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VI. DIMENSIONS INSTITUTIONNELS

6.1 Réorganisation administrative

Dans plusieurs pays, les forêts peuvent relever, sur le plan administratif, de plus d'un organisme ou d'un ministère. Il s'ensuit souvent une «lutte interne» au sein du gouvernement (voire d'un ministère) qui entraîne un manque de coordination ou de coopération, une pléthore de règlements et de pratiques confus ou faisant double emploi et une situation difficile et déroutante pour les propriétaires et les utilisateurs des forêts, les résidents des zones voisines et autres parties intéressées. Certains aspects de ce problème ont déjà été étudiés ci-dessus (IV), particulièrement en ce qui concerne les conflits de compétence opposant les institutions chargées des forêts, de la faune, des aires protégées et d'autres ressources naturelles.

Au Ghana, la commission foncière est la principale autorité chargée d'octroyer les baux et concessions et de percevoir les loyers et redevances. Divers organismes forestiers - service des forêts, commission des forêts, conseil de développement des exportations de bois, bureau d'inspection des industries forestières, service de la faune - sont directement responsables de l'élaboration et de l'application de réglementations concernant l'exploitation et le contrôle des concessionnaires et des travailleurs forestiers. On a pu reprocher à ce cadre institutionnel d'avoir entraîné une gestion inappropriée des forêts, dont par exemple l'arrêt du recrutement des personnels et de faibles rémunérations. Il en est résulté de sérieux problèmes, tels que la surexploitation et des pratiques forestières non durables (Cirelli, 1996; Kotey et al).

C'est pourquoi certains pays étudiés ont regroupé les responsabilités administratives dans un même organisme. Bien que cela puisse paraître paradoxal, cette tendance s'inscrit dans le sens d'une décentralisation équilibrée de la gestion forestière. Le chevauchement de compétences au niveau central crée une telle masse de réglementations que la participation des acteurs locaux est fortement handicapée. La simplification des structures administratives - par exemple, en confiant plusieurs tâches sectorielles à des fonctionnaires dotés d'une compétence générale au niveau communal - est de nature à promouvoir la gestion locale.

La coordination des cadres réglementaires en aval de la coupe est également nécessaire. Par exemple, les scieries relèvent souvent du ministère de l'industrie, pendant que la vente de produits forestiers est soumise aux règles commerciales. Là encore, les chevauchements ou les lacunes réglementaires peuvent donner lieu à des pratiques forestières non durables.

6.2 Flexibilité législative

Dans bon nombre de pays étudiés, le processus de révision législative peut être assez complexe et exiger beaucoup de temps. L'adoption d'un code forestier complet ou la réforme de lois relatives aux forêts peut provoquer de longs délais entre l'approbation d'une politique forestière et sa traduction législative. De plus, après la promulgation d'une loi, son application effective est souvent handicapée par l'adoption tardive de ses textes d'application.

Toutefois, ce n'est qu'après l'adoption finale de la loi et de ses règlements que leur efficacité peut être évaluée. Mais il est parfois trop tard pour effectuer des ajustements sans passer par un long processus législatif ou réglementaire. Le recours à des «mesures provisoires» telles que celles adoptées au Ghana (voir 3.1.1 ci-dessus) peut aider à résoudre ce genre de problèmes.

Certaines dispositions des lois forestières peuvent nécessiter une mise à jour régulière. Lorsque la législation fixe un prix, une redevance ou une amende, lorsqu'elle énumère les aires ou les espèces protégées ou lorsqu'elle décrit en détail d'autres éléments importants, une réforme législative s'impose pour actualiser ces dispositions lorsqu'elles deviennent obsolètes du fait de l'inflation ou d'autres facteurs. Bien souvent les montants des amendes, fixés par la loi, sont vite dépassés et n'ont plus d'effet dissuasif. De même, les prix des produits forestiers et les montants des taxes forestières sont fréquemment prévus par la loi, rendant difficile leur adaptation aux fluctuations de la valeur de la ressource (Anywar; Kotey et al). Le temps, les efforts et les aléas politiques inhérents aux réformes législatives expliquent les longs retards apportés aux modifications des montants des amendes, souvent reportées jusqu'à ce qu'une réforme de la loi puisse être entreprise en profondeur. C'est pourquoi ces retards peuvent en pratique durer des années, voire des décennies.

Afin de remédier à ces inconvénients, il est courant d'habiliter le pouvoir exécutif à fixer, par voie réglementaire, les montants des loyers, taxes, redevances, prix, etc. En Gambie, les montants des amendes et des taxes ne sont pas spécifiés par la loi, celle-ci prévoyant l'adoption de règlements en la matière que l'administration peut réviser (loi forestière, art. 102 et seq.; règlement forestier, art. 3 et 41). On trouve des dispositions semblables à Zanzibar (art. 95 de la loi forestière), en Tanzanie (règlements forestiers) et au Soudan (art. 21 de la loi forestière). En Afrique du Sud, les montants des redevances forestières peuvent être fixés au niveau ministériel (art. 55 de la loi sur les forêts domaniales), ce qui rend plus aisée leur mise à jour régulière.

Cependant, l'adoption des règlements est souvent plus difficile qu'elle n'en a l'air et ne constitue pas nécessairement une solution flexible. C'est pourquoi il arrive assez souvent que les règlements aussi deviennent obsolètes. Au Liberia, bien que la loi fixe un barème des redevances applicables, elle autorise le service forestier à en ajuster régulièrement les taux en fonction de l'évolution des prix des grumes et des coûts de production (Schmithüsen). La loi peut aussi définir un critère précis de fixation des taux, rendant plus aisée l'élaboration ultérieure des règlements dans ce domaine (Gambie, art. 102 de la loi forestière).

En Afrique du Sud, on a suivi une approche différente. La nouvelle loi forestière définit le processus d'élaboration de ses règlements d'application, qui comprend une consultation du public. Elle prévoit toutefois la possibilité d'adopter des tarifs - redevances forestières et prix des services et produits fournis par l'Etat - moyennant une procédure simple qui requiert seulement le consentement du ministre des finances (loi sur les forêts domaniales, art. 54 et 55). Une telle procédure n'est cependant pas envisagée pour les amendes. Mais afin d'éviter des problèmes posés par l'inflation à cet égard, la loi ne fixe pas le montant des amendes, se contentant de disposer que le contrevenant s'expose à une peine d'emprisonnement et/ou d'amende pour chaque type d'infraction.

Là où les sanctions ne peuvent pas être maintenues à un niveau dissuasif par la voie réglementaire, le législateur impose parfois des peines non pécuniaires, telles la saisie d'objets ou le retrait d'avantages, dont la valeur croît plus ou moins au même rythme que l'inflation. Par exemple, le prix du bois et d'autres produits forestiers augmente en général autant sinon plus que l'inflation. C'est pourquoi de nombreuses lois fixent les montants des amendes par référence à un multiple de la valeur des produits forestiers prélevés ou ajoutent aux peines de base des amendes complémentaires d'un montant égal à la valeur des produits forestiers objet de l'infraction, augmenté des coûts de réparation des dommages causés[7]. De cette manière, le montant de l'amende peut être déterminé au moment du jugement ou du paiement, en fonction des valeurs et des coûts du marché, sans qu'il soit nécessaire de recourir au législateur.

La confiscation et la saisie des véhicules, outils et instruments utilisés pour commettre les délits forestiers sont un autre moyen d'appliquer des sanctions assez proches des valeurs courantes du marché[8]. La perte d'équipements ou de biens qui doivent être remplacés aux taux actuels du marché constitue une sanction financière qui n'a même pas besoin d'être calculée par les tribunaux. Dans certains cas, lorsqu'un concessionnaire commet une infraction forestière, il peut perdre des droits contractuels obtenus au titre de la concession (Namibie, art. 45(a) du projet de loi); Afrique du Sud (art. 58(1)(b)) de la loi sur les forêts domaniales).

Enfin, la valeur du temps et du travail d'une personne fluctue également en fonction de l'inflation. D'où l'importance accordée aux peines d'emprisonnement par certaines lois forestières, telles que celle du Malawi (art. 72). Néanmoins, le recours trop fréquent à l'emprisonnement comme moyen de dissuasion peut s'avérer contre-productif: faute d'autres options, il peut conduire à une augmentation des acquittements par des tribunaux qui refusent d'envoyer en prison les auteurs de délits forestiers. Plus grave encore, il peut porter atteinte au droit de la personne de ne pas subir des peines excessives. La loi sud-africaine sur les forêts domaniales comporte une disposition permettant d'éviter cet écueil: elle donne au juge la possibilité de condamner le délinquant à un «service communautaire», c'est-à-dire à des prestations en forêt, sans détention, exécutées à la place d'autres peines (art. 58(8)(a)).

6.3 Amélioration de l'application et de la dissuasion

La mise en œuvre des lois forestières pose de sérieux problèmes dans presque tous les pays étudiés (Saastamoinen et al). La gestion, la protection et la mise en valeur des forêts dépendent toutes de l'assurance qui sera donnée à ceux qui investissent leur temps, leurs efforts et leur argent, que le fruit de leur travail ne sera pas vain à cause d'opérations illégales (coupes, exportation, défrichement, etc.).

Le succès de la police forestière dépend de nombreux facteurs. On peut dire qu'elle échoue lorsque les contrevenants ont le sentiment:

Les pays étudiés reconnaissent généralement que ces trois facteurs constituent de vrais problèmes et les réformes législatives qu'ils ont entreprises essaient d'y porter remède.

6.3.1 Formation des fonctionnaires

Il est essentiel de dispenser aux agents forestiers une formation adéquate et d'élaborer des procédures visant à améliorer l'efficacité et la capacité des personnels chargés de mener des enquêtes, d'arrêter les auteurs d'infraction, de rassembler et présenter des preuves de façon appropriée, etc. (Kotey et al; Saastamoinen et al). Dans presque tous les pays étudiés, l'accent a été mis sur cette formation aussi bien des juges et procureurs que des agents de police, qui concourent tous à la mise en œuvre de la loi. De leur bonne formation dépend pour une large part l'efficacité de leur action. Par exemple, en améliorant le pouvoir de transaction des agents forestiers, la masse des petites infractions à traiter par les tribunaux diminue, sans enfreindre les droits des contrevenants (Malawi, art. 34 de la loi forestière).

6.3.2 Présomptions probatoires

Bon nombre de pays étudiés ont adopté des règles particulières en matière de preuve des infractions forestières, notamment pour ce qui est des coupes illégales et d'autres activités illicites. En Namibie, toute personne trouvée dans une forêt classée en possession de produits forestiers doit prouver qu'elle est autorisée à les détenir. Plus généralement, chaque fois qu'une autorisation est requise pour une quelconque opération, la charge de la preuve de la régularité de l'acte incombe à la personne qui l'effectue (art. 44 du projet de loi forestière). A Zanzibar également, quiconque est trouvé en possession d'un produit forestier en forêt classée est présumé l'y avoir prélevé, à moins qu'il ne puisse prouver le contraire (art. 96 de la loi forestière).

La loi sur les produits forestiers communaux du Zimbabwe établit aussi des présomptions de ce genre en disposant (art. 24):

A loi mauricienne réglemente l'utilisation des présomptions dans les tribunaux. Tout agent forestier compétent peut délivrer un certificat établissant certains faits, notamment le fait qu'une infraction a été commise sur des terres réservées ou publiques ou la valeur des produits forestiers pris ou endommagés. Un tel certificat constitue alors une preuve irréfutable (art. 13 de la loi sur les forêts et les réserves). Et on trouve des dispositions semblables dans de nombreux pays, comme le Swaziland (art. 8 de la loi sur les forêts privées). Toutefois, cette tendance à adopter des présomptions qui renversent le fardeau de la preuve, si elle facilite l'exercice des poursuites, ne doit pas aller à l'encontre des principes de juste traitement des accusés et de respect des droits de propriété et d'usage des produits forestiers (Christy, 1995).

6.3.3 Solutions contractuelles

En matière de lutte contre les infractions forestières, les pays étudiés privilégient de plus en plus les sanctions contractuelles s'agissant des concessions et les sanctions administratives s'agissant des autorisations. Cette approche augmente l'efficacité de la police forestière en ce qu'elle permet de suspendre ou d'annuler assez rapidement un contrat ou une autorisation en cas d'irrégularité. Cette annulation agit comme une sanction commerciale et augmente avec la valeur du bois.

Souvent les sanctions contractuelles sont prévues par la loi forestière elle-même, ce qui lève toute incertitude quant à leur application aux contrats portant sur le bois. Le projet de loi namibien (art. 20), par exemple, autorise une nouvelle négociation, la suspension ou la résiliation d'un contrat lorsque le concessionnaire refuse de:

La suspension d'une autorisation est permise lorsqu'il y a lieu de croire que celle-ci, une loi ou un règlement applicable ont été violés, jusqu'à ce que son titulaire mette un terme à l'irrégularité. Passé un délai raisonnable, l'autorisation peut être annulée si l'irrégularité persiste (art. 32). L'annulation est également encourue lorsque le détenteur enfreint la loi d'une façon ou d'une autre.

En Sierra Leone, les concessions forestières stipulent l'obligation de se conformer aux prescriptions des plans d'aménagement et de toute loi applicable (art. 8, 14 et 23 de la loi forestière; art. 8.3 du projet d'accord sur les concessions). Si un concessionnaire ne respecte pas son contrat de concession, celui-ci peut être résilié sans qu'il soit nécessaire d'intenter une action en justice. Il en est de même lors du renouvellement de la concession: le ministre peut le refuser en se fondant sur une simple évaluation des performances du concessionnaire (art. 14 et 16 de la loi forestière).

Selon la loi sud-africaine, la suspension, la modification, voire l'annulation d'un permis peuvent être ordonnées par l'administration chaque fois qu'un changement matériel se produit dans les conditions qui existaient au moment de l'octroi du permis ou que le détenteur du permis ne se conforme pas aux conditions stipulées, après mise en demeure (dont on peut se passer si elle cause un retard pouvant aggraver des préjudices aux personnes ou à la forêt - art. 25(2) de la loi sur les forêts domaniales).

6.3.4 Paiements forcés

Au titre des pouvoirs de police forestière, les utilisateurs des forêts peuvent être contraints par l'administration forestière à payer des sommes qui lui sont dues, tels que loyers, redevances, taxes, amendes. Dans certains pays, la loi prévoit à cet effet une sorte de gage mobilier. En Namibie, le projet de loi forestière permet aux agents forestiers de saisir les produits forestiers pour lesquels des redevances n'ont pas été payées. Des lots mélangés de produits forestiers peuvent être saisis, même lorsqu'il y a une incertitude quant aux parts des redevances qui ont été payées et celles qui ne l'ont pas été. Faute de paiement rapide, le service forestier peut vendre les produits saisis et utiliser les recettes pour payer d'abord les frais de saisie et de vente, ensuite les redevances restant dues, enfin le producteur (art. 23 - voir aussi l'art. 34 de la loi forestière du Soudan). De la même manière, les animaux pâturant en forêt peuvent être saisis et retenus jusqu'à ce que le propriétaire s'acquitte de ses taxes, faute de quoi il est procédé à la vente judiciaire du bétail saisi (art. 42).

6.3.5 Modalités alternatives et informelles de mise en oeuvre

Le fossé existant entre agents forestiers et populations locales (agriculteurs, usagers de la forêt, populations autochtones, communautés) est souvent accentué par le fait que ces dernières ont difficilement accès aux lois forestières (Kotey et al). Or pour que la législation forestière soit efficace, il importe qu'elle soit perçue comme profitable à tous et que ses principes fassent l'objet d'une acceptation générale. C'est pourquoi plusieurs pays ont mis en place des mécanismes plus accessibles et moins formels de règlement extrajudiciaire des conflits forestiers. Plutôt que de miser exclusivement sur les tribunaux pour résoudre des problèmes civils et administratifs, il est fait recours à l'arbitrage ou la médiation pour trouver, de manière plus souple, des solutions qui donnent satisfaction tant à l'administration qu'aux populations locales. Les différends peuvent ainsi être réglés plus rapidement et les forêts ont moins à pâtir de longs contentieux.

Le recours au règlement extrajudiciaire est généralement limité aux affaires courantes: conflits entre usagers des forêts, dommages aux cultures, autorisations administratives, etc. Il arrive toutefois qu'il touche à des questions plus importantes. Au Ghana, par exemple, le projet de loi forestière envisage d'étendre cette forme de règlement des différends même à certains délits forestiers, sur la base du pouvoir de transaction des agents forestiers (Cirelli, 1996).

Il arrive aussi que le règlement extrajudiciaire des conflits s'étende aux questions sociales et culturelles. La loi sud-africaine prévoit ainsi la désignation de facilitateurs, médiateurs et arbitres pour le règlement des différends résultant d'accords conclus en vertu de la loi elle-même (art. 45). Dans leur travail, ces personnes doivent prendre en considération les facteurs suivants: (i) les liens historiques et culturels entre la forêt et les communautés lorsque celles-ci sont parties à un différend; (ii) le besoin de trouver des solutions équitables aux problèmes forestiers posés; et (iii) les règles coutumières de gestion des forêts. Les dispositions relatives à l'arbitrage et à la médiation englobent des questions très diverses, tels les conflits concernant l'accès du public aux forêts domaniales.

En revanche, en Gambie, la plupart des conflits forestiers, y compris les délits forestiers, relèvent du chef de district en sa qualité de «magistrat de troisième classe». En l'occurrence, les «conflits» s'entendent aussi des appels des décisions prises par le service forestier (Ribot; art. 84 de la loi forestière). Bien qu'il ne s'agisse pas techniquement de règlements extrajudiciaires, ces procédures s'en rapprochent dans la mesure où elles sont très accessibles à la population locale et permettent d'apporter des solutions adaptées à ses problèmes pratiques.

6.4 Capacité d'agir

Le risque d'inertie de la part des agents chargés de la police forestière est pris en compte par certaines lois forestières nouvelles. Le projet de loi namibien prévoit à cet égard que toute personne est en droit d'exiger l'application de la loi (art. 48). Une mesure similaire a aussi été envisagée en Ouganda. De telles dispositions donnent aux acteurs non gouvernementaux la possibilité d'agir pour que la protection de l'environnement et le bien-être social - qui pourraient ne pas être considérés comme prioritaires par l'administration - soient dûment pris en compte (Anywar). En Afrique du Sud, toute personne physique ou morale peut demander au ministre de protéger n'importe quelle forêt en vertu de son pouvoir d'instituer des zones forestières contrôlées (art. 18 de la loi sur les forêts domaniales).

6.5 Financement des activités forestières publiques

Plusieurs pays étudiés sont confrontés à de graves insuffisances de financement du secteur forestier (Saastamoinen et al). L'administration forestière a de lourdes responsabilités en matière d'entretien et de planification, qui sont coûteuses et difficiles à assumer, mais qui ne sont habituellement pas génératrices de revenus. Même lorsque des recettes proviennent des taxes, redevances, amendes, etc., elles doivent en général être versées au trésor, sans obligation de les réaffecter au secteur forestier. On observe en outre une tendance à allouer une partie croissante des recettes forestières aux budgets locaux. Ces réformes entraînent parfois une diminution des ressources des services forestiers centraux.

Au Ghana, le service forestier est responsable de la majeure partie des opérations forestières et des activités de gestion, ainsi que de la collecte des recettes qu'elles produisent et des redevances pour les services professionnels fournis (art. 7, 15 et 16 de la loi relative à la commission forestière. Selon un projet de réforme, une partie importante de ces revenus serait attribuée aux communautés locales pour financer leurs activités décentralisées. L'administration et la supervision des forêts entraînent, toutefois des coûts directs et indirects qui doivent être supportés par les organismes forestiers dans l'intérêt, à long terme, des forêts du pays. Il est aussi envisagé de mettre en place un nouveau système de gestion administrative et financière et un mécanisme de recoupement direct des coûts supportés par le gouvernement central (Cirelli, 1996).

On note par ailleurs une tendance à créer des fonds spéciaux alimentés par des recettes forestières, en vue de réaffecter directement ces revenus au secteur forestier. En Gambie, 50 pour cent des recettes forestières doivent être versés au Trésor et le reste au Fonds forestier national. Pour les forêts communautaires, il est prévu de créer des fonds communautaires locaux. Ces fonds sont alimentés par l'essentiel des recettes provenant de la vente des produits forestiers de ces zones, de la moitié des amendes perçues, ainsi que d'une partie des recettes d'exploitation des forêts protégées et de 30 pour cent des redevances et droits de licences et de permis afférents à ces zones (art. 8 et 36-38 de la loi forestière et règlement 59/1987). Ce mode de distribution revient à «indemniser» la collectivité pour la perte du droit de jouir de la forêt (Ribot).

Au Malawi, la plus grande partie des recettes forestières est affectée au fonds forestier (art 55 de la loi forestière). Par exception à cette règle, le service forestier peut décider le partage de certains coûts et avantages avec les villages. Le fonds peut servir à financer plusieurs sortes d'activités, en particulier pour promouvoir la gestion polyvalente et durable des forêts par les communautés locales, la participation des communautés locales à la gestion et à la conservation des forêts, ainsi que tout plan susceptible d'assurer une gestion bénéfique des réserves forestières (art. 59).

Les mécanismes de financement peuvent aussi avoir des objectifs spécifiques. En Sierra Leone, par exemple, les concessionnaires, titulaires de permis et acheteurs de bois sur pied doivent payer une taxe de reboisement, dont le produit est directement versé au fonds de reboisement (art. 17 de la loi forestière). Les personnes assujetties peuvent être exonérées du paiement de la taxe si elles effectuent elles-mêmes le reboisement, à la satisfaction du service forestier. En Afrique du Sud, la loi sur les forêts domaniales a institué un fonds pour les loisirs et l'accès aux forêts (art. 41).


[7] Exemples : Zanzibar (art. 97 de la loi forestière) ; Gambie (art. 112, 113, 116 et 118 de la loi forestière); Malawi (art. 74 de la loi forestière); Namibie (art. 45(1)(c) du projet de loi forestière); Afrique du Sud (art. 25.1, 59(1) de la loi sur les forêts domaniales); Zimbabwe (art. 11 de la loi les produits forestiers communaux).
[8] Gambie (loi sur les forêts, art. 119); Soudan (loi sur les forêts, art. 25-29); Swaziland (loi sur les forêts privées, art. 9); Afrique du Sud (loi sur les forêts domaniales, art. 68).

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