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DISCUSSION ET CONCLUSIONS

 

Évaluation globale du régime fiscal forestier

 

Pour pouvoir évaluer l’efficacité du  régime fical forestier, il convient d’examiner les modes de recouvrement des redevances afférentes aux divers produits forestiers (bois d’œuvre, perches, charbon de bois, bois de feu, etc.)

 

Sur le plan de la rentabilité, les redevances sur le bois d’œuvre sont probablement très efficaces par rapport au coût. Le RFD et les agents de terrain chargé du recouvrement  de ces redevances sont des fonctionnaires du gouvernement  qui perçoivent les salaires de la fonction publique. Dans un district, les salaires mensuels d’un RFD et des agents de terrain intervenant dans le recouvrement dee ces redevances ne devraient pas dépasser 500 000 U Sh au total, mais le montant total des recettes qu’ils recouvrent est généralement bien plus élevé.

 

En ce qui concerne l’évasion fiscale, elle est possible dans deux cas : si les fonctionnaires de terrain se laissent corrompre par les propriétaires de scieries et déclarent des volumes coupés inférieurs à la réalité, et si des grumes sont volées dans la forêt. Quoique relativement peu fréquents,  des cas de ce genre ont été signalés dans certaines stations. La tentation est plus forte lorsque le personnel est sous-payé, payé en retard ou ne perçoit pas de  primes.  En général, le bois récolté illégalement est transporté sans les documents requis, de nuit, et « dissimulé » d’une manière ou d’une autre, pour échapper aux contrôles. Des efforts ont été faits pour minimiser ces opérations clandestines, en faisant effectuer des patrouilles par une équipe spéciale qui vérifie la documentation du bois, lors du transport,  dans les hangars à bois et sur les marchés. Si la documentation prescrite manque, le bois est saisi et vendu aux enchères. Le succès de ces patrouilles est démontré par le montant recouvré durant l’exercice financier de 1999/2000, qui s’est élevé à 137 898 936 U Sh, soit 36 827 180 U Sh de plus que durant  l’exercice précédent. Ce montant représentait 12,4 pour cent des recettes totales perçues. Les dépenses des membres de l’équipe spéciale (indemnités, carburant, etc.) représentaient  certainement moins de 30 pour cent du montant total perçu.

 

Le nouveau système consistant à faire des versements anticipés au Bureau forestier de district minimisera aussi l’évasion fiscale, dans la mesure où il est appliqué de manière honnête. L’un des points faibles du recouvrement des redevances est l’insuffisance des contrôles dans la forêt. Même avec les patrouilles rigoureuses de l’équipe spéciale, d’importants volumes de bois récoltés illégalement  continuent à arriver sur le marché, ce qui implique que le suivi et le contrôle à la source restent insuffisants. Les deux principales raisons sont  l’insuffisance du personnel de terrain et de moyens de transport. En outre, les quelques  fonctionnaires en place ne sont pas  motivés et ne se sentent pas particulièrement concernés par ce qui se passe à l’intérieur de la forêt. Leur collusion avec des personnes qui agissent illégalement ne saurait pas conséquent être exclue.

 

L’irrégularité des contrôles effectués par le personnel du siège du Département des forêts contribue aussi à l’évasion fiscale. Il n’y a pas de système approprié au siège pour vérifier la correspondance entre les montants perçus et les recettes prévues. Les visites de terrain sont sporadiques à cause  des problèmes de transport et de l’insuffisance des fonds disponibles pour payer les indemnités. Les agents de terrain n’ont donc guère de scrupules à s’entendre avec le secteur privé, car ils savent  que les comptes sont très rarement vérifiés par les fonctionnaires du siège.

 

Les systèmes actuellement adoptés pour attester  la production de bois d’œuvre et le recouvrement des redevances comprennent aussi des mécanismes qui réduisent l’ampleur des pertes de recettes potentielles. Le paiement anticipé garantit que les producteurs opérant dans la légalité n’auront pas d’arriérés dans le paiement de leurs redevances. En outre, le fait que la production  soit déclarée à l’Office ougandais des recettes (URA)  avant le marquage du bois garantit le paiement en temps voulu de la TVA.

 

Le recouvrement des redevances sur le bois d’œuvre a été examiné en détail à la fois parce que, dans la fiscalité forestière,  c’est le seul système de recouvrement qui soit complexe et d’autre part parce qu’il représente environ 60 pour cent des recettes total perçues. Pour les autres types de produits forestiers (charbon de bois, bois de feu, perches, etc.), le système de recouvrement des recettes est relativement simple. Le producteur se rend tout simplement dans le bureau du RFD pour payer la redevance correspondant au volume récolté ou pour obtenir une licence qui l’autorisera à récolter les produits pendant une période déterminée. Dans certains cas, le garde-forestier recouvre les redevances, puis  les remet au RFD. Toutefois, comme avec les redevances sur le bois d’œuvre, l’évasion fiscale est possible, en cas de corruption ou de vol.

 

Globalement, le régime fiscal forestier pourrait être amélioré grâce à un certain nombre de mesures:

 

 

 

L’impact du régime fiscal forestier sur l’aménagement durable des forêts

 

Selon la définition de l’OIBT,  l’aménagement forestier durable est le processus:

 

“d’aménagement des forêts visant à atteindre  un ou plusieurs objectifs clairement définis concernant  la production constante  de biens  et de services désirés, sans porter atteinte à leur  valeur intrinsèque ni compromettre leur  productivité future et sans susciter d’effets indésirables sur l’environnement physique et social.”

 

Dans le régime fiscal forestier ougandais, les principaux facteurs susceptibles d’avoir un impact sur l’aménagement forestier durable sont le cadre juridique et politique, le partage des recettes et le contrôle et la supervision.

 

 

Cadre juridique et politique

 

La fiscalité forestière ougandaise est en grande partie réglementée par la Section 30 de la Loi forestière de 1961 (Chapitre 246) qui confère au  Ministre le pouvoir de (entre autres):

 

 

La Section 31(1) de la même loi confère aux autorités locales le pouvoir de formuler des règles applicables aux réserves forestières locales dont ils ont la charge.

 

L’un des objectifs de la politique forestière actuelle  est de promouvoir le développement d’entreprises forestières viables et efficaces,  en vue d’exploiter pleinement les produits forestiers, de réduire les gaspillages excessifs et de satisfaire la demande intérieure et extérieure de produits de qualité à des prix compétitifs. Toutefois, cet objectif n’est pas reflété dans la loi qui n’a pas été mise à jour, et reste pour l’essentiel telle qu’elle a été promulguée en 1961. Les problèmes posés par le cadre juridique et politique sont les suivants: la faiblesse des redevances et des sanctions; l’insuffisance des crédits en faveur du développement du secteur privé; et le manque de ressources disponibles pour le Département des forêts.

 

Faiblesse des sanctions et des redevances: La Loi contient des dispositions relatives à l’aménagement  forestier durable et prescrit des sanctions à l’encontre de ceux qui contreviennent à ces réglementations, mais ces amendes sont ridiculement faibles, de sorte qu’elles n’ont aucun effet dissuasif sur les activités illégales. Par exemple, pour le dépassement de la possibilité de coupe annuelle, le contrevenant est passible d’une amende de  2 500 U Sh, ou d’un emprisonnement de six mois, quelque soit le volume de bois rond coupé. Entre 1964 et 1971, cette amende équivalait à 375 dollars E.-U., mais à présent elle ne correspond plus qu’à environ 1,40 dollar E.-U. Elle est donc dérisoire et  encourage la surexploitation des forêts.

 

La politique de tarification est un autre problème. Pour les bois de feuillus de Classe I enlevés  dans les réserves forestières, la Possibilité de coupe annuelle (PCA) est de 1 960 m³ de bois rond, soit 163 m³ de bois rond par mois. Cette PCA a été établie sur la base du nombre de propriétaires de scieries et de scieurs de long autorisés à opérer dans une réserve forestière et sur le volume moyen de bois rond que chacun peut abattre en un mois. Avant la récente révision, la redevance sur le bois d’œuvre applicable aux  feuillus de classe  I s’élevait à 34 000 U Sh/m³, soit environ 18, 80 U Sh/ m³. Le    taux de récupération étant de 30 pour cent, 163 m³  de bois ronds permettent de produire 49 m³ de sciages, et le prix courant des sciages de bois de feuillus de Classe I est de l’ordre de 482 dollars E.-U./ m³. Ainsi, les 49 m³ de sciages se vendraient 23 618 dollars E.-U., après déduction d’une redevance de 3, 065 dollars E.-U. Même après avoir compensé les coûts de production des sciages, la marge de profit est si élevée  qu’un propriétaire de scierie a tout intérêt à augmenter ses gains en dépassant la PCA. La révision des redevances sur le bois d’œuvre a sans doute atténué ce problème, mais il n’est pas certain que les nouvelles redevances réussissent à dissuader de dépasser les volumes de coupe autorisés.

 

En conclusion, les bas niveaux des redevances sur les produits forestiers et le caractère dérisoire des  peines sanctionnant les activités illégales ne dissuadent guère de surexploiter les ressources forestières et conduisent à une gestion non durable des forêts. Ceci a eu plusieurs effets: amenuisement des ressources des  forêts tropicales de hautes futaies, où environ 280 000 hectares de forêts sont aujourd’hui dégradées; réduction de la superficie des autres terres boisées, en grande partie défrichées; et réduction de la superficie des réserves forestières gouvernementales, tombée à 740 000 hectares, contre une superficie originelle de 1,1 million d’hectares.

 

Développement du secteur privé. La politique et la législation forestières actuelles  sont en grande partie centrées sur les zones protégées et les réserves forestières et elles ne donnent au secteur privé qu’un rôle consultatif. Ceci a sans doute favorisé dans une certaine mesure la dégradation des forêts sur les  terres publiques et sur les terres privées, et entraîné un manque à gagner. Contrairement à ce qui s’est passé dans d’autres secteurs de l’économie, la privatisation n’a pas touché les réserves forestières jusqu’à présent. En outre, une autre lacune de la politique forestière actuelle, est qu’elle ne prévoit pas de subventions au secteur, même pour soutenir la vulgarisation forestière (alors qu’il en existe dans le secteur agricole)

 

Contraintes liées aux ressources. Aux termes de la politique forestière, l’aménagement  des réserves forestières classées est sous l’entière responsabilité du Département des forêts. Toutefois,  étant donné que  l’essentiel des recettes recouvrées auprès du secteur sont envoyées au Trésor, et que le Trésor alloue des crédits de plus en plus faibles au budget du secteur, le Département des forêts est dans l’incapacité de mettre en œuvre  les activités de développement et les activités ordinaires. Comme le Crédit discrétionnaire autorisé est très insuffisant  pour mettre en œuvre toutes les activités prévues à travers le pays, de nombreuses activités ne sont pas effectuées, les activités illégales se multiplient, les forêts se dégradent et une partie des recettes potentielles est perdue. La diminution des crédits budgétaires alloués au secteur forestier  est en partie due à la faiblesse relative des recettes versées par le  secteur au trésor, mais l’augmentation des activités illégales, la dégradation des forêts et la corruption de quelques fonctionnaires dérivent du fait que les réserves forestières sont gérées par des fonctionnaires sous-payés et démotivés.

 

 

Partage des recettes

 

Le principal bénéficiaire des recettes forestières collectées dans les réserves forestières est le Gouvernement ougandais, suivi de l’administration locale, à l’échelon du CL 5. Dans la plupart des districts, les 40 pour cent qui sont retenus sur les recettes restent à l’échelon CL 5 et ils ne sont pas transmis aux échelons inférieurs (CL3). Le partage équitable des recettes forestières avec les échelons inférieurs est rarement pris en considération,  de sorte que l’échelon CL 3 de l’administration locale et les Offices forestiers de district ne bénéficient pas directement des recettes forestières qui sont recouvrées, et n’ont pratiquement aucun contrôle sur le processus.

 

Bien que les communes ou les sous-comtés adjacents aux réserves forestières ne tirent pas profit du recouvrement des recettes forestières, ils sont les principaux responsables de la protection des forêts, et les premiers à en supporter le coût.  Du fait que les avantages ne sont pas partagés, les échelons inférieurs de l’administration locale tendent à prélever des taxes supplémentaires sur le bois d’œuvre et rechignent à contribuer à la protection des réserves forestières.

 

En outre, de nombreux districts  sont opposés à tout partage de recettes avec le gouvernement central. Ils veulent en conserver la totalité et, lorsque ce sentiment est fortement ancré, l’appui fourni par ces administrations locales  est réduit au minimum. Or la protection des réserves forestières est impossible sans l’appui des administrations locales, de sorte que le Département des forêts  doit conclure avec elles  un arrangement à l’amiable sur le partage des avantages, pour obtenir leur coopération pour soutenir l’aménagement forestier durable.

 

Une partie des 60 pour cent des recettes forestières envoyées au gouvernement central est restituée chaque mois au Département des forêts sous forme de CD. Cette part couvre essentiellement les dépenses ordinaires. En moyenne, chaque OFD reçoit 200 000 U Sh (117 dollars E.-U.) par mois, ce qui est très insuffisant  pour couvrir les coûts des activités de  protection des forêts et les dépenses ordinaires. Les fonctionnaires de terrain du Département des forêts sont fortement démotivés par cette situation, et plus encore,  par les salaires insuffisants et les conditions de travail  très médiocres. Il est donc presque inévitable que certains fonctionnaires cherchent à améliorer leur sort, en se laissant corrompre. Cette situation devrait cependant s’améliorer sous peu, avec la restructuration du Département des forêts qui est en cours;  la nouvelle organisation devrait avoir moins de personnel qu’aujourd’hui, mais leur assurer de meilleures conditions de travail.

 

Enfin, c’est le Département du Trésor du Ministère des finances qui détermine  les postes  qui seront financés dans le plan de travail du Département des forêts, ainsi que le plafond de son  budget. Cette décision dépend  des priorités nationales évaluées à ce moment-là, de sorte que, pendant longtemps,  le Département des forêts a évité de classer les activités par priorité (en particulier les programmes de développement forestier).

 

Par exemple, les plantations forestières qui ont été établies dans les années 60 et 70 n’ont pas été régénérées après la coupe rase, faute de fonds. L’office national de gestion de l’environnement (NEMA) déclare ce qui suit dans son rapport national sur l’état de l’environnement (1988) (page 81) :

 

D’après les prévisions, si une opération massive de boisement n’est pas immédiatement entreprise, et si  le niveau d’exploitation actuel est maintenu,   le pays sera confronté  d’ici l’an 2010 à des déficits de la production de sciages. Ceci aura des conséquences majeures tant  sur l’économie, du fait qu’il faudra importer du bois pour satisfaire la demande intérieure,  que  sur l’environnement, à travers la diminution des produits et des services procurés par les forêts.

 

Ce scénario illustre le manque de durabilité de l’aménagement forestier actuel. Cependant, l’Offi ce national des forêts proposé devrait avoir une autonomie plus grande. L’Office encouragera le gouvernement à intervenir le moins possible dans le secteur et favorisera l’externalisation des activités et la privatisation, pour stimuler la productivité et soutenir les progrès sur la voie de l’aménagement forestier durable.

 

 

Contrôle et supervision

 

Dans le cadre des systèmes actuels de suivi et de contrôle des pratiques forestières et du recouvrement des recettes, la supervision est insuffisante. Peu de fonctionnaires du Département des forêts se déplacent pour aller sur le terrain, et les dirigeants du Département ne viennent jamais, si bien que les agents de terrain tournent de plus en plus le dos aux bonnes pratiques forestières, ce qui a entraîné une baisse de  la productivité et du montant des redevances perçues dans le secteur. Pour parvenir à un aménagement forestier durable et améliorer le recouvrement des recettes forestières, il est indispensable de mettre en place des services normatifs et consultatifs (suivi, fixation de normes, inspections et assistance technique).

 

Il n’existe dans le régime fical forestier aucun mécanisme visant spécifiquement à promouvoir l’aménagement forestier  durable, tels que caution de bonne exécution ou subventions aux améliorations. Le résultat est que ceux qui ont établi des  projets de plantations forestières ont réduit au minimum leurs investissements et n’utilisent pas de techniques améliorées. Avec un soutien approprié, les communautés locales pourraient probablement cultiver des arbres, sur des terres louées dans des réserves forestières ou sur leurs propres terres, en adoptant des méthodes plus modernes que les investisseurs actuels. Des systèmes de soutien technique et financier doivent être mis en place pour les y encourager. Il est également indispensable de prévoir des systèmes pour minimiser et maîtriser la dégradation des forêts. Ces systèmes devraient être basés sur des incitations et des désincitations appropriées pour encourager une meilleure gestion des ressources forestières existantes, et leur expansion sur des terres agricoles et sur d’autres terres se prêtant à la sylviculture.

 

Les recommandations qui suivent sont proposées pour renforcer l’impact de la fiscalité forestière sur l’aménagement forestier durable:

 

 

 

Dépenses consacrées par le gouvernement à l’aménagement forestier durable

 

Il ressort de ce qui précède que la durabilité de l’aménagement forestier actuel dépend de la générosité des donateurs. La contribution du  gouvernement ne couvre que les dépenses ordinaires (c’est-à-dire les salaires et les indemnités versés au personnel, les coûts administratifs etc.), et éventuellement le CS. Les dépenses totales consacrées par le gouvernement à la foresterie se répartissent comme suit:  salaires 22 pour cent, indemnité 19 pour cent,  coûts administratifs 18 pour cent, le restant étant affecté aux services publics.

 

Pour l’exercice financier courant (2000-01), le budget forestier du gouvernement s’élève à 877 763 000 U Sh (soit environ 487 646 dollars E.-U.), alors que les contributions des donateurs s’élèvent à 1 241 116 000 U Sh (1 930 624 dollars E.-U.). Cet argent sert à financer des projets forestiers mis en œuvre par le Département des forêts comme le Projet de semences forestières, l’Étude nationale sur la biomasse; le Projet Plantations péri-urbaines et les activités de  renforcement des capacités.  Les crédits budgétaires  sont répartis entre plus de 50 Offices forestiers de district, si bien que chaque district reçoit du gouvernement entre 20 000 et 300 000 U Sh par mois pour couvrir toutes les dépenses opérationnelles (transport, carburant, papèterie, fournitures de bureau etc.). Aucune des activités de gestion essentielles (protection contre les incendies et les activités illégales, boisements, opérations d’entretien, inventaires du matériel sur pied, inventaires d’aménagement,  entretien des parcelles témoins permanentes, démarcation des limites des forêts, planification de l’aménagement forestier, campagnes de sensibilisation et services de vulgarisation forestière)  n’est couverte par la contribution du  gouvernement. Les salaires sont très bas et il n’existe aucune mesure visant à motiver le personnel (par exemple des bonus ou des primes spéciales). De même, aucun dons ou subvention n’est prévu pour encourager les sociétés ou les particuliers qui  opèrent dans le secteur forestier.

 

Toutes les dépenses  afférentes aux activités de développement sont  financées par des donateurs, à l’exception des taxes à payer sur les marchandises importées et des salaires du personnel local affecté aux projets. L’extrême insuffisance  des fonds alloués par le gouvernement explique que l’aménagement forestier durable soit si peu appliqué.  La dégradation des forêts a augmenté et c’est seulement à travers ces projets que le   Département des forêts a réussi  à reprendre un certain contrôle sur le domaine forestier et à planifier quelques activités d’aménagement forestier durable.

 

Il semble que les priorités fixées par le gouvernement  soient à l’origine de l’insuffisance  des ressources allouées à la foresterie et du problème critique du financement du Département des forêts. Les recettes perçues par le gouvernement (auprès de toutes les sources) ne sont pas suffisantes pour couvrir tous les programmes de ses différents ministères et départements. Les programmes publics de base (Éducation primaire universelle (EPU), défense, lutte contre la pauvreté, santé, etc.), bénéficient d’une plus haute priorité lors des allocations budgétaires. Il s’ensuit que certains départements, conne celui des forêts, sont fortement pénalisés. Ceci est probablement dû à une combinaison de facteurs, tels que l’insuffisance des recettes perçues dans le secteur forestier et la sous-estimation des fonctions environnementales des forêts, parmi les législateurs.

 

Les problèmes qui viennent d’être mentionnés pourraient être en partie résolus par une amélioration du recouvrement des recettes, qui permettrait d’accroître sensiblement la contribution du secteur forestier au Trésor. Si les législateurs estiment que le secteur est une importante source de revenus pour le gouvernement, les allocations budgétaires au Département des forêts seront nettement plus élevées.

 

Deuxièmement, le Département des forêts devrait devenir autonome,  pour  pouvoir  utiliser librement les recettes qu’il recouvre. Si cela est fait, les dépenses seront allouées en fonction des priorités du Département des forêts et des activités importantes  pour l’aménagement forestier durable seront classées en tête de cette  liste de priorités. L’autre solution pourrait être d’accroître la flexibilité du CD, de façon  à pouvoir effectuer des virements de fonds lorsque les circonstances l’exigent. Actuellement, il n’est pas permis de virer les fonds du CD d’une activité à l’autre, ce qui est absurde. Par exemple, dans le budget des CD pour 2000-01, les crédits prévus pour l’eau et l’électricité s’élèvent respectivement  à 118 000 000 et  3 716 000 U Sh, alors que la consommation d’eau est très inférieure à la consommation d’électricité.

 

Enfin, une autre mesure importante serait de sensibiliser les législateurs aux fonctions environnementales des forêts. Ils seraient ainsi plus conscients de leurs  effets bénéfiques et le Département des forêts serait protégé contre  des coupes budgétaires drastiques.

 

 

Les effets des autres politiques du gouvernement sur l’aménagement forestier durable

 

Un certain nombre de lois et de politiques qui ont une incidence sur l’aménagement durable des forêts, vont maintenant retenir notre attention.

 

 

Loi sur la faune (1996)

 

En vertu de la Loi sur la faune de 1996 (Wildlife Statute, 1996), 321 000 hectares de forêts ont été transférés à l’Office ougandais de la Faune (UWA). L’UWA s’est borné à couper à ras les plantations forestières situées à l’intérieur de ces zones (dont beaucoup étaient précieuses pour la recherche et pour les semences), dans l’espoir que la forêt naturelle s’y régénèrerait. Les fonctionnaires de l’UWA ignoraient que la plupart de ces plantations avaient été établies sur des prairies,  et non pas sur des zones anciennement occupées par des forêts naturelles, et qu’il aurait mieux valu les éclaircir avec soin pour protéger et renforcer la régénération naturelle des espèces indigènes.

 

La coupe rase donne naissance à un enchevêtrement d’adventices et d’espèces concurrentes qui mettent des années à se transformer en forêt naturelle. Cette coupe, effectuée sans plan d’exploitation, a privé le secteur d’importantes sources de semences et de recettes potentielles provenant de la vente du bois. En outre, elle a mis un terme aux recherches sur l’aménagement durable des forêts dans ces zones. Globalement, le transfert de ces zones à l’UWA a conduit à la perte de ressources forestières précieuses sans pour autant répondre aux objectifs fixés.

 

 

Loi de 1997 sur la décentralisation

 

La Local Government Act de 1997, sur  la décentralisation, régissait le  transfert des pouvoirs du gouvernement central aux districts et aux conseils des échelons  inférieurs, notamment en ce qui concerne la gestion d’un certain nombre de ressources naturelles, comme l’eau, les pêches et les forêts.

 

Au départ, la gestion de toutes les réserves forestières a été  décentralisée, mais  le gouvernement central s’est empressé de reprendre en main  la gestion des principales réserves forestières (d’une superficie supérieure à 5 000 hectares- connues sous le nom de Réserves forestières centrales). Ce revirement était dû à un manque de confiance dans les districts, considérés comme n’ayant  pas les compétences techniques et les ressources financières requises pour gérer les forêts de manière durable et efficace. En outre, on craignait  que les districts ne négligent  le statut biologique et environnemental de ces forêts (par exemple les PCA) et ne les surexploitent pour couvrir leurs déficits budgétaires.

 

L’exploitation anarchique des réserves forestières locales restées sous le contrôle des administrations locales a déjà été signalée. Par exemple, les rapports font état de cas d’abattages effrénés pour la production de bois d’œuvre et de charbon de bois, de pâturage excessif et de conversion de forêts à l’agriculture. Tout porte donc à croire que la majorité des réserves forestières locales de l’Ouganda sont dégradées.

 

Ces problèmes viennent du fait qu’aucun district ne dispose de mécanismes adéquats pour gérer les ressources forestières et n’est conscient de la nécessité de réinvestir pour garantir l’aménagement durable des forêts. En outre, aucun district n’a recruté de fonctionnaires spécialisés pour planifier l’aménagement de ces réserves forestières locales.

 

Dans la mesure où les administrations locales se sentent concernées par l’aménagement durable des forêts, elles ont le pouvoir d’édicter des réglements administratifs (au titre de diverses Lois et de la Constitution), et elles pourraient exercer cette faculté  pour réglementer l’exploitation forestière.

 

 

Politique d’utilisation des terres - Loi agraire (1998)

 

Aux termes de la Loi agraire de 1998, la responsabilité de la gestion des ressources agraires incombe aux districts, qui sont habilités à  gérer tous les problèmes fonciers dans les zones relevant de leur compétence. Cette loi a des conséquences importantes pour la gestion des forêts situées sur des terres publiques à l’extérieur des réserves forestières. Ces forêts n’ont pratiquement été soumises à aucun plan d’aménagement  officiel et beaucoup ont été converties à d’autres utilisations, en particulier à l’agriculture. On ne sait pas très bien  si les districts  prendront aussi en charge la gestion de ces forêts ou s’ils les abandonneront à leur sort.

 

Aux termes de la Loi agraire de 1998, les populations peuvent  revendiquer la propriété de la terre qu’elles ont utilisée, ou sur laquelle elles ont vécu, pendant au moins treize ans. Ceci pourrait mettre en péril l’aménagement forestier durable, par exemple si un utilisateur revendique la propriété d’une terre située dans une réserve forestière qu’il a exploitée pendant plus de 13 ans. Ce problème se pose en particulier dans les réserves forestières dont les limites n’ont pas été clairement définies. La propriété privée de la terre risque de conduire à un morcellement accru des forêts, et, par voie de conséquence, à l’impossibilité d’obtenir de grands blocs de terre pour y établir des plantations forestières commerciales. La propriété privée des terres peut aussi inciter les personnes sans terres à s’installer dans les zones forestières. Enfin, elle peut aussi conduire à l’épuisement des forêts situées sur des terres privées, dans la mesure où les propriétaires de ces terres ne sont pas informés de l’importance de leurs forêts et ne reçoivent pas d’aide pour améliorer leurs méthodes de culture.

 

Par ailleurs, la propriété privée des terres  pourrait inciter des individus  qui sont intéressés et en ont les moyens, à investir dans l’établissement de plantations forestières. Toutefois, compte tenu de la conjoncture économique actuelle,  la première exigence est d’obtenir un revenu immédiat, ce qui devrait encourager une expansion accrue de l’agriculture.

 

 

Urbanisation

 

La politique actuelle d’urbanisation et d’industrialisation est considérée comme une menace pour l’aménagement forestier durable, car elle pousse à convertir les  forêts. De nombreuses plantations urbaines et péri-urbaines sont menacées de défrichement. Par exemple, la demande croissante de terres industrielles a entraîné la disparition de 1 000 hectares de forêts dans la Réserve de Namanve (sur l’autoroute Kampala-Jinja), et de 8 744 hectares de forêts dans la Réserve de Wabisi-Wajala. De nombreuses plantations péri-urbaines d’une superficie plus modeste ont aussi été défrichées par certaines autorités urbaines.

 

 

Réforme et restructuration des services publics

 

Le programme de réforme et de restructuration des services publics a conduit à des suppressions de postes dans le secteur forestier où il manque aujourd’hui 154 gendarmes forestiers, 284 gardes forestiers, et 25 forestiers. Ceci a eu plusieurs conséquences: protection très insuffisante du domaine forestier, absence de services de vulgarisation et prolifération des activités illégales.

 

 

Attitude face au changement

 

Jusqu’à présent, le soutien financier du gouvernement au secteur forestier a été minime et nous en avons déjà longuement examiné les raisons. Le secteur jouit pourtant d’un appui politique considérable. La nomination d’un Ministre de l’environnement montre bien l’importance que le gouvernement attache au secteur.

 

Cet appui est également démontré par le fait que l’Ouganda participe aux réunions intergouvernementales régionales et internationales sur l’aménagement forestier durable. Au niveau régional, l’Ouganda est signataire du Traité de coopération est-africain et membre de l’OILS et du COMESA. Il est également partie aux conventions internationales suivantes : Convention sur la diversité biologique (CDB), Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES), Convention de Ramsar et Convention africaine pour la conservation de la nature et des ressources naturelles. Ces traités et ces conventions offrent tous des possibilités  d’améliorer les politiques forestières, à travers la coopération régionale et internationale.

 

Compte tenu des ressources limitées que l’Ouganda peut mettre au service du secteur forestier, les avantages obtenus ont été notables et l’efficacité a été accrue grâce à des initiatives régionales et internationales. L’appui politique important  fourni par le gouvernement au secteur forestier a été reconnu par les donateurs, d’où le grand nombre de projets financés par des donateurs   actuellement mis en œuvre par le Département des forêts.

 

Les ressources forestières de l’Ouganda peuvent contribuer à éradiquer la pauvreté et à créer des richesses, grâce aux opérations de gestion des terres boisées et aux  activités forestières industrielles. Ajoutons à cela que, bien que l’aménagement  officiel des forêts ait été introduit en Ouganda il y a plus d’un siècle, le secteur est encore confronté à de nombreux défis, par suite des troubles qui ont suivi l’indépendance du pays, et des faits nouveaux récemment introduits dans les politiques et la législation. C’est la raison pour laquelle la politique forestière de 1988 qui est  en vigueur, est considérée comme peu efficace  et inadaptée et le cabinet a proposé de transformer le Département des forêts en un Office national des forêts semi-autonome (ONF).

 

 

L’Office national des forêts  (ONF) proposé

 

L’ONF proposé devrait améliorer les performances du secteur forestier ougandais en général, et l’aménagement des Réserves forestières centrales en particulier. Dans ce même ordre d’idée, une nouvelle politique forestière est en cours de formulation. Celle-ci a pour but de protéger un couvert forestier suffisant, qui appartiendra au Gouvernement, mais sera géré dans une optique de durabilité avec la participation du secteur privé et d’organisations non gouvernementales. Ces forêts devraient remplir les fonctions écologiques et fournir les produits nécessaires pour couvrir les besoins des générations présentes et futures des Ougandais et de la communauté mondiale.  Les autres avantages attendus de la création de l’ONF sont décrits ci-après.

 

Réduction des dépenses forestières publiques. Comme on l’a déjà vu, les recettes collectées par le Département des forêts sont très inférieures à leur montant potentiel, par suite de l’insuffisance des fonds et des moyens disponibles. Les districts  ne retirent donc  que de maigres avantages de la participation du gouvernement au secteur forestier et l’arrangement actuel se solde par un déficit net du budget forestier du gouvernement central. Les recettes perçues devraient augmenter avec la création d’un ONF semi-autonome et l’on prévoit que les dépenses seront plus utiles, car les priorités seront mieux définies.

 

Gestion plus efficace des Réserves forestières centrales. Dans les Réserves forestières centrales, l’aménagement forestier a été inefficace, en raison de l’insuffisance des capacités du  Département des forêts. L’ONF renforcera ces capacités, pour que la foresterie apporte les contributions économiques et environnementales souhaitées à la société.

 

Accroissement des investissements forestiers. Dans le passé, les investissements privés et publics ont été limités dans le secteur forestier.  Ceci s’explique en partie par des facteurs économiques et par des facteurs institutionnels. Il semble en particulier que le Département des forêts soit peu armé pour attirer les investisseurs privés. L’ONF devrait être plus orienté vers le secteur privé et être mieux à même d’attirer de petits et gros investisseurs vers le secteur, en mettant à disposition  de meilleurs accords de gestion mixtes (public-privé) et en renforçant le soutien et le contrôle.

 

Meilleure allocation des recettes dans le secteur privé. Malgré la grande activité  du secteur forestier, le montant des recettes recouvrées est limité. L’ONF proposé devrait améliorer la fiscalité forestière, en mettant en œuvre un certain nombre de recommandations:

 

 

 

Conclusions

 

En conclusion, le secteur forestier ougandais est dans une phase de restruc turation, qui devrait lui permettre  de se rapprocher des objectifs de l’aménagement forestier durable. Une nouvelle politique est en cours de formulation pour le secteur et la Loi forestière et les réglementations accessoires sont aussi en cours de révision afin de créer des conditions propices à un aménagement forestier durable.

 

En ce qui concerne le régime fiscal forestier, les aspects qui font actuellement l’objet d’un examen et d’une révision sont les suivants:

 

 

Cette restructuration est censée permettre au secteur forestier de se développer pour réaliser pleinement son potentiel. Le Gouvernement ougandais et les administrations locales  devraient tirer profit de ces réformes institutionnelles et des changements qu’il est proposé d’apporter au régime fiscal forestier.

 

 

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