditions. Avec ce type de contrat, le gouvernement assume tous les frais de mise en œuvre du projet, et prend donc tous les risques. Cette méthode pose un problème: le contractant n’est pas encouragé à réduire ou à contrôler les coûts du projet. En fait, si le contrat est rédigé en termes de coûts plus un pourcentage des coûts, le contractant sera encouragé à augmenter les coûts et donc ses bénéfices. Ce type de contrat peut facilement entraîner des augmentations importantes des coûts par rapport aux premières estimations, qui doivent toutes être assumées par le gouvernement. On évitera donc d’y recourir chaque fois que possible.

8.5.2.6 Contrat avec responsabilité deréalisation

Le contrat avec prime d’encouragement regroupe plusieurs caractéristiques du contrat sur dépenses contrôlées et du contrat à prix fixe. Selon cette méthode, la somme payée par le gouvernement dépend à la fois de l’offre de l’entreprise et des coûts réels pour mener à bonne fin le contrat. Si les coûts réels dépassent l’offre, une partie du surcoût du contrat est payée par l’entreprise et une partie par le gouvernement, et ce dans des proportions préétablies. Si les coûts sont inférieurs à l’offre, le gouvernement et l’entreprise partagent les économies réalisées. Ainsi, tant la somme payée par le gouvernement que les benefices du contractant varieront en fonction des coûts réellement encourus. Le risque est partagé proportionnellement entre les deux parties. Cette méthode est fondée sur l’idée que puisque le gouvernement accepte de prendre certains risques, les contractants seront disposés à accepter des bénéfices ou un revenu plus bas et, en conséquence, feront des offres plus basses pour le contrat.

Les avantages de cette méthode pour le gouvernement sont qu’elle attire plus de contractants potentiels du fait que les risques sont partagés avec le gouvernement et que les risques sont plus faibles pour le contractant. Il pourrait donc y avoir plus de soumissionnaires et des soumissions plus basses. Un inconvenient de ce type de contrat est que le gouvernement doit disposer d’un moyen efficace pour évaluer et vérifier les frais supportés par le contractant.

8.5.2.7 Contrat conditionnel

Lorsque le gouvernement et les contractants disposent d’informations sur le projet ou sur l’activité, ils peuvent passer un contrat conditionnel. Dans ce cas, le montant des paiements dépend des facteurs spécifiés du projet ou de l’activité. Par exemple, des paiements effectués aux termes d’un contrat portant sur la construction de routes, pourraient être fondés sur les conditions du sol, la quantité de graviers disponibles, la quantité de roches qu’il faut perforer ou faire sauter, etc. Ce système de paiement réduit les risques et l’incertitude que les contractants peuvent rencontrer en préparant leurs offres et en exécutant le contrat (McAfee et McMillan, 1988). Les paiements du contractant varient directement en fonction de la cause sous-tendant le coût imprévu. Dans les contrats conditionnels, les contractants et le gouvernement doivent convenir à l’avance des aspects des risques du contrat qu’ils partageront.

Cette méthode présente deux inconvénients. Le premier est, comme pour le contrat avec responsabilité de réalisation, que les deux parties doivent convenir d’une méthode pour évaluer quand les conditions ont changé de manière que les coûts dépassent ceux estimés à l’origine. Ils doivent également décider qui devra prendre et interpréter les mesures requises. Là encore, indépendamment du sujet qui sera responsable, l’autre partie devra d’une manière ou d’une autre vérifier les procédures, de sorte que les frais de gestion des contrats seront plus élevés. Le deuxième inconvénient est qu’avec les contrats conditionnels, le gouvernement assumera presque tous les risques liés au dépassement des dépenses résultant de la hausse des coûts.

8.6 Résumé du chapitre

• L’estimation des valeurs attribuées aux forêts par la société et l’établissement d’un système de revenus forestiers qui reflète ces valeurs dans les contrats forestiers, font partie des tâches les plus importantes dans l’administration des forêts publiques. Ils affectent non seulement les revenus forestiers, mais aussi le comportement de ceux qui exploitent les forêts, les offres sur les contrats forestiers, et l’exploitation et l’aménagement des forêts.

• La première partie du chapitre traite des valeurs forestières et des methods d’estimation pour les produits et valeurs forestiers et non forestiers.

• Une distinction est faite entre valeurs et prix, valeurs marchandes et non marchandes et les droits forestiers, les systèmes de revenus forestiers, les valeurs du bois sur pied et la rente économique sont définis.

• On explique les diverses méthodes d’estimation du bois d’œuvre et les avantages et inconvénients de chacune.

• Les contrats d’exploitation forestière ont une valeur outre le bois d’œuvre. Les facteurs à l’origine de ces valeurs sont définis. On suggère que ces valeurs soient reflétées dans des droits forestiers séparés sur les contrats forestiers.

• On définit et on illustre par des exemples les différents types de valeurs forestières autres que le bois d’œuvre et non marchandes. On identifie et on explique les concepts d’évaluation pouvant être appliqués à la série diverse de produits et valeurs forestiers et non forestiers, et de valeurs non marchandes.

• On explique différentes méthodes d’évaluation des valeurs forestières autres que la production de bois d’œuvre et non marchandes.

• La deuxième partie du chapitre traite des taxes forestières, du choix des taxes pour les contrats forestiers, des avantages et inconvénients des différentes taxes forestières et du choix des taxes forestières lors de la conception d’un système de revenus forestiers.

• Les taxes forestières sur le bois d’œuvre qui sont passées en revue comprennent les redevances d’abattage fondées sur le volume, les redevances d’abattage par arbre, les ventes de bois à prix forfaitaire, les taxes forestières sur les produits forestiers transformés (sciages, placages, contreplaqués, etc.) et les taxes à l’exportation sur les grumes et les produits forestiers transformés.

• Les taxes sur les terres et tenures forestières qui sont examinées englobent les droits initiaux de licences et les taxes de renouvellement sur les contrats forestiers, les taxes de surface et les droits sur les coupes annuelles autorisées ainsi que les taxes sur la propriété.

• On suggère qu’un système de revenus forestiers comprenne à la fois des taxes sur le bois d’œuvre et des taxes sur les terres et tenures forestières.

• On examine les taxes forestières pour les utilisations des forêts autres que la production de bois et non marchandes et on donne des exemples de taxes potentielles.

• Le chapitre se termine par un examen des méthodes de paiement et de fixation des prix pour les contrats d’acquisition. Il décrit sept types de contrat d’acquisition, leurs méthodes de paiement et leurs avantages et inconvénients.

8.7 Références bibliographiques

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