QUESTIONS DE GESTION

APPLICATION DU PROGRAMME «PÉTROLE-CONTRE-VIVRES »

OBJECTIFS, PORTÉE ET MÉTHODE DE LA VÉRIFICATION

45. Comme je l’ai indiqué dans mon rapport précédent [par. 91], mes collaborateurs se sont rendus dans le bureau du représentant de la FAO (FAOR) en Iraq du 26 mars au 14 avril 2001, afin d’examiner en particulier l’application du Programme “pétrole-contre-vivres”. Ils ont procédé à une vérification de la régularité des activités du bureau et à une évaluation de la gestion des ressources humaines. En ce qui concerne l’application du Programme, les trois bureaux auxiliaires d’Iraq du Nord de Dohuk, Arbil et Souleimaniyeh  ont fait l’objet d’un contrôle ainsi que le bureau chargé de la coordination d’Arbil. Mes collaborateurs ont rencontré le Coordonnateur pour les affaires humanitaires en Iraq de l’Organisation des Nations Unies ainsi que de hauts responsables du Gouvernement irakien. Étant donné qu’une vérification des comptes du bureau de pays du Programme alimentaire mondial (PAM) a été réalisée conjointement, des comparaisons ont été également établies chaque fois que cela était pertinent. À la suite de la mission, d’autres informations ont été obtenues du siège à Rome. Un contrôle de suivi du matériel et des équipements a été en particulier réalisé. Dans la mesure du possible, on a accordé une attention particulière à la suite donnée aux observations formulées dans les rapports de la vérification interne publiés en décembre 1999 (AUD 5399) et mars 2000 (AUD 5699) et revus en février 2001 (AUD 2201).

LE CONTEXTE

46. En août 1990, la résolution 661 du Conseil de sécurité a imposé à l'Iraq un régime général de sanctions excluant les denrées alimentaires et les médicaments, et établit le Comité 661 chargé de superviser la mise en œuvre des sanctions. Tout au long de l'année 1991, les Nations Unies ont exprimé leurs graves préoccupations à l'égard de la situation humanitaire en Iraq et ont proposé différentes mesures devant permettre à l'Iraq de vendre des quantités limitées de pétrole pour se procurer des approvisionnements à caractère humanitaire. En avril 1995, le Conseil de sécurité a adopté la résolution 986 à titre de "mesure temporaire destinée à répondre aux besoins humanitaires du peuple iraquien". Cette résolution habilitait les États Membres à autoriser, pendant une période 180 jours, l'importation de pétrole et de produits pétroliers provenant d'Iraq en quantités suffisantes pour générer des revenus ne dépassant pas le montant total de 2 milliards de dollars EU. Les revenus obtenus devaient être déposés sur un compte séquestre appelé "compte Iraq", qui devait être utilisé pour répondre aux besoins humanitaires de la population iraquienne ainsi qu'à d'autres fins. Après de longues négociations, un Mémorandum d’accord a été conclu le 20 mai 1996 entre l’Organisation des Nations Unies et le Gouvernement iraquien.

47. Aux termes de la résolution 986, les revenus obtenus ont été répartis comme suit:

48. Le Programme a été initialement appliqué en décembre 1996 pour une période de six mois, conformément à la résolution 986. Des résolutions ultérieures devraient le prolonger par tranches semestrielles. Le 17 décembre 1999, la résolution 1284 supprimait le plafond sur les exportations de pétrole iraquien, créait la Commission de contrôle, de vérification et d’inspection des Nations Unies (COCOVINU) en remplacement de l’UNSCOM, et suspendait l’allocation de 1 pour cent au compte séquestre Iraq . Suite à l’adoption de la résolution 1330, les revenus provenant de la vente de pétrole ont été répartis comme suit:

49. Comme l’explique la section II du Mémorandum d’accord conclu entre l’Organisation des Nations Unies et le Gouvernement irakien, le programme a fonctionné dans le cadre de plans de distribution établis par le Gouvernement irakien et approuvés par le Secrétaire général des Nations Unies. Une fois approuvé, les plans de distribution, qui comportaient une liste des catégories de fournitures et de matériels devant être achetés et importés, servaient de base à l’utilisation par l’Iraq des revenus obtenus pendant la phase approuvée. Tous les contrats signés par le Gouvernement irakien (ou par les institutions des Nations Unies le représentant pour les trois gouvernorats du Nord) ont été adressés au Bureau chargé du Programme Iraq à New York, afin d’être traités et, dans la plupart des cas, communiqués au Comité 661, pour approbation. A partir du 1er mars 2000, certains contrats ont été toutefois approuvés par le Secrétaire général des Nations Unies sur la base de listes d’articles standard ayant reçu l’aval du Comité 661 conformément à la « procédure accélérée » prévue par la résolution 1284 du Conseil de sécurité (1999). Un second changement important a été apporté par la résolution 1409 du 14 mai 2002 qui adoptait la liste d’articles sujets à examen ainsi qu’une nouvelle série de procédures de traitement des demandes.

50. Dans le contexte ci-dessus, la FAO s’est vu confier la mise en œuvre du volet agricole du Programme. Comme les autres institutions de l’Organisation des Nations Unies, elle a supervisé l’application du Programme par le Gouvernement iraquien dans les gouvernorats du Centre et du Sud du pays et s’est chargée de son application directe dans les trois gouvernorats du Nord. Les conditions de l'intervention de la FAO ont été définies dans un Mémorandum d'accord conclu avec l’Organisation des Nations Unies les 14 et 16 octobre 1997. Les deux parties ont signé un Mémorandum d’accord révisé les 19 octobre et 9 novembre 1998. Aux termes du Mémorandum d’accord révisé, des fonds étaient alloués à la FAO tous les deux ans.

51. La FAO a été autorisée à facturer les dépenses d'appui du programme au taux de 3 pour cent des décaissements réels effectués sur les fonds alloués. Ce taux réduit (comparé au taux standard de 5 pour cent pour les activités d'urgence) a été accepté par l'Organisation en raison du volume et de la valeur de l'assistance à fournir. Conformément à l’article 3.3 du Mémorandum révisé, ces dépenses d'appui émargeaient aux tranches de 13 et 2,2 pour cent respectivement. Compte ayant été tenu des avances déjà faites, les fonds ont été versés à la FAO sur la base des prévisions de besoins mensuels de liquidités présentés au Bureau chargé du Programme Iraq. Ils ont été déposés sur le compte bancaire portant intérêt ouvert à cette fin, tandis qu'un fonds fiduciaire a été établi pour en assurer la comptabilité.

VÉRIFICATION DE LA RÉGULARITÉ DES OPÉRATIONS

Comptes bancaires existants et reconstitution de fonds

52. Au moment de la mission de mes collaborateurs, trois comptes bancaires avaient été ouverts par le représentant de la FAO en Iraq: un compte courant en dollars EU dans une banque privée à Amman (Jordanie) et deux comptes courants (l’un en dinars irakiens – ID, l’autre en dollars EU) dans la même banque à Bagdad. En raison des sanctions appliquées dans le pays, aucune banque irakienne n’était autorisée à recevoir des fonds directement du siège. En outre, les banques étrangères n’avaient pas le droit d’ouvrir des succursales dans le pays. Le compte bancaire à Amman a donc servi d’intermédiaire entre la FAO et le système bancaire national irakien. Il a été reconstitué par le siège sur la base des demandes présentées par le représentant de la FAO. Des fonds ont été transférés ensuite:

53. Mes collaborateurs ont examiné les reconstitutions demandées et accordées en 2000, 2001 et jusqu’à ce jour et ils ont formulé les observations suivantes:

Sécurité des espèces et des valeurs

54. La sécurité des espèces et des valeurs est un domaine où de nombreuses irrégularités ont été constatées, compte tenu notamment des montants élevés conservés en permanence. Au moment de la mission de leur mission, mes collaborateurs ont noté l’équivalent total de 5,4 millions de dollars EU, dont notamment l’équivalent de 2,6 millions de dollars EU pour le seul bureau auxiliaire de Souleimaniyeh. Ils ont recommandé ce qui suit:

55. Mes collaborateurs ont été informés ensuite que toutes leurs recommandations avaient été suivies d’effet à l'exception de celle qui recommandait de confier la garde des clés de coffre à du personnel international qui serait appliquée une fois que le fonctionnaire aura été recruté dans le cadre d'un contrat de durée déterminée. Mes collaborateurs ont également recommandé de renforcer le niveau de la sécurité (caméras, alarmes, bureaux distincts pour les caissiers, etc.); ils ont été ensuite informés qu'une série de mesures avait été prise, notamment l’installation de caméras de surveillance.

56. Les irrégularités susmentionnées ont été en partie dues à l'absence de règles et règlements détaillés à la fois dans le Manuel de la FAO et dans le Manuel administratif et financier pour les représentants de la FAO (Manuel FAOR). Le rapport de la vérification interne publié en décembre 1999 (AUD 5399) recommandait que la Division AFF fournisse aux représentants de la FAO en Iraq des directives spécifiques sur les mouvements, la gestion et la garde des liquidités. Ces directives n'avaient pas encore été publiées au moment de la mission de mes collaborateurs et elles ne le sont toujours pas au moment de la rédaction du présent rapport. Seule une "procédure de gestion des liquidités en cas d'évacuation d’Iraq" a été préparée par le représentant de la FAO en Iraq et approuvée par la Division AFF en mai 2002. Je recommande donc d’élaborer dans les meilleures délais des règles et directives précises sur la gestion des liquidités et des valeurs à l’intention de tous les représentants de la FAO et que le cas spécifique de l'Iraq soit également traité.

Gestion et contrôle des inventaires

57. Mes collaborateurs ont passé en revue les systèmes et procédures actuels de gestion et de contrôle d’inventaire afin d'évaluer leur conformité avec la section 503 du Manuel de la FAO et avec les sections pertinentes du Manuel FAOR. En ce qui concerne la vente d'équipements, ils ont remarqué ce qui suit:

58. Dans les deux cas, mes collaborateurs ont constaté que l'autorisation de l’Organisation des Nations Unies n'avait pas été obtenue avant la vente des équipements en question. En l'absence de procédure écrite (approuvée par le Bureau du Coordonnateur pour les affaires humanitaires en Iraq ou par le Bureau chargé du Programme Iraq) autorisant le représentant de la FAO à vendre, ou remettre à quiconque en Iraq, des équipements au titre du Programme SCR 986, mes collaborateurs ont recommandé que la question soit étudiée avec le Bureau du coordonnateur pour les affaires humanitaires en Iraq/le Bureau chargé du programme Iraq. Ils ont été informés ensuite que, à l'avenir, toute question concernant des cessions d'articles serait soumise au à au Bureau du coordonnateur pour les affaires humanitaires en Iraq aux fins d’approbation par le Comité 661.

Prêt de véhicules aux autorités locales

59. Des véhicules financés au titre de la tranche 13 pour cent étaient habituellement prêtés aux autorités locales. Mes collaborateurs ont passé en revue les dossiers concernant ceux qui ont été prêtés aux autorités locales d'Arbil(144 véhicules), de Dohuk (78 véhicules) et de Souleimaniyeh (125 véhicules). Des accords, conclus pour une période de six mois et renouvelés ensuite, déterminaient les conditions de ces prêts. Toutefois, mes collaborateurs ont noté que certains véhicules avaient été remis à des autorités locales sans que des accords soient conclus (par exemple, dans le cas de 35 motocyclettes pour Souleimaniyeh). Ils ont également noté que toutes les pages des accords et les listes des annexes jointes n'avaient pas toutes été dûment paraphées, timbrées et datées par les deux parties. En outre, l'utilisation prévue n'était pas toujours précisée dans l'annexe. Les accords d'extension stipulaient que les dispositions "s'appliquent aussi à tous les véhicules à moteur prêtés ultérieurement par la première partie à la seconde et qui ne figurent pas sur la liste jointe au présent accord".

60. Compte tenu de ce qui précède, mes collaborateurs ont recommandé ce qui suit:

Mes collaborateurs ont été ensuite informés que leurs recommandations avaient été acceptées et que les responsables sur le terrain avaient reçu les instructions d'agir en conséquence.

GESTION DES RESSOURCES HUMAINES

Portée de l'évaluation de la gestion des ressources humaines

61. Mes collaborateurs ont passé en revue l'organisation en matière de gestion des ressources humaines et la situation du personnel en place au moment de leur mission. Ils ont également réexaminé les procédures de recrutement du personnel international et national et les différents types de contrat utilisés. Ils ont procédé à des vérifications ponctuelles des dossiers du personnel et des heures supplémentaires payées. Outre les comparaisons effectuées avec le PAM, les résultats de l'enquête du Bureau du coordonnateur pour les affaires humanitaires en Iraq sur les conditions d'emploi dans le système des Nations Unies en Iraq, publiés le 10 décembre 2000, ont été examinés aux fins de comparaison avec les autres institutions des Nations Unies.

62. Une attention particulière a été accordée à la suite donnée aux décisions prises par le Directeur général le 13 octobre 2000 concernant le renforcement de la gestion du Programme « pétrole-contre-vivres ». Dans le domaine des ressources humaines, ces décisions qui devaient être appliquées avant le 31 décembre 2000, étaient les suivantes:

Autorisations et situation en matière de personnel

63. Seuls les onze postes ci-après du bureau de la FAO ont été financés par le Programme ordinaire:

Tous les postes avaient été pourvus au moment de la vérification. Tous les titulaires bénéficiaient de contrats de durée déterminée prenant fin le 31 décembre 2001. À l'exception du représentant de la FAO lui-même, tous les autres membres du personnel financés au titre du Programme ordinaire, ont consacré une grande partie de leur temps de travail à la mise en œuvre du Programme SCR 986. Cela a été notamment le cas du fonctionnaire d’administration, du commis d’administration et de la secrétaire du représentant de la FAO. Cette dernière, outre la rémunération au titre du Programme ordinaire en tant que G-3, recevait également une "indemnité" mensuelle "pour service spécial rendu au Programme SCR 986" d'environ 400 dollars EU, versée au titre de la tranche de 2,2  pour cent. La même indemnité était versée au commis aux douanes qui s'occupait des formalités douanières pour les intrants agricoles. Mes collaborateurs ont toutefois été informés ultérieurement que suite à leurs observations, ces indemnités ne seraient plus versées.

64. Au moment de la mission des mes collaborateurs, le Programme SCR 986 se trouvait dans la phase IX, couvrant la période 12 décembre 2000 - 8 juin 2001. Toutefois, à des fins budgétaires et comptables, l'approbation du financement et des postes ainsi que l’établissement des états de dépenses par le Bureau chargé du programme Iraq ont eu lieu entre le 1er janvier et le 30 juin et entre le 1er juillet et le 31 décembre. Quant aux postes, ils ont été approuvés par lieu d'affectation (postes au siège d'une part et postes en Iraq d'autre part, avec une ventilation par zone - Centre/Sud et Nord) et par nationalité (personnel international d'une part et personnel national d'autre part). Le tableau 3 ci-après récapitule pour la période 1er janvier - 30 juin 2001, le nombre de postes demandé, approuvé et pourvu au moment de la vérification.

Tableau 3: Effectif du personnel pour la Phase IX du Programme SCR 986 au moment de la vérification

Siège

Bagdad

Nord de l’Iraq

Total

 

P

GS

Total

Int.

Nat.

Total

Int.

Nat.

Total

Postes demandés

6

17

23

22

98

120

38

375

413

556

Postes approuvés

6

15

21

134

98

111

355

350

385

517

Postes pourvus

5

13

18

11

74

85

32

291

323

426

Vacances

1

2

3

2

24

26

3

59

62

91

                     

65. Au siège, le seul poste international vacant du cadre organique était celui d’administrateur (finances) (P-4) dont la création avait été décidée par le Directeur général le 13 octobre 2000 pour renforcer la Division AFF. Les autres postes du cadre organique concernaient le Service TCOR (quatre chargés des opérations: un P-2 et trois P-3) et le Service AFSP (un chargé des achats, P-4). Dans la catégorie des services généraux, le nombre total de postes approuvés était de 15, y compris les sept postes supplémentaires dont la création avait été approuvée par le Directeur général le 13 octobre 2000. Au moment de la vérification, deux postes n'avaient pas encore été pourvus: celui de commis comptable (G-4) à la Division AFF et celui de commis au classement (G-2) au Service AFSP.

66. Au moment de la vérification, le nombre total de personnes employées au bureau du représentant de la FAO pour la mise en œuvre du Programme SCR 986 était de 408, selon les lieux d'affectation et les types de contrat indiqués dans le tableau 4 ci-après. Par rapport à l’effectif approuvé pour la phase IX, 88 postes étaient encore vacants. Pour le cadre organique, deux postes d'observateurs n’ont pas été pourvus au bureau principal à Bagdad mais les candidats devaient arriver très bientôt. Dans le Nord, trois postes étaient vacants, semble-t-il, en raison de l’interruption de service obligatoire imposée aux titulaires de contrats de consultants de courte durée. Concernant les services généraux, mes collaborateurs ont été informés que le recrutement pour les 24 postes vacants dans la région du Centre/Sud a été retardé à dessein en raison du manque d'espaces à usage de bureaux. Après l’achèvement des travaux le 15 juin 2001 dans les nouveaux locaux, le personnel avait été recruté.

Tableau 4: Situation en matière de personnel en Iraq au moment de la vérification
selon les types de contrat

   

Bureau principal
de Bagdad

Bureaux du Nord

Total FAOR

Consultants internationaux (engagement sur la base des services effectifs

11

32

43

Contrat de service (CS)

13

41

54

Accord de louage de services (SSA)

50

221

271

Contrat de travail occasionnel (CLC)

11

27

38

Nomination de brève durée (STA)

0

2

2

TOTAL

85

323

408

       

Contrats du personnel international affecté au Programme SCR 986

67. Au moment de la mission de mes collaborateurs, les 43 agents internationaux, recrutés pour l'application du Programme SCR 986 étaient encore tous au bénéfice de contrats de consultant de brève durée. Comme le prévoit l’article 317.24 ii) du Manuel de la FAO, leur nomination pour des périodes de courte durée ou intermittentes de moins d'un an correspondait à une série de contrats spécifiques pour une période donnée (engagement sur la base des services effectifs). Le rapport de la vérification interne daté de février 2001 (AUD 2201) a rappelé les difficultés précédemment rencontrées dans ce domaine, notamment un taux élevé de renouvellement, des compétences techniques inappropriées et des retards dans le processus de recrutement. Il recommandait "des arrangements d'emplois et contractuels plus généreux […] pour attirer et conserver du personnel international qualifié pour des périodes plus longues". Il notait aussi la décision du 13 octobre 2000 de créer une équipe de gestion composée de 14 personnes du cadre organique, recrutées au plan international et affectées sur le terrain dans le cadre de contrat de durée déterminée.

68. Toutefois, au moment de la mission de mes collaborateurs, cette décision n'avait été que partiellement appliquée. Sur les 14 postes internationaux de terrain du cadre organique, sept ont été pourvus mais aucun des titulaires ne bénéficiaient encore d'un contrat de durée déterminée (seulement d'un contrat de consultant de brève durée). Pour six postes vacants, des candidats avaient été récemment sélectionnés mais les offres étaient encore en cours de finalisation. Pour le dernier poste (Directeur de programme), l'avis de vacance qui devait paraître dans plusieurs publications internationales spécialisées, n'a été envoyé pour approbation au Sous-Directeur général, Département de la coopération technique, que le 7 mai 2001. Le Directeur de programme est entré en fonction en mars 2002. Au moment de la rédaction du présent rapport, deux des 14 postes étaient toujours vacants - un administrateur (finances) et un responsable de bureau auxiliaire - mais des candidats avaient été récemment sélectionnés.

Contrats du personnel local affecté au du Programme SCR 986

Différents types de contrats utilisés

69. Comme l’a montré l’enquête sur les conditions d'emploi dans le système des Nations Unies en Iraq déjà mentionnée, divers types de contrat ont été utilisés par les différentes institutions pour le personnel recruté localement: engagement pour une durée limitée (ALD), contrat de travail occasionnel (CLC), contrat de service (CS) et accord de louage de services (SSA). Pour les 1 900 ressortissants iraquiens employés par le système des Nations Unies au moment de l'enquête, la ventilation était la suivante: CS, 44 pour cent; SSA, 22  pour cent; ALD, 21  pour cent; et CLC, 2  pour cent; le reste (11  pour cent) représentant des contrats de durée déterminée. Il faut noter également que sur les 11  pour cent de contrats de durée déterminée, le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) en absorbait plus de 7 pour cent en raison des contrats de durée déterminée temporaires accordés pendant une période de onze mois et renouvelables après une interruption d’un mois.

70. Parmi tous les types de contrats utilisés par le système des Nations Unies en Iraq, la nomination de durée limitée est le seul auquel la FAO n'ait pas eu recours. Un tel contrat devait offrir une grande souplesse pour des recrutements limités dans la durée (minimum de six mois et trois ou exceptionnellement quatre années au plus). Perçus en général comme un type de contrat plus satisfaisant pour l'employé, qui bénéficie du statut et des avantages d'un fonctionnaire (assurance maladie, congés de maternité, congés de maladie et congés annuels, droits au Fonds de pension), ces contrats ont été considérés comme contraignants par plusieurs organisations en raison de leur limitation dans la durée. En fait, au moment de l'enquête, seules quatre institutions, le Centre des Nations Unies pour les établissements humains (CNUEH ou HABITAT), le Bureau du coordonnateur pour les affaires humanitaires en Iraq, le PNUD et le PAM utilisaient ce type de contrat.

71. Le représentant de la FAO avait vivement recommandé l'utilisation de contrats de durée limitée en février 1999 afin d'harmoniser les arrangements contractuels que la FAO offrait au personnel national avec ceux d’autres institutions de l’Organisation des Nations Unies travaillant en Iraq. Une recommandation allant dans ce sens avait été formulée dans le premier rapport de vérification interne (IAR 6097) publié en novembre 1997 et réitérée dans le rapport (AUD 4698) de septembre 1998. Compte tenu de la correspondance échangée entre le représentant de la FAO et le siège, il semblait que les positions sur la question des engagements pour une durée limitée évoluaient avec le temps. Toutefois, à l'issue de longs débats (presque 20 mois se sont écoulés entre la recommandation initiale du représentant de la FAO et la décision prise le 13 octobre 2000), il a été décidé de ne pas adopter ce type de contrat principalement en raison de ses limitations de durée. En lieu et place, tous les ressortissants iraquiens seraient recrutés dans le cadre de quatre types différents de contrats:

Au moment de la mission de mes collaborateurs, cette décision n'avait pas été totalement appliquée comme expliqué dans les paragraphes suivants.

Contrats du personnel national du cadre organique

72. Dans la catégorie du cadre organique, aucun des agents recrutés au plan national n'avait été engagé au moment de la vérification. Tous les personnels nationaux du cadre organique, à l'exception d’une personne, bénéficiaient de contrat de service. Ce type de contrat avait été utilisé pour la première fois par le représentant de la FAO en juillet 2000. La durée et les dispositions concernant certains éléments de sécurité sociale distinguaient le contrat de service du contrat de louage de services (SSA). Toutefois, les bénéficiaires de contrat de service n'étaient pas considérés comme des fonctionnaires. En Iraq, le contrat de service était utilisé par la moitié des institutions ayant fait l'objet de l'enquête, le PAM représentant plus des trois quarts à ce moment-là. Il faut toutefois noter que le contrat de service type du PNUD utilisé par d'autres institutions différait à certains égards de celui de la FAO. Alors que le Manuel du PNUD indiquait que le contrat de service était le type de contrat approprié "pour une période de onze mois ou plus", la section 375 du Manuel de la FAO précisait qu’il s’agissait d’un contrat d’une année maximum, renouvelable pour une période ne dépassant pas un an. Compte tenu de ses limitations actuelles, on ne pouvait pas considérer le contrat de service de la FAO comme répondant aux besoins spécifiques du Programme SCR 986.

73. Mes collaborateurs ont été informés que dans le cadre du processus actuel de simplification des différents arrangements contractuels, le contrat de service serait redéfini et inclus dans le futur "accord de service de personnel" (PSA). Étant donné que ce nouveau type de contrat devait être encore approuvé, mes collaborateurs n'ont pas été en mesure d'affirmer s'il convenait mieux aux besoins spécifiques du Programme SCR 986. Au moment de la rédaction du présent rapport, mes collaborateurs ont été informés que onze contrats de durée déterminée avaient été donnés à des fonctionnaires recrutés sur le plan national. Étant donné que l’accord de service de personnel n’a pas encore été finalisé, les autres contrats de service seraient transformés en contrats de durée déterminée d'un an avant la fin 2002.

Contrats du personnel national de la catégorie des services généraux

74. Pour cette catégorie de personnel, aucun des 50 contrats de terrain de durée déterminée n'avait été encore conclu au moment de la vérification. Tous les ressortissants iraquiens de la catégorie des services généraux bénéficiaient donc d'un contrat de travail occasionnel ou d'un contrat de louage de services (à l'exception du commis aux finances qui bénéficiait d'une nomination de brève durée).

75. Au moment de la rédaction du présent rapport, mes collaborateurs ont été informés que 47 agents des services généraux recrutés au niveau national bénéficiaient de contrats de durée déterminée. Étant donné que l’accord de services personnels n'était toujours pas finalisé, des contrats d'un an étaient en cours d’établissement pour les autres contrats de travail occasionnel et les contrats de louage de services et devraient être finalisés d’ici la fin 2002.

Organisation en matière de gestion du personnel

76. Comme indiqué dans les précédents paragraphes, la décision prise le 13 octobre 2000 restait à appliquer dans sa totalité au moment de la vérification effectuée par mes collaborateurs. Si le délai initial fixé au 31 décembre 2000 était à mon avis irréaliste étant donné la durée incompressible du processus de recrutement de l'Organisation, les retards rencontrés ont soulevé entre autres la question de l'organisation adoptée en matière de gestion du personnel. Dans le passé, tous les contrats du personnel recruté au plan local étaient établis par le représentant de la FAO. La décision de créer plusieurs postes de terrain a entraîné un supplément de travail pour le siège, en particulier pour le Service d'appui à la gestion (MSS) désormais chargé d'établir tous les contrats à durée déterminée pour ces postes. La dotation en personnel du Service MSS concerné (qui travaille pour le Département de la coopération technique et le Département des pêches) ne pouvait pas être considéré comme satisfaisante et mes collaborateurs ont recommandé qu'elle soit revue. Un nouveau poste de commis au personnel de niveau G-5 attaché au Programme SCR 986 au titre de la tranche de 2,2  pour cent a été ultérieurement créé et un candidat interne a été recruté.

Heures supplémentaires

77. Aux termes de l’article 302.133 du Règlement du personnel " l’horaire normal dans les bureaux extérieurs est fixé compte tenu des us et coutumes locaux, du climat, des pratiques des autres institutions installées dans la même zone et des exigences du service ». Pour la représentation de la FAO en Iraq, les horaires de travail officiels ont été fixés comme suit: de 8 h 30 à 16 heures, du dimanche au jeudi, et de 9 heures à 14 heures, le samedi. Aux termes de l’article 302.303 du Règlement du personnel "les fonctionnaires qui sont appelés à travailler au-delà de leur horaire hebdomadaire normal et qui remplissent les conditions prescrites par ailleurs reçoivent une compensation dans les conditions prévues par le Manuel de la FAO». En ce qui concerne la représentation de la FAO en Iraq, tout le personnel des services généraux était concerné. Pour le personnel du Programme SCR 986, le mémorandum adressé le 1er avril 2001 par le représentant de la FAO au coordonnateur de la région Nord indiquait que les heures supplémentaires ne concernaient que le personnel de la catégorie des services généraux employé dans le cadre d'un contrat de louage de services ou d'un contrat de travail occasionnel, à l'exception toutefois des chauffeurs qui bénéficiaient d'une indemnité forfaitaire mensuelle de 100 dollars EU, incluse dans leurs traitements à cette fin.

78. Mes collaborateurs ont passé en revue les règles, procédures et paiements des heures supplémentaires pour le bureau principal à Bagdad. Selon les instructions les plus récentes publiées par le représentant de la FAO le 5 novembre 2000, « pour éviter tout abus d’heures supplémentaires, le personnel à qui il est demandé de travailler doit d’abord obtenir de son supérieur hiérarchique l’autorisation de rester au bureau au-delà des horaires normaux de travail ». Mes collaborateurs ont été informés que dans tous les cas une autorisation préalable en bonne et due forme avait été obtenue. Ils n’ont toutefois pas pu obtenir de preuve écrite étant donné qu’aucun formulaire officiel de demande d’heures supplémentaire (ADM. 47 ou 48 spécifié à l’article 324.42 du Manuel de la FAO) n’a été rempli. Le seul document écrit, qui a servi au calcul des heures supplémentaires et à leur paiement, était le registre se trouvant à la réception sur lequel le personnel inscrivait chaque jour les heures supplémentaires travaillées. Mes collaborateurs ont toutefois noté que les heures supplémentaires inscrites par les personnes concernées ont été réajustées (en fait réduites dans tous les cas) par le représentant de la FAO lui-même à la fin du mois. En dépit de ces ajustements, le nombre d’heures supplémentaires travaillées a dépassé dans tous les cas la limite de 25 heures par mois fixée par l’article 325.221 du Manuel de la FAO.

79. Compte tenu de ce qui précède, mes collaborateurs ont recommandé ce qui suit:

Mes collaborateurs ont été ensuite informés que leurs recommandations seraient appliquées.

APPLICATION DU PROGRAMME SCR 986 DANS LE NORD DU PAYS

Informations générales sur le Programme dans les trois gouvernorats du Nord

80. Les trois Gouvernorats d’Iraq du Nord de Doruk, Arbil et Souleimaniyeh sont des régions principalement agricoles. Elles sont dotées d’un sol fertile et de conditions climatiques propices à la production agricole. Toutefois, en raison de l’instabilité et des troubles civils que la région a connus ces dix dernières années, le secteur agricole s’est considérablement détérioré. Les dommages à l’infrastructure rurale de base, la pénurie d’intrants agricoles essentiels et l’absence de services d’appui efficaces ont provoqué une diminution significative des rendements et de la productivité alors que la santé du cheptel s’est détériorée et que la déforestation s’est intensifiée. Avant sa participation au Programme « pétrole-contre-vivres », la FAO était associée au début des années 90 à un programme d’aide qui était avant tout axé sur la fourniture d’intrants agricoles essentiels et sur la lutte contre les maladies des plantes et des animaux.

81. Dans le cadre de l’application du Programme SCR 986, la FAO, qui participe au Programme interorganisations d’assistance humanitaire des Nations Unies, s’est vue confier le volet agricole dans les trois gouvernorats du Nord et conformément au Mémorandum d’accord conclu entre l’Organisation des Nations Unies et le Gouvernement irakien, s’acquitte des tâches suivantes:

82. Si le Programme «pétrole-contre-vivres» a été initialement conçu, aux termes de la résolution 986, comme une mesure temporaire, les prolongations répétés dont il a fait l’objet ont modifié la nature des opérations. En effet, partant de la simple distribution de semences et d'engrais, la FAO a commencé, dès la phase IV, à mettre en œuvre des programmes de relèvement humanitaire à court terme dans les domaines de l'irrigation des cultures, des secours en cas de sécheresse, de la production animale, des services de vulgarisation, de l'agrométéorologie et du relèvement des industries agro-alimentaires. En outre, la FAO a reçu des fonds venant de secteurs autres que le secteur agricole (secteur de l’éducation lors de la Phase IV et secteur de la nutrition lors des phases IV et VI). L'effet conjugué de l'essor des prix du pétrole et de la suppression du plafond imposé aux exportations de pétrole iraquien ont donné à la tranche de 13 pour cent une ampleur financière sans précédent, comme le montre le tableau 5 qui récapitule les fonds alloués à la FAO pour chaque phase.

Tableau 5: Fonds alloués à la FAO pour chaque phase au titre de la tranche de 13 pour cent, en millions de dollars EU

Phase

Résolutions du Conseil de sécurité

Période couverte

Tranche de 13 pour cent

     

Agriculture

Autres

Total

I

986

10 déc. 1996/7 juin 1997

II

1111

8 juin /4 déc. 1997

III

1143

5 déc. 1997/3 juin 1998

IV

1153/1158

4 juin/25 nov. 1998

V

1210

26 nov. 1998/24 mai 1999

VI

1242/1266/1275/1280

25 mai/11 déc. 1999

VII

1281

12 déc. 1999/8 juin 2000

VIII

1302

9 juin 2000/5 déc. 2000

IX*

1330/1352

6déc. 2000/3juillet 2001

X*

1360

4 juin/30 nov. 2001

XI*

1382

1déc. 2001/30mai 2002

XII*

1409

1 juin/25 nov. 2002


* Le Bureau chargé du Programme Iraq doit encore confirmer ces allocations à la FAO.

Nouvelles orientations du Programme à partir de la Phase IV

83. La nouvelle orientation du Programme à partir de la phase IV a exigé une approche plus formelle et mieux définie pour garantir une planification adéquate de chaque secteur ainsi que des mesures appropriées pour renforcer la gestion technique, administrative et financière sur le terrain et au siège. Une première mission multidisciplinaire a été envoyée en février 2000 pour évaluer le relèvement agricole dans le nord et identifier les moyens de parvenir à moyen terme à une économie rurale durable. Toutefois, ce n’est qu’en 2000 que davantage de temps et d’attention ont été consacrés à l’application du Programme SCR 986. Outre les décisions déjà mentionnées prises par le Directeur général le 13 octobre 2000, on citera notamment l’envoi d’une importante mission de reconnaissance multidisciplinaire en Iraq en novembre/décembre 2000. Son objectif principal était de formuler des recommandations concernant une approche sectorielle intégrée globale. Étant donné que le rapport de la mission intitulé « Vers un cadre stratégique aux fins d’un relèvement agricole durable dans les trois gouvernorats du Nord de l’Iraq » n’était pas finalisé avant la mission de mes collaborateurs en Iraq, ils n’ont pu l’étudier qu’après leur retour.

84. Selon la mission de novembre/décembre 2000, les principaux objectifs étaient d’apporter un soutien aux fins d’un relèvement durable et équitable du secteur agricole dans les trois gouvernorats du Nord par le biais d’une approche intégrée et fortement participative qui s’appuierait sur l’expérience acquise par la FAO dans le cadre du Programme spécial pour la sécurité alimentaire (PSSA), en renforçant la sécurité alimentaire et l’état nutritionnel, en réduisant la pauvreté rurale et en améliorant la protection de l’environnement. Pour ce faire, les mesures prioritaires ci-après ont été identifiées:

Une mission de suivi a été organisée en 2001. Au moment de la rédaction du présent rapport, mes collaborateurs ont été informés que la FAO prenait les mesures nécessaires pour finaliser un programme de relèvement de trois ans, dont le coût serait calculé en détail et qui serait prêt d’ici la fin 2002.

85. Si je regrette qu’un tel cadre n’ait pas été conçu plus tôt car cela aurait constitué un outil utile fin 1998/début 1999, lorsque le programme a dépassé le stade de la seule fourniture d’approvisionnements humanitaires, je me félicite de l’approche finalement adoptée. J’estime que les objectifs et les principaux éléments du cadre vont dans le sens du paragraphe 2 de l’annexe I du Mémorandum d’accord qui précise que « les besoins de relèvement spécifiques dans les trois gouvernorats du Nord doivent recevoir toute l’attention nécessaire ». Le fait que la FAO, comme d’autres institutions des Nations Unies, oeuvrait au nom du Gouvernement iraquien « en tenant dûment compte de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Iraq » ne devrait toutefois pas être oublié. A cet égard, je suis d’avis que le rôle du gouvernement irakien doit être défini dans ce cadre. De même, il fallait donner le poids nécessaire au « principe d’une distribution équitable des approvisionnements humanitaires dans tout le pays », conformément également à l’annexe I du Mémorandum d’accord, afin d’éviter les disparités entre le Nord et le reste du pays.

86. J’estime aussi que l’application effective du cadre entraînera inévitablement un réexamen des documents de base sur lequel est fondé le Programme « vivres-contre-pétrole ». A l’heure actuelle, la FAO, tout comme d’autres institutions des Nations Unies, doit mener à bien ses activités dans le Nord en totale conformité avec la résolution 986, les résolutions adoptées ultérieurement, et respecter la lettre et l’esprit du Mémorandum d’accord conclu entre l’Organisation des Nations Unies et le Gouvernement iraquien. Le fait que tous ces documents ne contiennent aucun mandat précis concernant la mise en œuvre effective du Programme SCR 986 ne va pas sans poser de problème. Comme indiqué dans les paragraphes ci-après, certaines «zones d’ombre» étaient dues aux relations entre les autorités locales et la gestion des fonds constitués localement.

Relations avec les autorités locales du nord

87. Comme l’a souligné le Directeur exécutif du Programme Iraq dans le rapport sur la phase IX (90 jours) qu’il a présenté le 8 mars 2001, les institutions de l’Organisation des Nations Unies ont dû faire face à un contexte difficile et sensible pour l'application du Programme dans le Nord du pays, ce qui les a placé "dans une situation délicate". Selon lui, "d'une part, [les institutions des Nations Unies] doivent mettre en œuvre le Programme au nom du Gouvernement iraquien et, d'autre part, [elles] n'ont d'autre possibilité que de traiter directement avec les autorités locales des trois gouvernorats du Nord, ce qui suscite un mécontentement croissant de la part du Gouvernement iraquien".

88. Le fait que les institutions des Nations Unies soient chargées de mettre en œuvre le Programme "au nom" du Gouvernement iraquien est prévu très clairement dans le libellé de la résolution 986 ainsi que dans le Mémorandum d’accord conclu avec le Gouvernement iraquien. Comme l’indique l'avis juridique du Bureau du Coordinateur des Nations Unies pour les affaires humanitaires en Iraq daté du 15 janvier 2001, les institutions des Nations Unies "se sont vu attribuer certains pouvoirs appartenant au Gouvernement iraquien dans le but d'administrer le Programme interorganisations dans les trois gouvernorats du Nord". Cependant, il était également incontestable que, depuis que le Gouvernement iraquien avait procédé au retrait de ses services et de son soutien à la région en 1991, la seule administration présente était celle des autorités locales. Concernant le secteur agricole, l'administration était placée sous la responsabilité du "Ministère de l'agriculture", associée à sept directions générales sectorielles auxquelles s'ajoutaient trois directions générales (une par gouvernorat), regroupant des bureaux annexes au niveau des districts et sous-districts.

89. Étant donné que les autorités locales ne constituaient pas un gouvernement légitime, leur existence n'a été reconnue dans aucun des documents officiels du Programme (résolution du Conseil de sécurité et Mémorandum d’accord). De plus, l'avis juridique susmentionné ne fournit aucune indication suffisamment claire concernant leur statut. La seule recommandation formulée portait sur la "nature du partenariat mis en place avec les autorités locales, lequel requiert dans tous les cas un effort conjoint ou une action concertée". D'une part "la poursuite de la collaboration ou le processus de consultation et de coopération avec les autorités" a été définie comme étant "impérative et absolument indispensable au vu des circonstances actuelles" (les autorités locales "doivent être invitées à donner leur avis quant aux programmes et aux projets nécessaires"). D'autre part, il a été souligné que les institutions des Nations Unies devaient être responsables des "décisions importantes" ainsi que du "contrôle général et final" afin de garantir le respect de la résolution 986. C’est pour cette raison que la nécessité de "mettre en place des mécanismes ou des procédures appropriés leur permettant de traiter avec les autorités locales" a été mise en évidence.

90. La nature exacte des "mécanismes ou procédures" devant être mis en place n'a pas été définie dans l'avis juridique, ce qui est regrettable. Il était seulement indiqué que "le Bureau juridique est [serait] chargé d’aider les institutions dans le processus visant à créer des garanties appropriées pour la gestion des programmes, autant que de besoin". Il est tout aussi regrettable que la question des relations ne soit mentionnée que dans un avis juridique daté du 15 janvier 2001, c’est-à-dire quatre ans après le début de la mise en œuvre du Programme SCR 986. Comme dans d'autres régions, l'absence de directives claires émanant du Bureau du coordonnateur pour les affaires humanitaires en Iraq pour coordonner véritablement les activités des différentes institutions des Nations Unies s'est avérée préjudiciable à la mise en œuvre du Programme SCR 986. Faute de directives, les diverses institutions des Nations Unies ont dû concevoir leur propres approches et procédures. Dans le cas de la FAO, plusieurs comités ont été mis sur pied afin de garantir la participation des autorités locales. Comme on a pu le voir dans le cas des fonds constitués localement, cette participation, qui a largement dépassé le cadre de la consultation et de la coopération, a dû être réexaminée afin que les autorités locales soient considérées comme des "partenaires" et non plus comme des "co-gestionnaires" du Programme.

Gestion des fonds constitués localement

91. Les fonds constitués localement sont les revenus découlant des droits versés par les récipiendaires de matériel et de fournitures dans les trois gouvernorats du Nord pour le transport, la manutention et la distribution internes. La base juridique de tels versements est prévue au paragraphe 7 de l'annexe I du Mémorandum d’accord conclu avec le Gouvernement iraquien en 1996. Aucune directive n'a été émise par le Bureau du coordonnateur pour les affaires humanitaires en Iraq concernant les fonds constitués localement et, malheureusement, le Mémorandum d'accord conclu entre l’Organisation des Nations Unies et la FAO n'a pas abordé la question. Les seuls documents fournissant quelques informations sont des rapports rédigés par le Secrétaire général. Le rapport daté du 4 septembre 1997 (S/1997/685) indiquait que "des intrants tels que pièces détachées, machines et pesticides pour lutter contre les maladies non-endémiques [seraient] vendus afin de favoriser les investissements dans l’agriculture". Dans un autre rapport daté du 4 juin 1998 (S/1998/477), il était mentionné que "certains intrants tels que les pompes et les canalisations pour l’irrigation, les pièces détachées pour machines agricoles, les pesticides et les médicaments contre les maladies non épidémiques, les semences et les engrais [ont été] vendus à un prix symbolique, pour que la distribution soit plus équitable. Les fonds ainsi obtenus [ont] servi à financer de nouveaux investissements qui bénéficieront aux petits exploitants."

92. En l'absence de directives émises à l’échelle du système des Nations Unies, le représentant de la FAO a formulé ses propres directives en se fondant sur les décisions prises par le siège en octobre 1997. Outre plusieurs mémorandums relatifs à des questions spécifiques aux fonds constitués localement, les premières directives ont été envoyées par le représentant de la FAO au coordonnateur de la province du Nord le 21 juillet 1998. Ce document succinct ne traitait pas de toutes les questions en jeu. Un document plus global intitulé « Gestion des fonds constitués localement provenant de la vente de marchandises conformément à la résolution 986 des Nations Unies » a été rédigé par le coordonnateur de la province du Nord en 1999 (il n'est fait mention d'aucune date précise). Selon ces deux documents, les fonds constitués localement ont été générés, conservés et utilisés comme suit:

93. Les comités ci-après, tous présidés par la FAO, ont été mis en place dans chaque gouvernorat pour jouer "un rôle actif dans la gestion" des fonds constitués localement:

94. Tous ces comités ont été en fait associés au processus de prise de décision, comme en attestent les responsabilités spécifiques qui leur ont été confiées.

95. Dans son rapport daté de mars 2001 (AUD 3401), le vérificateur interne formulait l'observation ci-après que mes collaborateurs ont approuvé: "Au fil des années, on a donné, dans le but de répondre aux demandes des autorités locales, une interprétation trop généreuse à l'utilisation de ces fonds, qui s’est donc écarté de son intention et finalité premières. […] Des évaluations ont montré que ces fonds ont servi à rémunérer quelque 4000 à 5000 travailleurs occasionnels ainsi que d'autres personnels, à louer durant de longues périodes entre 400 et 500 véhicules et à financer l'acheminement d'eau (pour un total d’environ 3,5 millions de dollars EU .) vers des zones touchées par la sécheresse. Même si ces versements ont été effectués dans le respect des procédures prévues applicables à l'utilisation de ces fonds, les critères stricts d'utilisation n'ont pas été respectés. De surcroît, le personnel de la FAO a confirmé qu’il était difficile de surveiller et de s’assurer que le personnel et les autres ressources approuvés étaient utilisés aux fins prévues."

96. De fait, en décembre 2000, le nouveau coordonnateur de la FAO a commencé à donner suite aux recommandations de la vérification interne préconisant de "mettre un terme à cette pratique […], de réorienter l'utilisation de ces fonds et d’élaborer des procédures révisées pour garantir une transparence totale" et celles-ci étaient sur le point d'être appliquées au moment de la mission de mes collaborateurs. Ces derniers ont examiné le projet de procédures révisées et recommandé ce qui suit:

97. Enfin, mes collaborateurs ont recommandé de définir, en coopération avec le Bureau du coordonnateur pour les affaires humanitaires en Iraq, la nature exacte des fonds constitués localement. Ces derniers pourraient être considérés comme un "sous-produit" de la tranche de 13 pour cent et être traités en conséquence. Ils seraient donc inclus dans la phase semestrielle du plan de distribution. Dès lors, il serait dûment tenu compte de "la souveraineté et [de] l'intégrité territoriale de l'Iraq", conformément à la résolution 986 et au Mémorandum d’accord, puisque le plan de distribution était examiné avec le Gouvernement iraquien avant d’être approuvé par le Secrétaire général des Nations Unies. La conclusion d'un accord de fonds fiduciaire constituerait également une solution appropriée pour que la garde des fonds constitués localement soit officiellement confiée à la FAO. Les revenus et les dépenses seraient consignés de la même façon que les décaissements ordinaires de la tranche de 13  pour cent et reportés dans les états financiers de l'Organisation. Il faut noter que, sur base des registres locaux, vérifiés par le siège à l'époque de la rédaction du présent rapport, le montant des fonds constitués localement s'élevait à 17,7 millions de dollars EU au 31 décembre 2001 et à 19,5 millions de dollars EU au 30 juin 2002, alors que les dépenses se chiffraient à 12,2  et 13,4 millions de dollars EU respectivement. Étant donné que l'Organisation a approuvé les recommandations formulées par mes collaborateurs et que les mesures appropriées ont été prises, je recommande que l'Organisation continue de déployer tous les efforts nécessaires pour résoudre les problèmes en suspens concernant les procédures relatives aux fonds constitués localement et que les revenus et dépenses au titre de ces fonds soient dûment consignés dans les états financiers de la FAO pour l'exercice 2002-2003.

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4 Outre les 13 postes internationaux pour la région Centre/Sud approuvés en janvier 2001, cinq postes additionnels ont été approuvés en avril 2001.

5 Outre les 35 postes internationaux pour la région Nord approuvés en janvier 2001, deux autres postes ont été approuvés en mai 2001.

 

 


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